Ton crane frappe le bitume avec force sans te prévenir, ton équilibre t’as complètement lâché par surprise et l’alcool a atténué la douleur. Tu restes quelques minutes comme ça, la fraicheur du sol t’aide à aller mieux apparemment. Bien que ça ne soit et n’ai jamais été ton but. Tu essayes juste de ne pas rendre ton dernier repars et tes nombreux verres dans cette ruelle. Paumes au sol tu pousses sur tes avant-bras et réussi seulement à t’asseoir. C’est déjà ça, tu te dis. Tu attrapes ta bouteille qui était tombée par terre et boit une gorgée avant de te forcer à te lever. Tu ne sais pas où tu es ni où tu vas, tu n’avais pas l’intention de rentrer chez toi ce soir. Tu sens que tu es au bord de la connerie, que si tu mets un pied dans ton appartement tu n’en ressortiras peut-être jamais. Un petit coup d’œil à ta montre hors de prix t’apprend deux choses : 1, tu as cassé le cadran en tombant et tu l’as mauvaise. 2, tu n’arrives plus à lire l’heure apparemment. Tu lâches un long soupire et continue de marcher au hasard dans les rues de San Francisco. Tu t’ennuies un peu, il faudrait quelque chose pour te distraire mais les rues semblent vides et la ville dans un sommeil profond. Les seules personnes que tu pourrais croiser voudront surement te dépouiller des quelques affaires que tu as sur toi. Une personne tourne le coin de la rue un peu plus loin dans ton champ de vision et tu marches plus vite, dans sa direction. Plus tu t’approches plus tu te réjouis que ça soit une fille. « Excuses-moi, tu aurais l’heure ? » Les mots sont mal articulés et tu ne fais aucun effort pour paraitre sobre.

Un autre show de terminé. De l'argent en plus dans mon pauvre compte d'étudiante. C'était tout ce que j'y voyais de positif. Des fois je me disais que j'aurai mieux fait de faire comme les autres étudiants: être caissière ou servir des bières dans un bar. Mais jamais ça n'aurait été mieux payé que le job que je faisais depuis un mois maintenant. Mine de rien, c'était bien payé. Trop bien payé. Sion comptait les gros pourboires que certains me laissaient, croyant que j'allais finir par enlever déjà le peu de vêtements que j'avais sur moi. Blague. Ce qui était bien, c'est que dès qu'il y en avait un qui me faisait chier, j'avais direct le videur de la boîte qui se pointait. On touche pas aux filles, règle d'or. Alors bon, comme je disais, tant que je gagnais assez de fric pour pouvoir m'offrir plus tard un appartement à New York et bosser pour le New York Times... ça m'allait. Poussant la porte des vestiaires, j'hissais mon sac sur l'épaule. J'étais une fille quelconque quand je sortais de ce trou. Et clope au bec quand je sortais enfin dehors. Loin de la fille trop dévêtue d'il y a quelques minutes. Manquait plus que je rentre chez moi. D'habitude je prenais un taxi, vu qu'à cette heure-ci ça faisait un bail que les bus ne desservaient plus. Mais là, j'avais une curieuse envie de marcher. Il faisait frais, mais assez bon. Et j'étais tranquille, je fumais de façon pépère. J'arrivais à un croisement et j'entendis mon portable sonner au fond de mon sac. M'arrêtant, je me mis à le chercher, apercevant un message de ma mère qui me demandait comment c'était passé ma journée. Maman poule même à dix mille kilomètres. Mais un autre truc m'extirpa de ces pensées. Un truc qui s'approchait. Un truc qui sentait presque l'alcool à plein nez. Excuses-moi, tu aurais l’heure ? Merde, encore un clodo qui va me saouler. Rangeant rapidement mon portable, je finis par tourner le regard sur... Léo? Ah non, loin, très loin d'être un SDF. Regardant sa dégaine, j'ai presque un rire qui sort d'entre mes lèvres alors que je souffle la fumée de ma cigarette, Tu sais que cette question est nulle pour aborder une fille? J'ajoute hilare.

