Ce matin-là, comme tous les autres matins donc, je m’étais habillée après ma douche . J’enfilais un jean slim que je retroussais , un débardeur blanc , lissais mes cheveux et chaussais mes derbies noires. Enfin je pris mon blazer noir, mes lunettes de soleil , mon sac à main et mes clés pour abandonner mon domicile le temps d’une matinée . Dans un premier temps je montais dans ma Cadillac pour me rendre chez l’esthéticienne qui devait s’occuper de mes ongles et de ma peau . J’aimais me rendre à l’institut et me faire chouchouter de longues minutes . Cependant je trouvais toujours ce genre de séances trop courtes. Une fois mes soins pour la peau et ma manucure terminés , je marchais vers le Starbuck juste à quelques pas . Arrivée au café , je m’installais en extérieur à la table où j’avais l’habitude de me poser et commander un caramel macchiato ainsi qu’un énorme muffin noisette et chocolat . Les serveuses, habituées à mes visites matinales, ne prenaient même plus la peine me demander ce que je voulais, elles me l’apportaient presque aussitôt . Regardant dans le vide en buvant une gorgée de ma boisson , je me perdis spontanément dans mes pensées . Souvent, je me replongeais dans les émotions du passé. Que ce soit de la nostalgie, de la rancœur ou encore des regrets… Là , je repensais à mon père et à mon frère restés en Ukraine . Je n’avais que très peu de nouvelles d’eux et au fond ça me désolait profondément . J’avais envie de tout plaquer et de retourner à Odessa , les retrouver … mais ça serait bien trop débile de faire une telle erreur . En sachant que c’est en partie mon père qui ne voulait pas que je devienne ce que je suis aujourd ‘hui . C’est-à-dire une mannequin presque reconnue dans le monde entier , sur la couverture de nombreux magazines . L’orgueil prit finalement le dessus sur ma rancœur et à ce moment même j’avais envie de me montrer plus courageuse et fière que jamais , pour ma mère , celle qui avait toujours eu une foi inconditionnelle en moi , en mes capacités et qui nous avait tristement quittés quelques année plus tôt . « Je serais forte pour toi , мама » pensais-je du plus profond de mon être avant de baisser mon regard perdu vers ce muffin qui me priait de le manger . Je m’exécutais donc et mordais dans le gâteau en savourant chacune des bouchées dans ma bouche . Quel est l’imbécile a avoir dit que toutes les mannequins étaient anorexiques , qu’elles se nourrissaient simplement de fruits ou encore de légumes crus ? Certainement pas moi , étant donné l’appétit d’ogresse dont mes parents m’avait doté . En tout cas ce muffin était totalement succulent . Je le finis aussi vite qu’il avait pu apparaître sur ma table et décidai de me griller une cigarette après ce petit encas . Clope au bec et briquet entre les mains , la flamme qui jaillit consuma le début de ma tige à cancer . Portable dans la main , je surfais sur le net avant de me connecter sur Facebook et voir de quelconques nouveautés . Rien d’extraordinaire apparemment et alors que je tirais une latte sur ma cigarette et levais mes yeux , je crus voir une allure masculine qui m’étais familière entrait dans le café . Je soulevais mes lunettes et observais par la fenêtre qui cela pouvait bien être . Je pus reconnaître au loin un mec du type latino . Ce latino-là je pourrais le reconnaître parmi cents autres . « Tiens , tiens … Domenico Torrès ou le mec que je m’étais tapée , deux ans plus tôt . Il ne me semblait pas l’avoir revu depuis cette ‘aventure’ à Los Angeles » . Un sourire osé apparut discrètement au coin de mes lèvres alors que je me remémorais les détails de notre dernière rencontre . Aussi , je rebaissais les lunettes sur mes yeux après l’avoir entièrement examiné et recommençais à fumer comme si de rien n'était.
