Devant et derrière, la route défile à perte de vue. Derrière Jacksonville, devant San Francisco.
Je quitte la ville de ma vie sans réel regret. Un changement s’impose. Je ne suis pas triste à l’idée de partir. Non vraiment pas.

Né un deux juin ensoleillé, je n’ai jamais eu à me plaindre de quoi que ce soit. Je n’ai jamais quitté les rails. Quoi que…
J’ai grandi sous le soleil permanent de Floride. Avec une mère-enfant, qui avait vu en mon père un prince charmant qui la ferait rêver. Il l’a fait, pendant quelques années… Avant que j’arrive, finalement. C’était peut-être ma faute alors.
Quand je suis né, mes parents étaient ensemble depuis quatre ans. Quand, je suis arrivé, mon père à commencé à laisser découvrir un alcoolisme relativement important. Est-ce qu’il existait déjà avant ? Est-ce qu’il l’avait caché à ma mère ? Est-ce que le fait que je naisse le fasse réapparaitre ?
Demandez à ma mère, elle dira toujours que je n’y suis pour rien, mais je ne suis pas dupe. Peu importe finalement.
Quand je suis rentré à l’école primaire, ma mère n’avait plus que moi, mon père n’était jamais là. Et quand il rentrait, il ne se préoccupait pas vraiment de nous. Il n’a jamais été violent, ni rien. Il n’était juste… pas là.
Ça ne m’a jamais empêché d’être bon à l’école. Enfin bon… tout est relatif, disons que je n’étais pas le dernier.
Le pire dans tout ça, c’est que quand j’ai eu 5 ans, ma mère a accouché d’une petite fille.
Et c’est 15 ans, que j’ai compris que cette fille n’était pas de mon père. Est-ce que lui l’avait deviné, aussi au final ? Je n’en sais rien. Mais quand j’ai eu 15 ans, mon père est parti. Et je suis devenu l’homme de la maison, pour ma mère et ma petite sœur.
Grandir vite. Il le fallait. Ça ne me dérangeait pas plus que ça. Je commençais à bosser ici et là en plus des cours. Je n’étais jamais pris de cours. J’avais l’air de me foutre de tout. C’était un genre que je me donnais. Mais au contraire, je prenais tout au sérieux. Je ne laissais rien au hasard. Toujours là pour ceux qui en avait besoin.
D’un autre coté, j’enchainais les filles. Peu importait pour moi. Je préférais faire ça plutôt que de leur faire croire au bonheur que je ne voulais pas leur donner, comme mon père avait pu le faire. Ça ne servait à rien de mentir.
C’est moi qui m’occupait principalement de ma petite sœur, ma mère travaillait comme infirmière et elle était souvent de garde et fatiguée en rentrant.
Ça ne me dérangeait pas. Je l’emmenais à l’école, j’allais la rechercher, je l’aidais à faire ses devoirs… On avait une petite vie, tranquille et routinière. Ça m’allait plutôt bien.
A 20 ans, je venais de décrocher un boulot dans un garage. Et j’avais une petite amie. Une vraie plaie. Je ne sais pas pourquoi, j’avais voulu faire des efforts pour elle. J’avais voulu tenir bon. Mais le fait est qu’elle me pourrissait la vie. Plusieurs fois elle venait à mon boulot pour me faire des crises.
C’en était trop, j’ai rompu. Elle ne m’a pas lâché pour autant pendant un long moment.
C’est là que j’ai décidé de plus céder à cette histoire de « faire un couple » c’était trop d’emmerdes.
J’ai continué ma petite vie bien tranquille pendant 5 ans.
Et puis j’en ai eu marre. Marre de voir les mêmes têtes, tout le temps, les mêmes endroits, sortir dans les mêmes bars, prendre les mêmes routes, se faire draguer par les mêmes filles. J’en pouvais plus.
Alors j’ai réuni ma mère et ma sœur, et je leur ai dit… je leur ai dit que maintenant elles allaient devoir se débrouiller sans moi. Que j’avais besoin d’aller voir si l’herbe était plus verte ailleurs. Elles ont compris.
J’ai pris ma voiture et je suis parti.

Devant et derrière, la route défile à perte de vue. Derrière Jacksonville, devant San Francisco.
Je quitte la ville de ma vie sans réel regret. Un changement s’impose. Je ne suis pas triste à l’idée de partir. Non vraiment pas.