Ce matin en me levant, j'ai décidé d'aller rendre visite à Alice. Elle me manque tellement que j'ai l'impression que chaque jour qui passe sans elle, m'écorche l'âme, détruit mon cœur. Mon nouveau chez moi est agréable, mes colocataires sont sympas et ils ne sont pas chiants. Me glissant sous la douche, je ferme les yeux, profitant du silence qui règne. Même le chien de Camil est silencieux, à moins qu'il ne soit sorti avec son maître. Je ne reste pas bien longtemps sous le jet mi-chaud mi-froid. Retournant à ma chambre, je me plante devant mon armoire dans laquelle trône trois bêtes chemises, une dizaine de tee-shirt et cinq pantalons. Je devrais peut-être aller m'acheter d'autres vêtements ? Mon salaire me le permets mais je ne sais absolument pas choisir les choses qui me mettent en valeur alors que je suis les blogs de mode actuelle. Soupirant longuement, j'opte pour mon sempiternel jeans bleu délavé et déchiré par mes soins ainsi qu'un tee-shirt blanc près du corps sans outrage. Mon bonnet noir est très important car c'est Alice qui me l'a offert et je le mets tout le temps. Je ne crains pas la chaleur alors un bonnet, sur la tête, ne me donnera pas davantage chaud. Enfilant une paire de baskets, je saisis mon sac en cuir, un autre cadeau d'Alice et y fourre mes papiers, mon iPod, mon téléphone... En bref, tous les accessoires nécessaires et je n'oublie pas mon appareil photo, mon Bridge, encore un cadeau d'Alice.

J'ai vérifié d'avoir tout fermé bien comme il faut. Aujourd'hui, il fait beau alors je vais aller au cimetière à pieds. Je suis plutôt sportif alors ce n'est pas quelques kilomètres qui vont me tuer, et puis, avec la musique à fond dans les oreilles, c'est encore plus rapide. Tellement rapide que, je n'ai pas vu le temps passer et mes jambes m'ont conduit à destination. J'ai acheté un bouquet de rose orangées, c'était ses fleurs préférées de son vivant, me voilà devant sa sépulture. Ma gorge se serre douloureusement et je ne retiens pas mes larmes. Il m'a fallu plus d'une semaine pour arriver à venir la voir après son enterrement et je ne reste guère plus d'une dizaine de minutes. Embrassant ma main, je la dépose sur son prénom puis me lève. Je ne vais pas rentrer de suite. M'installant sur le premier banc qui passe, je laisse mon chagrin glisser silencieusement hors de moi, chaque larme me soulage un peu plus et je me perds dans mes pensées, me remémorant mes souvenirs d'avec elle. « Bonjour, puis-je m'asseoir ? » Je sursaute bêtement et essuie rapidement mes larmes avant de sourire à la blonde : « Oui.. bien sûr la place est libre.. », et plus jamais cette place ne sera prise, Alice n'est plus.

Je me décale un peu, lui laissant davantage de place. Je ne suis pas spécialement d'humeur à parler mais je ne vais pas l'envoyer paitre. « Merci. » Je tente un sourire. Un sourire ridicule et sans conviction. Je me sens tellement mal que même sourire, devient le plus dur des obstacles que l'on peut trouver sur un parcours sportif. J'ai envie de rejoindre Alice mais, je sais qu'elle ne le voudrait pas. Je la vois déjà, les mains poser sur les hanches et tapant du pied par terre en me disant "Nolan Angel Blackbird ! Tu n'as pas le droit d'être ici ! Sale gosse, je t'ordonne de repartir d'où tu viens sur le champ, sinon tu recevras mon pied au cul ! Non mais oh !" Oui, c'est tout à fait ce qu'elle dirait. Je fixe mes pieds, souriant bêtement à cette image totalement irréaliste avant que mon sourire ne s'efface, laissant sa place à une expression de douleur plus qu'intense. Les larmes reviennent abondamment sur mes joues et je ne les retiens pas.

« Tenez. » Je relève la tête et prends le mouchoir que la blonde me tend gentiment. « Merci mademoiselle... » Je n'ai pas honte de pleurer. Tout du moins, généralement, j'évite de pleurer devant les gens mais là, nous sommes au cimetière alors, mes larmes n'ont pas besoin d'être cachées. Ici, je peux me permettre de laisser aller mon chagrin, quitte à crier ma douleur au monde. Bien sûr, je ne le ferais pas. Je ne veux pas que l'on me prenne pour un fou. Si je veux hurler ma peine, j'irais loin de tout. Loin des gens qui seraient susceptibles de me juger dans le mauvais sens. J'essuie l'eau qui coule sur mes joues et me mouche discrètement. Un silence s'installe. Un silence qui n'est pas gênant, tout au contraire. Ce silence est mérité et est apaisant. Après avoir rassemblé un peu mes esprits, je me tourne vers la jeune fille et lui tends la main : « Je m'appelle Nolan... et vous ? » J'essaye de nouer le contact mais, je ne suis pas sûr de m'y prendre comme il faut...

« Enchanté Nolan, je m'appelle Mia » Mia. Jolie Mia. Oui, je suis homosexuel mais cela ne m'empêche pas de trouver une fille jolie. Elle semble si fragile vu de près. Si cela se trouve, elle est tout sauf fragile. Je ne peux faire que des suppositions à ce stade, je ne peux qu'émettre des hypothèses sur ma nouvelle amie. Enfin amie, c'est vite dit, après tout, elle ne me connaît pas à ce que je sache ou alors, je suis célèbre sans le savoir ...? Imaginons la scène. La demoiselle se tourne vers moi avec un sourire splendide et me sort, avec une voix suave, "Oui, je sais qui tu es joli môme..." Hirk ! Non, en fait, je ne veux rien n'imaginer de la sorte ! Trop de bizarre, tue le bizarre. Et comme je suis quelqu'un de curieux, je serais totalement déçu si cela se produisait. Mais bon, je m'égare un peu là. Néanmoins, ce petit vagabondage de mon esprit a réussi à me faire un peu sourire, ce n'est pas rien. « Pardon de vous demander ceci mais, Est-ce que vous venez souvent ici ...? » Je ne suis pas sûr que cette question fasse le même écho chez elle. Elle risque de mal le prendre parce que j'essaye de rentrer dans sa vie privée, oui, c'est ce qu'elle pourrait penser. D'un autre côté, je ne peux passer ma vie dans le noir, à pleurer comme un enfant à qui l'on aurait pris le jouet favori. « Pardon, je suis indiscret... cela ne fait qu'une année que je suis ici et je ne vois pas beaucoup de personnes alors... alors forcément, si l'on me parle et bien je deviens curieux... Je suis désolé, votre vie ne me regarde pas après tout et je... je... » Je vais me taire parce que je m'enfonce tellement dans les méandres de la bêtise que, je me fais peur moi-même.