Tu as un peu abusé ce soir, te mettre aussi minable n’était surement pas la meilleure chose à faire mais comme toujours tu préfères toucher le fond plutôt que de remonter la pente. Si tu vas mal il faut que tu ailles vraiment mal et comme tu ne vas jamais bien le cercle vicieux t’emprisonne et t’empêcher de changer les choses. Tu te sens mieux quand ton cerveau est ralenti par la boisson, quand tes muscles sont détendus à l’extrême et que la seule chose dont tu te préoccupes est de marcher correctement. Ce que tu n’arrives pas à faire non plus, tu as tangué jusqu’à l’inconnu en évitant une nouvelle chute. « Léo ? » Tu ne la regardais déjà plus mais ton prénom mal prononcé te fait lever les yeux. Tu es sur de la connaitre, tu as seulement besoin de quelques secondes pour remettre chaque chose à sa place. Tu fronces les sourcils, les yeux rivés sur son visage. « Tu sais que cette question est nulle pour aborder une fille ? » Iloa, la sangsue comme tu avais décidé de l’appeler. Certaines filles croient que ton coté mystérieux est surjoué pour les attirer, malheureusement tu recherches l’effet opposé. « Je te demandais seulement l’heure. » Tu fais de ton mieux pour contenir ton attitude d’alcoolique. « Tu as de la chance de tomber sur moi, j’aurais pu être un violeur ou pire.» Non pas que tu n’aies pas envie de la toucher, loin de là.

Ca me fait rire de le voir comme ça. Il a l'air de tenir à peine debout, il fait pas très propre sur lui... Ouais, ça me fait rire. Ca change du mec qui se la joue un peu avec un balais dans le cul en fait. C'est sympa. Comme quoi. Je le détaille, on dirait qu'il a fait du chemin pour venir jusqu'à moi. Ses yeux ou plutôt son regard a l'air complètement embué d'alcool. Trop absent, pas assez concentré. Je te demandais seulement l’heure. Nouveau sourire pour moi. Bon, même complètement bourré il reste un peu lui même, c'est cool. J'espère juste qu'il a pas vomi. Y'a pas l'air d'avoir de traces... Hum. Un rapide coup d'oeil sur son poignet et je vois sa montre à dix mille dollars abîmée. Sans blague. Je ris. Tu as de la chance de tomber sur moi, j’aurais pu être un violeur ou pire. Je remonte mes yeux sur lui, Tu parles d'une chance. Je réplique doucement en haussant les épaules, avant de remettre ma clope entre mes lèvres, fouillant à nouveau dans mon sac pour en ressortir le portable que j'avais lâché quelques instants plus tôt. Allumant l'écran, j'observe le cadran un moment, avant de retirer la clope de ma bouche, soufflant, 2h56 monsieur. Je dis en articulant comme il faut comme s'il pigeait rien de ce qu'on pouvait lui dire. Tu veux autre chose? Je termine par ajouter, le fixant curieusement.

