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Je laissais la petite Will s'installer et déposer ses affaires, tandis que je m'occupais du repas. En fait, je n'avais même pas demandé si elle avait déjà mangé, peut-être même qu'il en était ainsi, mais je ne voulais pas le savoir. Je voulais passer un bon moment avec elle, autour d'un petit repas chaud bien que je ne puisse pas le préparer puisqu'elle avait débarqué par surprise, et elle n'aura pas le choix, quitte à la faire manger pour la seconde fois de la soirée. Le téléphone sonnait, dans le vide. Je supposais que beaucoup de monde appelait le restaurant, les gens n'étant pas d'humeur à organiser une sortie au restaurant, à aller faire les courses, ou même à aller récupérer leur nourriture chinoise, étant donné le temps qui faisait. Et puis, il paraît même qu'il a bonne réputation, ce qui en rajoute une couche. J'observais donc toujours du coin de l’œil mon invitée, la regardant embrasser tendrement son chien. Cela me rappelait Charlotte et son chat, lorsqu'ils étaient tous les deux encore là. Je chassais cette idée hors de mon esprit, et la regardais enlever délicatement ses chaussures. « Wow, doucement, je vois que tu veux m'intoxiquer ! En fait tu es venue ici avec des idées de meurtre, avoue ! » dis-je avec un petit rire. J'adorais la taquiner, et en général elle le prenait plutôt bien et me rendait la pareille. Globalement, tout allait bien entre elle et moi. Je répondais à sa question, peut-être un peu tard d'ailleurs mais de manière spontanée, n'ayant pas même besoin de réfléchir à cette stupide question. « Bien sûr que non que tu ne me déranges pas, reste. Si Julian rentre il dormira sur le canapé. La galanterie ne lui fera pas de mal. » plaisantais-je avec un sourire.

Le restaurant répondit enfin, après une bonne minute d'attente qui m'avait semblé durer seulement quelques secondes, mon esprit étant davantage concentré sur mon hôte de ce soir, et je m'apprêtais à commander lorsqu'une petite blondinette m'attrapa par la taille. Je ne sais comment elle avait deviné que j'appelais le restaurant chinois, mais quoi qu'il en soit elle l'avait fait. Elle me serrait contre moi, je lui souriais en retour. Afin d'éviter que le gérant du restaurant m'entende dire d'étranges choses, je lui répondais d'une voix douce et basse, avec un grand sourire. « C'est noté, des nouilles pour ma jolie petite nounouille » Je retenais un rire et passais rapidement ma commande au téléphone. Trois plombs pour obtenir une réponse, mais le temps d'un éclair pour prendre la commande. Pourvu que la livraison soit aussi rapide, je commençais à avoir faim. Alors que je m'apprêtais à raccrocher, je sentis la jolie blonde m'embrasser dans le coup et je me mis à ricaner. Je me retournais, lui tenant la taille, et l'embrassais sur la joue. « Coquine. » murmurais-je alors.

J e la regardais me faire une grimace, je la lui rendais de la manière la plus affreuse que je pouvais la faire. Même en faisant une grimace elle était mignonne. Elle avait son petit charme, son air enfantin qui me faisait craquer et auquel je ne pouvais pas réellement résister. « Tu squattes mon lit ? Et ben, mademoiselle la princesse ! » râlais-je en plaisantant. Je continuais : « Je parlais de Julian parce que d'habitude il dort avec moi. Tu comptes vraiment dormir nue ? C'est intéressant à savoir » dis-je avec un sourire ornant le coin de mes lèvres. Je raccrochais enfin et posais le téléphone une fois avoir passé notre commande. J'avais pris un repas chinois, car c'était une valeur sûre avec Will. Elle m'avait brièvement parlé de son ancienne vie dans un pays asiatique, dont je n'avais pas retenu le nom, et j'étais presque sûr qu'elle en appréciait la gastronomie traditionnelle. Et je me souvenais également avoir d'ores et déjà mangé chinois avec elle, je ne prenais donc aucun risque, ma mémoire ne me jouant aucun tour. La pluie tombait toujours aussi fort, mais je n'y prêtais plus attention, celle-ci étant complètement portée sur Will.


