Lera se sentait mal depuis qu’elle s’était réveillée tôt ce matin. Elle avait d’affreux maux de ventre et craignant qu’il s’agît une nouvelle fois d’une fausse alerte –une énième, ce qui avait le don de l‘agacer- elle décida de passer outre. Elle ne gardait pas Eireen aujourd’hui et en avait profité pour demander à sa meilleure amie de passer à la maison, à défaut de pouvoir la voir ailleurs. Cela ne pourrait que lui faire du bien, passer du temps avec Frankie. Depuis qu’elle était enceinte, elle trouvait que son cercle d’amis s’était considérablement réduit. Encore plus maintenant que le délai était atteint –et dépassé. Personne n’avait envie de se coltiner une baleine le point d’exploser, elle la première. La plus petite action lui paraissait être insurmontable, heureusement dans ces moments, elle pouvait compter sur William qui parvenait à rattraper le retard qu’il avait accumulé depuis le début de la grossesse. D’ailleurs, elle ne lui en voulait pas pour cela, tout d’abord, ce n’était pas dans ses plans de se retrouver avec un enfant sur les bras et ensuite, il avait sûrement d’autres choses à faire que de supporter ses changements d’humeur et ses plaintes à longueur de journée. La sonnerie retentit. Ce fut avec difficulté qu’elle traîna sa carcasse jusqu’à la porte, un sourire aux lèvres, sachant pertinemment qui était sa visiteuse. « Coucou ! » Elle l’observa un instant, remarquant qu’il manquait visiblement quelqu’un « Oh, tu n’as pas pris Katie » dit-elle d’un ton triste, elle aurait bien voulu voir sa filleule qui lui manquait. « Tu veux boire quelque chose ? » demanda-t-elle après refermée la porte, se dirigeant vers la cuisine.

tu finissais d’habiller katie, le soleil enfin s’était installé à san francisco, si bien que tu prenais un plaisir à pouvoir enfin habiller ta fille comme une vraie petite princesse. khris n’en pouvait plus de tes achats incessants pour katie, mais quand il s’agissait d’elle tu devenais vite incontrôlable. jamais tu n’aurais pensé devenir comme ça, mais c’était une idée à laquelle tu t’étais bien faite, désormais. tu faisais tout pour que cette idée s’intègre aussi bien dans la petite tête blonde de ta meilleure amie. tu rassemblais tes affaires, en pensant à lera. la grossesse la perturbait autant que toi, sinon plus. c’était compréhensible. tu ne comprenais que trop bien tout ce qui pouvait se passer dans la tête de lera. tu étais passée par là. depuis le début de sa grossesse, tu essayais de l’aider à accepter. accepter ce nouveau rôle qui allait être le sien. tu l’avais souvent vu avec katie, aussi tu étais certaine qu’elle ferait une mère parfaite. et puis… tu serais toujours là pour elle de toute façon. « je file chez lera. je te laisse katie ? » tu demandes à khris, qui te réponds que oui, il va l’emmener au parc. tu l’embrasses et puis tu fais pareil avec katie avant de claquer la porte.
quelques minutes plus tard, tu étais déjà chez ta meilleure amie. tu frappes en attendant qu’elle t’ouvres. au moment où tu te dis que tu ferais mieux de rentrer au lieu de la déranger, voila lera qui ouvre. « Oh, tu n’as pas pris Katie » tu souris en voyant son visage quelques peu déçu. « non khris s’occupe d’elle aujourd’hui. » « Tu veux boire quelque chose ? » dit-elle se se dirigeant vers la cuisine. « non, je veux que tu t’assois et que tu arrêtes de gesticuler dans tous les sens. je te rappelle que t’es déjà assez en retard comme ça, pas la peine d’en rajouter » tu la disputes gentiment. tu t’assois dans le canapé en attendant que lera te rejoigne. « alors, comment tu te sens ? » tu t’inquiètes.