Qu’un ou une inconnu(e) totale te voit dans cet état ne te dérange pas du tout, tu n’as rien à cacher à une personne qui t’éviteras et ne te reverras jamais de toute sa vie. Tu as beaucoup plus de mal à te montrer sous cet angle devant les personnes qui te connaissent personnellement. Enfin, tu ne connaissais que très peu cette fille mais elle savait qui tu étais et ça suffisait à te mettre mal à l’aise. Bien que ça ne se voie pas sur ton visage, tu aurais préféré tomber sur une autre personne qu’elle. Tu t’étais plus ou moins dit que tu lui passerais dessus un de ces jours mais tu doutes que maintenant elle soit toujours intéressée. « Tu parles d’une chance. » Elle sourit parce que la situation est risible, tu le sais très bien. Tu te tiens un peu plus droit, passe une main dans tes cheveux et essayes d’agir normalement. Tu cherchais quelque chose pour te distraire et on te l’a servie sur un plateau d’argent, maintenant il ne reste plus qu’à la faire rester. « 2h56 monsieur. » Elle articule chaque syllabe comme si tu étais un enfant ou un handicapé, comme si elle n’avait jamais été alcoolisée dans sa vie. « Tu veux autre chose ? » Tu lui souris poliment pour la remercier de t’avoir donné l’heure, elle a apparemment remarqué ta montre en piteux état, tout comme toi. « Je suis saoul, pas autiste. » Voix froide, regard froid, comme toujours. Jamais plus elle ne te verrait habillé d’un jean, un t-shirt et une veste en cuir. Tu passais le plus clair de ton temps en costume-cravate. « Une cigarette ? » Tu cherches ton feu dans ta poche et attend qu’elle t’en tende une pour la coincer entre tes lèvres. Tu commences à marcher dans la direction qu’elle prenait avant que tu ne l’arrêtes. « Tu viens ? »

Je suis saoul, pas autiste. La façon dont il me sort ça et la façon dont il me regarde, ça ne me fait ni chaud ni froid. Sa froideur habituel, depuis le peu de temps que je le connais, ça me fait pas peur. C'est juste une carapace qu'il se forge. J'suis presque sûre. Il doit cacher des trucs c'est sûr. Plusieurs fois j'ai hésité à faire ma fouineuse et à lui poser plein de questions. Peut être mon côté de "journaliste" qui ressort. J'adore ça. Enquêter, chercher, fouiner, et écrire sur tout ce que j'avais pu récolter. J'avais juste trouvé le métier qu'il me fallait, j'attendais juste de terminer mes études pour pouvoir pleinement profiter de tout ça. J'avais hâte. Mais pour l'instant, j'étais face à ce français et à son accent trop européen et saoul qui continuait de me faire rire. Une cigarette ? Je soupire. J'espère juste qu'il a pas oublié comment fumer, j'ai pas envie de le ramasser à la petite cuillère non plus. Cherchant mon paquet dans la poche arrière de mon jean, je sors une cigarette que je lui tends, aussitôt attrapée. Il l'allume lui même, et je l'observe faire, plissant mes yeux tout en continuant de fumer la mienne. Puis je le vois marcher, pile là où je vais. Je reste perplexe, ne bougeant pas d'un pouce, coinçant ma cigarette entre mes doigts, Tu viens ? J'arque un sourcil, avant de me décider à le rejoindre, claquant mes bottines sur le bitume froid et dur. T'habite par là-bas? Je demande, curieuse de savoir où il comptait aller maintenant.

Tu aspires ta première bouffée et ton corps te remercie, l’alcool appelle la cigarette et la cigarette appelle l’alcool. Plus tu restes dehors moins tu as envie de rentrer chez toi. Beaucoup trop d’idées fusent dans ta tête à la seconde pour essayer une nouvelle fois de mettre fin au calvaire qu’est ta vie. Les seuls moments où tu n’as presque pas envie de mourir sont ceux où tu fais ressentir ça à quelqu’un. Rendre les autres plus malheureux que toi est devenu ton antidépresseur et jusqu’ici ça semble fonctionner à merveille. Tu battras un homme et tu rabaisseras une femme pour te sentir meilleur et toujours plus en vie. Un paradoxe que tu as tenté de comprendre mais qui n’a aucun sens. A force tu as oublié qu’un jour tu n’étais pas comme ça, que tu pouvais sourire sans la détresse d’une autre personne. Elle s’arrête alors que tu continues de marcher, elle doit surement avoir du mal à te faire confiance la petite. « T’habites par là ? » Tu continues à marcher avec elle un peu à la traine. Tu souffles ta fumée en l’air comme un volcan et tu lâches un léger rire. « Non. » Ce qui te fait rire c’est que tu n’en as aucune idée en fait. Tu ralentis un peu le pas pour que vous vous retrouviez à la même hauteur, tu baisses les yeux sur elle. « C’est avec ça que tu gagnes ta vie alors ? » Sourire ironique par rapport à ta propre activité professionnelle.