Will me fait un clin d’œil puis m'enlace, appuyée sur mon dos. Pour réponse je lui offre un baiser sur la joue, elle réplique avec un bisou sur le nez, tout en faisant une mine outrée lorsque je lui dis qu'elle est une sacrée coquine. « C'est ça petite Will, fais pas l'innocente ! On sait tous que ce sont ceux qui le cachent plus qui le sont le plus, pas vrai ? » Je l'interrogeais du regard. « Tu dois être du genre sauvage » affirmais-je avec un petit rire. Petite tigresse. « Moi j'aime ça ? Oh non, je sais pas... » dis-je tout en prenant un air innocent. L'air taquin et coquin de Will disparu pour laisser place à un visage inquiet. Étrange réaction. Elle évoqua la soirée d'hier, plus implicitement qu'explicitement, et je perdais également mon sourire qui était pour l'instant si radieux. « Oh.. ça va, ça va. De toute façon il faut que ça aille ». Je disais celà sous un temps si fataliste, pourtant il était vrai : Nous devions accepter et laisser s'envoler les poussières de nos relations et amours passés.

W ill avait le don pour vous changer les idées. Elle était pétillante et savait retourner la situation, je trouvais du moins. Nous rigolions, nous étions tendres l’un envers l’autre car l’on s’appréciait et en ce moment nous avions particulièrement besoin l’un de l’autre, ayant chacun le cœur brisé par nos anciens compagnons respectifs qui ont eu la merveilleuse idée de se mettre ensemble. L’ironie semble m’aller plutôt mal, pas vrai ? Quoi qu’il en soit, Will m’apportait toute la tendresse qui me fallait et n’hésitais pas à me faire sortir de mon petit monde remplis d’idées et de pensées ennuyantes et tristounettes. Elle me faisait des bisous, des câlins, des plaisanteries. Tout ce dont j’avais besoin, et que Charlotte m’avait confisqué en même temps que son temps et son amour. C’était comme si je me jetais à corps perdu vers Will, que j’essayais d’oublier tant bien que mal Charlotte, mais sans aucune idée de manipulation derrière la tête. Tout cela se faisait de manière spontanée, et plus les jours passaient plus j’avais l’impression de me lier à Will. Je ne savais plus trop au final si c’était de l’amitié ou de l’attirance entre nous.

A peine eut-elle brisé l’ambiance entre nous deux, évoquant le bal de la veille qui pourtant s’était…relativement bien passé, qu’elle provoquait à nouveau un élan de positivité. Je lui souriais, et me ramassais un coussin en pleine face « EHHH ! » criais-je en lui renvoyant un coussin sur elle et la frappant, tout de même doucement. Une guerre, une bataille de coussins avait commencé, et elle semblait bien déterminée à la gagner, pour lui faire plaisir j’abandonnais les armes et réclamais le drapeau blanc en rigolant alors qu’elle tentait de m’assommer avec son même coussin. A ce moment-là, la sonnette retentit. Cela devait être le serveur, j’étais heureux qu’il arrive si vite. Je vis Will baisser les armes, et je ne sais si c’était elle ou moi, ou les deux en même temps peut-être, mais nos lèvres se rencontrèrent tendrement. Je lui faisais un large sourire et m’enfuyais vers la porte pour réceptionner et payer le livreur. Une fois qu’il fut parti et que ses services furent exécutés, je m’approchais du salon et posais le repas sur la table basse. « Bon appétit Willy ! » m’exclamais-je.

B on, je l'avoue, il y avait mieux comme surnom et je n'avais pas réellement fait d'efforts. Willy... Ca pouvait avoir un côté tendre, mais bizarrement lorsque j'y pensais sérieusement, cela me rappelait le film Sauvez Willy, ou un truc du genre. Je n'étais plus vraiment certain de rien. Je ne savais plus ce que je voulais, si je voulais récupérer Charlotte ou l'oublier, si je voulais plus qu'une amitié et un semblant de comédie avec Will. Tout ce que je savais, c'est que notre relation se développait sous une forme inattendue. Au début basée sur une base amicale, nous étions déterminés à faire payer Elia et Charlotte en les rendant jaloux au plus haut point. Nous étions prêt à tout, y compris à se faire passer pour un véritable couple. La comédie était censée cesser une fois avoir intégré de nouveau la sphère privée et avoir laissé de côté la sphère publique et Facebook. Pourtant nous nous rapprochions de plus en plus, loin des regards indiscrets, et aucun de nous deux ne semblait réellement repousser l'autre. Je ne savais si de réels sentiments naissaient ou s'il s'agissait d'un manque affectif à combler. Quel qu'il soit, Will commencions à être de plus en plus proches.