Je rentrais dans mon auto en faisant claquer férocement la portière de mon véhicule. J'étais supposé négocier mon emploi du temps avec un certain Jared Fever, un gros client à moi. Avec mon horaire chargé, je devais revoir certaines de visites, les déplacer. La fin du semestre à l'université prenait bientôt fait et il me restait un dernier match de saison à disputer cette semaine: autant dire que j'ignorais où donner de la tête. Ainsi, j'avais appelé Jared pour qu'on s'organise un petit temps mort après mon arrangement cet avant-midi. Bien entendu, tout ne se passa pas comme prévu. Lorsque vint le moment de s'asseoir et de discuter, son téléphone portable sonna et il prit d'interminables minutes à discuter avec ce que je crus comprendre être l'une de ses conquêtes. Quand il raccrocha finalement, ce fut son fils qui vint accaparer toute son attention. Décidément, j'avais l'impression qu'on se foutait de ma gueule. Constatant qu'attendre une minute de plus dans son palace ne me mènerait strictement nulle part, je déclarais forfait et jetais les gants blancs. Je ne me gênais pour lui faire savoir que je ne repasserais pas chez lui tant et aussi longtemps qu'il ne serait pas prêt à me recevoir. Lui et moi n'avions déjà pas une relation des plus amicales: je ne tenais pas à ce que les choses s'empirent encore. Je me demandais pourquoi j'avais d'ailleurs accepté d'entretenir son aménagement paysager. Après tout, il ne manque pas de compagnies d'entretien pour satisfaire ses exigences et il y avait assez de maisons à San Francisco pour pouvoir parvenir à me faire subvenir. Malgré moi, je devais avouer que l'argent m'avait acheté - littéralement. Depuis janvier, avec mon statut d'étudiant, l'argent devenait de plus en plus primordiale. Je pourrais me plaindre autant que je le voulais, Jared avait au moins une qualité: il était généreux avec son portefeuille et c'était tout à son honneur de vouloir embaucher un type comme moi dans une entreprise indépendante.
Remonté par mon tête-à-tête infructueux, je donnais quelques coups sur le volant immobilisé. La menace que j'avais laissé planée au-dessus de la tête de mon employé fonctionnerait peut-être, mais pour l'instant, cela me mettait dans la merde: c'était maintenant que j'avais besoin des arrangements et pas plus tard. Je pris une grande inspiration pour calmer ma colère. Je jetais ensuite un regard à ma montre: j'avais 1 heure et demie avant mon prochain rendez-vous. Cela me laissait le temps de passer prendre un petit quelque chose pour le déjeuner. Malgré l'énorme charge de travail auquelle j'avais eu affaire cet avant-midi, mon estomac ne criait pas famine. J'eus d'abord l'idée de passer à l'appartement pour me faire à manger. La paresse s'empara de moi immédiatement. Je chassai cette idée bien qu'elle aurait été pratique pour que je prenne une douche également. J'étais tout sale. Au moins, je ne sentais pas mauvais, mais c'était carrément de la chance dans mon cas. La douche n'aurait vraiment pas été de refus. Toutefois, la paresse l'emporta. En plus, je me disais que comme j'allais travailler cet après-midi, cela ne valait pas la peine que j'aille me laver. Alors, je fis mentalement défiler les quelques restaurants prêt-à-emporter dans le Nord de la ville qui voudrait m'accepter dans une telle tenue. Starbucks me sembla un choix judicieux et de ce pas, je mis le contact en faisant vrombir le moteur. Il me suffit d'une vingtaine de minutes à zigzaguer dans la ville pour enfin atteindre ma destination. Je me stationnais en parallèle vis-à-vis un parcomètre et y insérais la monnaie nécessaire.
J'allais me commander un sandwich et un café noir que je pensais déguster dans mon auto ne cherchant pas forcément la compagnie. La serveuse m'adressa un drôle de regard en me voyant auquel je répondis par un regard froid. Surprise de ma réaction, elle s'empressa de s'exécuter. Une fois ma commande en main, je sortis à l'extérieur, marchant dans la terrasse extérieure. Alors que j'allais atteindre mon auto, je m'accrochais dans la chaise d'une jeune femme. Je devais être tellement pressé que j'oubliais de regarder où je mettais les pieds. À première vue, il n'y eut aucun dégâts majeur: ni elle ni moi n'avions reçu du café sur nos vêtements et échappé notre nourriture.
- Excusez-moi!
