Les Américains sont vraiment étranges. Ils sont toujours pressés et toujours méchants aussi. Je ne comprend pas c'est quoi ce besoin de toujours caser les pauvres types qui n'ont rien demandé à personne. J'étais debout dans la cour d'école pendant la récréation à regarder les enfants jouer tranquillement tandis que les deux autres femmes que je ne connaissais pas encore étaient en train de fumer, débitant des bêtises sur les parents d'élèves. Etant moi-même un parent d'élève, je ne me permettais pas ce genre de choses. Bien que je savais que d'être une famille monoparentale pouvait être extrêmement contraignant. Sauf que nous étions en pleine exercice de notre emploi et que donc on ne pouvait pas se permettre de quitter les petits montres des yeux une seule seconde. Ma tasse de thé entre les mains, je sentis l'odeur de cigarettes monter jusqu'à mes narines et me décalai un peu avant de remettre une mèche de cheveux derrière les oreilles pour voir qu'une bagarre venait d'éclater. Un petit blond venait de coller un coup de poing à un autre enfant plus baraqué. Ni une, ni deux et voyant que mes collègues ne bougeaient pas d'un pouce, je posais délicatement le récipient au sol avant d'aller vers les enfants qui continuaient de se disputer. Sauf qu'en partant, je shootais dans ce que je venais de mettre à terre. « Oh zut. » Mes collègues m'adressèrent un coup d'oeil et je baissais la tête honteuse avant d'arriver à la hauteur du petit démon blond que je connaissais pour être un élément perturbateur de sa classe. Je me baissais alors pour me mettre à sa hauteur. « Stuart... » Je l'appelais d'abord calmement, inutile d'élever la voix après un enfant. Mais il m'ignora et je poussais un soupir avant de hausser la voix. « Stuart Thompson, arrêtes ça. » Je le vis alors se tourner vers moi et du sang s'écoulait de son nez. « Mais... mais... Il a dit que maman était morte à cause de Papa. C'est pas vrai. Papa, il aurait jamais fait de mal à Maman.» Ah c'est vrai. Je le regardai avec un mine compatissante avant de lui tendre ma main. « Tu viens, on va aller appeler ton papa pour qu'il vienne te chercher et te nettoyer. Faut que tu sois tout beau pour Papa nan ? » Le petit la glissa dans la mienne et je me relevai avant de me diriger vers les deux bonnes femmes pour leur signaler le fait que l'autre garçonnet avait débuté la bagarre.
« De tout de manière, la famille Thompson est une famille à problèmes. Le père, il est complètement taré. C'est un alcoolique doublé d'un moins que rien. Tandis que la mère était une pauvre folle qui se tapait le tout SF. » Choquée qu'elle dise ça devant le petit, je lui bouchai les oreilles avant de les regarder. « Je me fiche de comment était sa mère. Il faut penser un peu à ce pauvre petit. Maintenant si vous voulez bien m'excuser mais je vais aller faire mon travail. » Je le tire derrière moi avant d'aller dans les toilettes pour lui nettoyer le visage et essayer d'éliminer toutes les tâches de sang et les égratignures. Le petit me regardait sans bouger, sans gémir et je fus toucher de voir qu'il était si dur pour un si petit âge. Je le pris donc avec moi dans ma classe avant de composer de chercher le numéro du père qui devait être dans son carnet de liaison. L'école était finie de tout de manière, les enfants n'allaient pas tarder à partir. Enfin, je trouvais pour composer le numéro de monsieur Thompson et l'appeler. Messagerie. Je détestais les messageries. « Bonjour Monsieur Thompson, ici l'institutrice de Stuart... il y a eu quelques complications. Est-ce que vous pourriez venir le chercher s'il vous plait... Merci... Bonne journée. » J'eus un sourire timide au téléphone, ridicule avant de raccrocher. Puis, j'allais dans un coin de la classe avant de prendre le petit sur les genoux, lui dégageant le visage. « Vous avez des enfants, maitresse ? » Son ton était triste, ça se sentait et je lui souris. « Oui, j'ai un fils plus vieux que toi. Il s'appelle Alexis. » Il semblait embêter et jouait des jambes quand je ne sais pas ce qu'il se passa mais il me prit dans ses bras. « Maman me manque. » Je lui caressais les cheveux en lui disant que je savais. Il arrive souvent que les enfants venant de perdre un proche se raccroche à la seule figure maternelle qu'ils connaissent. Nous. Leurs institutrices. « Tu veux que je te lise une histoire ? » Il acquiesça et je commençai donc le conte. Pour une fois qu'il était calme, fallait mieux en profiter non ?
