Clyde & Apple ♥
-Non non non noooon! Perchée sur mes talons de bien 14 centimètres, j'essayais, en vain, d'atteindre l'arrêt de bus avant que celui-ci ne s'éloigne. Je trottinais du mieux que je pouvais , le plus vite possible, ma jupe au vent, tenant mon sac à main contre ma hanche, faisant de mon mieux pour garder ma dignité. Le peu qu'il me restait en tout cas. Mon chignon s'était défait et mes cheveux tombaient dans mon dos, envoyant deux-trois mèches dans mon visage, sur mes yeux et dans ma bouche. C'est vrai que c'est beaucoup plus marrant de risquer de se prendre un poteau... Tant qu'on y est, autant paraître vraiment idiote! En plus, je devais faire attention à mon bras, pour ne pas avoir plus mal que ce que je ressentais déjà. J'avais l'habitude des tatouages, mais celui-ci était ma première phrase et ça faisait drôlement plus mal qu'un simple petit noeud sur le doigt. Je devais tirer une sacrée tête d'ailleurs, car même les grands-mères se retournaient pour me regarder, inquiètes. En même temps, je sortais tout juste du tatoueur, alors c'était encore à vif. Oui, j'avais séché deux heures de cours. Mais ce n'était que deux petites heures après tout...
-Stoooop!Je levais mon bras endolorit dans l'optique d'attirer l'attention du chauffeur, mais j'aurais très bien pu siffler que ça n'aurait strictement rien changé. C'est ainsi que, essoufflée comme un chacal, je vis le bus s'éloigner sans moi.
-Boubentchiki ! Bytchara ! Littéralement, couille molle et bouseux. J'adore le russe! Jurant en russe, je donnais un coup de pied dans un paquet de cigarettes vide, par terre, manquant de tomber. C'est de justesse que je me rattrapais à la barre de l'abri-bus. Jetant un coup d'oeil autour de moi pour vérifier que personne ne m'avait vu, je me redressais. Je savais bien que j'aurais dû prévoir une plus grosse marge. Et mettre mes Supra violettes au lieu de ces Louboutin interminablement hautes. Je m'assis sur un banc, posais mon sac prune à côté de moi et entrepris d'ôter mon blazer bleu foncé. Il faisait un temps magnifique aujourd'hui et faire du sport en talons n'était pas spécialement rafraîchissant. Délicatement, je tirais une manche, puis l'autre. « Ouïe! ». Bon, il allait me falloir un peu de temps pour que la douleur s'estompe.
Le soleil était juste en face de moi, envoyant tous ses rayons dans ma figure. J'adorais le soleil. Sans lui, je ne pourrais tout simplement pas vivre! Néanmoins, piochant dans mon sac, j'en sortis mes lunettes pilotes que j'installais sur mon nez avant de tirer mon portable hors de la petite poche intérieure qui lui était réservée dans mon sac. D'un geste rapide, je pianotais sur l'écran puis envoyais le message en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire. Je suis une championne dans l'écriture des SMS. Après tout, j'en envoyais tellement que j'étais bien entraînée maintenant.
« Choupet, j'ai loupé le bus alors je serais un peu en retard. J'apporte une surprise pour me faire pardonner! ». Sur ces mots, je tournais la tête derrière moi à la recherche d'un endroit où je pourrais trouver cette fameuse surprise. J'aperçus alors une boulangerie-pâtisserie spécialisée dans les recettes françaises. S'en était trop, je ne pouvais pas résister à l'appel de ses petites choses colorées tellement alléchantes. Les pâtisseries françaises était un réel pêché-mignon. Et puis ce n'est pas Clyde qui refusera d'en partager avec moi. Il n'a pas intérêt en tout cas.
Clyde, c'est le sale abrutis que je ne peux tout simplement pas rayer de ma vie. Je le connais depuis que je suis toute petite, mais c'est depuis que je suis à San Francisco que nous sommes devenus vraiment proches. Quand je suis avec lui, je peux me transformer en une véritable gamine incontrôlable. Et en plus de m'amuser comme une folle, je peux tout simplement tout lui dire, parler de tout avec lui. En fait, quand je suis avec lui, je peux être moi tout simplement. Je n'ai pas à faire attention à ce que je dis, ce que je fais, ce que je fais, à comment je mange, à comment je me tiens. Clyde, c'est tout simplement mon meilleur ami.
La petite clochette au-dessus de la porte sonna. Son tintement retentit dans la pièce dorée et blanche, décorée de voûtes et de formes légères, simple et aérée. Au milieu de la petite salle se trouvait une fontaine, hors service, remplie de petits chocolats dans leur papier brillant et coloré, Tout autour, près de la vitrine, un présentoir exposait tartelettes, tartes et autres gâteaux coupés en parts égales d'un côté, beignets, petits pains au chocolat et croissants de l'autre. Au fond de la pièce, le comptoir vitré protégeait toutes les autres gourmandises, tel que des choux à la crème ou des mille feuilles, sous des vitres étincelantes. Des petites assiettes étaient posées un peu partout, pleines de bonbons, dragées ou chocolats. Une douce petite mélodie venait de l'arrière du magasin. Je ne mis pas longtemps à faire mon choix. Je n'avais pas pu m'empêcher de prendre un peu de tout. Je n'y peux rien, je suis comme ça.
Chargée de trois paquets aux couleurs pastels et de mon sac, je sortais de la pâtisserie au moment où le bus arrivait. Pas de sprint cette fois-ci. Assise seule près de la fenêtre, je regardais le paysage défiler. Observer le visage des gens, les différentes boutiques, les arbres, les maisons, les voitures, c'était vachement intéressant. On découvre vraiment beaucoup de choses. Et on rit aussi. Tout seul, après avoir assisté à la chute idiote d'un passant. Sauf que quand on se rend compte que l'on a ri tout haut et que tous les passagers du bus vous regardent, vous vous sentez encore plus idiot que ce pauvre jeune homme qui essaie à présent de faire comme si de rien était. Oui, la honte m'aime bien en général, au point de me suivre partout. Mais je m'en fiche, j'ai l'habitude!
Je sortais précipitamment de mes rêveries afin de ne pas louper mon arrêt de bus. Croker Amazone. J'avais décidé d'aller rendre visite à mon meilleur ami pour apporter mon fruit à son changement d'idées. Il fallait qu'il sorte. Il fallait qu'il se rende compte que même après un grave accident, la vie continue. C'est pourquoi, une fois que la porte de chez lui s'ouvrit, je pris seulement le temps de lui plaquer un gros bisou (un peu baveux mais ça, c'est affectif) sur la joue, avant de le kidnapper. Sans lui dire où je l'amenais, c'est plus marrant. Mes trois paquets de pâtisseries posées sur ses genoux, je pris le chemin du zoo, tout en ignorant ses petites protestations. C'est moi qui décide, un point c'est tout!