l''important dans la vie n'est pas de respirer mais d'avoir le souffle coupé
PEUT-ÊTRE ÉTAIT-CE LA VIE, TOUT SIMPLEMENT ? REDEVENIR SANS CESSE ORPHELIN. ON DEVRAIT NOUS LE DIRE À LA NAISSANCE : METS TON COEUR DANS UNE VALISE, PRÉPARE-TOI À VOYAGER.
Six heures du matin, les voisins du dessus venaient tout juste d'éteindre leur foutu télévision. Je n'avais pas fermé l'oeil de la nuit, entre les ébats sexuels et le son de la télévision à fond, je n'avais pas réussi à trouvé le sommeil. Je me levais, sur les nerfs me dirigeant vers la cuisine. Aujourd'hui j'avais une enquête à réaliser pour le journal, la plus grosse jusqu'alors – bien que peu intéressante. Devant mon placard j'hésitais entre un bon chocolat chaud ou un café, je n'étais pas sûre que ce dernier soit une bonne solution, j'avais déjà les nerfs à fleur de peau. J'optais alors pour le chocolat, j'avais gardé cette vieille habitude d'enfant. Depuis toute petite, j'ai toujours eu du chocolat chaud et, je ne saurais dire pourquoi, j'ai gardé le goût de cette boisson en grandissant. Au lycée, Natacha et moi nous faisions encore des goûters, chocolat chaud et biscuit, tout en discutant de notre petite vie lycéenne, des garçons qui nous plaisaient, des filles qu'on détestaient. Evan m'en préparait un chaque fois que j'étais malade, et je savais qu'il faisait fondre du vrai chocolat, le rendant plus épais et bien meilleur. Je versais le chocolat en poudre au fond de ma tasse, puis ajoutais ensuite le lait chaud, sortant de la casserole. Un bon chocolat en poudre, c'était pas si mal non plus. Je sortis de mon appartement, allant chercher le journal au rez-de-chaussée de l'immeuble, il y avait évidemment le SF Chronicle et d'autres journaux de la ville. J'en pris trois, j'aimais le SF Chronicle, mais j'aimais aussi m'informer sur les autres, je pouvais ainsi comparer l'information. Je remontais à mon appartement, appartement que je pourrais bientôt quitter d'ailleurs. Je gagnais mieux en tant que journaliste – ce qui est assez logique comparé au métier de caissière – ce qui me permettait de quitter ce vieux studio et d'en prendre un autre, peut-être plus proche de mon travail.
Je lisais le journal, sans vraiment le lire. Je pensais à la journée qui allait suivre. Je devais faire un article sur un chantier de San Francisco, la construction d'un des plus grands buildings de la ville, j'avais pris rendez-vous une semaine auparavant avec le responsable de chantier pour y assurer ma présence, et surtout pour ne pas arriver à l'improviste. Ce sujet me stressait légèrement, premièrement parce que j'allais travailler en équipe avec un photographe et deuxièmement parce que mon rédacteur m'avait filé ce sujet pour me tester et voir de quoi j'étais capable. Il me l'avait dit en m'en annonçant la couleur, un petit clin d’œil qui se voulait rassurant. Je soupirais longuement, si mon sujet était choisi pour paraître dans le journal, je pourrais sûrement par la suite évoluer légèrement, ou au moins avoir plus de liberté. J'avais hâte d'y être et en même temps j'y allais à reculons, et si je me foirais ? Je n'avais jamais été ce genre de fille qui doute de ses capacités, mais cette année à San Francisco avait remis en question tout ce dont j'étais sûre, et premièrement ma capacité à faire du journalisme – ne trouvant pas de travail dans ce domaine pendant presque huit mois. Sept heures du matin sonnait l'église, je voulais arriver en avance sur le chantier. Nous devions y être pour huit heures trente, mais j'avais tellement la boule au ventre qu'il m'était impossible de rester chez moi tranquillement. Je décidais d'aller directement au Journal, pour préparer ma journée, revoir mes questions. Il n'y avait pas encore trop de monde sur la route à cette heure-là, en une demi heure j'arrivais au San Francisco Chronicle. Je voulais partir sur les coup de huit heures, le chantier étaient à quinze-vingt minutes de là en voiture, mais je ne faisais pas confiance en la circulation de San Francisco qui pouvaient vite se montrer traître.
Mon rédacteur m'avait imposé un photographe, en même temps je n'en connaissais aucun au sein du Journal, alors ce n'était pas plus mal. Je ne me souvenais pas trop de son nom, mais mon chef m'avait assuré qu'il était bon, et je n'avais pu m'empêcher de penser qu'il voulait vraiment me donner un coup de pouce. Je pense que Monsieur Johnson – mon rédacteur – m'appréciait bien ou en tout cas il appréciait mon travail. Je ne savais pas trop comment aborder le terrain, en même temps je ne savais pas trop à quoi m'attendre. Un chantier oui, mais encore ? Je rejoignis mon rédacteur, il était presque huit heures, le photographe ne devait plus trop tarder. Les minutes défilaient, mes yeux restaient fixé sur la pendule, huit heures une, huit heures deux, huit heures cinq, toujours pas de photographe. Je me triturais les doigts, commençant à m'énerver « T'inquiètes pas Siloë, il doit avoir quelques problèmes avec la circulation, il va arriver » me rassura Johnson. Mais ça ne me rassurait pas du tout, je me disais simplement que si le photographe avait des problèmes de circulation pour venir au Journal, qu'est-ce que ce serait pour nous qui devions aller sur le chantier ? Huit heures dix, un homme avec une grosse pochette marron arrivait d'un pas pressé vers le bureau de Johnson. Je soufflais un bon coup lorsqu'il arriva devant la porte, s'excusant de son retard, ma tension redescendait. Pour mieux remonter. « Pas de temps à perdre, on est déjà en retard » dis-je sèchement, partant déjà vers l'ascenseur. Je lui fis signe de me suivre, lui faisant comprendre qu'on prendrait ma voiture. Je ne savais pas vraiment quelle était la raison de son retard, mais nous avions vingt minutes devant nous pour qu'il se justifie. C'était peut-être un sujet merdique que j'avais là, mais ça restait un sujet important je n'avais pas envie de tout foiré à cause d'un merdeux qui n'était pas capable d'arriver à l'heure. Dans l'ascenseur, je soufflais légèrement, agacée de ce retard. Je regardais le photographe du coin de l'oeil, il était jeune. Sans m'en rendre compte mes yeux restèrent fixer quelques instants sur lui, le détaillant de la tête au pied. Ses yeux se tournèrent vers moi, il devait se sentir observé, je détournais le regard de manière agacée, alors que j'étais plutôt gênée. Il était beau garçon, mais ça ne le rendait pas plus pardonnable. Je me tournais vivement vers lui, la main tendu « Siloë Lewis » me présentais-je, un peu plus froidement que je ne l'aurais voulu. Je n'arrêtais pas de le regarder en biais, quelques frissons me parcourant l'échine. J'avais comme l'impression que l'atmosphère était lourde, je levais les yeux aux compteurs. J'inspirais profondément, m'obligeant à ne pas regarder dans sa direction, les portes de l'ascenseur s'ouvrirent et je me précipitais à l'extérieur. Comme si j'avais besoin de respirer.