C'est un grognement qui sort de ma gorge pour toute réponse, je bosse, c'est pas du tout le moment de me faire chier. Mon cerveau enchaine les formules mathématique plus ou moins compliqué, visualise des résultats, synthétise des données et essaie de mettre en place d'autre problématique plus précise. Tout ça en même temps. Utiliser tout mon intellect me permettait de ne focaliser que sur les choses dite simple, claire et précise. Enfin surtout, la science n'avait absolument rien à voir avec les sentiments et les ignorer c'est tout ce qu'il me fallait pour le moment. Je n'ose pas imaginer l'état dans lequel je vais être quand Amelia va venir vivre à la maison, ça devrait faire plaisir à Stuart mais ça va me rendre fou. Ne pas pouvoir être cartésien plus de 24 heures ? Ouais .. Ça s'annonce mal. Un main se pose sur mon épaule. Réflexe. Torsion. Clés de bras. Transfert. Le vieux Wilfried se retrouve par terre, les yeux écarquillés et les lèvres grimaçantes. Shit.
« Mon dooooos .. Mon doooos … Putain Thompson … »
Mon regard se lève au ciel quand mes lèvres expirent un soupire.
« Désolé. C'est pas comme si tu me connaissais pas depuis le temps cela dit. »
Haussement d'épaule, le corps se retourne et l'esprit se terre à nouveau dans les grilles, les chiffres, les lettres et autre nom grec sauf qu'à peine eu-je le temps de me concentrer que le vieux bonhomme m'apostrophe.
« C'est l'école de ton fils qui a appelé. Tu devrais prendre l'appel, on sait jamais. »
Si tôt eut-il mentionner le mot école que j'étais déjà sur le chemin du vestiaire. Fébriles, mes mains fouillent dans ma poche de veste pour en sortir un vieux téléphone qui avait visiblement fait son temps, la messagerie indiqué un message vocal. Le haut parleur contre mon oreille, droit comme un i, j'écoutais la voix chantante de institutrice de Stuart. Quelques complications . Le message n'est même pas terminé que ma blouse est dans le bac à linge sale, non stérilisé. En moins de 30 secondes j'ai remis mon jean et ma chemise, j'attrape ma veste et trottine vers le parking, je vois Wilfried qui me salue du coin de l'œil. Père de famille monoparental aussi. Il comprend. Sautant dans ma voiture, j'enclenche le moteur dans un silence total. Bonjour j'ai perdu toute ma virilité au volant de ce monospace en l'espace d'une demi seconde. Si cette voiture était moche elle avait au moins le mérite d'être utile et plutôt pas mal niveau sécurité, c'est ce qu'il faut pour les gosses. Ce qui ne m'empêche pourtant pas de conduire comme le dernier chauffard du dimanche. J'avais des réflexes quasiment surhumains, autant qu'ils servent à quelque chose. L'adrénaline qui s'infiltre dans mes veines me rappelle que mon dos était toujours dans un piteux état, et la douleurs qui ce dernier s'amusait à me procurer n'était malheureusement pas seulement physique. Avaler une vicodine ne suffit pas pour l'oublier, elle. Pour le peu que je relâche ma concentration c'est terminé, j'la vois partout, mes souvenirs s'entrechoquent, j'l'imagine à la place de cette femme qui traverse la rue en courant, j'l'entrevoie dans le rétroviseur souriant à ce dernier alors que du bout des lèvres elle e disait de continuer à rouler, j'hoche la tête sans vraiment comprendre. Je sais que tout ça n'est qu'illusion, je sais que le manque me bouffe, je sais que j'peux pas continuer comme ça et pourtant je suis là à chérir une illusion fade et sans saveur n'ayant rien à voir avec l'Evelyn que j'ai pu connaître. Un sourire triste apparaît sur son visage, j'me retourne. Disparu. Retour à la réalité. Le klaxon du type derrière moi me fait avancer un peu plus vite. J'crois que j'ai perdu la raison.
