Il avait ouvert les yeux, après des heures ou peut-être des jours de coma. Il savait pas, il savait plus. Il avait plus la notion du temps. Il ne savait absolument pas quel jour on pouvait bien être, il savait uniquement qu'il était actuellement dix heures, que ça faisait donc plus de dix heures qu'il avait remis les pieds sur terre, entre autre. Qu'il avait quitté ce monde de rêverie qu'il avait habité durant. Il s'était réveillé en entendant la voix de Lera, en sentant sa présence près de lui et il trouvait ça complètement pathétique. Putain, ça avait l'air d'être sortie d'un film à l'eau de rose qui lui foutait la gerbe. Parce que je veux pas qu'elle pense que sa venue fut nécessaire à mon rétablissement, se disait-il en boucle. Il avait une migraine affreuse, il était fatigué, pourtant, il ne trouvait pas le sommeil. Il repensait sans arrêt à ce qu'il s'était passé. Comment avait-il fait pour se retrouver dans ce lit d'hôpital ? Il repassait la journée du drame en boucle, les yeux fermés, comme s'il regardait un film. Il n'avait pas bu, ne s'était pas non plus drogué. Il conduisait normalement, à la vitesse exigé et il regardait la route, plus concentré que jamais. Il avait beau chercher, il trouvait pas, il trouvait pas ce putain de détail qui aurait put expliquer l'accident. Il passe sa main sur ses yeux, fouille dans le tiroir à sa droite à la recherche de son téléphone. Il hésita quelques secondes à lui envoyer un message, pour qu'elle sache qu'il était réveillé. Mais il s'y résigna, jetant son téléphone au bout du lit. Et puis, alors qu'il avait trouvé le sommeil depuis seulement quelques minutes, il l'entendu entrer dans la chambre blanche. Il l'avait reconnut uniquement par le sons de ses chaussures qui claquaient au sol, au bras qu'elle avait posé sur son lit, comme pour vérifier qu'il était bel et bien en vie. Il y avait de quoi, après tout. Georgia apparu enfin face à lui, qui n'avait pas bougé de position et s'était uniquement contenté d'ouvrir les yeux. Elle avait  l'air inquiète et l'espace de quelques instants, il mit les reproches qu'il avait à lui faire de côté. Parce qu'elle était là, parce qu'elle avait l'air de s'être inquiétée pour lui. « Comment tu vas ? », il se dit alors que sa question pouvait paraître stupide. Elle n'avait pas l'air d'aller bien, il le savait, il l'avait presque sentie. C'était limite écrit sur son front. Et puis, il avait prononçait ces mots comme si c'était elle, la blessée. Il n'aimait pas la voir comme ça, alors il aurait aimé la prendre dans ses bras, mais il ne put. Parce qu'il ne pouvait tout simplement pas se lever, par interdiction des médecins. « Qu'est-ce que tu fais là ? », simple question qui attendait une réponse toute aussi simple. Elle n'était pas au courant qu'il s'était réveillé, du moins, c'est ce qu'il croit. Parce qu'il n'avait finalement pas envoyé de message pour le lui dire. Le regard plongé dans celui de la jeune femme, il cherche une réponse, une réponse à une question qu'il n'a même pas encore posé. Il avait beau être tout juste sorti du coma, il n'avait en rien oublier tout ce qu'il avait vu, lu et entendu avant son accident.

