Il arrive que je me noie dans la confusion de mes propres pensées, que tout autour de moi devient flou et beaucoup trop abstrait pour que mon esprit puisse s'alléger. Lorsque ça arrive, je m'isole. J'oublie le monde qui semble, pour une fois, crier trop fort pour moi ou je me ressource avec ce qui m'entoure. Une simple promenade sous la pluie, une escapade vers une destination choisie au hasard. Seulement je n'avais pas vraiment le courage ni la motivation pour agir comme je l'aurais fait normalement mais j'avais rencontré une fille merveilleuse qui se prénomme Athéna et qui m'a proposé une ballade à cheval pour m'aérer l'esprit et pour oublier toutes les petites morsures qui s'étaient agrippées à moi ces derniers jours. J'avais de la chance d'avoir rencontré Athéna car elle était si semblable à moi sur certains points qu'elle me rappelait que je ne devais pas me perdre pour quelqu'un et que je devais rester fidèle à ce que je suis. Sans le savoir, elle m'éclairait le chemin et il suffisait que je passe un peu de temps à ses côtés pour que tout s'illumine à nouveau autour de moi. Le mouvement des gens dans cette ville me donnait parfois le vertige. Non pas parce qu'ils allaient trop vite mais parce que les choses pures disparaissaient à une vitesse bien trop grande. C'est sans doute la difficulté de ces derniers temps qui me fait penser ça mais aujourd'hui, plus que jamais, je me rendais compte que le monde entier était parsemé de ratures. Comme des tâches d'encre qui bavent et qu'on a bien du mal à effacer. J'ouvrais les yeux sur la réalité, sur le sarcasme des faux sourires. Sur la désinvolture que les gens offrent face à la beauté des choses simples.

Si j'aimais autant Athéna, c'est car elle me semblait en dehors de toutes ces choses que je méprise. Elle restait elle-même et elle gardait une constante luminosité. Elle gardait la simplicité et c'est ce dont j'avais le plus besoin pour me retrouver. Alors mon après-midi était forcément programmée et j'avais accepté son invitation avec plaisir. Athéna était monitrice dans un centre équestre et elle s'était arrangée pour que l'on passe un moment ensemble avec les chevaux. Cela faisait des années que je n'étais plus monté à cheval. J'espérais que je n'avais pas trop perdu la main. Dans le cas contraire, je suis certaine que Athéna allait savoir me rassurer et me guider puisque c'était son travail après tout. Après lui avoir confirmé ma présence par message, j'ai été prendre une douche pour ensuite enfiler de vieux vêtements usés. Il ne s'agissait pas d'un défilé de mode et je comptais être à l'aise au maximum. J'ai choisi un long t-shirt, dans lequel je flottais un peu, et un vieux slim bleu clair que j'associais à une paire de converses. Une fois prête, j'ai pris les transports en commun pour arriver au centre équestre.

Écouteurs aux oreilles, je marchais à travers le centre à la recherche d'une grande blonde aux cheveux longs. Ça a duré quelques minutes avant que je n'aperçoive sa silhouette au loin. J'enlevais mes écouteurs en faisant taire la voix de Jeff Buckley. Puis j'ai couru jusqu'à elle en lui sautant dessus pour la câliner et en espérant l'effrayer. Enfin ça, c'était ce que j'espérais. Il était probable qu'elle réagisse de façon brutale mais j'en riais déjà d'avance.

En ce moment, tu voyais bien que ça n'allait pas de son côté. Tu le sais, tu le sens. Elle est ta meilleure amie, ta moitié, ton tout. Et tu la connais par coeur. Elle aurait beau essayé de te mentir, tu parviendrais à déceler le vrai du faux rien qu'en l'observant, rien qu'à la position des traits de son visage. C'est vrai qu'avec le métier que tu faisais tu n'avais pas forcément le temps parfois, et tu le regrettais car parfois, tu n'avais pas l'impression d'être assez présente pour elle, alors qu'elle répondait toujours présente lorsque tu en avais besoin. Cependant, tu faisais tout ce qui était en ton pouvoir pour répondre présente à l'appel, même si ce n'était pas la journée, tu te rendais chez elle le soir, ne serait-ce que pour lui changer un peu les idées, quitte à te coucher tard, bien que le lendemain tu te lèves tôt tu t'en fichais pas mal. C'était Mad avant tout. Mad, Khris et Appoline étaient et demeureraient les personnes les plus importantes à tes yeux, celles pour qui tu te battrais corps et âme pour qu'ils soient heureux. Tu avais beau jouer la fille forte, qui ne montre pas ses sentiments, au plus profond de toi, ta meilleure amie, tu l'aimais de tout ton coeur, c'est pourquoi tu faisais en sorte de tout faire pour qu'elle se sente bien dans les pires moments. C'est d'ailleurs pour cette raison que tu avais posé une demi-journée au centre afin de passer du temps avec elle.