Arrivé devant l'école, je gare rapidement la voiture, m'accroche au détail, cherche la petite bête un peu partout, j'analyse les gens, le comportement des enfants, les bruits de la ville. Tout est bon pour garder mon esprit en éveil. Une fois dans l'école, la première chose qui me marque c'est le silence, pas de cris d'enfants, ni d'adulte, tous les couloirs sont vide, les dessins cubiques des gamins trône sur les murs, des empreintes de peintures rendent l'endroit un peu plus chaleureux .. Du moins si c'est le genre d'ambiance qu'on peut apprécier. J'étais venu une seule fois dans la classe de Stuart, un soir où Evelyn m'avait demander d'aller à la réunion parent/prof puisque ce dernier avait encore fait une connerie, le problème c'est qu'il avait changer de classe depuis le temps – la voix doucereuse de son institutrice était là pour en témoigner - m'arrêtant dans le couloir, je reste immobile quelques secondes. Une voix. 3ème classe vers la gauche, le timbre était doux et les accents suaves, nul doute que cette dernière appartenait à la maitresse du petit monstre. Je reste un instant dans l'embrasure de la porte, elle est rousse. Choc. Rousse. Rousse putain. Je déglutis et regarde le sol quelques secondes, non Sonic, c'est pas du tout le moment pour les hallucinations, she's gone. She's gone. En relevant les yeux j'me rend compte qu'elle est en train de lire un conte à Stuart, ce dernier est paisible, j'écoute aussi d'une oreille distraite tout en essayant de me focaliser sur tout, tout, sauf sa chevelure flamboyante. Lorsqu'elle termine, du moins je pense qu'elle termine, je lance un. « Bonsoir. » Stuart lève aussitôt le regard vers moi, il lui faut un peu moins d'une seconde pour se redresser, crier un « PAPA » et simplement courir dans mes bras, habituer, je le serre contre moi tout en soupirant vers son institutrice. « Je suis désolé s'il vous cause des ennuis, qu'est ce qu'il a encore fait cette fois ? » Prenant mon courage à deux mains, je quitte la cheveux blond du petit garçon contre moi pour lever les yeux vers la rousse. Respire, expire. Tout se passera bien.