J'allais reprendre la route, mais je croisai son regard auquel je n'avais pas réellement porté attention depuis l'incident. J'ignorais comment elle s'appelait, mais je me souvins d'elle. Los Angeles! Bon sang! Cela fait tellement longtemps....l'époque où je m'enfilais des filles à chaque soir tout en prenant le soin de fuir à l'aube. Cela ne me ressemblait pas du tout. Je ne pensais pas que ce passé allait me rattraper jusqu'à San Francisco.
- Je me trompe en affirmant qu'on se connait? demandai-je dans une incertitude. Après tout, j'étais tellement saoul que je me souvenais pas exactement de tout ce qui s'était passé avec mes aventures par le passé.
En venant au Starbuck je ne m'attendais pas à faire de quelconques rencontres ou retrouvailles . Je m'étais rendue ici dans le seul but de me rassasier et de profitais du beau temps prévue pour toute la journée . Si quelqu'un m'avait dit que je croiserais une vieille rencontre , je n'aurais certainement pas cru cette personne . Et pourtant … Qui donc ai-je croisé ? Domenico Torrès . Un mec rencontré à Los Angeles deux ans plus tôt . Le soir même de notre rencontre nous avions eu une relation ensemble et nous nous étions quitté aussitôt sans vraiment garder de contact par la suite. Apparemment ce charmant jeune homme avait bien marqué ma mémoire puisque plusieurs temps plus tard puisque j'arrivais à me rappeler de lui et même de son nom . C'est étrange n'est-ce pas ? Mais disons que j'ai toujours eu une asse bonne mémoire . Malgré mes nombreuses connaissances masculines , actuelles comme passées , j'ai toujours eu tendance à m'en rappeler . Mémoire sélective ? Peut être bien en tout cas cette nuit à L.A. Fut forte en émotion , croyez-le ou non . Je reconnus Dom avant même qu'il ne m'aperçoive . Il avait l'air assez speed en passant sa commande et buta même dans ma chaise en se précipitant un peu trop . « Excusez-moi » dit-il en vérifiant qu'il n'y ait eu aucun dégat . Je souris assez niaisement en constatant qu'il ne m'avait pas reconnu . « T'es pas obligé de me vouvouyez , tu sais ... » lui répondis-je en riant légèrement . Son regard ,jusque là fuyant , finit par croiser le mien .« Je me trompe en affirmant qu'on se connait? » rétorqua le jeune homme . Un ton d'incertaintude s'émanait de sa voix mais finalement peut être que j'avais pensé trop vite . Mon visage revenait progressivement à Domenico . « Non , non … tu ne te trompes pas ! » affirmais-je en gardant mon regard fixement plongé dans celui du latino . « Los Angeles , il y a deux ans … Ça ne te dit rien ? » poursuivis-je tranquillement . J'approchai la tasse de macchiato à mes lèvres et sirotait ma boisson sans quitter Domenico des yeux . En posant la tasse sur ma table je finis par lui balancer mon nom : « Minnie et toi c'est Domenico , n'est-ce pas ? » Je faisais comme si je me rappelais à peu près de lui alors que je me rappelais très bien de notre rencontre . « Assis-toi … si tu n'es pas trop pressé . » lui proposai-je amicalement en sortant un nouvelle clope de mon paquet . J'allumais cette dernière et recrachais la fumée en pianotant les doigts de ma main libre sur le rebord de la table . Mon regard se pencha légèrement sur les quelques mégots qui logeaient le cendrier avant de me refocaliser sur le latino .
