Une énième soirée branchée à laquelle Melchior Reid était de nouveau convié. S’il était fatigué ? Bien sur que non. Il en raffolait même, se montrer à tous, fier et plus beau que jamais. Plus que tout, il appréciait cette étiquette d’homme insaisissable qu’on lui avait posé. Il était difficile à suivre et difficile à contenter, une nuit suffisait amplement puis il disparaissait, comme avaler par l’obscurité dans laquelle il s’était engouffré. Il était connu comme un homme qui ne saurait se poser, pourtant rien de péjoratif ne courrait à son sujet, il savait rester respectueux avec ses partenaires, les traitant avec gentillesse et tendresse. L’on le qualifiait même parfois du Georges Clooney de San-Francisco, un gentleman célibataire dont le cœur était difficile à prendre, attisant la curiosité et la fascination des femmes qui croisaient sa route. Vêtu de son costume à quelques milliers de dollars, il descendit de sa voiture, la confiant au voiturier dans un geste simple avant de s’avancer vers l’entrée, ne se formalisant pas de la file d’attente. Melchior Reid ne faisait jamais rien comme tout le monde et en tant qu’abonné aux invitations VIP, il ne connaissait pas le fameux adage de la patience est vertu. Il était de ces personnes qui obtenaient tout ce qu’ils désiraient et ce dans la minute qui suivait. Il avait parfois trouvé cela agaçant car aucun réel défi ne se présentait à lui, cependant le reste du temps, cela lui était très agréable. Il faudrait être fou pour refuser une telle facilité dans son existence, ou bien hypocrite, or aux dernières nouvelles, le psychiatre ne répondait pas à aucun de ces critères. Ce fut donc sûr de lui qu’il se présenta au videur, ne prenant même pas la peine de s’arrêter, son visage était connu dans le milieu de fait, la porte lui était toujours ouverte.

« Votre carton d’invitation » Lui dit pourtant la masse de muscles qui peinait à tenir dans son costume à bas prix. Incrédule, Melchior, le regarda simplement. C’était la première fois qu’une telle chose se produisait et à vrai dire, il ignorait comment agir. Devait-il s’offusquer publiquement en se présentant, alors qu’il était certain que son visage n’était pas inconnu au jeune homme. Visiblement non.

« Je ne l’ai pas » répondit-il sur un ton suffisant, se sentant humilié d’en passer par là. « Je n’en ai nullement besoin puisque… »

« Pas de carton d’invitation, pas d’entrée » le coupa l’homme face à lui, visiblement agacé par son comportement.

« Je suis Melchior Reid, allez donc vérifier sur votre liste » déclara-t-il sans se départir de son calme, bouillonnant intérieurement car son nom ne semblait aucunement être familier à l'inconnu et puis le spectacle n’échappait nullement à ceux qui espéraient y entrer après avoir passé il ne savait combien d’heures dans la file d’attente. « J’attends » ajouta-t-il en voyant que l’homme était peu décidé à bouger. Cette soirée prenait tout à coup une tournure dramatique pour la réputation du psychiatre.

« charlotte, un des journaliste se plaint parce que sa conso’ n’arrive pas assez vite à son gout, va le voir, souris, occupe le. et trouve les barmen, bordel. » charlotte hoche la tête, attache son oreillette et part en direction du bar. ses talons noirs claquent sur le sol, ils résonnent dans sa tête, couvrant le bruit de la musique, elle déteste quand tout ne se passe pas bien. en arrivant, elle repère le journaliste en colère. elle lisse sa robe rouge et se dirige vers lui à grands pas. elle passe son bras sur ses épaules, elle lui sourit, lui dit qu’elle adore sa montre. il se détend. elle caresse son bras, doucement avec son index, elle lui tourne la tête et il oublie sa consommation qui n’arrive pas. son oreillette bipe, elle appuye sur le bouton. « charlotte ? » elle s’excuse auprès de l’autre. « oui ? » « vas a l’entrée, y’a un problème, quelqu’un n’a pas son invit’ et refuse dégager le passage, si c’est un low-cost tu le vires, sinon tu le fais entrer. » elle hoche la tête. elle reprend sa course folle jusqu’à l’entrée. costume taillé à la perfection. il n’a rien d’un low-cost. elle s’approche du videur. elle sourit à l’homme en costume. « votre nom ? » elle dit doucement. « melchior reid. » bougonne le videur. charlotte arque un sourcil. « c’est pas à toi que je posais la question. » elle lève les yeux au ciel. « si t'étais malin tu saurais qui c’est. laisse le passer. » elle s’écarte et laisse passer melchior reid. « je peux vous offrir quelque chose à boire ? pour nous excuser du désagrément. » elle sourit de toutes ses dents. dis oui pitié.