Pour toi, la meilleure thérapie au monde, ce sont les chevaux. Quand rien ne va de ton côté, il te suffit simplement de te rendre au centre, et dès lors où tu te retrouves en contact avec cet animal aussi fort, aussi puissant qu'est le cheval, tout semble allait mieux, tu oublies tout, tu ne penses qu'à cet animal et le lien qui vous unit. C'est quelque chose qui ne s'explique pas, tu pourrais passer des heures et des heures leur côté, les observer, t'en occuper. C'est pourquoi, et connaissant Mad, tu étais sûre qu'elle allait accepter de venir au centre pour faire une petite balade à tes côtés. Tu savais pertinemment que plus jeune elle montait à cheval, mais les choses avaient fait qu'elle avait arrêté contrairement à toi qui a posé tes fesses sur le dos d'un cheval à l'âge de trois ans, et qui ne s'est jamais arrêtée. D'ailleurs, bien que tu ai ta demi-journée, cela ne t'empêche pas de travailler le matin. Samedi matin, tu as des cours à donner. Des petits, des grands, bon... Principalement les grands, les galops 3/4/5/6 et 7. Mais quand vraiment il y a besoin, tu donnes également cours aux petits. Tout le long de la matinée, tu penses à l'après midi qui t'attend. Il te tarde vraiment que ta meilleure amie pointe le bout de son nez. Les cours terminés, tu te rends au club house pour manger un morceau. Tu réfléchis également au cheval que tu vas donner à Mad'. Tu ignores son niveau, mais tu préfères lui attribuer un cheval sûr. Qui ne fera pas de blague à sa cavalière. Après avoir fini de manger, tu ramènes tes affaires à la voiture, puis tu retournes dans les écuries t'occuper de ton cheval. Un beau bai que tu as depuis désormais trois ans. Bien que tu connaisses ce cheval depuis cinq ans, puisque tu l'avais en demi-pension chez un particulier, seulement suite au décès de ce dernier, tu en as hérité. Le plus beau cadeau que l'on ait pu t'offrir. Tu as promis au défunt de prendre soin de son cheval jusqu'à la fin de sa vie. En ces cinq années, vous avez développé une telle complicité. Un seul regard, et tu le comprends. Il t'écoute au doigt et à l'oeil. Un bel étalon câlin, proche de l'homme, au sang chaud comme tu les aimes. Le cheval de tes rêves clairement. Tu entrais dans son box, lui faisant remarquer ta présence d'un appel de langue. Il tourne la tête en ta direction, les oreilles bien dressées, il t'observe avant d'approcher le bout de son nez de ton visage. Tu ne peux t'empêcher de sourire et de lui déposer un bisou sur le bout de son nez. Puis tu t'approches de lui entourant tes bras autour de son encolure pour le câliner. Après ce moment tendresse, passons aux choses sérieuses, tu lui enfiles son licol pour le sortir de son box, et l'attacher à l'anneau d'attache qui se trouve juste à la droite en sortant de son box. Une fois attachée, tu t'apprêtes à aller chercher le matériel nécessaire, mais tu es pris de court quand tu sens quelqu'un te sauter dessus. Tu sursautes, surprise seulement, tu ne mets pas longtemps à deviner l'actrice de cette supercherie. Ta meilleure amie. Tu te retournes pour la prendre dans tes bras. Une chose est sûre, heureusement qu Twinner n'a peur de rien. Sinon, il aurait déjà cabré et tout le tutti quanti. « T'es en avance dis donc ! » Tu la regardes de plus près vêtue d'un slim bleu. Bon ce n'est pas un pantalon d'équitation mais elle a prit le pantalon qui était le plus adapté à la situation. « C'est que ça te va bien les pantalons moulant ! » t'exclames-tu d'un ton taquin. Bien que tu sois branchée fille, l'idée n'avait jamais effleuré ton esprit d'une quelconque attirance envers elle. Pourtant, elle était belle, avait tout pour elle. Mais elle était ta meilleure amie, et sa s'arrêtait là. D'ailleurs elle n'avait jamais eu peur et ne t'avais jamais jugé de ce côté là, elle t'avais prise telle que tu étais, et c'est ce que tu appréciais chez elle. Car parfois, on ne va pas se leurrer, mais l'homosexualité pouvait faire peur à certaine personne. Foutu préjugé. « Alors prête à monter ? » lui demandes-tu, tout en caressant l'encolure de ton poney qui s'amuse à gratter le sol avec son antérieur gauche. « Je crois que monsieur s'impatiente » lâches-tu en riant légèrement. Twinner sentait bien que quelque chose se tramait, que tu ne l'avais pas sorti de son box innocemment. Il te connaissait autant que tu connaissais. Ne dit-on pas qu'il n'y a pas que votre cheval vous ressemble comme votre reflet dans un miroir ? Twinner en est la preuve. « Tu veux peut être voir le cheval que tu vas monter non ? Rassures toi, je ne t'ai pas mis le plus chaud du club. Je t'ai mis un amour de cheval, il est doux, tu vas voir, je suis sûr que tu vas l'adorer ! »