Je ne savais pas si je devais attribuer cette rencontre au destin. Ces derniers temps, il me semblait que je retrouvais des gens que je n'avais pu vu depuis longtemps. Je me demandais s'il n'y avait pas quelqu'un ou quelque chose qui manigançait tout ça. Quoiqu'il en soit, quelle ne fut pas ma surprise de tomber sur cette conquête - si on peut l'appeler comme ça. C'était pratiquement embarrassant de se revoir à vrai dire. Elle avait connu l'ancien Dom, celui qui craignait de s'attacher à qui que ce soit, qui enchaînait des soirées sans lendemain. Je n'étais pas très fier d'avoir agi de la sorte, car ces agissements n'avaient jamais vraiment correspondu à ma personnalité. J'aurais pu mettre cela sur le compte de la jeunesse, mais cela remontait à deux ans uniquement. J'aurais pu accuser mes potes de la fac de m'avoir influencé, mais la vérité, c'était que j'étais difficilement influençable. À Los Angeles, j'avais simplement laissé libre cours à mes pulsions sexuelles sans vraiment me soucier si j'allais blesser quelqu'un. Car oui, il m'était déjà arrivé de me glisser dans le lit d'une fille avec laquelle je m'entendais bien et qui en pinçait pour moi. Inutile de dire qu'après la nuit, quand les masques étaient tombés, notre relation s'arrêtait net pour cause de souffrances et illusions. Encore une fois, ce scénario me semblait le plus facile et le plus sûr. En même temps, je me disais que la plupart des filles savaient ce qu'elles faisaient et qu'elles savaient à quoi s'attendre. C'était un jeu de séduction et ce dit jeu prenait fin le lendemain matin. Il n'y avait pas de partie remise. En voyant la façon dont elle m'abordait, je crus comprendre que la brunette l'avait compris.
Même si j'étais à peu près certain de la connaître, je lui avais tout de même demandé si on se connaissait. Avec un sourire plutôt attendri dissimulé derrière sa tasse, elle me rappela Los Angeles. Alors, il n'y avait plus aucun doute. Je me rappelais d'elle en termes vagues. J'avais eu plusieurs conquêtes avant elle - ce qui me faisait paraître pour un salaud de première - et je ne me souvenais pas exactement du déroulement complet de notre soirée ensemble bien que je me doutais de la façon dont elle avait terminé. En fait, si je me rappelais d'elle plus que d'une autre, c'était probablement parce que je me souvenais que mes potes m'avaient lancé le défi d'aller la séduire. Aucun d'eux n'avait osé l'approcher, mais ils la dévoraient tous des yeux. D'un naturel courageux, j'avais accepté. Et après, le brouillard. Que faisait-elle à San Francisco d'ailleurs? Je le saurais peut-être si je me souvenais un minimum d'informations personnelles la concernant. Bref, lorsqu'elle prononça son prénom, j'opinais de la tête tout en enregistrant cette information dans ma mémoire. Du même coup, je réalisais qu'elle se souvenait de mon prénom. Cela me rendit mal à l'aise bien que je préférais ne pas lui montrer.
- Ouais, Domenico, acquiesçai-je avec mon accent espagnol qui ne m'avait jamais quitté, même avec ma déportation.
Elle m'invita ensuite à m'asseoir. Honnêtement, je ne savais pas si je préférais retourner dans ma bagnole et déguster mon sandwich en tête-à-tête avec moi-même ou m'asseoir et entretenir une conversation étrange et inconfortable. Je soupirai en me disant que je n'avais rien de mieux à faire et si jamais je n'en pouvais plus, je pourrais toujours partir. Ce n'était pas exclus. Je pris alors place à ses côtés.
- Ça te dérangerait d'éteindre ta clope? demandai-je sans grande délicatesse. Ça me fout la nausée.