J'aime les enfants. J'ai toujours aimé les enfants. Petit, grand, mince, gros, blond, roux etc. J'ai une tolérance vis-à-vis d'eux qui frise le ridicule. Comme ce petit là, Stuart que j'étais en train de nettoyer. On m'avait raconté son histoire. Une maman très jeune qui n'arrivait pas à s'en occuper, un papa qui n'en était pas vraiment un. On m'avait conté l'histoire des Thompson aussi tragique soit-elle et j'ai tendance à surprotéger ce petit parce que je comprenais le père. Je les voyais les parents monoparentaux qui s'en sortaient très bien. Mais quand on se retrouve si subitement propulser à ce rang, il est parfois normal de perdre pied. C'est pour ça que je trouvais mes collègues injuste envers ce monsieur. Bon certes, vu ce qu'on m'en avait dit, ce n'était pas l'homme le plus charmant de la Terre mais quand même. Alors que je nettoyais le petit, je le vis me regarder avec un air intrigué comme ci j'avais quelque chose sur le visage. Je regardai donc dans la glace et il attrapa ma pince et mes cheveux tombèrent en cascade sur mes épaules. « Maman aussi était rousse avant de devenir blonde. » Je lui souris avant de reprendre ma pince pour me les attacher laissant quelques mèches pendouiller sur les côtés. « Tu sais il y a plein de rousses dans le monde. Je ne suis pas la seule. » Il m'examina un peu plus avant de mettre sa main sur mon visage et de s'approcher de moi. Il était dur pour son âge, je ne l'ai jamais vu pleurer même quand on lui a annoncé que sa mère ne reviendrait plus. « Vous ressemblez à maman. Elle était aussi gentille que vous avant... » Il faillit dire quelque chose mais se retint alors, je le pris avec moi pour l'emmener dans la classe et appeler son père. Répondeur, comme toujours. J'ai entendu dire qu'il exerçait une activité professionnelle. Normale. Ensuite, j'allais m’asseoir dans le coin de lecture pour lui lire un conte. Celui de Raiponce. J'en suis dingue de cette histoire que je trouve si romantique.
« J'ai vu le dessin animé avec ma petite sœur. » Je lui souris à nouveau avant de lui montrer les images et de le faire participer de temps en temps. Il me posait des questions sur Alex et semblait curieux, je continuai de lui sourire et de rire parfois. « J'ai toujours voulu avoir un grand frère. » Je passais une main dans mes cheveux pour finalement les détacher puis, les lissai d'une main. « Beh tu le rencontreras un jour. Si ton papa est d'accord. » A peine eus-je dit cette phrase que j'entendis un bonsoir à peine audible avant de tourner la tête, toujours souriante. Puis, le petit courut dans les bras de son père. Je me levai donc, tirant un peu sur ma jupe comme par réflexe et le regardai, l'examinai sans pour autant le juger. « Bonsoir. » J'avais dit ça sur le ton le plus doux possible. Ce que je voyais en face de moi n'avait pas d'importance. Si ce n'est qu'il était assez bel homme. Fatigué. Mais c'est compréhensible. Avec deux enfants, plus un nouveau-né. Je m'approchais donc pour lui tendre la main, plongeant mon regard dans le sien pour y lire une certaine souffrance. « Ravie de faire enfin votre connaissance. Stuart m'a dit beaucoup de bien de vous. » Détendre l'atmosphère, être charmante. Ne pas le mettre mal à l'aise. Puis, sa question ne me surprit pas. Je jouais un moment avec mes mains avant de l'inviter à s'asseoir et prendre place derrière mon bureau. « Stuart mon chéri, tu veux bien nous attendre dehors... » Je le vis donc partir en pestant avant de fouiller dans mon bureau pour en sortir un bonbon que je lui tendis. Il me sourit avant de partir en hurlant comme quoi il avait eu un bonbon. Puis, je me tournai à nouveau vers l'homme qui se tenait en face de moi, me décidant à prendre la parole.
« Il s'est battu. Les enfants sont méchants avec lui et il n'a fait que se défendre mais... » Je dégageai mon visage avant de m'éclaircir la gorge pour reprendre mon monologue. « il a besoin d'aide pour surmonter la mort de votre épouse. Toutes mes... » Je cherchai le mot en anglais mais n'y parvins pas. « Je suis navrée. Je ne pense pas qu'un étranger pourra l'aider donc j'ai eu une idée. Je peux vous l'exposer ou bien... ? » J'attendis qu'il m'invite à continuer ou m'envoie chier. Après tout, beaucoup de parents m'envoyaient bouler et apparemment, il avait l'air du genre «je n'ai pas besoin de votre aide, merci. » Et je pouvais le comprendre. Jenna Karjalainen, curieuse comme pas permis à forte tendance de se mêler de ce qui ne la regarde pas... VDM ?
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