Je n'arrive pas vraiment à jouer la comédie avec Athéna et même lorsque j'essaie, elle devine et découvre bien assez tôt que je ne vais pas aussi bien que je peux le prétendre par moment. Les gens font moins attention à ce qu'il se passe dans votre esprit lorsque vous souriez à tout bout de champ, lorsque vous riez fort et que vous utilisez une tonne de couleurs à a peu près toutes les occasions de la journée. Si parfois je m'obscurcissais, Athéna arrivait comme un petit soleil et tout allait mieux. Je me disais que ça devait être ça ; une meilleure amie et rien que pour sa présence, je voulais qu'elle soit certaine de pouvoir compter sur moi à tout moment. Mes insomnies avaient été répétitives ces derniers temps. Ça se voyait à la couleur glauque de mes cernes mais les choses s'arrangeraient d'elles-même, j'en été certaine et je comptais bien profiter de cette journée pour me remettre sur pieds. T'es en avance dis donc ! Je plaidais coupable. C'est vrai que j'étais en avance mais j'étais plutôt pressée de la voir et je n'avais rien d'autre de prévu pour la journée. Aujourd'hui, c'était Athéna et c'est tout.  Ok, mea culpa. J'étais impatiente de te voir, je l'avoue ! Elle avait un emploi du temps assez chargé, ma petite Athéna alors je profitais toujours au maximum des instants qu'elle arrivait à nous trouver. C'est que ça te va bien les pantalons moulant! Sa façon de me lancer ce genre de remarques, ça a toujours tendance à me faire rire. Sans doute parce que j'ai un peu de mal avec les compliments. Pourtant, venant d'elle ça me faisait plaisir car même si notre relation n'a jamais été ambiguë, je savais qu'Athéna avait un bon œil concernant les filles car elle était lesbienne et ça ne m'avait jamais posé problème puisque mon frère était homosexuel lui aussi. On est en 2014, ce genre de choses ne devraient plus être remises en question. Alors prête à monter? L'impatience me chatouillait un peu le ventre. Bien sûr, j'avais arrêté l'équitation depuis plusieurs années mais cela n'avait jamais rien effacé des bons souvenirs que j'en ai gardé. Parfois, je préférais être avec les animaux qu'en compagnie de la race humaine. Leur présence était quelque chose de rassurant, envers laquelle je ne ressentais aucun doute. Totalement, si tu savais comme je suis impatiente. C'est un cadeau génial que tu m'offres là. Et j'étais sincère. Longtemps, je m'étais dit qu'un jour, je remonterais sur un cheval mais au final, l'idée s'est toujours évaporée. Elle se remettait constamment à plus tard. Je crois que monsieur s'impatiente. Je l'écoutais rire en observant la beauté de son étalon. C'est vrai qu'il était élégant Twinner. Je trouvais qu'il correspondait totalement à Athéna et le lien qui les unit les rendent encore plus beaux ensemble. C'est rare d'avoir une telle complicité avec un animal et le voir me rendait nostalgique. Mon sourire s'élargit d'avantage face à cette scène. Tu veux peut-être voir le cheval que tu vas monter non ? Rassures toi, je ne t'ai pas mis le plus chaud du club. Je t'ai mis un amour de cheval, il est doux, tu vas voir, je suis sûre que tu vas l'adorer! Sur ce point-là, je lui faisais entièrement confiance. Je lui avais fait part de mon expérience avec les chevaux, au court d'une de nos discussions. Elle savait parfaitement que je n'étais pas grimpée sur un cheval depuis longtemps mais je ne me faisais aucun souci donc j'acquiesçais en lui lançant Je te suis ! Montre-moi cet ange.