Non. Clair, net, précis. Bon, il veut marcher avec moi alors... Ok. Il est chelou lui des fois, je sais jamais s'il m'apprécie ou pas. Des fois il m'envoie chier, mais des fois il reste presque poli. C'est bizarre. Mais moi ça me fait rire, encore, toujours. Parce que mine de rien, je peux pas dire grand chose non plus, avec ma super bipolarité. Même si je suis assez stable ces derniers temps grâce à mon traitement, je sais très bien que je peux virer à n'importe quel moment. Bref, je continue de marcher, fumer, baillant un petit peu au passage, parce que bon cours-boulot-dodo, c'était mon quotidien. Et c'était un peu fatiguant. C’est avec ça que tu gagnes ta vie alors ?, Hum? Je relève mes yeux vers lui, alors qu'il m'extirpe de mes pensées. Lâchant ma clope de mes lèvres, je souffle la fumée qui ne s'est pas incorporée dans mes poumons, avant de sourire un peu, regardant à nouveau en face de moi, Ouaip, on va dire ça. Je dis en haussant les épaules, Mais c'est provisoire, je vais pas faire ça toute ma vie. C'est du dépannage. J'ajoute en passant une main dans mes cheveux longs, Je danse bien hein? Je finis par lui demander en rigolant.

« Hum? » Tu as envie de lui dire qu’elle devrait écouter les gens quand ils parlent, surement parce que tu es trop susceptible et plus vraiment maitre de ton tempérament. Mais elle sourit alors tu te tais, bizarre, sans commentaire. Tu tires une latte sur ta cigarette. « Ouaip, on va dire ça. » Elle hausse les épaules, tu te doutes qu’elle n’a pas encore fini de parler mais tu en as déjà marre. Ta capacité de concentration sous l’emprise de l’alcool équivaut à celle d’un enfant de cinq ans. « Mais c’est provisoire, je vais pas faire ça toute ma vie. C’est du dépannage. » Tu fais un petit signe de tête pour lui montrer que tu écoutes toujours ce qu’elle dit mais tu continues de regarder droit devant toi. « Je danse bien hein ? » Ca la fait rire apparemment. Tu mets tes mains dans tes poches et continues à fumer la clope au bec. « C’est sûr qu’être une pute n’est pas un plan de carrière. » Tu te retiens de rire en parlant monotonement. Tu baisses les yeux vers elle et ils tombent droit dans les siens. « Je ne m’en souviens même pas, du doit avoir encore quelques progrès à faire. » Tu te fais sourire, tu continues de marcher comme si de rien n’était.

C’est sûr qu’être une pute n’est pas un plan de carrière. Je fronce les sourcils, suivant son rythme de marche. Je suis pas une pute merde. Ok, mon travail n'est pas très glorieux, mais je ne touche personne, personne ne me touche et c'est tant mieux comme ça. De toute façon, comme je l'ai dit, c'est seulement du dépannage, et uniquement du dépannage. J'aime danser, après aguicher c'est un autre problème. Quand y'a des hommes trop mûrs et moches, c'est sûr que des fois ça me dérange. Mais je pense à l'argent et uniquement à ça. C'est le boulot qui rapporte gros. Encore plus gros que de bosser comme simple caissière. Les pourboires en plus, c'est le top. J'attends juste de bien avoir payer mes emprunts et mes études pour me consacrer pleinement à ce que je veux être plus tard. Mais je ne réponds rien, ça me saoule déjà assez, j'ai pas envie d'expliquer une énième fois les différences entre ces deux jobs. Je ne m’en souviens même pas, du doit avoir encore quelques progrès à faire. Je lui tire la langue, croisant mes bras contre ma poitrine alors que je sautille rapidement pour le dépasser, de façon à ce que je me mette face à lui, le forçant à s'arrêter, N'importe quoi. Impossible que tu t'en souvienne pas, j'ai bien vu que t'avais regardé du début à la fin. Alors arrête de mentir, c'est pas bien tu sais. Je réponds simplement avec un sourire satisfait sur les lèvres.

