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Mercredi 21 août 2013 https://www.youtube.com/watch?v=S1s-DHNptCQ
» Bonjour maman. En cherchant à nettoyer mon placard, je suis retombée sur ce carnet aux pages noircies de mes maux. Tu t’en souviens, hein ? De toutes ces pages trempées de larmes, déchirées de colère, remplies de pensées. Je ne me rappelais même pas de sa présence à vrai dire. Je croyais l’avoir jeté, avec toutes mes autres affaires de l’orphelinat. Tu te souviens, cet endroit dans lequel tu m’as délibérément jetée ? Je me demande toujours la raison de ton acte, tu sais. Cette question hante mes nuits et me bouffe. La dame de l’orphelinat ne cessait de me répéter que c’était pour mon bien, pour me protéger. Mais merde, me protéger de quoi ? Tu avais l’air heureuse sur l’unique photo que tu m’as laissée. Tu avais l’air de m’aimer. Alors, pourquoi ? Tu ne sais pas ce que ça fait de voir tous ces gens trouvant du réconfort dans les bras de leurs familles. De sentir leur extase, leur joie. Celle de voir leur famille au prochain Thanksgiving. Tu crois que ça fait quoi quand t’es seule pour te souhaiter un putain de joyeux anniversaire ? Quand y’a que toi pour y penser, pour t’offrir un cadeau. Eh ben, je vais te le dire, moi. Ça fait mal. Ça fait une putain de douleur qui te bouffe de l’intérieur. Ça te fait te sentir isolé, abandonné. Ouais, je me sens seule tu sais, maman. J’ai l’impression d’être différente, de venir d’un autre monde. Parce que, quoi que je fasse, où que j’aille, je pourrais devenir qui je veux. Je peux m’envoler pour l’Italie, prétendant m’être enfuie d’un mariage forcé à un prince vaniteux, personne ne sera là pour le confirmer. Cela peut sembler amusant un instant, mais imagine, vivre toute une vie ainsi. En sachant que personne ne s’inquiètera si tu meurs au fin fond de la forêt amazonienne. Mais ça me donne vraiment envie de me barrer de ce monde, putain. Et là, tu l’aura bien dans le cul. Tous tes sacrifices te retomberont dessus comme de la merde. Celle que tu es. Certes, mes mots font mal. Mais peut-être que tu sentiras mieux la douleur que je ressens comme ça. Parce que malgré tout, même si tous s’entêtent à dire que seul on ne souffre pas, seul il y a personne pour nous décevoir, rien ne vaut l’amour d’un être cher. Au moins, on sait qu’on compte pour quelqu’un, que notre mort touchera quelqu’un. Mais ça, tu n’y avais pas pensé. Dans to geste égoïste, tu n’en pensais qu’à bien. Soi-disant. Parce que tout ça, ce sont des conneries. Si tu voulais mon bien, t’aurais cherché à te démerder pour me tenir en vie, contre toi. Et pas à des kilomètres, dans un endroit grouillant d’enfants, aussi désespérés que moi. C’est horrible, je te jure. Quand tu vois tous ces sourires tristes, ces rires de façade. Ces espoirs muets. C’est comme un miroir qui te renvoie en pleine face ton air désemparée.
Je craque de plus en plus, tu sais maman… Regarde ce que je suis devenue, regarde jusqu’où je suis arrivée. En es-tu fière ? Es-tu fière de moi, de là où tu te trouves ? Pourtant tu vois, tout ça, un jour, ça s’effondrera. Ca volera en fumée, le jour où je n’aurai plus la force de continuer. Pour l’instant, je suis encore sur cette corde tendue. Mais combien de temps encore ? Je sais que ce ne sont que des moments passagers, des blues éphémères. Mais quand ils viennent, ils me prennent aux tripes, ils m’effondrent. C’est dur, maman… Tu vois, juste relire ce journal, ce pseudo recueil de lettres, qui pourtant ne te parviendront jamais, ça m’arrache des cris de douleurs. Enfin bon. Je fais avec. Je me rends compte que ça me décharge d’écrire. Je devais aller mieux à l’époque. Peut-être que je devrais peut-être continuer à écrire alors. Peut-être que ça m’aiderait de nouveau. En tout cas, maman, saches une chose. Malgré ma haine, ma colère et mon désespoir, malgré tout, saches je t’aime quand même. Ou du moins, j’aime l’idée que je me fais de toi. Futile idéal. |
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