HISTOIRE !
Salut. Euh, je sais pas par où commencer en fait... il faut que je résume ma vie, c'est ça? Oké.. bon alors pour faire court, j'ai été abandonné un peu après mes 4 ans par mes parents qui sont partis de la maison un jour et n'y sont plus jamais revenus pour je sais pas quelle raison. Euh... après ben y'a des squatteurs qui ont prit possession de chez moi et c'est avec eux que j'ai continué mon chemin de vie, quoi. Ça a duré environ sept à huit ans. Vivre avec eux au jour le jour, tout ça, et c'était pas terrible. J'ai toujours été jaloux de ces gamins avec un papa et une maman qui les emmenaient au parc d'attraction, jaloux de ceux qui allaient à l'école le matin et l'après midi avant de rentrer prendre leur goûter, jaloux de ceux à qui on offrait des cadeaux à noël sous un sapin dans la joie et la bonne humeur. Tout ce que je demandais à peu près chaque jour que dieu faisait, c'était que quelqu'un s'occupe de moi comme on s'occupe de son fils. Mais j'ai jamais rien obtenu de tel. C'est clair que j'avais mes potes les junkies pour me tenir, mais ils étaient stone la plupart du temps (et moi aussi par la même occasion à cause de la fumée de la weed, j'ai cependant jamais touché à une autre drogue) et du coup il fallait pas trop leur en demander. Hum... ça a toujours été hard du début à la fin, encore plus l'hiver, et il fallait supporter de voir certains de mes amis claquer chaque année. Parfois je me suis réveillé contre des corps devenus inertes suite à des overdoses, ou bien juste à cause du froid... d'ailleurs, maintenant je crois que je suis immunisé contre tout ce qui touche à la mort même si j'ai une peur terrible de crever. Ma vie n'est absolument pas marrante en fait, mais je m'y suis habitué comme on s'habitue à voir du sang dans les films d'horreur, car ouais... c'était l'horreur pendant 15 ans environ. Courir, voler, courir de nouveau, trouver un endroit où dormir, trouver a manger.... voila le quotidien, mais si je devais résumer à un mot, ce serait certainement "survivre" qui serait le plus adapté. Ouais, c'est ça, survivre... comme un chien.

Quand j'ai eu 16-17 ans, j'ai quitté mon ancien groupe en compagnie d'une fille qui, je pense, était ma copine. On s'est rencontré au travers su job qu'on avait en commun (autrement dit la prostitution) et entre nous, ça a été une grande histoire d'amour pendant un an. J'ai été tellement marqué par cet épisode qu'après ça, j'ai commencé à m'éloigner de la gente féminine, d'ailleurs... Sans me tromper, je crois que l'année 2008 à été la meilleure de toute ma vie parce que c'est la seule durant laquelle je me suis pas battu à fond pour rester vivant. J'avais quelqu'un qui me comprenait, quelqu'un comme moi... on partageait un mode de vie en commun.

Tout ça, ça a pas duré longtemps. Lorsque l'un des "amants" d'Harmony m'a vu avec elle une fois, il n'a pas voulu croire à l'argument "on est frères et soeurs". Nan nan, à la place il m'a menacé de me flinguer si je restais en contact avec sa "chérie", alors en gros, on s'est mit d'accord qu'il fallait que je me tire pour éviter le pire, que je coupe tout contact aussi. C'est mon dernier souvenir de ce temps là... ensuite je suis retourné à la "rue". En solitaire. Le cauchemar de n'importe quel clodo. Il faut dire que j'avais perdu à peu près toute envie de me battre depuis ma séparation avec Harmony... C'est la seule personne qui m'a dit qu'elle m'adorait, que j'étais quelqu'un de bien, qu'elle s'occuperait de moi jusqu'à ce que je puisse le faire tout seul, à l'époque. Le fait de ne plus l'avoir près de moi m'a achevé moralement.

Mais je me suis relevé comme j'ai pu.

En grandissant, je me suis arrangé pour changer mes habitudes de "travail" afin de passer à autre chose qu'à faire les trottoirs. Mon physique m'a aidé, forcément. Depuis quelques années, je suis une "pute de luxe" comme vous dites, bien que je préfère dire que je joue le rôle de "garçon de compagnie" plus qu'autre chose. C'est un job moyennement facile d'accès... mais si j'ai réussi à rentrer dans le business, c'est le principal, non? J'ai commencé à me faire plus d'argent que vous ne pourriez l'imaginer grâce à ça, mais il me fallait un travail de jour. Alors j'ai suivis une formation de tatoueur en ville. C'est là que j'ai rencontré pour la première fois un gars nommé Andrew Winters. On a fait notre apprentissage en même temps et on est devenus potes assez vite. D'ailleurs, je suis sorti avec sa soeur y'a un an et demi, mais je l'ai lâchée par peur qu'elle réagisse mal le jour où elle apprendrait pour mon "travail de nuit". C'était mieux pour elle... et en plus, là, j'étais de toute façon en train de remettre en question ma personnalité. Il m'a fallu environ quelques mois pour comprendre que les filles n'avaient plus d'intérêt à mes yeux et un mois de plus pour l'accepter. Cercle vicieux... le truc, c'est que je pouvais pas remballer mes clientes sous prétexte que j'étais Homosexuel. Alors j'ai commencé à jouer la comédie et perdre le plaisir que j'éprouvais pendant longtemps à avoir des rapports sexuels. Après Harmony, j'étais brisé de l'intérieur... vide, il n'y avait plus de sentiments ni d'émotions dans ce que je faisais... et encore aujourd'hui, c'est difficile.

Il y a quelques temps, je me suis rapproché de mon pote-collègue au tattoo shop. Je vous passerai les détails... mais ce mec m'a rendu accro à lui. Je sais pas pourquoi ni comment, mais je suis tombé sous le charme. Il a su utiliser les bons mots et les bons gestes pour me redonner l'envie de croire en tout, à commencer par moi-même. Parce que non, je n'ai pas une image très positive de qui je suis, un bâtard qui court les rues depuis des années, ou une salope comme l'ont dit d'autres plus tard. Je sais pas quelle valeur j'ai quand on me prend à part, mais en présence d'Andrew, j'ai l'impression de pas être qu'un concentré de vide.