« Excusez-moi jeune homme, comment vous appelez-vous? »

Ce fut la première phrase qui me tira de mes journées ennuyantes à servir des coca-cola ou des cafés aux clients de ce stupide bar. J’étais justement en train de régler une note, lorsque deux personnes m’accostèrent en me posant cette première question. Perplexe au début, j’avais détaillé rapidement des yeux comment elles se présentaient : plutôt bien habillées, l’air sûr d’elles… Toujours d’un air intrigué, je finis par leur répondre. Luca Adriano Portelli. Ouais, je vous l’accorde, ça fait vraiment le gros italien de pure race. Bah oui, ça c’était moi, né à Milan et ayant vécu toute ma vie ici. J’avais arrêté les études et je me consacrais qu’à des petits boulots, et en ce moment je travaillais dans un bar au centre ville. Les études, ce n’était pas trop mon truc, je me forçais pas à bosser même si tout le monde me répétait que j’avais des capacités et que j’étais loin d’être con. Au diable, rien à foutre, moi je voulais entrer dans la vie active au plus vite. Heureusement que ma meilleure amie me comprenait. Ouais, cette Ambre. Cette jolie brune qui me suivait depuis que j’étais né presque. Non je déconne, depuis la maternelle. Hé, 22 ans quand même, ce n’était pas rien. Ah la mignonne, elle était amoureuse de moi quand on avait 4 ans. Nous avions suivis la même scolarité jusqu’à que je quitte ce milieu déplaisant : maternelle, école, collège et moitié de lycée. C’était ma confidente, je la tenais vraiment dans mon cœur même si on a l’habitude de se lancer des pics à longueur de journée, on s’aime bien.

Bref, si je revenais à ce que j’étais en train d’expliquer. J’avais donc répondu à cette fameuse question, mais je n’en étais pas resté là. « Et vous? » avais-je répliqué. Ouais, ça c’est tout moi, je n’ai pas peur de me faire remarquer, toujours franc et ne jamais tourner autour du pot. Elles me répondirent du tac au tac, et sans passer par quatre chemin non plus. Apparemment, elles m’avaient remarqué depuis un bout de temps et elles me proposaient un poste en tant que… mannequin. Ouais, la classe pas vrai? « Vous avez la carrure, vous avez un joli visage… Si vous êtes d’accord, on est prêt à vous prendre. » Et attendez, pas pour n’importe quelle marque : Gucci. J’acceptais tout de suite. Entre serveur et mannequin? Vous auriez fait comme moi.

Voilà le pourquoi du comment je suis mannequin au jour d’aujourd’hui : une coïncidence, une chance même. Ca ne court pas les rues quelqu’un qui vient vous voir pour vous proposer ce genre de job. En plus, ça flattait carrément mon égo, que demander de plus? Ambre fut également contente pour moi, puisqu’elle travaillait dans le milieu aussi. Les deux meilleurs amis mannequins. J’avais enfin la gloire dont pas mal de gens rêvaient. La belle vie, rien à redire.


Il y a deux semaines, j’avais besoin d’Ambre. A chaque fois que j’avais un problème, je l’appelais, c’était elle la première et personne d’autre. J’attrapais donc mon téléphone portable et je composais son numéro : rien, je ne tombais même pas sur le répondeur. Je décidais donc d’aller voir sur son lieu de travail, elle n’y était pas non plus. Je regardais sur Facebook pour voir si elle avait publié une quelconque information : rien, niet, nothing. Les jours passaient et je n’avais aucune nouvelle d’elle, et je ne pouvais pas la joindre non plus. Il fallait avouer, même si je suis très fier, que tout cela eut un effet néfaste sur mon humeur. Je pétais plus rapidement les plombs, plus souvent, et j’étais comme perdu. Ouais, elle me manquait cette idiote et le fait de ne pas m’avoir dit où elle était m’énervait au plus haut point. Mais en fin de compte, l’inquiétude remportait tout. J’étais préoccupé, et j’avais peur qu’il lui soit arrivé quelque chose. C’est alors que l’idée d’aller voir son père me vint à l’esprit. Il devait savoir quelque chose, j’en étais sûr. Et bien entendu, je ne m’étais pas trompé : « Elle est partie aux Etats-Unis, à San Francisco. » WTF? Qu’est-ce qu’elle était allé foutre avec les Américains? Sans rajouter quoi que ce soit, je fonçais chez moi : il fallait que j’aille la retrouver. L’idée de vivre sans elle, et de ne plus la revoir m’était insupportable. J’achetais donc un billet d’avion, et j’empilais mes habits dans plusieurs valises. Je confiais ensuite mon appartement à ma voisine et j’informais à mon boulot de mon départ : heureusement, le directeur me fit une mutation pour que j’aille travailler pour Gucci mais à San Francisco. San Francisco… Sérieux, quelle idiote.