Tout le monde part un jour...
Au revoir Evelyn.

Je n'ai pas assisté à beaucoup d'enterrements dans ma vie. Je savais que normalement on devait se rendre à l’Église et écouter les gens faire un speech sur la mort et tout ça mais dans ses dernières volontés, ma sœur avait souhaité sauter l'étape « Curé » pour passer directement à la crémation et ensuite disperser les cendres avec les gens proches d'elle. Ou ceux qui avaient marqué sa vie. Ne connaissant pas ceux présents dans son entourage, j'avais laissé papa le faire vu qu'ils avaient travaillé en longue collaboration. Certes l'entente n'avait pas toujours été au beau fixe mais il a été celui qui a été le plus touché, comme Sonic, parce qu'ils sont restés prêt d'elle jusqu'à la fin. Quand il avait du se rendre auprès d'Imogen, il m'a doucement donné la relève pour que je le maintienne au courant de son état et j'avais longuement parlé avec elle. Il est évident qu'elle souffrait beaucoup trop pour survivre mais mourir si jeune restait tragique quand on y pense.

Debout devant mon miroir, j'arrangeai une dernière fois mes cheveux avant de me tourner vers Mélodie et Stuart qui étaient assis sur le canapé et ne comprenaient pas. La fillette n'était pas encore assez âgée pour savoir de quoi il retournait mais Stuart, très intelligent avait vite fait le rapport entre la naissance d'Amélia et le non retour de sa mère. Sonic étant trop atteint n'avait pu lui expliquer mais nous avions eu rapide de le faire. Il a compris et je me sentais mal pour le petit. Resserrant les pans de sa chemise en lin, je le recoiffais mais il se débattit. Pas de noir. Des couleurs vives, joyeuses. Je voulais la même pour mon enterrement. Je déteste tout ce qui est sombre et visiblement, je tenais d'elle. Quand l'heure fut d'y aller, je leur donnais la fleur avant de me diriger vers mon père qui avait les yeux rougis à force de pleurer. « Ça va aller, lui murmurai-je avant de le prendre dans mes bras, c'est ce qu'elle voulait. » Avoir dix sept ans et devoir dire ça. C'était horrible. Je devais rester rationnelle, détachée car j'étais celle qui la connaissait le moins. Je venais tout juste d'arriver et j'avais mes deux sœurs qui m'abandonnaient chacune à leur manière. Je finis par me détacher de lui, le regardant avec un petit sourire timide avant de prendre sa main. Que la famille proche pour la crémation. Le reste se passait sur la plage. Je ne savais pas qu'elle aimait l'océan à vrai dire mais c'était stipulé dans ses dernières volontés, dictées à mon père qu'elle voulait un enterrement dans un lieu public et de préférence vaste. Après mûres réflexions, tous les trois, nous étions partis sur la thèse de la plage, qu'il y aurait certes un prêtre et que chacun lui dirait adieu à sa manière. Je n'avais pas préparer de speech pour ma part, juste une bougie avec une fleur et c'est bon. Je ne savais pas ce que faisaient les autres. Je ne me suis pas réunie avec eux, passant mon temps entre chez Lunhabee et Sonic.

Une fois dans la voiture, je pris Mélodie sur les genoux qui tenait sa fleur elle aussi, ne comprenant pas où on l'emmenait. La petite réclamait sa mère trop souvent et mon père était dépassé par les événements. Nous ne les prenions cependant pas pour la crémation. Seuls mon père, Imogen, Sonic et Robbyn s'y rendaient, je restais avec les enfants. Je ne voulais pas voir ça. Alors, je sortis de la voiture, retenant Stuart qui lui voulait voir avant de saluer les autres pour m'adosser contre le capot et m'allumer une clope, au soleil. Elle partait sur un beau soleil. Était-ce un signe ? Je ne sais pas mais quoi qu'il en soit, elle avait du beau temps, ce qui était chouette. Enfin, je me comprenais quoi. Une demi-heure plus tard, après avoir emmené les enfants quarante fois aux toilettes, je les vis tous sortir et mon père portait l'urne. Je n'osais regarder les autres alors, je repris les enfants bien que le polisson voulu aller avec son père. « Tu rejoindras ton père après, lui murmurai-je avant de l'attacher dans la voiture pour reprendre place aux côtés de mon père qui restait silencieux. » Je n'osais dire quelque chose si ce n'est lui prendre la main et ne pas relever la tête. Le trajet se fit dans une atmosphère pensante, lourde et semblait interminable.

