J'étais un peu pris de court par le comportement d'Andrew, n'étant absolument pas habitué à le voir réagir comme ça. Cette situation me donnais un peu l'impression d'être un enfant qui attendait les instructions de son professeur pour faire ce qu'on lui demanderait... enfin, j'imagine que c'était ça puis-ce que je n'étais jamais été à l'école. Si je savais lire, écrire et calculer, c'était uniquement grâce à Wendy qui avait accepté de m'aider il y a quelques années sans en parler à personne. Je pense qu'elle pouvait comprendre la honte qu'impliquait le fait d'être analphabèthe... et comme elle ne m'avait pas jugé lorsque je lui en ai parlé, j'avais fini par lui accorder une grande confiance. Aujourd'hui, si j'avais un truc personnel à discuter, c'était d'ailleurs avec elle que ça se faisait.

J'observais Andrew s'approcher en restant patiemment immobile. Son petit jeu me donnait légèrement mal à la tête parce que je m'imaginais tout un tas de trucs et aussi parce que je ne savais pas exactement où il voulait en venir. Au bout de quelques secondes, le jeune homme fut suffisament proche pour que je puisse le toucher si l'envie m'en prenait, mais encore là, il n'y eut pas le moindre mouvement de ma part. Je crois que dans le fond, j'essayais de profiter un maximum de la possibilité que j'avais de voir ce type dans un état pareil.

Il glissa une main derrière ma tête et se pencha vers l'avant pour faire quelque chose qui me surprit tout autant que le reste de ses gestes avant ça. À ce moment précis, je commençais à comprendre ce qui était réellement en train de se passer, et mes jambes se mirent à trembler malgré moi. J'avais fermé les yeux en sentant ses lèvres inhabituellement calmes contre les miennes, mais ce fut le seul truc que mon accepta de faire car je ne parvenais pas à bouger ne serait-ce qu'une main. Je ne sais pas pourquoi ça me faisait ça... il m'avait complètement désarçonné. Après tout... je n'avais jamais vraiment caché le fait que j'étais un romantique, mais ce n'était qu'au travers des autres que je l'avais vécut jusqu'à maintenant, en tant que spectateur. Depuis qu'Andrew avait commencé à changer de comportement vis-à-vis de moi, les choses avaient commencé à évoluer cependant. Je savais qu'on n'en était pas au "même point" tous les deux, je l'avais très bien compris après qu'on ait couché ensemble pour la première fois et même plus tard, mais je me contentais de penser qu'un jour ça finirait par changer. Je n'avais pas vraiment besoin que tout le monde sache ce qui se passait entre nous très précisément comme le faisaient Mary et Maël... mais qu'au moins entre nous, quand on était rien que les deux ou en présence de quelques amis, qu'au moins là il accepte de montrer qu'il y avait plus que de l'amitié entre deux mecs.

Le baiser se rompit finalement, et je repris silencieusement ma respiration en gardant les paupières closes. Un petit sourire s'afficha sur mes lèvres. Je prenais ce geste de sa part comme une marque d'amour. Finalement, même comme ça, c'était suffisant. Je Savais. C'est ce qui comptait le plus, non?

Andrew « Je t’aime…. »

À ce moment-là j'étais tellement dans mon truc que je n'entendis pas tout de suite ce qu'il venait de dire. Et puis les mots finirent par atteindre mon cerveau. Moi qui était déjà immobile, je crois que je le devins encore plus lorsque la phrase fut assimilée. Jamais de ma vie j'aurais pensé pouvoir être aussi ému parce que quelqu'un venait de se déclarer comme ça, mais dans un sens, c'était logique. Ce qu'Andrew faisait devait en quelques sortes être "contre-nature" pour lui, et j'en étais conscient. Mais il l'avait dit, tout seul, sans que j'aie à lui forcer la main ou quoi que ce soit. Je ne savais pas comment réagir. Non, en fait, je n'arrivais pas à réagir. Je finis par ouvrir deux yeux vitreux et remontais mes deux mains froides jusqu'à son visage en essayant de ne pas trop trembler.

Robbyn « Ne... m'laisse pas tomber Andrew... parce que moi je le ferai jamais. »

Je pense qu’on ne pouvait pas offrir de meilleur cadeau d’anniversaire à quelqu’un. Ce que je ne pensais pas, par contre, c’était qu’Andrew puisse autant modifier son comportement en un claquement de doigts. J’avais comme l’impression qu’il venait d’ouvrir une porte qu’il avait eu peur de déverrouiller jusqu’à présent, et qu’il se rendait compte qu’il n’y avait pas de monstre ou quoi que ce soit d’autre à l’intérieur de la pièce. En fait, cette pièce, là, bah elle était vide. C’était à lui d’apporter les meubles et de l’aménager à sa manière… par contre, je l’aiderai à le faire, puis-ce qu’on était deux.

Maintenant que la tension était redescendue, je m’autorisais à relâcher tout ce qui s’était accumulé en moi ces dernières semaines, en commençant par un gros soupir. Mes jambes finirent par se stabiliser, et je me laissai guider par le grand brun sans poser de questions. Bénie soit la Californie pour ses températures plus qu’agréables à la sortie de l’hiver. Je dis ça parce qu’en arrivant sur le toit, le « froid » auquel on aurait pu s’attendre fut beaucoup moins ardent que prévu. Ouah, je crois que cet été, on allait y passer beaucoup de temps.

Quoi qu’il en soit, je m’approchai d’Andrew sans lui lâcher la main, puis levai les yeux en imitant son mouvement. Je n’en revenais pas. D’habitude, de nous deux, c’était pas moi qui me sentais complètement désarçonné face à l’autre… et pourtant là, je vous jure que je ne savais même plus comment je m’appelais depuis quelques minutes. Qu’est-ce que vous aviez fait de Danny ? Il était où mon ami ? Je le connaissais pas, ce type, là, à côté de moi. Pendant de longues secondes, je me mis à observer le jeune homme tandis que ce dernier avait la tête dans les étoiles. Depuis quand ça l’intéressait ce genre de choses ?

Andrew « J’aimerais aller sur la lune avec toi…. »

C’est bon… là, il m’a achevé. Je posais deux grands yeux ronds sur son visage et me tournais un peu plus vers lui, complètement paumé.

Robbyn « Andrew… t’es sûr que t’es toi? »

Je suis nul, hein…? Dites le que je suis nul. Je sais que j’aurais dû réagir tout à fait autrement à la réplique du brun pour que cela passe pour un stéréotype parfait de scène romantique de la St Valentin, mais je ne pouvais pas m’empêcher de flipper face à un changement aussi radical chez lui, même si ça me faisait plus plaisir qu’autre chose dans le fond.