Il y a certaines rencontres qui se font par hasard,un jour où on s'y attend le moins . Ces rencontres peuvent bonnes ou au contraire désagréables ou tout simplement surprenantes … Celle que je venais de faire pouvais parfaitement être classée dans la catégorie des rencontres surprenantes . C'était deux ans plus tôt que j'avais rencontré Domenico , à Los Angeles . Si je m'étais rendue dans cette ville , c'était pour un défilé . Après ce défilé, quelques amis mannequins et moi décidions de nous rendre dans un bar ou une boîte de nuit , je ne me rappelle plus exactement où nous contions nous amuser comme de vrais adolescents. Etant de nature très fêtarde , je ne refusais jamais les virées nocturnes entre potes . D'ailleurs durant ce genre de soirée j'ai toujours tendance à boire comme un trou et fumer comme un véritable pompier . Déjà qu'au quotidien je fumais pas mal , en soirée c'était peut être le double . Enfin bref …. Durant cette soirée un mec est venu m'abordé , ce mec en question était Domenico . On savait déjà comment la soirée allait finir : dans le pieu et au réveil , nous ferions comme si de rien était . J'avais vu tout juste . Le matin même nous nous étions mutuellement mis d'accord pour ne pas nous prendre la tête et nous contenter d'une seule aventure d'un soir . De toute façon ce n'était pas compliqué la plupart de mes aventures d'un soir je ne les revoyais quasiment jamais . Cependant le hasard fit que Dom et moi nous retrouvions ce jour-là . Lorsqu'il me vit , il me demanda incertain si nous nous connaissions , je lui répondis que oui en lui remémorant briévement le contexte de cette première rencontre . Los Angeles , il y a deux ans . Et si ça restait encore un peu flou pour ce jeune homme , je lui rappelais mon prénom . Je ne pouvais pas faire plus précis donc j'espérais que ces détails pourraient mieux l'aider .Effectivement ça a eu l'air d'un peu plus éclairer le latino à mon sujet . Il me confirma d'ailleurs que son prénom était bien Domenico , avec son petit accent espagnol muy caliente. J'étais en train de fumer quand je lui proposais de se joindre à ma table . Domenico s'assit alors à mes côtés et me balança assez sèchement : « Ça te dérangerait d'éteindre ta clope? Ça me fout la nausée. » . Je lui rétorquais alors avec autant de non-délicatesse : « J'éteindrai ma clope quand tu me le demanderas un peu plus poliment … » Je tirais une nouvelle latte , lui souriais d'un air faussement forcé et passais mécaniquement mes doigts dans mes cheveux . Mon regard se posa ensuite sur l'avenue où passaient de nombreuses voitures avant de me retournais ver Domenico . J'attendais de sa part qu'il s'excuse du ton qu'il avait employé plus tôt . Ça ne m'avait pas vraiment plu et je le lui avait fait comprendre . Je n'étais pas vraiment du genre à me soumettre à des ordres demandé aussi rudement .
- Désolé si je t'ai semblé rude, repris-je sur un ton plus amical, mais j'ai juste eu un avant-midi de merde et la cigarette me répugne vraiment.
Elle haussa les sourcils, comme si elle attendait que je lui déballe ce qui s'était passé un peu plus tôt.
- Je t'épargne les détails, déclarai-je sans réelle envie de m'ouvrir sur quelque chose que j'essayais plutôt d'oublier.
Je me rassoyais plus confortablement sur ma chaise en l'approchant de la table. J'en profitai pour prendre une gorgée de mon café noir. Avec le stress des examens, la pression de réussir et mon boulot qui n'avait rien d'évident ces derniers temps, je n'étais probablement pas dans le meilleur état d'esprit pour affronter une situation du genre. Du genre caméléon, je pouvais me fondre dans n'importe quel contexte aisément. Là, j'avais l'air d'être levé du pied gauche. Je lui faisais déjà subir ma mauvaise humeur alors que je n'avais prononcé que quelques mots. Minnie n'avait pas à subir ça: surtout vu les termes dans lesquels nous nous étions connus. Elle n'était pas obligée de me tolérer et pouvais toujours me renvoyer aller manger dans ma voiture; rien ne l'empêchait. Si j'avais été de mauvaise foi, j'aurais très bien lui retirer sa clope du bec et partir tel un effronté. Cela m'aurait encore évité de socialiser et j'aurais pu rester dans ma bulle comme je l'aimais tant. J'aurais agis comme un imbécile et aurais espéré ne pas la recroiser de nouveau dans San Francisco. Sauf qu'elle ne méritait pas ça et que je venais tout juste de m'installer. Je considérais qu'on méritait une chance de voir si la conversation irait bon train ou nous mènerait nulle part. Je pris donc une grande respiration, une seconde longue gorgée pour retrouver un peu plus de jovialité. Je cherchais quelque chose pour engager la conversation, mais rien de naturel ne vint à l'esprit. J'ouvris discrètement la bouche en espérant que les mots me viendraient de cette façon, mais rien n'y fit. Plutôt, j'échappai un petit rire gêné.
- Excuse-moi, mais je n'ai pas l'habitude de ces situations, expliquai-je un petit sourire au coin des lèvres. Je devrais sûrement te dire «Alors, que s'est-il passé depuis notre rencontre?» mais comme je n'ai que de vagues souvenirs de toi, je crois que cette question serait un peu désuète.
