J'arrivai devant la porte de l'appartement d'Enora dans un calme presque total. J'étais content de mon marchandage et je ne m'en cachait pas. On peut me traiter de gamin autant que cela fait plaisir à monsieur ou madame, mais j'avais confiance en mes capacités intellectuelles et je savais qu'en les utilisant correctement, cela pouvait me permettre de m'amuser avec les gens presque comme je le voulais. Mettre la rouquine dans un cul de sac m'avait d'ailleurs mit de très bonne humeur hier. C'était comme une partie d'échecs gagnée après avoir monté une fine stratégie... je dois admettre que mes plaisirs sont parfois malsains.

Après un instant d'hésitation, je sonnai.

- Salut ..

Et une gifle à la figure, bam. Je m'y attendais, et sur le coup ça ne fit pas du bien. Il faut dire que j'ai tout fait pour agacer Enora avant et après avoir obtenu son accord à mon chantage. Si j'avais honte de faire ça à l'une des amies de ma soeur? Non... non, pas vraiment. Ça restait une fille avant tout, et ma notion du respect avait des limites bien particulières.

Après avoir passé une main sur ma joue pour la frotter un peu en riant silencieusement, j'attendis que la rouquine me laisse entrer avant de délacer mes chaussures.

▬ Bonjour! Alors dis-moi, combien de temps devant nous?

- Elle ne revient pas avant 18h. Donne moi ma came, s'il te plaît.


▬ Oh, mais c'est super, ça!

Je retirai ma veste en cuir pour la poser sur une chaise, me retrouvant ainsi dans le débardeur noir qui se trouvait en dessous et laissait mes épaules libres. Sans rien ajouter, je prit le sachet de pilules qui se trouvait dans l'une des poches du veston pour le donner à Enora


▬ Je te donnerai l'autre moitié tout à l'heure

J'attendis patiemment qu'Enora aille cacher ce que je venais de lui donner et en profitai pour jeter un coup d'oeil à la décoration en osant toucher à des objets de décoration intrigants. Lorsque la jeune femme revint, je la suivis cette fois-ci avec pour seul bruit de fond le tintement des pièces métalliques qui pendaient sur moi. J'eus l'occasion d'observer la nuque de la rouquine depuis derrière ainsi que la silhouette de manière générale, et cela me rappela pourquoi je l'avais faite chanter à la base.

Préservatif, bam, la fille sur le lit, point. Démerde toi mon gars. Nan nan nan, c'est pas comme ça que je voyais les choses. Après un court soupir, je penchai la tête sur le côté et pris l'emballage carré qui m'était destiné.

▬ Tu préfère te déshabiller toi-même ou me laisser faire ça aussi?

Mon sourcil gauche s'arqua d'un air narquois.

▬ Et toi ? Tu te débrouilles, ou je ... le fais ?


Ça se sentait à des kilomètres que s'il y a quelque chose dont elle n'avait pas envie aujourd'hui, c'était bien de devoir faire ça, et je ne comptais pas l'y obliger. Depuis que je sais comment l'Ex de ma soeur la traitait, ça m'a suffit à me discipliner lorsqu'il s'agissait de relations intimes, afin de ne jamais ressembler à ce gars.

J'offris un petit sourire à Enora avant de m'approcher un peu du lit tout en enlevant mon haut et en ouvrant la ceinture qui retenait mon jeans qui glissa facilement après ça. Au lieu d'aborder la rouquine directement, je m'assis à côté d'elle en silence en prenant le temps de l'observer sans gêne visible. J'étais terriblement partagé entre l'envie de faire tomber mon attitude détestable et celle de ne pas laisser transparaître la moindre trace de la sensibilité qui me restait à présent. Je finis par planter mes yeux sur les siens et tendre un bras dans sa direction.

▬ Donne ta main.

▬ Ayant des à priori sur toi, je pouvais pas en être sûr.

