Quand j’étais gamin, j’avais tout de l’enfant normal. Des parents avec des jobs standard, un appartement standard, une scolarité banale… vraiment, rien de spécial à raconter à ce sujet. J’étais le fils sage mais énergique que tout le monde désire avoir et pendant des années, je n’ai jamais remis l’éducation de mon père et de ma mère en question. Ce n’est qu’à l’adolescence, lorsque qu’une fille un peu plus jeune que moi vint frapper à la porte en clamant haut et fort que Mr. Williams était son géniteur et qu’il devait s’occuper d’elle à partir de maintenant que tout à changé. Découvrir que son papa a trompé sa femme avec une prostituée (et qu’il l’a surtout fait sans protection), ça peut transformer n’importe quelle personne en une autre.
À la maison, l’ambiance était progressivement devenue électrique, alors j’ai commencé à sortir de plus en plus souvent, accompagnant d’abord ma demi-sœur Ruslana dans ses escapades, puis vagabondant ensuite de mon côté. Cette époque me rappelle encore à quelle vitesse j’avais pu passer du sentiment d’admiration envers mon père à celui de mépris, ainsi que la manière dont notre relation s’est envenimée au fil des mois. Dur… parce que je grandissais tandis que lui prenait de l’âge, alors un jour, quand j’ai compris que j’étais devenu le plus fort malgré le fait que le chef de la maison savait crier très fort, il n’eut plus la moindre autorité sur moi. Oh ho, j’avais 16 ans et je me sentais invincible, alors j’ai commencé à désobéir et à provoquer dès que l’occasion se présentait... mais ce que j’avais pas prévu, c’était qu’étant donné que j’étais encore sous la responsabilité de mes parents, ils pouvaient très bien décider de tout ce qu’ils voulaient pour moi.
Résultat, j’ai finis à l’école militaire. Génial ! Lorsqu’on m’a apprit la nouvelle, je suis entré dans une colère noire et j’ai cassé un meuble en donnant un coup de pied dedans, mais ça n’a pas empêché le fait que j’ai été forcé d’aller au camp d’entrainement pour « me redresser » un peu. Si je n’ai pas du tout apprécié le fait de devoir m’habituer à recevoir des ordres, au début, j’ai tout de même rapidement pris plaisir aux activités de soldat, sans compter que c’est là-bas que j’ai rencontré mon futur meilleur ami Harvey (qui est resté longtemps en service, d’ailleurs).
Malheureusement pour moi et malgré mon engouement pour une éventuelle carrière militaire, j’ai été blessé lors d’un entrainement. Pas de balle dans la jambe ou de bras en moins, non, mais un connard avait oublié les consignes de sécurité lorsqu’il s’est décidé à faire exploser une mine, un jour, et moi qui me trouvais à côté d’une paroi en béton à ce moment-là, bah ça m’a rendu sourd illico presto. Pendant environ trois jours, j’ai absolument rien pu entendre et par chance, les sons ont finit par revenir du côté droit. Mais bon… moi qui voulait bosser sur le terrain et non pas à distance à cause de mon handicap, ça m’a dégoûté. Résultat : je suis rentré à la maison, plus ou moins calmé, afin de prendre mes affaires et de me barrer des USA pour aller essayer Londres.
C’est là-bas j’ai fais la connaissance d’une fille prénommée Katsya qui m’a pas mal tapé dans l’œil, si bien qu’on est restés une année ensemble. J’avais 5 ou 6 ans de plus qu’elle, mais c’était pas si grave… non, ce qui l’était plus, c’est l’influence que j’ai eu sur la demoiselle. Jeune et con, trop sûr de moi, irrespectueux et égocentrique, j’ai entrainé ma copine dans les mauvaises habitudes, jusqu’à en faire une habituée à la drogue et à l’alcool alors qu’elle n’avait même pas 15 ans. « Wah, mais quel connard ! ». Bah oui, je suis un connard… j’ai même réussi à tirer Kat’ en Amérique en racontant n’importe quoi pour la convaincre de me suivre, elle et son stock de dope… et ça s’est mal terminé. Un jour, elle a abusé et fait une overdose et moi comme un con j’ai paniqué. La voir inerte au sol m’a secoué plus que n’importe quoi d’autre auparavant et j’ai à peine eu la force d’appeler une ambulance avant de prendre la fuite. Ce que j’avais fais était un crime… et j’étais tout à fait poursuivable en justice. Alors il fallait disparaître et c’est exactement ce que j’ai fais, non pas pour éviter les retombées juridiques, ça je m’en fichais, mais surtout parce que je ne voulais pas avoir à assumer la suite des événements… sans compter que Kat’ serait mieux sans mon influence néfaste dans sa vie.