Elle haussa simplement les épaules aux remontrances de sa meilleure amie et décida de prendre quelque chose pour elle, à manger bien entendu. De toute façon, elle n’avait rien de mieux à faire que de manger, boire et rester coucher toute la sainte journée ce qui l’exaspérait au plus haut point. Être enceinte, quelle difficulté. Parfois, elle regrettait d’avoir pris cette décision, tant de responsabilités était-elle prête ? Elle se le demandait. Elle se voyait mal arrêter de travailler mais elle ne pouvait pas non plus continuer tous ses voyages. Elle poussa un soupir. Elle attrapa un yaourt dans le frigo et alors qu’elle s’apprêtât à rejoindre Frankie au salon, elle fut assaillie de nouveaux maux de ventre, plus violents que ceux qu’elle avait eu jusqu’ici. Elle se cramponna au plan de travail, les paupières solidement scellées l’une à l’autre tandis qu’elle respirait profondément. Comportement qu’elle avait adopté à maintes reprises et le mal s’était toujours fait la malle. Pas cette fois cependant. Des larmes menaçaient de sortir tant la douleur allait crescendo. « Bordel, Bordel… » Murmura-t-elle en se courbant légèrement. Tout à coup elle remarqua un autre phénomène dont elle n’avait pas tout de suite pris conscience tant elle était obnubilée par la lame qui semblait s’enfoncer toujours plus profondément dans son ventre. Elle perdait les eaux. Elle allait accoucher. Là. Maintenant. « FRANKIE ! » hurla-t-elle, paniquée désormais. Elle n’était pas prête. Pas du tout même. Sa respiration s’accéléra, de même que son pouls. Ce n’était pas bon. Elle avait mal. Elle allait accoucher. Elle n’était pas prête. Voilà ce qui tournait présentement en boucle dans son esprit. « Je crois que c’est l’heure… »

assise dans la canapé, tu attends lera. qui bien évidemment ne t’as pas écouté et qui ne sort pas de la cuisine. tu restes là à l’engueuler alors que tu es certaine qu’elle ne t’écoute même pas. mais pour la forme tu le fais quand même. parce que c’est ton rôle de veiller sur lera. c’est ta meilleure amie, tu as toujours veillé sur elle depuis que tu la connais. elle est plus vielle que toi, mais elle a toujours été comme ton bébé…
tu commences à jouer avec tes ongles en attendant. absorbée dans ta manucure de fortune, tu réfléchis à tout un tas de choses, quand tu es rappelée à l’ordre par la voix de lera qui s’élève et qui t’appelle. tu sens que quelque chose ne va pas. tu te lèves d’un bond et tu fonces dans la cuisine, là où ta meilleure amie a disparu quelques minutes plus tôt.
tu découvres lera qui se recroqueville sur elle même. tu sens la panique dans son regard. tu la regardes et vite, tu comprends. c’est l’heure. sans pouvoir le retenir, dans un petit murmure « merde » sort de ta bouche. tu essayes de réfléchir. tu essayes d’aller vite. tu essayes de remettre tes pensées dans l’ordre et de savoir quoi faire. tu accoures vers lera et tu passes ton bras dans son dos et tu la redresse un peu. « viens au salon, il faut que tu t’assois. tu peux marcher ? attends… faut que je t’emmène à l’hôpital ! » serais-tu en train de paniquer ? il y a de grandes chances. tu emmènes lera dans le salon et l’assois dans le canapé. tu te relèves et poses une main sur tes yeux que tu fermes… tu réfléchis, vite, vite, vite. tu ne peux pas prendre exemple sur ton propre accouchement qui avait été un désastre puisqu’on t’avait endormie dès ton arrivée à l’hôpital, si bien que tu ne sais pas. tu ne sais pas ce que tu dois faire. tu as envie d’appeler khris. mais c’est pas me moment de ramener katie ici. alors tu oublies cette idée. mais il faut que tu trouves. vite.