Une fois sur la jetée, je repris les enfants, leur donnant à chacun leurs bougies et leurs fleurs pour voir qu'elle connaissait quand même du monde. Mélodie qui se mit soudain à comprendre qu'elle ne reverrait plus sa maman, commença à pleurer et je la portais jusqu'à la plage tandis que mon père ouvrait la marche rejoignant ceux déjà présents pour le bon fonctionnement des choses. Quand mes pieds touchèrent le sable, je retirai mes chaussures pour me placer à côté de Sonic, le petit entre nous deux. Je reposai Mélodie à terre qui ne cessait de chouiner et ce n'est que quand le prêtre commença à débiter le speech habituel que je sentis quelque chose rouler le long de ma joue. Je serrai plus fort la main de la petite, avant de glisser ma main libre dans celle de Sonic. Dire adieu à quelqu'un qu'on avait vu mourir, qu'on venait tout juste de rencontrer, c'était assez dur. Quand ce fut mon tour de m'avancer, je me baissais accompagnée des deux enfants pour poser la bougie. « J'aurai aimé mieux te connaître, Evelyn. J'espère que tu es plus heureuse là-bas. »  J'avais murmuré ça avant de retourner à côté de la famille Ginstorm-Thompson, muette. Tout cela me parut très long surtout quand les gens défilaient devant nous, présentant leurs condoléances. Je vis mon père, commencer à pleurer vers la fin, tandis que je tenais toujours fermement Sonic, n'osant faire quoi d'autre. Puis quand tout le monde fut parti, je pris la petite pour aller jusqu'à Robbyn avant de lui tendre la lettre et l'enfant. « Prends soin de Mélodie, Robbyn. Et si jamais tu as besoin de quoi que ce soit, tu peux m'appeler. » Je me surélevai pour le prendre dans les bras, la petite entre nous deux puis, je posai la gamine à terre avant de partir vers mon père, m'allumant une cigarette pour le prendre également dans mes bras. Il craqua complètement se posant de tout poids et j'ignorai combien de temps on resta comme ça mais je me défis de son emprise, je le regardai avant de lui donner le gamin, jetant un coup d’œil à Sonic. Ils s'arrangeront entre eux. Puis, je partis sans un regard pour ma sœur. Je ne voulais pas lui parler. Pas maintenant. Une fois sur le bitume, je remis mes chaussures pour aller m’asseoir sur un rocher, sortir une clope, la bouteille de whisky que j'avais planqué et lever la bouteille en haut regardant ma fleur qui dérivait au loin. « A ta santé, ma vieille. On finira bien tous par te rejoindre un jour, crois-moi. » Puis, je bus une gorgée, restant là à fixer l'eau jusqu'à temps que le soleil se couche pour finalement rentrer je ne sais où et m'enfermer dans ma chambre, repensant un peu à ce que j'ai vécu. Elle nous manquera quand même. Elle avait l'air gentille. Mais la mort peut frapper n'importe qui. A croire qu'elle n'était pas immortelle. Au revoir Evelyn, tu me manqueras.

Précisions: Pour éviter qu'on s'y perde, j'pense que vous pouvez tout faire en one shot (tout dire dans un post). J'veux pas d'un truc qui dure mille ans et où on se perd. Parce que sinon on va s'emmêler les pinceaux et ça servira plus à rien. Merci

Les flammes dansaient devant mes yeux, j’avais l’impression que c’est moi qu’on était en train de brûler et non pas elle. À l’image de mon père, je restais cependant quasi impassible devant la scène qui se déroulait alors que Mr. Ginstorm peinait à cacher sa douleur. Oh, oui j’étais désolé pour lui, mais pas autant que je l’étais pour moi-même. Dans ces moments-là… je ne crois pas qu’on pouvait penser à quoi que ce soit d’autre qu’à sa propre relation avec le défunt, et tous les souvenirs possibles et imaginables défilaient dans notre tête. Elle était tellement jeune… et s’était vue détruite tellement vite. Je ne souhaitais ça à personne, pas même à mon pire ennemi. Quand je pense à ces visites à la section psy que j’ai faites, à ces changements à 180° du comportement d’Eve pour essayer de se détacher de nous ou je ne sais trop quoi, puis à ses tentatives désespérées pour renouer avec moi parce qu’elle ne supportait pas que je lui en veuille… je me dis que là, au moins, on était au clair concernant notre attachement l’un à l’autre. Durant le processus de crémation, ma main était venue chercher celle d’Imogen jusqu‘à s‘y sceller presque, et je ne l’ai lâchée que lorsqu’on n’eut pas le choix. Elle et moi sortions tout juste d’un énorme froid dans notre relation, mais la glace entre nous avait fondu en un rien de temps lors de son retour à San Francisco. C’était comme si… non. C’est faux. Pas comme s’il ne s’était rien passé, au contraire. C’est justement parce qu’il s’était passé quelque chose, parce qu’Evelyn était décédée, qu’on a subitement reprit contact et qu’on est passés pour deux frère et sœur durant cette journée.