L'important dans la vie n'est pas de respirer mais d'avoir le souffle coupé
Ethan avait passé la nuit debout. La veille, on l'avait appelé pour retoucher des photos prises la semaine passée à rendre pour le lendemain, comme s'il n'avait que ça à faire ! Ce n'était pas pour le journal, mais pour une agence de modèles. Il avait accepté, incapable de résister à l'idée d'être un grand photographe. Il n'aurait pas dû. Il aurait dû refuser, dire qu'il était déjà engagé ailleurs, ça lui aurait évité bien des soucis. Il avait attendu une semaine pour avoir une réponse, alors qu'ils auraient pu appelé bien avant et il n'y aurait alors pas eu de problème. Les gens ne pensent pas assez aux choses. Ainsi, il passa la nuit à essayer de retoucher les photos -et elles étaient nombreuses- luttant contre l'envie de dormir à coup de bols entiers de café et de musique entraînante. C'était un calvaire. On disait parfois que les photographes avaient la vie facile, qu'ils prenaient de belles photos et que c'était tout, mais ils se trompaient. Il y avait bien plus de travail derrière, et contrairement à beaucoup, le boulot ne s'arrêtait pas à la fin de la journée, pas pour Ethan en tout cas. Après de longues heures et quelques dix cafés, il acheva enfin son travail, épuisé, si bien qu'il s'endormit simplement sur son bureau à quatre heures du matin sans y prêter attention alors qu'il attendait juste le bon moment, et le courage, de se lever pour se préparer. Il avait un rendez-vous important aujourd'hui, un article banal pour le journal mais il se devait d'être là puisqu'on lui avait assigné cette tâche à lui plutôt qu'à un autre sur un sujet aussi bidon... Il s'était endormi bêtement sur son ordinateur, ce qui fut l'erreur fatale. Il se réveilla trois heures et demi plus tard, à sept et demi. Il grogna légèrement avant d'ouvrir les yeux brusquement et de relever la tête de la même manière, sentant sa joue se décoller du clavier douloureusement. Il eût une moue mal réveillée un instant puis regarda l'heure et si mit à paniquer. Il devait être au journal à huit heures, sachant qu'il mettait bien un quart d'heure pour y aller et qu'il n'était pas prêt, et qu'en plus de ça, les embouteillages ne tarderaient pas à débuter... Il se leva rapidement de sa chaise de bureau, lançant un juron au passage puis couru dans la salle de bain. Il aperçut son visage dans la glace, les touches de clavier ayant laissé de grosses traces sur sa joue. Là encore, il jura en se frottant la joue nerveusement, laissant apparaître une marque rouge. Il soupira et abandonna. Il se prépara rapidement, ne prenant même pas le temps de soigner sa tenue, optant pour un simple jean et un t-shirt aux allures d'adolescent. Il enfila une veste, prit son appareil photo et sa sacoche puis se dépêcha de sortir. Il monta dans sa voiture en vitesse. Il était huit heures moins dix. Il n'aurait pas dû déjeuner ! Il démarra la voiture et prit rapidement la direction du journal. Il allait être en retard, il allait se faire tuer. D'habitude, il était plutôt ponctuel, mais il avait fallu qu'on l'embête avec ces retouches photos et tout fut fini. Comme il s'en doutait, les embouteillages lui fit prendre de plus en plus de retard. Lorsqu'il arriva au journal, il était huit heures cinq. Il n'avait pas un énorme retard, mais il détestait ça, il savait très bien que son patron n'avait pas un caractère très patient et il ne connaissait pas la journaliste qui l'accompagnerait. Il entra rapidement, courant du mieux qu'il pouvait, s'essoufflant trop vite, et appuya sur le bouton de l'ascenseur. Il regarda sa montre puis opta pour les escaliers, jugeant l'ascenseur trop long à venir. S'ensuivit une course folle dans les escaliers. Il se tenant le cœur comme pour calmer son essoufflement même si rien n'y faisait. Il se précipita ensuite vers le bureau où il avait rendez-vous, le souffle bien trop court, la joue toujours marqué de sa nuit. Il ouvrit la porte brusquement et leva la main en signe d'excuse. « Pardon... J'ai... eu du mal à... venir. » Sa phrase fut coupée par sa respiration saccadée, il leva les yeux vers la jeune femme en face de lui et son cœur -tambourina pourtant trop vite- cessa de battre une demi seconde. Elle était magnifique, semblant pourtant plus que contrariée. « Pas de temps à perdre, on est déjà en retard » Il déglutit. Elle passa devant lui et sortit de la pièce pour se diriger vers l'ascenseur. Il fronça les sourcils puis regarda brièvement son patron qui hausse les épaules, puis il la suivit. En attendant l'ascenseur, il jeta de brefs coup d'oeil vers la jeune femme, tentant par la même occasion de régulariser sa respiration. Les portes de l'ascenseur s'ouvrirent enfin et ils y entrèrent tous les deux. Son cœur battait encore bien vite mais il s'était enfin calmé. Il s'efforça de ne pas la regarder. Il y eût un long silence gênant. Elle souffla, sans doute agacée à cause de son retard. Il la regarda enfin et s'aperçut qu'elle avait les yeux rivés sur lui. Il sourit et elle détourna les yeux bien vite, énervée. Il se frotta l'arrière de la tête d'un air pitoyable, puis il osa enfin rompre le silence. « On va travailler ensemble alors peut-être que je pourrais savoir votre nom ? » Il parlait d'un ton nonchalant, comme si ça lui était égal alors qu'en fait, il crevait d'envie de la connaître. Elle semblait avoir un caractère plutôt colérique ou en tout cas, de s'énerver facilement pour dix minutes de retard, ce qui agaçait tout même pas mal le jeune homme. Elle était froide et il n'aimait pas ça. Elle se retourna enfin, lui tendant la main froidement. « Siloë Lewis » Un bien jolie prénom pour une mine aussi froide. Il tenta malgré tout de sourire en lui serrant la main. « Enchanté, Ethan Brittain. » Il eût quelques frissons en lui serrant la main, mais le contact fut vite rompu, elle se retournant vite en attendant que l'ascenseur s'ouvre enfin. L'atmosphère était gênante de par le mutisme de la jeune femme. Elle se précipita à l'extérieur et il soupira en la suivant, déjà agacé par la journée. Il était épuisé, il avait la joue ridiculement peu soignée, il ressemblait à un adolescent, et il était en compagnie d'une femme qui semblait profondément agaçante malgré sa beauté. Ce fut une mauvaise impression. A l'extérieur du bâtiment, elle se dirigea vers sa voiture et il n'eût d'autre choix que de la suivre. Ils entrèrent tous les deux à l'intérieur, dans un silence de mort et elle démarra la voiture. Il regarda le paysage tout en jetant quelques regards en coin en direction de la jolie Siloë. Il soupira, profondément las. « Bon. Pardon pour le retard, j'ai passé la nuit sur un projet, j'ai eu la mauvaise idée de m'endormir sur mon ordinateur, ce qui a causé ces magnifiques marques sur mon visage -il fit un geste pour souligner les marques- je me suis donc réveillé en retard et il y avait de la circulation. Sans compter que je ne peux pas courir. » Il avait tout enchaîné d'un ton qui témoignait de son exaspération. Il la regarda quelques instants, pourtant attiré par la jeune femme puis se détourna pour contempler le paysage défilant. Quelle affreuse journée en perspective.
