J'ai appris la nouvelle bêtement. Sur facebook. Le fait de ne pas avoir été mise au courant directement m'avait quelque peu énervée car Denver était devenue une amie importante, l'air de rien. On se connaissait depuis un an, peut-être un peu plus. Ça pouvait sembler peu pour certaines personnes, seulement pour moi c'était largement suffisant pour m'inquiéter de son état. Après avoir discuté brièvement sur le réseau social avec mon amie, je suis directement grimpée en voiture afin de la rejoindre au plus vite. Tout en roulant, je me suis dit qu'un bouquet de fleurs lui ferait plaisir. Ok, c'était clairement cliché mais si ça pouvait lui faire plaisir ne fusse qu'un minimum, je m'en foutais royalement. Après avoir fait un saut chez le fleuriste et m'être garée dans le parking, je passais les portes d'entrée pour demander le numéro de chambre de Denver à l'acceuil. Chose faite, je toquais à la porte avant d'entrer dans la pièce immaculée après avoir entendu un petit oui de la part de la jolie brune. Coucou. Je t'ai ramené des fleurs, j'espére qu'elles te plaisent. Je lui dis, en lui tendant le bouquet, le sourire aux lèvres. J'enlève ensuite ma veste pour la déposer dans le fauteuil, non loin du lit dans lequel elle est allongée.

J'enchaînais mes réponses sur le réseau social. Oui j'avais fait une tentative de suicide, et oui je m'en voulais à présent. Quand j'étais devant le fait accompli, je n'avais pas pensé aux conséquences, non. Je ne pensais qu'à cette douleur cuisante qui me brûlait le ventre jusqu'à la gorge. Cette douleur aussi bien physique et mentale, douleur que je n'avais jamais vraiment ressentie auparavant. Et c'était presque bizarre de se dire que tout ça c'était à cause d'un échec sentimental. J'avais trop mis d'espoir autour de Camil, j'étais tellement tombée amoureuse bêtement. Et voilà où j'en étais maintenant, sur un lit d'hôpital, à regarder mon bras charcuté par l'aiguille. Sveta devait pas tarder à passer. J'avais eu pas mal de compagnie ces jours, mais j'avais vraiment envie de voir mon amie. Ca me ferait du bien, je pense. On toque à la porte, et j'invite la personne à entrer, me redressant un peu dans mon lit alors que je vois Svetie passer la porte. Sa tête blonde m'a manquée. Je souris, la laissant venir, "Coucou. Je t'ai ramené des fleurs, j'espére qu'elles te plaisent." Je prends le bouquet qu'elle me tend en hochant la tête, "Oui, t'es la meilleure merci." je réponds, regardant les fleurs, avant de les poser à côté, me disant mentalement que je devrais appeler l'infirmière pour qu'elle me donne un vase ou un truc du genre. "Je suis contente de te voir... merci d'être venue." j'ajoute en me tournant vers mon amie, un peu mal à l'aise sur le coup.

Quelque part, j'étais furieuse contre Denver. Furieuse qu'elle ait voulu mettre fin à sa vie et d'autant plus en sachant que c'était pour un homme qui l'avait trompé. C'était quelque chose qui n'entrait définitivement pas dans mes principes. Bien sûr, j'avais pris en compte le fait que ses sentiments envers lui étaient immenses mais peu importe, je n'en avais rien à faire au final. Elle méritait d'être avec quelqu'un qui la rendait heureuse de façon stable. Tout comme chacun. Au fond, j’espérais simplement qu'elle aille mieux très vite et qu'elle puisse tourner la page car lorsqu'une trahison s'immisce dans un couple, elle restera toujours en arrière-plan. Comme une ombre, une blessure que même le temps ne pourra pas vraiment guérir. Mes pensées pouvaient sembler dures et froides mais j'étais simplement réaliste. Peut-être un peu trop. En pensant à tout ça, j'ai fini par m'assoir dans le fauteuil face à son lit d'hôpital. J'ai cherché du regard un vase pour y mettre les fleurs mais je n'en ai pas trouvé donc j'ai abandonné l'idée. Mon attention retourne donc sur mon amie et je ne peux pas m'empêcher de remarquer son teint pâle et son regard bourré de tristesse. J'aurais voulu faire quelque chose pour effacer tout ça mais ce n'était pas vraiment dans mes cordes. Être présente et la soutenir au maximum, c'est tout ce que je pouvais faire de concret. Ne me remercie pas, c'est tout à fait normal. Je n'allais pas rester chez moi sans rien faire en sachant que tu es ici. Je lui dis, toujours avec un sourire amical sur le visage. Faut que tu prennes soin de toi, que tu te reposes le plus possible aussi. Ça sonnait presque comme un ordre, ok mais c'était en grande partie parce que je tenais à elle. Je me racle un peu la gorge avant de continuer à débiter des paroles. En fait, tout à l'heure quand on discutait sur facebook, j'ai eu une idée. Mais j'attendais d'être en tête en tête avec toi pour t'en parler.

"Ne me remercie pas, c'est tout à fait normal. Je n'allais pas rester chez moi sans rien faire en sachant que tu es ici." Je souris légèrement. C'est la bonté incarnée cette fille. Je m'étais toujours entendue avec elle et je savais que c'était une excellente amie. J'étais vraiment contente qu'elle soit là. Pas que pour le fait d'être venue me voir parce que j'étais dans un lit d'hôpital et que je me sentais complètement honteuse d'être comme ça devant elle... mais ça me rassurait qu'elle soit là. Et je me sens encore plus idiote d'avoir fait un geste pareil. J'avais même pas imaginé une seconde que j'aurai pu perdre toutes ces personnes auxquelles je tiens. "Faut que tu prennes soin de toi, que tu te reposes le plus possible aussi." J'hoche la tête. De toute façon, j'en étais consciente, c'était ce que les médecins et les infirmières me répétaient H24. Même pour mon premier lever ça avait été une catastrophe, j'avais failli terminer par terre parce que ma tête tournait trop. Enfin bref. "En fait, tout à l'heure quand on discutait sur facebook, j'ai eu une idée. Mais j'attendais d'être en tête en tête avec toi pour t'en parler." Je fronce un peu les sourcils, curieuse d'entendre ce qu'elle a à me dire. "Vas-y dis moi, je suis toute ouïe." je dis avec un sourire faiblard.

Je crois que Denver venait tout juste de réaliser son acte et des conséquences que cela aurait engendré vis-à-vis de ses proches. Elle était plutôt bien entourée et connaissant un peu Jordan, j'imaginais qu'elle devait être encore plus furieuse que je ne le suis. Cela dit, je n'étais pas venue pour lui faire des reproches. En discutant avec elle sur Facebook, j'avais simplement voulu remplir mon rôle d'amie et insister sur la gravité des choses. Je gardais pourtant l'essentiel en tête, elle s'en ai sortie. Le reste était secondaire. Je me suis mise à fixer ces grands yeux bruns en recommençant à sourire car j'espérais vraiment qu'elle allait accepter ma proposition. Ça te dirait pas d'avoir une colocataire? Je riais un peu après la fin de ma phrase. Je n'avais jamais partagé un lieu de résidence avec quelqu'un, mise à part ma famille mais Denver m'avait donné l'envie et je crois même que ça pourrait être chouette. Bon par contre, je ne sais pas trop comment ça fonctionne mais je me débrouille pas mal en cuisine ! Oui, j'étais bien en train d'essayer de me vendre pour qu'elle m'adopte en tant que coloc. Puis je trouvais que c'était un bon sujet pour lui changer les idées ne fusse qu'un petit peu.