L’air frais te réveille, il t’oblige à garder les yeux ouverts pour continuer à marcher droit. L’alcool redescend doucement, tu le sens s’atténuer au fur et à mesure que tes pieds font chaque pas. Comme tout bon accro à n’importe quelle sorte de drogue, la redescente est évidemment le moment que tu détestes le plus. Lorsque ça fini par arriver, tu préfères être seul chez toi plutôt qu’au milieu de.. dieu sait où. Tu voudrais pouvoir te repérer par rapport aux noms des rues mais tu n’as pas tes lunettes et ta vision beaucoup trop altérée par l’alcool de toute façon. Tu sors une flasque, que tu gardes toujours dans la poche intérieur de ta veste, pour boire une gorgée de tequila. Mélanger les liquides fait toujours remonter les effets plus vite, croyez l’expert. « N'importe quoi. Impossible que tu t'en souvienne pas, j'ai bien vu que t'avais regardé du début à la fin. Alors arrête de mentir, c'est pas bien tu sais. » Elle te bloque la route et tu lèves les yeux au ciel, lâchant le plus long soupir de l’histoire de l’humanité. Ta main se pose sur son épaule, tu lui souris doucement et la pousse sur le côté de toute tes forces. Tu la voie tomber au sol comme une poupée de chiffon, ce que tu aimes ce genre de spectacles. « J’ai observé ce que tu appelles de la « danse ». A mes yeux cela ressemblait plus à une crevette en pleine crise d’épilepsie. » Tu lâches un rire froid et tu restes planté là, à attendre qu’elle se relève comme une grande.

Je peux faire ma gamine quand je veux. Soit faire la fille sérieuse, la fille complètement sûre d'elle... Je peux jouer plein de rôles. J'aurai pu être actrice. Mais ça me fait rire de titiller Léo. Il a l'air tellement coincé et froid, que j'ai envie de savoir ce qui se trouve derrière cette carapace. Ca me rend trop curieuse. Puis je le crois pas qu'il ait pas aimé ma danse, ça serait bien le premier. Il voulait juste me faire chier, j'en suis sûre. Au moins, je ne le croyais pas et j'étais prête à lui prouver le contraire. Sauf que le truc que je n'avais pas prévu c'est qu'il me pousse. Pas de façon à ce que je m'écarte, non. Mais de façon à ce que je tombe. Il n'y était pas allé de la main morte. Et à vrai dire, je ne m'étais pas attendue à ce genre de geste. Tellement pas, que j'en reste abasourdie, levant les yeux vers lui, J’ai observé ce que tu appelles de la « danse ». A mes yeux cela ressemblait plus à une crevette en pleine crise d’épilepsie. Je fronce mes sourcils. Ma mâchoire se serre. Je suis pas énervée par ce qu'il me dit, à la limite, ça j'en ai rien à foutre. Mais le fait qu'il me jette comme ça, sans raison, ça ouais, je peux pas faire semblant de n'en avoir rien à faire. T'es vraiment trop con. Je lâche en me relevant, passant ma main sur mes fesses pour nettoyer un peu la poussière du sol. Lui jetant un regard noir, je remets mon sac sur mon épaule avant d'ajouter, Je continue ma route seule, salut. Je finis par dire sèchement, tournant rapidement les talons. Taré.