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Ca m'avait fait bizarre, ce contact avec cet Ethan Brittain. Un peu comme une frisson, un peu plus électrique sûrement, mais j'avais préféré me précipiter hors de l'ascenseur plutôt que d'y réfléchir. Parce que je savais que je n'avais pas ressenti ce genre de sensation depuis Evan, et je n'étais pas encore totalement sûre d'être prête à avoir une relation. D'une certaine manière je sentais le besoin d'avoir quelqu'un dans ma vie, mais m'engager sentimentalement me semblait bien plus difficile. Et pour le coup, je préférais adopter la technique de l'autruche, faire comme si je n'avais rien ressenti, comme s'il continuait de m'énerver pour son retard alors que déjà je le détestais d'être aussi charmant, de sembler si sympathique et de me faire frissonner. Avoir une compagnie masculine était une chose, mais je sentais qu'il n'était pas ce genre de gars avec qui on pouvait simplement passer du bon temps. Il semblait être le genre de personne à laquelle on s'attache sans s'en rendre compte, dont on ne peut plus se passer. Je marchais à grand pas vers ma voiture, presque comme une course, comme si j'essayais de le semer, de fuir ce qui avait traversé mon corps. Pourtant, arrivée à ma voiture je ne pus m'empêcher de me retourner, voir s'il me suivait. Nous entrâmes dans la voiture, le silence nous accompagnant aussi. Je fixais la route, je me doutais que j'avais l'air froide mais d'une certaine manière me faire détester de ce photographe ne me semblait pas si mal. « Bon. Pardon pour le retard, j'ai passé la nuit sur un projet, j'ai eu la mauvaise idée de m'endormir sur mon ordinateur, ce qui a causé ces magnifiques marques sur mon visage, je me suis donc réveillé en retard et il y avait de la circulation. Sans compter que je ne peux pas courir. » Lorsqu'il me montra les marques sur sa joue je ne pus empêcher un léger rire de franchir mes lèvres, il avait l'air ridicule. Je n'y avais pas prêter attention jusqu'alors, me forçant à ne pas le regarder. Je ne savais pas tellement quoi lui répondre, j'avais bien envie de lui dire que ce n'était pas si grave et en même temps l'article qui allait suivre me tenait à cœur. J'étais mitigée entre l'envie de me faire détester et l'envie de me laisser aller au naturel. Je n'étais pas du tout ce genre de personne habituellement, je n'étais ni rancunière ni froide bien au contraire. « C'est la vie » dis-je tout simplement, c'était une phrase bateau qui n'était ni vraiment méchante ni vraiment gentille, ça donnait peut-être un peu l'impression que j'en avais rien à foutre. Ce n'était pas le cas évidemment, je savais que ce genre de choses pouvait arrivée et je me doutais bien que s'il avait ces marques sur la joue c'est qu'il avait dû bosser dur sur son projet mais sans vraiment savoir pourquoi je n'avais pas tellement envie d'être compatissante. Ça ne me ressemblait pas. « J'espère qu'on arrivera pas trop en retard » dis-je d'une voix plate, mes yeux rivés sur la route. J'avais envie de le regarder et en même temps ça me semblait être un supplice, comme si croiser son regard m'obligerais à le pardonner. Je lançais tout de même un regard en biais, il était tourné vers la vitre, regardant le paysage défilé comme un enfant à l'arrière de la voiture, ça m'aurait presque attendri.
Nous arrivâmes sur le chantier, il était huit heures quarante-cinq, un quart d'heure de retard génial. Je sortais de la voiture, et la fermait tout en commençant à avancer, Ethan sur mes pas. « Bonjour, où puis-je trouver le responsable ? » demandai-je à la première personne que je trouvais, il nous fit signe de le suivre et nous marchions derrière lui jusqu'à un petit cabanon. Il nous laissa là, retournant à ses occupations. Je regardais la porte un peu gêné, elle était complètement recouverte d'un poster représentant une femme en sous-vêtements, je frappais au niveau de la gorge de la nana. « Hey, bonjour mademoiselle Lewis, monsieur – dit-il en tendant la main – vous avez vu ma secrétaire ? » dit-il en montrant le poster du doigt, un sourire aux lèvres. Ses yeux se levèrent vers Ethan dans un regard qui se voulait complice. Il nous céda le passage, et nous entrions dans un minuscule bureau, recouvert de paperasses, de plans et d'outils. « Je récupère quelques affaires et on fait un tour du chantier ? De toute façon, ça sert à rien que j'vous parle pendant des heures hein, c'est sur le terrain que tout se passe » il prit ses papiers nous tendit deux casques jaunes et déjà nous faisions demi tour. Je mis le casque sur ma tête, me sentant légèrement ridicule, mais après tout c'était pour la sécurité. Le chantier était plutôt grand, le bâtiment avait commencé à être monté, je sortais un style et un calepin de ma sacoche. J'avais dans l'idée d'interroger quelques travailleurs puis quelques autres personnes qui n'avaient rien à voir avec le chantier, des passants par exemple, pour pouvoir rendre compte des différents points de vus. Sans vraiment le vouloir, tellement contente de faire une article qui avait un minimum d'intérêt pour le journal, je levais les yeux vers Ethan un sourire aux lèvres. Je me sentais comme une enfant, stressée du compte rendu, mais enthousiaste à l'idée de le faire. Certes, ça ne m'avait pas paru très intéressant comme article à faire, mais maintenant que j'y étais j'avais comme l'impression que j'allais m'amuser. Je fermais de nouveau mon visage lorsque je me rendis compte de mon geste.