Il avait sentie le contacte de ses lèvres contre son front et ça l'avait fait sourire. Elle était là, avec lui, et c'est ce qui importé le plus à l'instant présent. Il ne saurait vraiment décrire ce qu'il pouvait bien éprouver pour cette fille. Elle était tout simplement différente, différente de toutes les autres. Elle l'informa sur le fait qu'elle avait été présente tout les jours, bien qu'il le savait déjà, les infirmières l'en avaient informé. Alors il imagina l'espace d'un instant le nombre d'heures, de minutes, qu'elle avait bien pu passer ici. L'aurait-il fait lui ? Aurait-il eu le courage de la voir inerte, sur ce maudit lit ? Il ne sait pas. Mais, certainement pas. Il empoigna la télécommande du lit, appuyant quelques instants sur les boutons pour pouvoir être en position assise. Il fit une petite grimace, parce qu'il avait mal. Putain de fracture. Oui, il s'en était plutôt bien sortie. Une simple fracture des cotes. ça faisait mal, mais il aurait pu crever alors, à cette pensée, il ne voulait pas se plaindre. "Tu vas rester là, à me regarder dormir, encore ?", il insista sur le mot encore. Elle avait passé des jours à le regarder, inerte, et elle se prétendait encore capable de le voir lui, les yeux clos. Son ventre se mit à gargouiller, il avait faim. ça faisait combien de jour qu'il n'avait pas manger un truc potable ? Alors il avait subitement envie d'enfiler ses habits, de prendre ses jambes à son cou et s'en aller. Il avait toujours détesté les hôpitaux. Il avait vu, des années auparavant, la femme qu'il aimait passer ses jours dans ces lieux. Ces lieux maudits. Comment pouvait-il aimer y être ? Accepter d'avoir une chambre à son nom, l'espace d'un instant ? "T'as vue Aksel ?", il pensa au jeune homme qu'il considérait comme son frère. Comment allait-il, lui aussi ? Puis il ne dit plus rien, regagnant le calme qui régnait dans sa chambre lumineuse, beaucoup trop lumineuse. Il observa les fait et geste de la jeune femme jusqu'à ce que son regard se pose sur ses mains. Il les fixa, pendant un long moment. Il retrouva la raison, elle n'avait pas de bague. Pourtant, il se rappelait parfaitement de ce qu'il avait pu lire, comme s'il avait l'image face à lui. "Tu ne portes pas de bague, lui fit-il remarquer, avant de reprendre. Pour une femme marier." Il repose son regard fatigué sur la jeune femme, attendant la moindre réaction de sa part. "Quand est-ce que tu comptais me le dire ?"

Il ne la quittait pas du regard, alors qu'elle baissait les yeux. Elle fuyait, il le savait. Il se doute alors que, si elle ne parlait plus à Aksel, c'était pour la même raison. Son mariage. Il dut répéter ces mots à plusieurs reprises dans sa tête pour réellement réaliser l'étendu de la situation. Son mariage. Georgia s'était marié et ça le foutait en rogne. Pour des tonnes de raison. « Je sais pas, demain je fais la même putain de connerie que toi, je t'en parlerais directement. », sa voix s'était involontairement fait sec. Pourtant, il voulait pas. Il voulait pas lui faire de reproche, hausser le ton, gâcher leur retrouvailles. Il voulait pas. Mais c'était plus fort que lui, il pouvait pas faire semblant. Ça l'avait tellement rongé quand il l'avait apprit et ça le rongé encore aujourd'hui. Comment avait-elle pu faire ça ? Qu'est-ce qui l'avait poussé à le faire ? Il resta silencieux alors qu'elle termina sa phrase. Le moment n'était pas bien choisit, elle n'avait pas tord. Hausser le ton dans un hôpital, ce n'était pas top aussi. Mais il s'était déjà aventuré sur ce terrain glissant, il ne se voyait pas faire marche arrière, c'était déjà trop tard. Il ne dit rien, durant quelques longues minutes. Seul le bruit de leur respiration se faisait entendre, il remplissait la pièce. A nouveau, il ferma les yeux, posant sa tête contre son oreiller. Putain Georgia, pourquoi t'as merdé comme ça. « Je pense que y a pas de bon moment, pour parler de ça. Alors autant le faire maintenant. », il se maudissait d'avoir cette froideur dans la voix, cette froideur qui ne lui appartenait, du moins lorsqu'il s'adressait à elle. Alors qu'il s'apprêtait à reprendre la parole, une infirmière débarqua dans la chambre. Toujours là quand il faut pas celle là, pensa-t-il. Elle se contenta de lui sourire, de lui donner ses médicaments à prendre et elle se volatilisa aussitôt. Elle avait certainement comprit, à ta tête d'enterrement ou peut-être au regard de Georgia, que c'était pas le moment de taper la discussion. Tant mieux. « Dit moi que t'en avais pas envie. », le regard de nouveau posé sur la jeune femme, il la suppliait presque de lui dire ces mots. Ça l'excuserait, presque, d'avoir agi comme une enfant. Une adolescente qui met pour la première fois ses pieds à Vegas. Puis il prend son verre d'eau, avale ses cachets rapidement avant d'en boire une gorgée. Il va devoir en prendre pendant combien de temps, ces trucs là ? C'est pas comme s'il souffrait, il avait juste des douleurs aux cotes, ça allait vite disparaître. Demain, il serait sur pied et samedi, il serait sorti. Contre avis médical s'il le faut, il a pas que ça à faire, perdre son temps dans un putain d'hôpital. Il doit bosser. Il a prit du retard, certainement.