« T’es vraiment trop con. » Elle a l’air de ne pas en croire ses yeux, c’est vrai que la plupart des hommes auraient hésité au moins avant de l’envoyer valser contre le béton. Tu n’as aucun principe depuis que tu considères que tu ne possèdes plus d’âme. Tes actes sont détachés de toutes conséquences et la plupart du temps tu t’en sors bien. Elle se relève, définitivement en rogne contre toi. « Je continue ma route seule, salut. » Tu mets les mains dans tes poches, la voyant s’éloigner. Tu te demandes un moment si tu ne devrais pas tout simplement rentrer chez toi et allez dormir. Le problème étant que tu ne sais toujours pas où tu te trouves, tu lui emboites alors le pas restant quelques mètres derrière elle. « Il t’en faut si peu pour être vexée. » Peut-être qu’elle n’a pas entendu, tu n’accélères pas pour autant. Tu augmentes juste le son de ta voix. « C’est parce que tu es tombée ou pour l’histoire de la crevette que tu t’en vas ? » Tu continues à la suivre, sachant pertinemment qu’à un moment ou un autre elle finira par se retourner, au moins pour te dire de t’en aller.

Il t’en faut si peu pour être vexée. Je l'entends à peine. Comme s'il marmonnait. Non, je ne suis pas susceptible. Enfin peut être un peu. Mais j'ai mes raisons, et là c'en est une bonne. Depuis quand on fout les gens au sol? Surtout que je n'avais fait rien de spécial pour mériter ça. Il est taré. Plus que moi et ma stupide maladie. Vraiment. Je préfère rentrer chez moi, et le laisser avec son alcoolémie trop importante et sa future gueule de bois. C’est parce que tu es tombée ou pour l’histoire de la crevette que tu t’en vas ? Il l'ouvre. Une nouvelle fois. Un peu plus fort. Je termine par m'arrêter dans ma marche effrénée, fermant un instant mes yeux. Blasée je suis, pour le coup. Même exaspérée par son comportement. J'aurai pu tolérer tout ça, mais le fait qu'il me pousse de cette façon là, m'enlevait tous ces espoirs de bien m'entendre avec lui. Y'a des choses qu'on ne peut pas accepter, tout simplement. Me mordillant la lèvre inférieure un instant, je termine par rouvrir mes yeux, et me retourner vers lui, Sérieusement, lâche moi. J'ajoute de façon très sérieuse, le dévisageant un instant avant de me retourner afin de poursuivre ma route.

Tu ne sais pas ce que tu es en train de faire, même pourquoi tu as décidé de lui faire ça. Tu ne sais jamais en fait, ton cerveau te dicte ce que tu dois faire et ton corps l’exécute. Cela se ressent encore plus quand l’alcool entre dans l’équation. Le besoin de rabaisser les gens plus bas que terre, plus bas que toi, s’intensifie lorsque ton cerveau désinhibé faire ressortir les recoins les plus sombres en toi. Tu n’y peux rien et tu as oublié de te demander pourquoi, depuis le début. Tu l’as énervé, c’est embêtant. Si elle s’enfuie tu te retrouveras encore une fois tout seul, perdu et pitoyable. Pour l’instant tu t’accroches à sa haine pour te garder en vie. Elle s’arrête brusquement et tu manques de lui rentrer dedans par accident. « Sérieusement, lâche moi. » Tu soupires et continues à marcher puisqu’elle le fait aussi. Tu accélères pour te retrouver à côté d’elle. « Je pensais que tu voulais apprendre à me connaitre. C’est bien ce que tu m’as dit non ? » Tu fais référence à une conversation que tu as avais écourté sur facebook, tu étais sobre et elle t’avait lourdement agacé. Tu lâches un petit rire. « Tu étais même vexé que je ne veuille pas te parler. Et maintenant tu veux t’enfuir ? » Tu as ton regard de prédateur, tu le sais, mais tu l’adoucis avec un joli sourire.