Si seulement ce n'était pas arrivé maintenant! J'aurais géré tout cela beaucoup mieux. Rencontrer quelqu'un qu'on n'était plus sensé revoir, c'était...étrange. Surtout quand nous avons changé. Quelle image Minnie avait-elle de moi? Elle pouvait s'imaginer que j'étais le même mec de Los Angeles qui s'enfile des filles chaque soir et qui se la joue Casanova alors que je sais que ça ne me ressemble plus? Et à l'inverse peut-être que ma première idée que je m'étais fait d'elle est aujourd'hui fausse? Je commençais à comprendre pourquoi les one night devait rester des one night
« Désolé si je t'ai semblé rude,mais j'ai juste eu un avant-midi de merde et la cigarette me répugne vraiment. » finit-il par s'excuser après m'avoir demander assez sèchement d'arrêter de fumer . Il avait intêret de se faire excuser ! Et je fus satisfaite d'entre ses mots sortir de sa bouche . Je lui sourit donc gentillement cette fois ci et fumais une dernière latte de ma cigarette avant de laisser le mégot de cette dernière dans le cendrier . Je luis fis amicalement le signe de se joindre à ma table afin de manger l'encas qu'il venait de s'acheter . Je l'écoutais attentivement parler et entendis qu'il avait eu une matinée merdique . Pas du genre à me moquer des malheurs des autres , je fus intriguée de savoir ce qui avait pu se passer ce matin-là pour que Domenico soit d'une humeur aussi … fracassante . Je le regardais donc d'un air interrogateur et soulevais intrigué un sourcil afin d'insister sur mon envie d'en savoir plus . Malheureusement le jeune homme n'avait pas spécialement envie de papotter à propos de ce sujet et me le fis comprendre avec délicatesse : « Je t'épargne les détails » me déclara-t-il . Je n'allais pas faire ma garce et allait retenir cette fois ci ma trop grande curiosité . C'était sa vie après tout et je n'avais pas le droit de m'y immiscer s'il ne voulait pas me la dévoiler . Je gardais donc a langue dans ma poche un certain moment . Le silence s'installa petit à petit entre nous . Je me contentais de lui lancer des regards simples et sans aucune ambiguité . Que doit-on dire à un mec que l'on a pas vu depuis aussi longtemps? me questionnais-je intérieurement dans le but de briser ce silence de plus en plus pesant . Je baissais le regard passant une main dans mes cheveux, gênée . Gênée par cette situation plus qu'embarrassante et par mon inhabituelle timidité . Enfin Dom se décida à ouvrir la discussion , du moins à dire quelque chose qui interrompait l'absence de bruit qui s'était mise en place : « Excuse-moi, mais je n'ai pas l'habitude de ces situations .Je devrais sûrement te dire «Alors, que s'est-il passé depuis notre rencontre?» mais comme je n'ai que de vagues souvenirs de toi, je crois que cette question serait un peu désuète. » me confessa ce charmant latino avec un léger rire . A mon tour je ris légèrement avant de lui rendre la réplique : « T'inquiètes c'est la même pour moi x) En dehors de cette soirée je me suis rendue compte que je ne savais rien de toi à part ton prénom . » Je souris en coin avant de finir ma boisson et de me recentrer vers Dom : « Alors dis-moi Domenico … T'as quel âge ? Tu fais quoi dans la vie ? Parle-moi un peu de toi , qu'on apprenne à se connaître en dehors des draps d'un lit . » lui dis-je avec une pointe d'humour .