Je posais le repas du soir sur la table, un de ses nourritures préférées, et je la laissais s'installer sur mes genoux sans ronchonner. Je lui souriais, la voyant me regarder en me souhaitant un bon appétit. Je laisse ses lèvres se poser sur ma joue, et je profite du moment où elle tourne la tête pour regarder sa petite boîte pour embrasser délicatement sa nuque avec un sourire. Je l'écoute me demander si je veux regarder un film. « Si tu veux, mais évites Titanic ou ce genre de films, j'ai pas tellement envie de regarder ça ce soir » lui dis-je sérieusement. Quoi de plus cucul que Titanic sérieusement ? J'attrape mes baguettes avec difficultés, l'espace devant moi étant bloqué par Will, et essaye de les manipuler tant bien que mal. Je n'étais pas un pro en nourriture chinoise, et j'étais persuadé d'avoir l'air ridicule. Si cela pouvait aider Will à esquisser un sourire ou même un rire, alors j'oublierai la honte que je subissais. Et puis, le ridicule ne tue pas, et il faut un début à tout.

I l n’y aurait eu que moi, j’aurais été cherché une fourchette et un couteau, parce que sérieusement, les baguettes chinoises ce n’est pas mon truc. Disons que, si je voulais ne pas me ridiculiser, c’était légèrement foutu. Quoi qu’il en soit, j’essayais d’assumer mon manque d’habileté face aux nouilles chinoises, et Will ne semblait pas en tenir compte et ne tenait même pas compte de mes difficultés. Les nouilles chinoises devaient l’avoir transportée ailleurs, là où elle ne me voyait pas et tombait dans ses rêves. Elle proposa une soirée devant la télévision, à regarder un film. J’acceptais avec plaisir, mais je la suppliais presque de ne pas mettre un film à l’eau de rose, ce genre de long film où je m’ennuyais. Je les avais vus une fois, et cela m’avait généralement suffit. Titanic obtenait l’oscar des films cucul dont j’avais eu ma dose. Je levais les yeux en y pensant. Malgré tout, cela prenait tout son sens lorsqu’on se rappelait qu’il s’agissait d’un drame qui s’est réellement déroulé. Que la vie peut être fragile. Je comptais bien en profiter, et pour cela je devais aller de l’avant. Je ne savais pas si j’aimais Will, mais j’étais relativement bien avec elle. Relativement car la pensée de Charlotte m’étouffait encore et toujours. Je laisse Will s’échapper de mes genoux et je la regarde balayer du regard le meuble où j’avais rangé tous mes DVDs. Elle avait de quoi faire, vraiment. Elle en attrapa un, et je fus quelque peu surpris. Tout d’abord car je ne me souvenais pas l’avoir vu ni acheté, mais aussi car elle n’avait pas choisi une romance mais il film plutôt effrayant. Je n’avais pas peur de le regarder, je me souvenais d’images qui me faisaient d’ailleurs plutôt sourire. Je la laisse examiner la jaquette et ne dis rien, ne voulant pas perturber son choix. Finalement elle le choisit et le glisse dans le lecteur de DVD, prêt à lire le CD. Je la regarde brandir le dvd, fière d’elle, et je rigole doucement. Si c’est une froussarde, alors elle n’a qu’à bien se tenir, et elle ne sera pas si fière quelques minutes plus tard. Pendant qu’elle brandissait son DVD, jetant un œil à la couverture de celui-ci, j’étais parti dans la cuisine pour jeter la petite boîte de nouilles, désormais achevée. J’entendais Will me crier de revenir pour qu’elle puisse se blottir contre moi. Pendant toute la durée du film elle avait fait sa froussarde. Je l’avais serrée contre moi, et nous avions fini ensemble dans le lit, échangeant des ébats passionnés. Je pensais réellement me sentir bien à ses côtés. La page se tournait, difficilement mais doucement. C’est ce que je pensais du moins.

END