L'important dans la vie n'est pas de respirer mais d'avoir le souffle coupé
C'était rare pour Ethan qu'il soit énervé contre quelqu'un. En général, il était plutôt calme, il s'arrangeait pour que tout se fasse dans la bonne humeur, il n'aimait pas les différents, et d'autant plus quand il devait travailler avec la personne. Pourtant, avec cette Siloë, ça avait mal commencé, et ça avait mal continué. Elle paraissait tellement froide, distante, rigide, que ça ne pouvait que l'énerver. Il tenta néanmoins de s'excuser pour que l'ambiance de la journée soit suffisamment agréable. Lorsqu'il lui montra les marques sur son visage, elle eût un petit rire qui ne dura pas bien longtemps, un rire qui lui donna un peu d'espoir quant au reste de la journée, mais dès qu'elle eût ouvert la bouche, l'espoir s'évanouit. « C'est la vie » Ce n'était pas méchant ni même gentil, c'était simplement d'autant plus froid et distant. Ethan aurait préféré rire de ses marques tout le long du trajet, qu'elle se moque de lui et qu'ils puissent éclater de rire tous les deux, mais non. Il soupira puis retourna à la contemplation du paysage. « J'espère qu'on arrivera pas trop en retard » Il l'ignora totalement. Cherchait-elle à le faire culpabiliser, à en rajouter une couche ou quelque chose comme ça ? C'était un article totalement bidon à propos d'un chantier, il n'y avait pas besoin d'être si pressés, d'autant plus que les travailleurs ne devaient même pas remarquer leur retard ! Il croisa les bras nerveusement, impatient d'arriver sur les lieux. Déjà que cet article ne le motivait pas, être en compagnie d'une femme totalement froide, malgré le fait qu'elle soit magnifique, n'arrangeait en rien le photographe. Il préférait se concentrer sur le paysage qui défilait plutôt que de chercher à lui faire la conversation. Parfois, il aurait eu envie de s'arrêter pour prendre en photo certains lieux mais il se retint, sachant pertinemment que la jeune femme s'énerverait et qu'ils finiraient par se détester pour de bon avant la fin de la journée. Il arrivèrent enfin sur les lieux avec quinze minutes de retard ce qui sembla faire paniquer Siloë, ce qui eût pour effet de faire légèrement ricaner Ethan, qui lui n'était absolument pas pressé. Elle sortit vite de la voiture, il fit de même et elle commença à avancer à toute vitesse. Il la suivait, mains dans les poches en marchant, tout en analysant les lieux à la recherche de clichés potables à faire. Il soupira. Ce sujet ne le motivait pas du tout. Elle demanda à voir le responsable et un type leur indiqua le chemin jusqu'à un petit cabanon. La porte était recouverte d'un poster vulgaire et Ethan analysa alors la réaction de Siloë. Elle semblait gênée, hésitante en frappant au niveau de la nuque de la femme sur le poster, ce qui fit rire Ethan. Il posa sa main devant sa bouche, amusé de la réaction de la blonde. Celui qui semblait être le responsable du chantier ouvrit la porte. Il semblait le stéréotype même du gros pervers travaillant sur un chantier. Il les salua et fit une petite blague ridicule à propos du poster en regardant Ethan d'un air complice, qui lui le regardait d'un air noir et méprisant, n'ayant pas vraiment ce genre de posters chez lui... Ils entrèrent dans la cabanon quelques instants le temps que le responsable prenne tous ses papiers et ils en sortirent vite pour rentrer dans le vif du sujet. Le patron leur tendit deux casques jaunes qu'ils furent bien obligés de mettre. Ca rendait Ethan totalement ridicule, ce qui lui arracha une moue disgracieuse, mais il fallait dire que Siloë était dans le même état que lui, bien que le casque lui aille mieux qu'à lui. Une bourrasque de vent traversa le chantier, ramenant de la poussière jusqu'aux yeux de Ethan. Il se frotta donc les yeux en jurant légèrement, agacé. Lorsqu'il les rouvrit, Siloë le regardait en souriant. Un sourire qui bouleversa quelque peu le jeune homme. Un beau sourire enthousiaste, celui d'une gamine impatiente, mais il trouva ça extrêmement touchant. Son sourire s'éteint vite, se rendant sans doute compte de ce qu'elle faisait et son visage redevint froid, au grand damne de Ethan. Il détourna les yeux pour admirer le chantier et commença à prendre quelques clichés des travailleurs devant une grue, ou en train de creuser, puis son appareil dériva jusqu'à la jeune femme qui ne regardait alors pas dans sa direction. Il la prit alors en photo lorsqu'elle tourna la tête vers lui, s'apercevant de ce qu'il venait de faire. Il lâcha son appareil photo et fronça les sourcils. « Souriez la prochaine fois. » C'était tout ce qu'il avait à dire pendant qu'elle lui reprochait de ne pas se concentrer. Il sentait que la journée allait être longue en sa compagnie, et il n'avait pas envie de lui parler si c'était pour se disputer avec elle. Elle était jolie, charmante, si seulement elle n'était pas si froide, ils pourraient peut-être bien s'entendre et la journée aurait pu être agréable ! Il s'approcha d'elle, quelque peu désintéressé par l'article, mais c'était celui de la jeune femme alors il fallait que les photo collent avec ce qu'elle allait dire dedans. « Alors, vous comptez faire quoi à ces pauvres travailleurs à part les geler sur place ? » Il était assez méchant il fallait le dire, mais lorsqu'il était de mauvaise humeur, il n'était pas du genre à mâcher ses mots. Il sentait tout le même son cœur s'accélérer à son contact et c'était peut-être bien ça qui l'agaçait le plus.
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Nous avancions sur le chantier, le responsable nous expliquant brièvement les mesures de sécurité, que l'on entendait à peine à cause du bruit du marteau piqueur. Ca donnait un peu une dimension surréaliste, je ne pus m'empêcher de me laisser aller à mon imagination quelques secondes. « Bon, j'vous laisse vous débrouiller maintenant » nous dit le responsable, il avait sûrement d'autres choses à faire. Je restais plantée là un moment, observant le terrain qui s'offrait à moi, je griffonnais quelques mots sur mon carnet et regardais encore une fois autour de moi. Je repérais au loin une sorte de table construite sur le tas, avec deux cônes jaune et une grande planche en carton, j'avançais pour voir ce que c'était, il y avait pleins de grands papiers dessus. Je me retournais pour voir ce que faisais Ethan, je voulais vérifier qu'il prenait des photos du chantier, qu'il ne restait pas à glander sur place. Je le surpris entrain de me prendre en photo, je restais con un instant qu'est-ce qu'il foutait ? « Souriez la prochaine fois. » osa-t-il me dire. Je lui tendis mon majeur, pour qui se prenait-il ? « J'suis au maximum là » dis-je avec sarcasme, je décidais de l'ignorer. Johnson m'avait assuré que c'était un bon photographe, il avait intérêt à l'être, plus les minutes passaient plus j'avais envie de l'étriper. Et la journée commençait à peine, je soupirais fortement, déjà las. Je regardais la supposée table, des plans étaient dessus avec pleins de petits mots ici et là que je n'arrivais pas à déchiffrer. « Alors, vous comptez faire quoi à ces pauvres travailleurs à part les geler sur place ? » continua Ethan, j'avais dû lui taper dans l'oeil pour qu'il me cherche ainsi, pensais-je en riant intérieurement. Je savais très bien que ce n'était pas le cas. Je ne lui répondis pas, lui faisant un petit clin d'oeil à la place. S'il voulait jouer au plus con il était mal tomber, il valait mieux pour lui qu'il lâche l'affaire et m'ignorer plutôt que de me casser les pieds et m'énerver. Si à ce moment là je n'étais pas tendre avec lui, il allait comprendre sa douleur en m'énervant davantage. Je décidais de laisser tomber cette table ainsi qu'Ethan et me dirigeais vers l'un des travailleurs, je lui fis un signe de la main, le sourire aux lèvres. « Je pourrais vous posez deux-trois questions ? » demandais-je gentiment, il hocha la tête et s'arrêta alors. Je lui posais quelques questions, savoir comment il percevait ce bâtiment, et comment est-ce qu'il se sentait de faire parti de ceux qui construiraient l'un des plus grands gratte ciel de San Francisco. Il m'était beaucoup plus simple d'être chaleureuse et aimable avec cet homme tout comme il m'était beaucoup plus simple de le regarder sans me sentir mal à l'aise. Je ne me retournais d'ailleurs pas vers Ethan, je ne savais pas pourquoi mais je ne voulais pas qu'il puisse me voir toute gentille avec cet homme. Je préférais qu'il croit que je suis une sale peste. Je ne voulais pas non plus qu'il profite de cette occasion pour me faire une autre réflexion, je n'avais pas envie de passer mon temps à m'énerver après ce type. De la même manière que le premier travailleur, je fis un petit tour de chantier pour interroger d'autres personnes, sur diverses activités. Je m'amusais un peu au final, trouvant ça drôle d'avoir souvent les même réponses. Je riais même lorsque l'un d'entre eux me dit qu'il ne pouvait pas me parler « Comment ça ? » lui avais-je demandé bien curieuse de savoir pourquoi lui ne le pouvait pas alors que les autres en avait totalement le droit « Parce que je ne sais pas bien parler m'dame, vous savez, pour vot'article »* dit-il, je fus plutôt surprise. Il ria gêné et je rigolais avec lui, le rassurant. Je m'arrêtais un instant, cherchant Ethan du regard, j'avais besoin de savoir s'il avait prit pas mal de photo ou non, je le cherchais un peu sur le chantier ne le trouvant pas. Je finis par le repérer tranquillement adosser à un poteau, il m'agaçait. J'hésitais entre lui en mettre plein la tronche et me contenir, je ne savais pas s'il en avait fini avec ses photos. « Comment ça se passe ? » demandais-je platement, je préférais l'engueuler après être sûre qu'il n'avait rien foutu. « Il est quasiment midi, ils sont tous entrain de s'arrêter pour la pause déjeuner, je propose qu'on aille dans cet espèce de resto chinois en face et qu'on parle de ce que nous avons non ? » je lui montrais du doigt un genre de fast food asiatique, à vrai dire j'en avais pas grand chose à faire d'où je mangeais. J'en avais quasiment fini avec le chantier, je voulais interroger quelques passants pour boucler mon article.