Quand on y réfléchissait, que pouvait-il rester de cette nuit torride éphémère? À quel pourcentage pouvait-on évaluer les chances qu'on puisse faire évoluer notre lien? On s'entend: nous étions tous les deux sous l'effet de l'alcool ce qui a influencé passablement notre comportement habituel et notre jugement. Qu'est-ce que Minnie connaissait du vrai Domenico en fait sinon que ses aptitudes au lit? Qu'en était-il resté de cette aventure à Los Angeles? Vrai, bien peu arrive à me déchiffrer et arrive à percer ma carapace - cela va s'en dire. Or, je me demandais comment elle et moi pourrions en arriver à devenir de bons amis. Je devais laisser la chance au coureur, mais d'un autre côté, maintenant sobre et visiblement de bonne humeur, y allait-il avoir une connexion entre elle et moi? Une connexion assez forte pour que j'aie envie de la revoir et vice et versa. Nos allions nous faire face avec nos vrais caractères, nos réels états d'âme et nos réactions propres à n'importe quelle évènement. Peut-être réaliserait-elle que je suis un homme fermé, irritable facilement et peu bavard et qu'elle préféra garder le souvenir de moi, ce type jovial et dragueur qui l'avait conduit dans son lit? Peut-être réaliserais-je qu'elle n'est qu'une égocentrique, nymphomane qui n'a qu'envie de me retirer les vêtements? Peut-être, tout simplement, que nos caractères propres ne pourraient se tolérer l'un et l'autre. Toutefois, tout cela restait dans le domaine du probable, de la probabilité. Il valait mieux que je reste assis, à passer mon heure de dîner avec elle pour en tirer mes propres conclusions. Je ne pourrais le juger qu'à la fin de notre entretien, et pas, avant.
Ainsi, plutôt incertain, j'avais engagé la conversation en étant honnête, lui indiquant la délicate position dans laquelle je me trouvais avec elle et comment cette dite position me rendait inconfortable. Bien que ma nervosité n'était pas quelque chose de physiquement visible, il en demeurait qu'elle se sentait un peu. Contrairement à moi, elle acquiesça à mes propos, paraissant très calme et en contrôle de la situation. La pensée qu'elle avait fait face à genre de situations fréquemment me passa à l'esprit. J'étais peut-être tombée sur une croqueuse d'hommes tout compte fait. Ou elle ne réalisait pas ce qui se passait. Cependant, j'en doutais fortement. Reprenant la balle au bond, elle me proposa de me présenter. Je n'étais donc pas le seul qui avait oublié bien des détails de cette soirée. Je haussai les épaules, fixai le ciel bleu en réfléchissant quelques secondes et enchaînai.
- Je suis un jeune homme de 21 ans, commençai-je en reposant mon regard à nouveau sur elle, qui étudie à l'université de San Francisco en Management, mais qui travaille comme jardinier pour financer son loyer et sa bagnole. Je suis un grand sportif dans l'âme: je fais partie de l'équipe de football de l'université justement. Je parle l'Anglais et l'Espagnol - langue que je préfère de loin à celle de Shakespeare.
J'eus un sourire et m'interrompis.
- Wow! Je sonne vraiment comme une annonce d'un mec désespéré dans une agence de rencontre!
J'eus un bref rire. Je l'achevai avec une bouchée dans mon sandwich.
- Toi, c'est plus jeune demoiselle en chaleur ou «Miss Indépendante?» demandai-je avec humour.
Face à moi se trouvait Domenico . Un latino , terriblement sexy et bon au pieu , je l'avoue. Voilà tout ce dont je sais à propos de ce personnage rencontré il y a quelques temps à LA . En dehors de ces quelques informations , futiles il faut l'admettre , je ne savais rien de lui . Il allait donc nous être difficile d'échanger et de communiquer ensemble vu le peu de choses que nous sachions l'un de l'autre . Pourtant j'avais envie de le connaître . Envie de savoir qui se cacher derrière l'étalon de Los Angeles , derrière le dragueur et baratineur de ce soir-là . Il avait une carrure assez imposante à côté de mon gabarit fin de mannequin et cette carrure le faisait paraître comme un homme sur de lui et extrêmement confiant . En faite ma perception de lui était totalement fausse et mon jugement , à l'opposé de sa vraie personnalité . Lorsque Domenico commença à parler , c'était un tout autre homme . Une homme assez timide et mal à l'aise . Je voulais donc tenter de décontracter l'atmosphère comme je le pouvais