Après l’incident de mon ex, je n’ai plus donné de nouvelles à personne et ai coupé mon téléphone ainsi que tout ce qui pouvait permettre aux gens de me contacter. Ca m’a aidé à me recentrer un peu et à apprendre à réfléchir avant d’agir, mais même si les remords ont été mes seuls compagnons de route pendant des mois, mon comportement d’ordure n’a quand à lui jamais vraiment changé (en surface tout du moins). Des cœurs, j’en ai brisé pas mal sans trop m’en faire (pas de ma faute si les filles s’accrochaient alors que je précisais bien dès le départ qu’il ne fallait pas qu’elles s’attendent au prince charmant si elles voulaient de moi), et pendant plus de quatre ans, j’ai enchainé les petits jobs sans trop parvenir à trouver ma voie.
Bref. Au final, j’ai choisis de me poser à San Francisco après avoir apprit que ma sœur s’y trouvait, ce qui m’a permit de recoller plus ou moins les morceaux avec elle. Je n’ai pas trop aimé l’état dans lequel je l’ai récupérée, par contre, mais nous ne dirons rien à ce sujet… car j’ai plus important à raconter (on est là pour parler de moi ici, non ?). SF a été un carrefour crucial dans ma vie, là où beaucoup de choses ont changé dans ma conception de l’humain et de ses capacités à se voiler la face à lui-même. J’avais 25 ans, les gars, et j’avais passé chacune de ces années à nourrir l’idée qu’il n’y avait qu’une façon d’avoir des relations avec les filles et une façon différente d’en avoir avec les mecs. Mais je me suis trompé sur toute la ligne… il m’a suffit d’une rencontre pour m’en rendre compte.
Dans le courant de l’automne 2012, j’ai fais la connaissance d’un type qui s’appelait Ethan et qui avait tout de l’étudiant naïf et paumé de service, malgré ses ambitions. Il m’énervait et m’amusait en même temps, ce petit, alors j’ai joué avec pendant un certain temps pour mettre ses nerfs à vif en le narguant sans cesse. Oh, c’était plaisant pour un jeune homme arrogant comme moi, ça oui… sauf qu’au lieu de finir par lâcher Ethan lorsque j’ai commencé à m’ennuyer de l’embêter, j’ai fais de son cas particulier une obsession jusqu’à ce qu’un jour, on finisse par s’embrasser. Wow, non, je vais pas vous raconter toute l’histoire, c’est trop compliqué et trop long, mais j’ai eu beaucoup de questions existentielles qui se sont posées pendant des semaines. Difficile d’accepter qu’on n’aime finalement pas les filles, difficile de l’avouer par oral, difficile de trouver ça normal. Sortir du placard n’a pas été la chose la plus simple du monde car j’avais d’autres problèmes à côté de ça (notamment celui de me trouver une voie professionnelle définitive), mais ça a fini par se faire. Vous savez quoi ? Ca a été la meilleure chose qui me soit arrivée. J’ai pu relâcher la pression que je me mettais à moi-même et avoir un point de vue beaucoup plus ouvert sur plein de choses, mais surtout, j’avais trouvé un équilibre rassurant. Je savais qui j’étais et qui je voulais être, enfin. Durant les quelques mois qu’a duré ma relation avec Ethan, j’ai beaucoup travaillé sur mon comportement afin de devenir plus agréable, je me suis réconcilié avec Kat et j’ai développé tout plein de qualités que je pensais ne pas posséder.
Toute bonne chose ayant une fin, y’a un jour où je me suis réveillé, mais y’avait plus personne dans ma chambre. L’autre partie de mon lit était vide, le téléphone de mon mec sonnait pas et y’avait plus de trace de lui sur facebook. Dans un premier temps, ça m’a inquiété, puis énervé et encore plus inquiété par la suite. J’ai toujours pas eu de ses nouvelles jusqu’à aujourd’hui et même s’il a une bonne raison d’avoir déguerpi, je ne compte pas lui pardonner de s’être cassé comme un voleur de sitôt. Il m’a apporté des choses, ça je ne peux pas le nier, mais ça ne m’a pas empêché à vivre plus ou moins bien sans lui. Malgré le stress et la nervosité que j’ai eu durant tout l’hiver à cause de ce con, je vous apprendrai que j’ai quand même lâché mon job de nuit contre une formation de coach sportif qui m’a permit d’avoir une place stable en tant qu’entraineur personnel à l’un des fitness les plus en vogue de la ville. Franchement, je suis plutôt fier de moi… fini les angoisses nocturnes et les questions existentielles sur « qu’est-ce que je suis en train de faire de ma vie ». Je me sens bien, ouais. Seul, mais bien.