L'important dans la vie n'est pas de respirer mais d'avoir le souffle coupé
C'était insupportable de travailler avec quelqu'un comme elle. D'habitude, tout se passait bien, il rigolait bien en général et travaillait dans la joie et la bonne humeur, heureux d'avoir fait de la photo son métier, mais là, ça ressemblait plus à une corvée qu'autre chose. Pourquoi cette femme le mettait d'aussi mauvaise humeur ? Il n'était pas comme ça d'ordinaire, à lancer des piques pour mieux l'énerver. C'était étrange. Lorsqu'il lui demanda ce qu'elle allait faire, elle ne répondit pas, se contentant de lui lancer un clin d'oeil dont il ne comprit pas la signification. Cette histoire allait mal finir s'ils restaient ensemble toute la journée. C'est alors qu'elle s'éloigna pour poser des questions aux travailleurs. Enfin un peu de tranquillité. Il en profita pour analyser une nouvelle fois les yeux, cherchant à tout prix quelque chose d'assez digne d'intérêt pour être pris en photo. Ce n'était certainement pas son meilleur sujet, loin de là, mais il fallait bien qu'il fasse son travail. Il marcha un peu autour du chantier à la recherche d'un bon point de vue, ne se préoccupant plus du tout de la présence de la blonde. A présent, il était concentré et on aurait bien pu l'appeler mille fois, il n'aurait pas entendu. Lorsqu'il était comme ça, il pouvait être autant passionnant qu'énervant. C'était souvent ce qu'on lui disait d'ailleurs. Au lycée, il pouvait passer des heures à parler photo ou à prendre divers clichés, ce qui le rendait totalement associable aux yeux de ses amis, qui en profitait pour rire de lui amicalement. Il était le geek de la bande, le geek de la photo et ça lui plaisait. Malgré son manque d'intérêt pour les chantiers, il faisait de son mieux pour prendre des photos de bonne qualité. Il prit des travailleurs se qui avaient bien voulu servir de modèle -parce qu'il ne prenait jamais quelqu'un en photo sans son accord-, pelleteuse à terre, impressionnante, et d'autres photos d'ouvriers, de grue, des paysages mettant en relief l'ampleur du chantier, un tas de photographies qui allaient pouvoir illustrer l'article de la jeune femme. D'ailleurs, il avait totalement oublié sa présence dérangeante et lorsqu'il s'en souvint, il la chercha un instant avant de se poser contre un poteau après avoir pris toutes ces photos. Il avait bien travailler et contrairement à ce que certains pourraient dire, il s'était investi malgré tout. Il faisait une pause puis regarda sa montre. Bientôt midi, les travailleurs prenaient leur pause déjeuner. Il se demanda alors ce qu'il allait faire. Peut-être qu'il devrait chercher Siloë pour lui dire qu'ils se retrouvaient plus tard, n'ayant aucune envie de passer sa pause avec elle. Ce fut elle qui vint le voir. « Comment ça se passe ? » Elle posa la question d'un ton neutre, sans doute pour vérifier s'il avait bien fait son boulot. Il leva vers elle un œil froid et fier qui ne lui ressemblait absolument pas et se redressa. « J'ai fait presque toutes les photos dont j'ai besoin, après, je sais pas où vous vous en êtes mais moi j'ai presque fini. » C'était incroyable à quel point il était froid. Il s'étonna lui-même du ton employé, ne comprenant pas vraiment sa propre colère, mais il fallait dire qu'elle ne faisait rien pour arranger les choses. « Il est quasiment midi, ils sont tous entrain de s'arrêter pour la pause déjeuner, je propose qu'on aille dans cet espèce de resto chinois en face et qu'on parle de ce que nous avons non ? » Elle pointa un semblant de restaurant du doigt et Ethan suivit son regard avant de soupirer. Il n'avait vraiment aucune envie de passer plus de temps avec elle, mais il valait mieux passer sa pause déjeuner avec elle que d'avoir à rester plus longtemps ou d'être obligé de la revoir le lendemain pour faire le point. « Si vous voulez. » Dit-il dans un long soupir las, les mains dans les poches, appareil autour du cou en se dirigeant vers le restau. Il traversa la route en silence, Siloë sur ses talons et entra à l'intérieur avec elle. Il se posa à une table et elle le suivit. Tout se fit sans un moment, dans un silence de mort, un silence agacé, froid, brut. Il soupira de nouveau, le regard désintéressé. « Alors... Il vous reste quoi à faire pour votre article ? » Elle avait l'air d'attacher beaucoup d'importance à celui-ci, bien plus que lui. C'était sans doute son premier « vrai » article. Il eût un petit rire discret. C'était pas avec ça qu'elle arriverait à percer dans le métier. Qu'est-ce qui lui prenait ? Depuis quand est-ce qu'il méprisait les autres comme ça ? Il ne faisait jamais ça, il n'avait jamais fait ça. Elle le mettait hors de lui sans raison valable. Il se sentait totalement mal à l'aise en sa compagnie, les mains moites, stressé, et il ne supportait pas ça.
l''important dans la vie n'est pas de respirer mais d'avoir le souffle coupé
PEUT-ÊTRE ÉTAIT-CE LA VIE, TOUT SIMPLEMENT ? REDEVENIR SANS CESSE ORPHELIN. ON DEVRAIT NOUS LE DIRE À LA NAISSANCE : METS TON COEUR DANS UNE VALISE, PRÉPARE-TOI À VOYAGER.