en relançant la discussion avec un peu d'humour . Mon caractère bavard et curieux fit donc apparition et laissa doucement mon intimidation s'estomper . Avec une grande attention j'écoutais Domenico se présenter . Plus je l'écoutais , plus j'avais envie de rire . La façon dont il s'exprimer était terriblement drôle . On croirait qu'il se présente lors d'un speed dating . Sa présentation est drôle certes , mais efficace quand même car désormais j'en savais plus à propos de lui . « Wow! Je sonne vraiment comme une annonce d'un mec désespéré dans une agence de rencontre! » commenta-t-il a son propre sujet en riant briévement . Je l'accompagnais dans son léger fou rire avant de boire une nouvelle gorgée de mon macchiato . « En effet ! Ça sonnait pas mal comme ça . ^^ » ajoutai-je toujours en riant un peu .« Toi, c'est plus jeune demoiselle en chaleur ou «Miss Indépendante?» » interrogea Domenico . Je soulevais la mèche de cheveux qui tombait devant mes yeux et fixais le jeune homme . « Demoiselle en chaleur ? Hmmm non … Je ne saute pas tout ce qui bouge ! » articulai-je avant de poursuivre en souriant .« Miss Independent ? Oui , j'en suis une si cela signifie être une femme qui aime plaire et draguer pour se divertir . Bon après je ne dis pas que je suis une sainte , oui j'aime prendre mon pied mais c'est pas pour autant que je suis en chaleur , jeune homme ! » . L'écoute de certains curieux avait été attisée par notre conversation et sans aucune véritable discrétion , je pouvais les voir tendre l'oreille . « Puis il me semble quand même qu'à Los Angeles tu paraissais pas mal en chaleur , toi par contre ! » lui avouais-je en clignant de l'oeil .
L'être humain est complexe. À mon sens, il ne peut être décrit en quelques mots. De ce fait, il est impossible de lui coller une étiquette spécifique. Ainsi, outre quelques traits caractères communs substantiels, notre humanité est disparate dans son singulier, mais homogène dans son tout. Ceci veut dire que je ne pouvais être réduit à une simple description de ma personne. En effet, chaque humain comporte plusieurs facettes, comme nous le savons. Suivant la même règle que mon espèce, j'étais susceptible d'être le «Domenico normal», à la fois mystérieux, protecteur, analytique et rationnel. Or, il m'arrivait d'être ce «Domenico frustré» qui était batailleur, violent et impulsif ou «Domenico tourmenté» en proie d'émotions trop fortes, de désespoir et d'amertume. Je n'étais pas un robot programmé qui avait pour répertoire un certain nombre fixe d'émotions et ce, peu importe la situation dans laquelle j'étais confronté. Non, j'étais un humain à part entière, pris entre son côté homme et animal. Ma présentation s'était en revanche plutôt déroulé sous le couvert du robot plutôt que de l'être humain. J'imaginais que Minnie l'avait compris. Pour les premiers abords, c'était la façon normale de procéder. Si elle appréciait la façade, elle serait peut-être plus apte à apprécier les autres Domenico - Minnie ayant d'ailleurs assister à un autre de mes visages, une facette en présence réduite, celle du tombeur de ses dames. Elle était toujours assise sur sa chaise. C'était un bon signe en tout cas.
Alors, sur une note un peu humoristique - malgré moi - , je m'étais présenté plus en détails. Cela sembla d'ailleurs amuser Minnie qui ne put retenir un sourire. Elle ne se gênait pas d'appuyer mes propos tout en faisant entendre son rire cristallin. C'était une belle femme. Je me demandais comment j'avais réussi à la faire atterrir dans mon lit... Bref, elle y alla d'un exposé sur sa personne en évoquant qu'elle aimait se laisser prendre dans des histoires d'un soir de temps à l'autre, mais qu'elle n'était pas une nympho. Je l'écoutais en hochant la tête, comme si j'approuvais tout ce qu'elle disait. Rapidement, elle me renvoya la balle au bond en faisant insinuation que j'étais celui qui l'avait amené dans ses filets à Los Angeles, deux ans auparavant. Je ne pus contenus un sourire qui montra mes dents blanches. J'assumais ce que j'avais fait même si cela allait contre mes valeurs et ce que j'étais. J'essayais le plus possible de ne pas avoir trop de regrets dans la vie.
- Je vais rendre à César, ce qui est à César, reconnus-je, j'étais définitivement en chaleur. Tu as tout de même été réceptive.