I know I'm not that perfect, but just stay a while, baby then you will see ...

Je savais que c’était inutile d’essayer. Vivre. Continuer. Avancer. Encore et encore. A quoi ça pouvait bien nous servir ? On était tous là, à regarder les gens mourir autour de nous. On était tous là, à s’amuser comme des gens insouciants. Comme si rien n’allait jamais nous arriver. Comment font-ils ? Comment parviennent-ils à rire comme ça ? Comment peuvent-ils faire comme si de rien n’était, hein ?

Reprendre goût à la vie. Si j’en étais seulement capable, je leurs aurais ris au nez. Quelle idée stupide ! Comment aimer un monde qui n’a pas de sens ? Comment aimer un monde sans lui ? Sans eux ? L’air que j’inspire me donnerait presque envie de vomir. La vie n’a qu’un goût amer. C’était complètement stupide de continuer d’essayer. Je crois même que je n’ai jamais commencé. A quoi bon espérer ? L’horreur reprendra toujours le dessus. On s’acharnera toujours pour me briser encore un peu plus.

Je ne comprenais même pas cette sorte de pitié que les gens avaient pour moi. Je n’en valais pas la peine. Je ne méritais pas leur attention. Ils feraient mieux de me laisser. De tous me laisser. Je n’avais rien à leur donner. Je ne voulais rien de leur part, non plus. Je voulais juste qu’on me laisse tranquille. Rien d’autre. Qu’on me laisse partir. Loin d’ici. Loin d’eux. C’est probablement la seule chose qui me rendrait vraiment heureux, maintenant. Je voudrais qu’on me laisse fermer les yeux.

Je ne devrais pas me trouver là. Sur ce pont. A cette heure si matinale. De l’autre côté de la rambarde, assis sur le rebord, les pieds pendant dans le vide. Personne ne pouvait me voir. Du moins, pas ceux qui marchaient sur le bitume. Je crois. Je m’en fiche, de toute façon. Je fermais les yeux, lentement. Je pourrais tomber. Ca me semblait si facile de me laisser basculer dans le vide. Mais … Ils seraient bien capables de venir me chercher en bas avant que je ne me noie. De me chanter encore un de leurs discours débiles. Tu as pensé au mal que tu leur ferais si tu te laissais mourir ? Oui. Oui, j’y ai pensé. Mais eux, ils ont pensé au mal qu’ils m’ont fait ?

Je me demandais ce qui arriverait, lorsqu’ils se rendraient compte que je n’étais pas chez la psychiatre. Lorsqu’elle se rendrait compte que je ne l’attendais pas sur l’une de ses chaises dans la salle d’attente. Est-ce qu’elle téléphonerait chez moi ? Et qu’est-ce qu’ils feront, lorsqu’ils remarqueront que je n’étais pas dans ma chambre, et que mon portable était resté sur mon bureau ? Ils s’inquiéteront, probablement. Et alors ? Quelle importance ? C’était probablement le meilleur moment pour partir. Il n’y aurait personne qui me prêterait attention. Je serais enfin heureux …

A quoi ça servait que j’aille la voir, de toute façon ? Elle n’arriverait pas là où tous les autres avaient échoués. Là où j’avais moi-même échoué. Elle n’arriverait jamais à m’arracher une phrase. A me faire revivre. Elle ne parviendrait jamais à me comprendre. A comprendre. Elle n’empêcherait jamais rien, de toute façon … Ca ne servait à rien qu’elle perde son temps avec moi … Ca ne servait à rien qu’ils essayent tous de perdre leur temps avec moi … Ca n’en valait pas la peine. Vraiment pas la peine …