Je le voyais bien qu'il n'avait aucune envie de passer sa pause déjeuner avec moi, sa tête et ses soupirs en disait long. Il ne se rendait pas compte que j'avais autant à le supporter que lui devait me supporter, je me comportais certainement comme une peste avec lui – et en réalité pour des raisons minables – mais je savais au moins me montrer diplomate concernant le boulot. Je ne voulais pas spécialement me montrer gentille ou agréable avec lui, mais je pouvais au minimum me montrer supportable, au moins le temps d'une pause déjeuner pour tout mettre au point. Il accepta ma proposition d'aller manger au restaurant chinois d'en face, et c'est les mains dans les poches, traînant la patte qu'il m'accompagnait jusque là-bas. Il me laissa choisir d'abord ce que je voulais, je n'avais pas très faim et ne pris de ce fait pas grand chose. La femme nous laissa un gâteau chinois à chacun, je supposais que c'était la tradition. Une fois nos plateaux prêts nous nous installions sur une table au hasard « Alors... Il vous reste quoi à faire pour votre article ? » me demanda-t-il, sans vraiment s'y intéressé, il avait l'air de me demander ça plus pour savoir si nous avions bientôt fini ou s'il allait devoir me supporter encore longtemps. « J'aimerais interroger des passants, savoir ce qu'ils pensent et ce qu'ils savent de ce gratte-ciel en construction » j'avais envie d'approfondir mon sujet au maximum, je ne voulais pas me fier à un seul point de vu : celui des ouvriers. Je mangeais un peu de ce que j'avais dans l'assiette et lui demandais entre deux bouchées « On en a plus pour longtemps » dis-je simplement, un peu pour le rassurer aussi. Je finissais de manger tranquillement, nous ne parlions pas, il y avait juste ce son affreux de mastication. Je n'avais pas spécialement envie de lui faire la causette, de toute façon je n'avais rien à lui dire. Je levais quelques secondes les yeux sur lui, il était tout autant concentré sur son assiette que moi et tout comme moi il évitait de me regarder. Elle était chouette cette collaboration, deux personnes qui ne peuvent pas se blairer au point de ne pas pouvoir se regarder. Je bus un grand verre d'eau, j'avais fini mon repas, il ne me restait que ce biscuit chinois dont je n'avais absolument pas retenu le nom. Je le cassais en deux et en sorti le papier, je tombais sur la première face avec le petit mot écrit directement en chinois, je retournais mon papier pour découvrir la traduction « Si à la porte tu repousses le tigre, attention que le loup n'entre pas par la fenêtre » lis-je du bout des lèvres. J'eus une petite boule au ventre, comme si ce message me faisait comprendre que je repoussais Ethan. Je ricanais, levant les yeux vers le photographe « À votre avis ça veut dire quoi ? » demandai-je comme pour masquer ma gêne. Après tout, ce message ne voulait rien dire de concret pensais-je pour me rassurer, c'était des mots fais à la chaîne et c'était le hasard qui faisait que je tombais dessus. Mon interprétation était complètement subjective. Je voulais savoir quel était son message à lui, il n'avait pas encore ouvert son gâteau. « Vous avez pris pas mal de photo ? » demandai-je pour me recentrer sur le pourquoi de notre présence. Il s'essuya les mains et sortit son appareil photo, à mon tour j'essuyais mes mains sur la serviette en papier. Je n'étais pas peste au point de lui laisser pleins de graisse sur son appareil. Je regardais les quelques photos qu'il avait pris et je fus surprise lorsque – déjà – j'arrivais à la fin des photos du jour. « C'est tout ? » l'attaquai-je il n'y avait même pas dix photos, est-ce que ce gars là était tellement sûr de lui qu'il ne prenait qu'un minimum de photo ou bien était-il encore moins investit que ce que j'avais imaginé ? « Vous vous foutez de ma gueule ou bien ? » il m'avait énervé de nouveau, il était atteint de flemmingite ce gars ou quoi ? J'avais besoin d'un peu plus de photos, au moins pour ne pas être contrainte du pauvre choix qu'il me proposait et surtout pour être sûr de trouver la bonne qui illustrerait largement l'article. J'avais besoin de quelques autres photos, plus petite en revanche, pour montrer un peu la façon dont j'avais entrepris mon sujet.
L'important dans la vie n'est pas de respirer mais d'avoir le souffle coupé
Dès l'instant où il avait accepté d'aller déjeuner avec Siloë, il le regretta. Il n'avait aucune idée de lui parler, de la supporter encore quelques temps, il avait envie d'en finir au plus vite et de ne plus la revoir. Elle avait le don incroyable de le rendre nerveux et incertain, chose qu'il haïssait au plus haut point, l'empêchant d'apprécier la jeune femme. Ils entrèrent dans le restau et Ethan n'attacha aucune importance au service. Cependant, une serveuse leur donna à chacun un de leurs biscuits chinois ridicules. Ethan le déposa sur la table sans y toucher. Il n'était clairement pas d'humeur pour ces bêtises. Il demanda à Siloë ce qu'il lui restait à faire, l'envie d'en finir à présent plus forte qu'à l'ordinaire, d'une voix cependant désintéressée. Son article ne l'intéressait absolument pas, et pourtant, elle semblait totalement stressée à ce sujet, comme si sa vie entière en dépendait. « J'aimerais interroger des passants, savoir ce qu'ils pensent et ce qu'ils savent de ce gratte-ciel en construction » Il hocha la tête machinalement en admirant les alentours au lieu de la regarder elle, laissant son regard vagabonder vers l'affluence du petit restaurant de quartier. Il se servit un verre d'eau -le pichet était déjà servi- et en but une longue gorgée, gonflant ses joues de façon négligée, comme s'il était vraiment pressé. Il ne faisait absolument aucun effort pour entrer dans les bonnes grâces de Siloë, et il fallait croire qu'elle non plus. « On en a plus pour longtemps » Il s'arrêta soudain de bouger, la regardant enfin, puis hocha la tête avec un léger sourire. La torture prendrait bientôt fin. C'était étrange, véritablement bizarre la façon qu'elle avait de le mettre en rogne à la moindre parole. Ca ne lui ressemblait pas du tout, lui qui était si sociable, à rire de tout, sans se poser de question, il devenait froid, distant, presque méprisant devant cette fille dont il se demandait d'où elle pouvait bien venir. Elle était plutôt jolie pourtant, quel gâchis que ce mauvais caractère ! Ils mangèrent leur plat en silence, un silence de mort, gênant, horripilant. Comment était-ce possible d'être en compagnie de quelqu'un de si ennuyant ? D'autant plus qu'il détestait la nourriture chinoise à vrai dire, et s'il était venu là, c'était simplement pour éviter les histoires. Il étouffait, il étouffait démesurément. Pourquoi détestait-il tant la nourriture chinoise ? Sans doute parce que c'était dans ce genre de restaurant qu'il avait l'habitude d'aller avec son meilleur ami, Aimeric, et que depuis sa mort, il en était dégoûté, ces endroits lui rappelant bien trop de souvenirs. Peut-être que c'était également un peu pour ça aussi qu'il était tant énervé. Il évitait de penser à Aimeric pour ne pas se faire de mal et chaque fois, il voyait les longues conversations suivies d'éclats de rire brutaux, les bêtises, les folies, les discussions sérieuses aussi, les joies, les peines, les confidences. Tout se passait dans un restaurant, en général chinois, comme un repère, un rendez-vous non programmé mais pourtant bien prévu. Il avait du mal à le supporter et retourner dans ce genre de restaurant lui donnait des frissons.
