Parfois, il m'arrive de tourner en rond. De m'écorcher la personnalité avec de bonnes intentions. La conscience passe sur la blessure comme de l'eau de javel et j'écoute l'écoeurement des ombres qui ont décidé de vivre dans le creux de boîte crânienne. Oui, ça arrive. Parfois, j'ai ce désir bien ancré dans mes tripes, de tout foutre en l'air. Juste pour le plaisir. D'arrêter les efforts et de retourner aux instincts faciles de la femme que j'étais avant. La libertine, la brûlante. Celle qui ne reste jamais très longtemps. Et pour ne pas faire trop de conneries, je m'évade l'espace de quelques heures. Je grimpe dans ma voiture et je roule, simplement parce que j'en ai envie. Sans direction précise. C'est un peu ce qu'il se passe ce soir. Non, en fait, c'est totalement ça.

L'image de la fiancée se craquèle mais j'essaie de me rassurer et de me dire que ça finira par me correspondre. Je ne peux pas me plaindre, j'ai la vie rêvée par tant d'autres filles. Un fiancé sûrement trop bien pour moi et des projets qui grandissent doucement. Oui, je suis heureuse. Il ne reste plus qu'à l'accepter. Carreau ouvert, j'accélère un peu plus car le trafic n'est presque plus qu'un souvenir à cette heure-ci. La nuit s'est levée et l'éclatement des lampadaires illumine l'obscurité des rues. Et je continue de cette façon pendant presque deux bonnes heures, jusqu'à ce que mon attention s'arrête sur une jeune femme dont la crinière ne m'est pas inconnue. Je reconnais Jordan. Jordan qui semble être en mauvais état. Je me gare et sors du véhicule en me dirigeant vers la jeune femme. Je n'étais pas étonnée de son état car je la connaissais et je savais pertinemment qu'elle était solide mais quand même... Je l'appréciais et je devais m'assurer que les choses allaient bien. Jo ? Qu'est-ce qu'il s'est passé ? J'observais quelques instants les dégâts, en me demandant s'il ne valait pas mieux l'emmener à l'hosto.

Bordel qu’est-ce que ça fait mal cette connerie. Marcher c’est juste un supplice, c’est même pour ça que je me pose, adossée contre le mur de la rue et je pousse un soupire. Putain, ça s’arrête pas, j’ai même les larmes qui me montent aux yeux. Non, je chialerai pas, pour ces connasses et bordel ces putes vont en chier la prochaine fois. Elles ont pas intérêt que je les croise dans les rues, elles, je vais les finir avec une batte de baseball ou autre connerie du genre, putain, je vais les finir, les saigner, elles vont regretter de s’être foutues à trois contre moi. A trois, sérieux ? Je m’éclatais tranquille dans la boîte, je dansais, je collais les mecs qui me plaisaient, en mode chaleur, les corps qui se frottent les uns contre les autres, le genre d’ambiance que je kiffe quoi. Et puis là, je sors, pas envie de finir la soirée avec quelqu’un, envie de m’en griller une et pas seulement une clope, un bon joint pour être bien et marcher un peu, m’aérer l’esprit, bref être tranquille et c’est là qu’elles ont débarqué ces pétasses. Elles ont pas accepté que mes girls et moi on leur foute la raclée de leur vie, mais bon, elles ont pas de couilles s’en prendre à quelqu’un de seul, elles vont déguster j’le jure sur ma mère, je vais leur défoncer leur cul, oh bordel ouais. Merde, j’ai mal, truc de dingue. Y a les phares d’une bagnole qui m’aveuglent, bordel dégagez qu’est-ce que vous venez me faire chier là ! Je peux même pas parler, merde mais bon, je me calme quand je vois qui se trouve en face de moi, Svet, bah putain, j’ai un peu de cul finalement. « Une disputes de nanas » je dis seulement avec un sourire qui ressemble pas à grand-chose j’en suis sûre mais bon tant pis. « M’emmène surtout pas à l’hosto, c’est rien de grave » je rajoute, nan pas d’hosto pour moi, je suis pas une chochotte et puis je veux pas de questions « Ramène-moi chez toi »

Elle dit que ce n'est qu'une dispute entre filles, avec un sourire cassé que je lui reconnais bien. Je décide de ne pas insister, tout simplement car Jo ne fait pas partie des filles qui se plaignent à longueur de temps et ce, même lorsqu'elle est vraiment mal en point. La voir dans cet état me rappelle des périodes que moi-même j'avais vécu dans un contexte différent, avec d'autres personnes et je me dis que le temps vous bouscule sans que vous ne preniez conscience de quoi que ce soit. Presque en un claquement de doigts. Malgré ce qu'elle me raconte, je ne compte absolument pas la laisser dans cet état alors je l'emmène jusqu'à ma voiture en lui ouvrant la portière comme l'aurait fait un gentleman. Ouais, ça m'amuse. Après vous, Melle Wayans. Une fois en voiture, j'y entre à mon tour et je démarre en prenant le chemin de chez moi. Depuis que je connais Jordan, elle vit toujours les choses à cent pour cent, quitte à y laisser un peu de sa peau à chaque fois. Je comprenais un peu ce comportement car il y a quelques mois j'étais en plein dedans mais parfois, je me demandais pourquoi elle avait ce rythme. T'as toujours pas changé à ce que je vois. Un sourire sincère et amusé se dessine sur mes lèvres alors que je lui jette un regard complice. L'air de rien, un monde nous séparait mais cela n'a jamais empêché notre bonne entente et c'était plutôt cool au fond, car les moments que j'avais partagé avec elle ont toujours été cool. Que ce soit les soirées ou même les nuits, il restait peu de nanas comme elle et je la respectais pour ça. Après quelques minutes de route, je me garais devant la villa qui était vide, on est sorties de la voiture et je l'ai fait entrer. Fais comme chez toi surtout, te gêne pas. Je lui dis en balançant mon sac dans un coin. Je te sers quelque chose ? De la glace pour la douleur ou un truc du genre ?