Frankie vint l’aider à se déplacer jusqu’au, chose qu’elle n’aurait pu faire seule et encore maintenant, elle avait énormément de mal. Elle se mordit violemment la lèvre inférieure afin de faire taire ce cri déchirant qui menaçait de résonner entre les murs de son loft. Putain de bordel de merde c’était douloureux ces conneries. Elle respirait fort et son cœur battait en lui exploser de la cage thoracique. Assise, elle se laissa tomber sur le dos. « Frankie, on a pas le temps d’aller jusqu’à l’hosto là » elle s’interrompit un moment afin de réduire au silence un nouveau cri « j’ai pas la force de bouger » putain, dieu qu’elle avait mal. Même la fois où elle était tombée sur une barre les jambes écartées ne lui avait pas autant fait mal. Elle commençait à se demander si elle tiendrait le coup, elle n’était plus certaine de vouloir continuer, un peu trop tard maintenant qu’elle était face au laborieux travail qu’elle se devait d’accomplir. Mais quelle conne, mon dieu quelle conne, pourquoi avait-elle voulu cet enfant ? Quelle idée, mais quelle idée ! Dom avait eu raison, si elle n’était déjà pas prête à se faire déchirer l’utérus, saurait-elle s’occuper de ce gosse ? Merde, ce n’était pas le moment pour ce genre de réflexions, le travail commençait. « Ca commence, tu vas devoir t’y coller »

une fois lera assise sur le canapé, tu essaies de faire un bilan sur la situation. lera est en train d’accoucher et elle ne peut visiblement pas aller jusqu’à l’hôpital. « j’ai pas la force de bouger » ok… bon… comment tu vas te sortir de là ? tu vois à son regard que lera souffre et qu’elle ne peut effectivement pas bouger. tu cours vers ton sac et tu y cherches ton téléphone. tu reviens vers lera. « je vais appeler les pompiers, ils vont venir te chercher. » tu essayes de parler d’une voix calme et posée, pour ne pas effrayer ta meilleure amie plus qu’elle ne semble déjà l’être.
alors que tu es en train de composer le numéro des urgences, lera te fait une nouvelle frayeur. « Ca commence, tu vas devoir t’y coller » tu te stoppes net et essaye de voir si dans un moment de folie, lera est en train de te faire une mauvaise blague. « quoi ? non mais lera, arrête ! tu sais très bien que je peux pas faire ça ! » tu as envie de lui dire : retiens-toi, serre les cuisses jusqu’à ce que les pompiers arrivent ; mais tu sais très bien que c’est impossible. tu prends la main de lera dans la tienne pendant que de l’autre coté tu composes le numéro des urgences, lorsque quelqu’un daigne enfin décrocher en te demandant ce que tu veux, tu débites. « mon amie est en train d’accoucher, elle ne peut pas se déplacer, il faut envoyer quelqu’un ! » tu t’imagines hystérique, mais tu as trop peur de devoir faire accoucher lera…

Les contractions se faisaient de plus en plus régulières et la douleur allant toujours crescendo alors que Frankie se démenait avec le téléphone afin de contacter les pompiers. Lera n’eut aucun mal à capter sa panique et si sa meilleure-amie ne se calmait, ce serait le bordel. D’ailleurs cette dernière ne se sentait pas la force de faire accoucher son ami, ici dans son salon et pourtant elle devrait s’y coller. Miss Vilte lâcha un cri, rejetant la tête en arrière. Bordel, c’était douloureux ces conneries, elle se rendait compte que Frankie avait joué la carte l’euphémisme. Dieu, elle aurait franchement dû passer cette semaine à l’hôpital comme l’on le lui avait proposé mais son advertance pour les hôpitaux l’avait mis dans une situation aussi catastrophique, accoucher sans péridurale, elle ne s’en sentait pas la force, elle faudrait néanmoins qu’elle le fasse. Bordel, cet enfant avait intérêt à l’aimer inconditionnellement et à faire preuve d’une gratitude sans borne à son égard. Un second cri. « Putain Frankie fais quelque chose ! » la réprimanda-t-elle. Elle ferma les yeux un instant, respirant bruyamment. La douleur était telle qu’elle se sentait presque tomber dans les pommes. « C’est pas le moment de paniquer okay ? » reprit-elle avec plus de douceur « ca va bien se passer, tu vas y arriver, j’en suis certaine » l’encouragea-t-elle avec un léger sourire qui céda très vite sa place à une grimace de douleur. Ce n’était que le début.