Il secoua la tête pour chasser ces pensées mélancoliques et se reconcentra sur son assiette, sans pour autant lever un regard vers Siloë, comme si sa présence avait l'importance d'une plante posée au hasard dans le restaurant. Il entendit les bruits du biscuit qui se cassait et seules les paroles de Siloë le fit relever la tête vers elle. « Si à la porte tu repousses le tigre, attention que le loup n'entre pas par la fenêtre » Il haussa un sourcil devant la réaction de la jeune femme qui ricanait. « À votre avis ça veut dire quoi ? » Il hocha la tête à la négative en haussant les épaules pour signifier qu'il n'en savait rien. Il prit alors à son tour le biscuit chinois qu'on lui avait donné et l'ouvrit. Il lut le message rapidement dans sa tête, d'abord insouciant. Aujourd'hui est le point de départ de nouvelles choses. C'était ce que disait le bout de papier. Il releva la tête vers la demoiselle en face de lui, tout d'un coup gêné. Etait-ce par rapport à elle ? Il se racla la gorge de gêne mais ne dit absolument rien. « Vous avez pris pas mal de photo ? » Dire qu'il avait pris pas mal de photo était un peu exagéré, mais à vrai dire, il ne croyait pas en avoir besoin de beaucoup plus. Il s'essuya d'abord les mains avant de lui tendre son appareil. Elle fit de même et le lui prit des mains. Leurs doigts s'effleurèrent un instant et Ethan retira donc bien vite sa main. Elle sembla surprise. « C'est tout ? » Il passa légèrement sa langue sur sa bouche et fronça les sourcils. « Pas besoin d'en avoir des tonnes. » Il ne pouvait dire que la vérité après tout. Son article n'allait pas avoir besoin d'énormément de photo et elle ne l'avait pas orienté sur un sujet en particulier à traiter. « Vous vous foutez de ma gueule ou bien ? » Il la regarda alors d'un œil menaçant, sourcils toujours froncés. Il reprit bien vite son appareil des mains de la blonde. « De toute façon votre article ne sera jamais en première page, et c'est pas avec ça que vous progresserez dans le journalisme. Pas besoin de prendre trop à cœur un article qui sera classé entre les chats disparus et le dernier tournoi de belette. » Il se leva alors, déposa quelques billets sur la table pour payer le déjeuner -bien assez pour tous les deux, il le savait bien- et se dirigea droit vers la sortie, profondément énervé. Une fois à l'extérieur, il frappa le mur pour calmer sa colère puis avança vers le chantier, décidé à faire le maximum de photo, et tant pis pour la qualité. Elle voulait des photos, elle en aurait. C'était un jeu de gamins, mais il continuait tout de même, sans arrêt. Il avait envie de rire du travail acharné mais vain que la jeune femme fournirait, et pour ça, il allait bien sûr en rajouter une couche. Oeil pour œil, dent pour dent. Mais ne vous méprenez pas, il n'est pas comme ça d'ordinaire.
l''important dans la vie n'est pas de respirer mais d'avoir le souffle coupé
PEUT-ÊTRE ÉTAIT-CE LA VIE, TOUT SIMPLEMENT ? REDEVENIR SANS CESSE ORPHELIN. ON DEVRAIT NOUS LE DIRE À LA NAISSANCE : METS TON COEUR DANS UNE VALISE, PRÉPARE-TOI À VOYAGER.
Ethan ouvrit à son tour son gâteau chinois, il n'en fit pas partager le message mais releva soudainement son visage vers le mien. Lui qui s'appliquait si bien à éviter mon regard depuis que nous étions rentrés dans ce restaurant, je levais un sourcil, curieuse. Il laissa tomber le message sur le plateau lorsque je lui demandais de me montrer les photos. Il n'y en avait même pas dix, j'avais besoin d'un large choix, bien sûr que je n'aurais pas besoin de plus de trois ou quatre photos pour mon article, mais je voulais avoir du choix. Je vis ses sourcils se froncer, son visage se décomposer, visiblement il se mettait en colère. Et ça m'énervait moi-même, je lui demandais simplement de faire son boulot, pas de prendre trois photos minables et de me les balancer en me disant « Eh, voilà ma part du travail, j'suis resté toute la matinée avec toi sur le chantier mais j'ai préféré ne rien glander ». Ce qui était certain c'est que cet article ne le motivait vraiment pas, il s'en foutait comme de l'an 2000, et il me le faisait bien comprendre. Certes, ses photos étaient de bonnes qualités, mais s'il donnait autant de sa personne sur chacune de ses missions il ne devait pas être très apprécié. Il m'énervait, c'en était la preuve d'une certaine manière. Je n'étais pas ce genre de personne à détester quelqu'un dès les premières minutes, pourtant avec cet homme le courant ne passait pas. Pas du tout. « De toute façon votre article ne sera jamais en première page, et c'est pas avec ça que vous progresserez dans le journalisme. Pas besoin de prendre trop à cœur un article qui sera classé entre les chats disparus et le dernier tournoi de belette. » me dit-il, en colère. Je le regardais, choquée et avant même de pouvoir dire quoi que ce soit il se leva, balança de l'argent sur la table et partit. Je bouillais, pour qui se prenait-il ? Il se la pétait plus haut que son cul, si personne ne l'avait encore remis à sa place j'allais m'en charger. Il fallait qu'il se calme celui-là. Je me levais à mon tour, encore plus en colère qu'il ne pouvait l'être. Il s'était cassé pour se remettre au boulot sur le chantier, je le voyais mitrailler tout et n'importe quoi. Mais quel gamin, j'hallucinais ou quoi ? J'avançais d'un pas énervé vers lui, si j'avais été un Toon, j'aurais sûrement eu les yeux rouge et de la fumée qui me sortait des oreilles. Je marchais tellement vite que je ne faisais plus attention à ce qui se passait autour, ma seule envie était de prendre le premier objet pointu qui me venait sous la main et de planter ce maudit photographe. De le regarder avoir mal, de tourner et retourner l'objet en le voyant me supplier d'arrêter. Je serrais les dents. J'arrivais bien vite à lui et le bousculais, lui faisant perdre des mains son appareil qui – bien heureusement – était aussi accroché autour de son cou. « Non mais pour qui vous vous prenez ? Alors quoi, vous vous croyez au-dessus de tout le monde ? Regardez autour de vous, vous n'êtes rien de plus qu'une merde, tout autant que les autres petits cons dans votre genre. Maintenant, si vous êtes même pas capable de vous investir un peu dans un sujet – bien qu'il ne vous intéresse pas – c'est que vous n'êtes pas un bon professionnel. Grandissez un peu ! Que chacun fasse son boulot correctement et qu'on ai plus à se revoir. » criai-je comme une hystérique. La situation devait être tellement ridicule, je m'étais toujours moquée de ces couples qui s'engueulaient dans la rue sans pudeur, me disant qu'ils n'avaient aucune honte. Et pourtant, j'étais entrain de faire la même chose. Moi qui savais très bien garder mon calme quand il le fallait – et surtout quand il s'agissait de travail – là je n'y arrivais absolument pas, il me faisait sortir de mes gonds. « Et si vous êtes pas capable de comprendre que ce sujet est important pour moi, alors vous êtes un gros con. » ajoutais-je plus calmement avant de me retourner et de partir de mon côté. J'avais la boule dans la gorge, les tripes serrées, je n'arrivais pas à me calmer. J'avais envie de retourner vers lui et de lui mettre un putain de coup de poing dans la figure, j'avais envie de cogner, de courir, de me dépenser pour évacuer cette tension. Mais comme je ne pouvais rien faire de tout ça, et que j'étais incapable de garder tout ça pour moi je me mis à pleurer comme une grosse gamine. J'avais besoin de suinter. Je m'éloignais le plus rapidement possible, il était hors de question qu'il me voit ainsi, comme un bébé, il n'y avait rien de tel pour m'énerver davantage.