Eh bien oui, elle me considérant comme un enfoiré de première, je la considérais comme une fille qui niait partiellement la gravité de sa toxicomanie. Je l'avais vue quelque fois avec ma sœur, plus ou moins nerveuse, à chercher une excuse pour aller aux toilettes le plus vite possible. Ça m'avait mit la puce à l'oreille, mais je n'en savais pas plus.

Je m'approchai légèrement plus pour faire glisser le bout d'un des anneaux fixés à ma lèvre inférieure le long du bras d'Enora, puis m'arrêtai à son épaule avant de tourner d'un coup le regard vers un miroir qui était accroché à l'armoire et qui reflétait la scène qu'on le veuille ou non. Je déposai un autre petit baiser.

▬ Que tu sois tendue ou pas, ça va rien changer à ce qu'on a arrangé. Pourquoi t'essayerais pas de rendre ça moins désagréable pour toi aussi?

Il avait donc suffit d'une ou deux phrases pour remotiver un peu Enora. Et hop, sur le lit. Je ne pus m'empêcher de sourire durant le baiser et n'attendis pas indéfiniment pour y répondre tout en passant une main dans le dos de la rouquine pour remonter jusqu'à sa nuque et glisser mes doigts dans les cheveux qui s'y trouvaient. J'étais relativement heureux en ce moment précis, même si ce n'était pas le cas de la jeune femme.

Je savais qu'elle voulait en finir au plus vite et que pour cela il fallait qu'elle y mette du sien, au moins un minimum, alors je fis en sorte de la pousser à s'appliquer dans ses gestes jusqu'à ce que je me décide à "passer à la suite", ce qui se fit quelques minutes plus tard, peu m'importait que celles-ci paraissent longues à Enora ou non. Mon corps plutôt imposant pour mon âge se courba au-dessus d'elle au bout de quelques mouvements de bassin, et je me penchai sur son oreille en laissant quelques mèches de cheveux lui chatouiller le visage.

▬ Tu me hais, hein?

- Excuse moi .. Ça va mieux?

Je me tus encore un instant jusqu'à ce que la douleur retombe, puis me redressai un peu pour saisir le poignet de la main avec laquelle Enora me caressai pour replacer son bras sur le matelas. Cette situation me gênait et je n'avais absolument pas envie d'en parler. Dieu sait ce que ma sœur avait raconté à ce sujet... je n'avais pas besoin de la sympathie des gens, je ne la désirais pas. De plus, ce sont tous des traitres ou des hypocrites à un certain niveau, alors pourquoi je m'attarderais à quelques instants de complicité? Ça me faisait un peu peur, c'est pas pour ça que j'étais venu.

Sans répondre à la jeune femme, je fis en sorte de mieux serrer ma prise sur son poignet avant de continuer ce que j'avais commencé dans un demi-soupir.

Sa réponse à mon comportement désagréable me fit sourire et cambrer le dos dans un grondement sourd. Elle pouvait me griffer où elle voulait tant que ce n'était pas "là-haut", ça ne me dérangeait pas. Au contraire, cela me motiva peut-être plus qu'autre chose. Enora jouait le jeu, elle participait à sa manière, je me sentais maître de la situation et cela me plaisait bien.

Bref, je vous passerait les détails, mais la partie de jeu finit par s'arrêter au bout d'un certain temps, mais cela ne m'empêcha pas d'observer la jeune femme derrière mes yeux cernés de noir pendant quelques secondes. Je n'avais pas eu le moindre geste "affectueux" à son égard jusqu'à maintenant. Pas une seule caresse donnée avec un minimum de tendresse, pas un baiser de trop, jamais. Je ne donnais à personne, si ce n'est à ma sœur, très implicitement.

Après avoir levé une main et l'avoir approchée de son visage, je m'arrêtai à un ou deux centimètres de sa peau. Malgré tout, il y avait une partie de moi qui me disait d'être gentil, mais l'autre me retenait. Encore une fois, ce fut elle qui gagna et je finis par reculer à quatre pattes avant de me relever pour me rhabiller en silence.