Je me suis toujours dis que c’était mieux comme ça, que Sara ne souffrait plus, là, que c’était pas plus mal qu’elle ne fasse plus partie de ce monde impitoyable, mais juste maintenant, qu’est-ce que j’avais envie qu’elle soit encore en vie. J’aurais pu faire n’importe quoi, n’importe quoi pour qu'elle revienne, qu’elle aille mieux, qu’elle retrouve l’envie d’aller de l’avant, quitte à dépenser toute mon énergie pour ça. C’était insupportable, et l’impression de ne pas en avoir fait assez pour elle me retournait l’estomac. J’aurais pu… j’aurais forcément pu changer quelque chose si je m’étais montré plus attentif. Une grosse inspiration gonfla ma poitrine au moment où la crémation se termina. Non, je n’allais pas « craquer », mais je me sentais vraiment mal, comme chacun d’entre nous ici présent, bien que mon esprit était sans doute moins torturé que celui de Sonic. Il allait devenir dingue, je le savais, je le connaissais trop, et puis si Keenan n’était pas là, c’était encore plus mauvais signe. Il aurait besoin de moi, après… quand j’aurais la tête à froid. Pour le moment, j’avais aussi besoin de quelqu’un, et heureusement qu’il était là mon quelqu'un, dans l’entrée, les yeux certainement rivés sur la porte en attendant qu’on revienne, en même temps que Logann attendait Imogen. La suite se déroulait sur la plage, et les voitures pour le transport étaient garées devant le crématorium. Je me suis séparé de ma « sœur » à ce moment-là, pour le déplacement, en lui lançant un dernier regard insistant même si on allait se revoir dans moins d’un quart d’heure. Il faut croire que nos réactions changent du tout au tout lors d’un enterrement, hein? Il y a à peine quelques jours, Imo et moi ne nous adressions même pas la parole. Bon, là je n’avais pas trop l’envie ni le temps de discuter ça, en fait, alors n’allons pas plus loin dans les réflexions philosophiques sur la vie pour le moment. La réalité des faits, c’est juste que je me suis affalé contre l’épaule de Yuri une fois dans la voiture et que je n’ai pas été capable de prononcer le moindre mot sur la route. Lui non plus, et c’était mieux comme ça. S’il avait dit quelque chose, je me serais certainement mit à pleurer en faisant le lien entre ses paroles et ce que je n’avais pas eu l’occasion de dire à Evelyn. Je ne l’ai pas vue dans ses derniers instants, même si je suis passé à l’hôpital lorsque Amy m’a dit que c’était fichu pour son ainée. Je ne me souviens même plus la dernière chose que je lui ai dit! C'était certainement une bêtise, un truc pour essayer de la faire sourire, j'en sais plus rien. Bref… la plage se dessinait à l'horizon, j’avais tout juste le temps de me reprendre et de lâcher la manche de la chemise de mon petit-ami à laquelle j'étais agrippé depuis dix minutes.