L'important dans la vie n'est pas de respirer mais d'avoir le souffle coupé
Il agissait comme le pire des prétentions, comme ça, sans raison, juste parce qu'elle l'agaçait au plus haut point. Il étouffait d'être à ses côtés. Certes, il comprenait un peu pourquoi elle attachait tant d'importance à cet article mais il n'arrivait pas à se comporter normalement. Au début de cette journée -qui semblait d'ailleurs interminable- il était plutôt motivé -certes bien moins que pour d'autres articles, mais tout de même- mais dès lors qu'il était entré dans ce satané bureau et qu'elle lui avait lancé une remarque cinglante sur son retard, il avait perdu toute envie de faire de son mieux. Il était en très mauvaise compagnie, à croire qu'il avait fait quelque chose d'odieux avant même leur rencontre et qu'elle ne puisse pas lui pardonner. C'était absurde tant il s'énervait contre elle. Il quitta alors rapidement le restaurant sans prendre la peine d'emporter la soit-disant prédilection en lui lançant sa réplique absolument odieuse qu'il regretta aussitôt qu'il l'eût prononcée, même s'il était trop énervé pour venir s'excuser. Depuis quand agissait-il de la sorte ? C'était étrange, il y avait bien trop de stress, de tension inutile, alors qu'aux premiers abords, avant qu'elle ne parle, il l'avait trouvée plutôt charmante.
Il était à présent dehors à photographier des tonnes de choses, prenant tout de même des clichés suffisamment beaux pour paraître dans un magazine, tel un gamin vexé. Il l'était, vexé, c'était certain, mais il aurait très bien pu prendre sur lui comme il le faisait régulièrement et être amical et agréable, comme à son habitude. Mais avec elle, ce n'était pas comme ça, c'était comme si tout était accentué par mille avec cette femme. Tout comme les battements de son cœur qu'il se maudissait d'avoir. Tout d'un coup, elle arriva pour le bousculer et son appareil photo tomba sur son torse -heureusement qu'il l'avait attaché, sinon il lui aurait fait payer cet affront. Il fronça les sourcils, interloquée et s'apprêtait à répondre mais elle ne lui en laissa pas le temps et se mit à crier contre lui toute la haine qu'elle semblait ressentir. « Non mais pour qui vous vous prenez ? Alors quoi, vous vous croyez au-dessus de tout le monde ? Regardez autour de vous, vous n'êtes rien de plus qu'une merde, tout autant que les autres petits cons dans votre genre. Maintenant, si vous êtes même pas capable de vous investir un peu dans un sujet – bien qu'il ne vous intéresse pas – c'est que vous n'êtes pas un bon professionnel. Grandissez un peu ! Que chacun fasse son boulot correctement et qu'on ai plus à se revoir. » Elle avait raison, il le savait très bien au fond, mais jamais il ne l'avouerait, pas devant elle, certainement pas. C'était bizarre à quel point elle le mettait hors de lui. Auparavant, jamais il ne s'était retrouvé dans une telle situation, à tel point énervé contre quelqu'un. « Vous êtes cinglée ou quoi ?! Ca va pas de hurler comme ça en pleine rue ? Vous voulez des photos non ? Eh bien là, j'en fais, alors venez pas me gonfler à crier comme une hystérique après moi ! »
Il souffla ensuite pour évacuer toute la tension accumulée mais elle ne lui laissa pas vraiment le temps pour se calmer. « Et si vous êtes pas capable de comprendre que ce sujet est important pour moi, alors vous êtes un gros con. » Elle partit avant qu'il ait eu le temps de répliquer. Il baissa ensuite la tête, l'air un peu coupable, parce que oui, il le savait, c'était sa faute à lui. Pourtant, il ne démordrait pas, il n'irait pas la chercher, il n'irait pas s'excuser, tant pis. Il fronça légèrement les sourcils en la regardant partir et il crut voir des larmes sur son visage au moment ou elle tournait la tête pour vérifier que la voie était libre pour traverser la route. De quoi se sentir encore plus coupable. Pourtant, la colère était toujours là, il était toujours remonté contre elle, excessivement même. Il termina de prendre quelques photos et, comme un lâche, appela un taxi. Ce n'était absolument pas professionnel, c'était même puéril, il agissait comme un gosse un peu trop fier, mais il ne voulait pas rester un seul instant, trop mal à l'aise pour supporter encore cette situation. Un taxi arriva alors et et indiqua la direction du bureau pour prendre sa voiture et rentrer chez lui. Il ne voulait pas affronter une nouvelle fois son regard, surtout si elle avait pleuré. Il s'arrangerait plus tard pour lui transmettre les photos, mais il n'avait surtout pas envie de la revoir, il se comportait bien trop mal lorsqu'elle était là. La taxi passa devant la jeune femme et il détourna la tête pour ne pas la regarder, espérant qu'elle ne l'ait pas vu. C'était vraiment puéril. Il arriva ensuite au bureau et ne tarda pas à prendre sa voiture pour rentrer chez lui. Il devait être environ quatorze heures lorsqu'il arriva enfin à son domicile. La journée n'était pas terminée mais elle avait déjà duré un temps interminable. Il fut soulagé de rentrer, posa son appareil sur le bureau et s'assit douloureusement sur la chaise devant son ordinateur. Il passa ses mains devant son visage d'un air las. Il fallait qu'il mette les photos sur son ordinateur pour les retoucher à présent. Il le fit donc et parcourut les photos qu'il avait prises. Certaines étaient vraiment prises à la va-vite, et ça se voyait. Il tomba alors sur un cliché de Siloë qu'il avait pris. Elle ne souriait pas, mais elle était tout de même magnifique. Quel gâchis que ce mauvais caractère !