« You are an example of better things to come. »«
That when I was older, you’d be proud of me… » Je lève les yeux vers mon guitariste alors qu’il gratte les dernières cordes de sa guitare avant de me regarder, complètement stoïque. «
Wow. » Je souris timidement en frottant mon bras pour y chasser ma chair de poule. Il se met à rire en reposant sa guitare. «
Tout ce qu’on fait, c’est carrément différent de l’album précédent. C’est dingue de voir à quel point on a grandi et à quel point cette pause nous a aidé à aller de l’avant. »
Je n’ai pas vu mon meilleur ami -et accessoirement, le guitariste de mon groupe- depuis que j’ai quitté Bâton-Rouge. J’aimerais pouvoir dire que ça fait bien cinq ans que l‘on ne s‘est pas vu, pourtant ça ne fait que quelques mois. Tant de choses ont changé dans ma vie depuis que je suis parti pour San Francisco, c’est peut-être pour ça que j’ai l’impression d’avoir pris cinq piges dans la tronche depuis notre dernière fois dans un studio.
« They say the problems come, come in pairs and I am number one. »Je me rappelle de cette période de crise qui a précédé mon départ. Rien n’allait plus. Les tensions dans le groupe étaient juste insupportables. Il ne se passait pas un jour sans qu’il n’y ait une dispute. Les trois mois de tournée qui ont suivit la sortie de notre deuxième album se sont ajoutés aux pires moments que j’ai vécu dans ma vie. Puis quand je suis rentré chez moi après ça, j’étais loin de me douter que les choses iraient de mal en pis.
C’était comme si tout mes vieux démons ressurgissaient par-dessus mes problèmes actuels.
Mon père avait fait une rechute. Je l’appelais régulièrement pendant ma tournée pour avoir de ses nouvelles et il m’assurait toujours qu’il se sentait beaucoup mieux, qu‘il sortait régulièrement pour aller à la pêche, marcher, jouer aux cartes avec ses amis. En rentrant à Bâton-Rouge, je me suis aperçu qu’il avait fait rediriger la ligne du téléphone fixe de la maison à la chambre dans laquelle il reposait dans son centre de cure de désintoxication et que malgré son entrain et la bonne humeur qu’il adoptait au téléphone, il était au plus bas et se sentait vraiment mal. Mon père ne s’est jamais remit de la mort de ma mère.
J’ai ensuite appris par les journaux locaux qu’un fou avait été arrêté en ville il y avait de ça, quelques jours à cet période là. Cela faisait plusieurs années qu’il était recherché pour des crimes contre mineurs et après de nombreuses recherches sur son compte, je n’ai pas mis longtemps à faire le rapprochement entre son type de victime et la mort de Silver mon ex copain, ce qui par la suite m’a fait me sentir plus mal encore que ce que je ne l’étais déjà.
En l’espace de deux semaines, les deux événements les plus douloureux que j’avais pu vivre dans le passé venaient de resurgir brusquement dans ma vie. J’ai lamentablement replongé dans la drogue et mon piteux état n’a fait qu’empirer les rapports déjà fragiles que j’entretenais avec les membres de mon groupe. J’étais en train de perdre le contrôle.
Deux solutions se présentaient à moi, à ce moment là. Le suicide ou la fuite.
« What do I do when I'm so in love with you? »Je me rappelle que j’ai acheté ce billet pour me rendre à San Francisco, sans grande conviction. Je voulais partir en Europe, au départ. L’Angleterre était l’endroit qui m’attirait le plus, parmi tout les autres. Seulement, l’avion pour San Francisco était celui qui décollait le plus tôt de l’aéroport et comme j’avais besoin de partir sur le champs, j’ai pas réfléchis plus longtemps et j‘ai sauté dans l‘appareil.
J’ai jamais vraiment aimé la Californie. Ma tante paternelle habite là bas et avec mon père nous nous y rendions à chaque période de fêtes pour les passer avec elle, mais j’ai toujours de très mauvais souvenirs de cet endroit. Je me perds toujours en ville, j’ai fais une indigestion une fois, suite au repas de Noël et j’ai passé plusieurs jours à l’hôpital -ce qui m’a poussé à devenir végétarien par la suite, j’ai manqué de me faire écraser par un bus, je me suis cassé le poignet et j’ai eu un traumatisme crânien en tombant dans un parc d’enfant. Une cicatrice de ma chute est toujours visible sur mon front.
Je suis donc parti en me disant qu’au moins je pourrais crécher chez ma tante en attendant de trouver un hôtel ou un petit studio à la con dans lequel survivre quelques mois. Parce que oui, je pensais sérieusement que je n’en aurais que pour quelques mois. Trois, quatre pas plus, le temps d’une pause, quoi!
Mais ça c’était avant de recroiser Sierra dans un café du centre commercial, puis avant que Lilas ne vienne me rendre visite, avant qu’elle ne devienne ma copine, avant qu’on s’installe ensemble, avant qu’on ait un chat, avant qu’elle ne tombe enceinte…
Enfin, vous voyez… heureusement que je ne suis pas parti pour Londres.