Le nombre conséquent d’invités me surprit en bien. Lorsque je suis sorti de la voiture, ils étaient presque tous déjà là, des visages familiers comme inconnus, tous là pour la même personne. C’était assez impressionnant et je sentis un poids se rétracter légèrement de ma poitrine rien que grâce à ça. En marchant jusqu’au groupe restreint composés par les proches d’Evelyn, j’ai pris le temps de saluer tout ceux qui s’approchaient de nous, puis laissais une nouvelle fois Yuri pour m’arrêter à côté de Stuart et lui accorder un coup d’œil. Il semblait très concentré sur ce qui se passait, ce qui me fit sourire à moitié, lui qui avait du mal à tenir en place d’habitude. Lorsque le speech commença, j’ai simplement croisé les mains devant moi en baissant un peu la tête pour fixer le sol. Je n’avais pas envie de voir les visages des autres et c’était mieux comme ça. Entendre les paroles des gens me suffisait largement en matière d’émotions, et mes yeux de sont fermés à plusieurs reprises pour me permettre de me concentrer afin de ne pas finir dans le même état que Mr. Ginstorm. Mes seuls regards étaient dirigés vers mon père. Il était celui qui me rendait mal à l’aise aujourd’hui. Je voulais le soutenir, mais je ne savais pas comment m‘y prendre. Je sais pas non plus pourquoi je cherchais à garder ma contenance dans un moment pareil, mais c’était suffisamment pénible pour m’obliger à me concentrer sur autre chose que sur l’instant présent. Cette violence que je m’infligeais m’a cependant aidé lorsque ce fut à mon tour de parler, car ma voix ne trahissait pas le moins du monde le chaos à l’intérieur de ma tête. Quoi que si, quand même, j’ai pas prononcé un seul mot en anglais, tout était en allemand pour la seule et bonne raison que je ne m’adressais pas aux personnes présentes sur la plage mais uniquement à Evelyn. « Je crois que tu réalises pas combien tu vas nous manquer… mais on va pas t’oublier. Je vais m’occuper d‘eux, t’inquiètes pas pour ça... et on se reverra bientôt, c’est juste une question de temps, et cette fois t‘auras intérêt à avoir retrouvé le sourire, sinon je te botte les fesses jusqu‘à ce que tu les sentes plus. Fais pas comme si t‘entendais pas ce que je te raconte. » 

Je suis revenu à ma place après ça en attendant que tous ceux qui le désiraient posent leurs derniers messages, et puis comme pour chacun, le passage des condoléances fut très long. Ensuite, le groupe se dispersa petit à petit, et je lâchais un soupir en ouvrant le premier bouton de ma chemise. Wow, c’était intense, c’est sûr.

Plus tard, Amy s’était approchée de moi, et je n’eus pas besoin de plus qu’un regard de sa part pour comprendre pourquoi elle venait me parler. Je me suis penché vers elle pour lui faciliter la tâche lorsqu’elle chercha à passer un bras derrière mes épaules, mais l’ai gardée un peu plus longtemps proche de moi pour lui glisser quelques mots. J’ai bien vu tout ce qu’elle avait fait depuis son arrivée ici, c’était presque anormal qu’une fille aussi jeune doive s’occuper de tout ça. « Je suis désolé que ça te soit tombé dessus comme ça Amy, mais j’admire vraiment ta force mentale. Essayes de pas en faire trop quand même… prends pas tout sur toi, t’es encore jeune, c’est pas ton rôle de t‘occuper des problèmes des adultes. D’accord? Je sais que t’aimes pas ça, mais si tu te sens surchargée, c’est toi qui m’appelle. T’inquiètes pas pour moi. » J’ai gardé le contact avec ses yeux jusqu’à ce qu’elle accepte ce que je venais de lui dire, puis ai caressé brièvement son épaule avant de la lâcher pour la laisser rejoindre son père. Bon. Mon regard s’est posé sur Mélodie et j’ai rangé la lettre dans une poche intérieure avant de m’accroupir à côté de la petite qui semblait un peu perdue au milieu de tous ces va-et-vient. « Tu veux voir maman? » Elle hocha la tête en se collant à moi, et je la pris dans mes bras avant de me relever pour la porter jusqu’au bord de l’eau. Je sais qu’elle ne comprendrait pas tout ce que je lui disais, mais je lui répéterai autant de fois que nécessaire « Maman est loin dans le ciel, en haut. Elle va pas rentrer… quelqu’un l’a appelée là-bas, mais quand on part on peut pas revenir. Elle t‘aime beaucoup, mais elle a pas eu le choix. Il faut pas pleurer Mélodie, tu vas la revoir un jour, mais pas tout de suite… en attendant, tu vas venir dans ma maison, d’accord? C’est maman qui a demandé. Tu aimes bien venir à la maison, hein? » j’avais la chance que la petite fille adore ma voix pour une raison qui me dépassait complètement. En tout cas, ça me facilitait la vie, elle n’a pas cherché plus loin avant de se calmer. Je pense qu’elle était fatiguée par tout ce qui venait d‘arriver, car elle s’est vite assoupie sur mon épaule, et moi je me suis rapidement retourné pour chercher Yu', puis m‘approcher de lui. « Ça commence, dude… nouveau chapitre. »