J'attrapai le paquet que me tendait la caissière, lui offrais le plus faux des sourires et me dirigeai d'un pas rapide vers la porte de la boutique après daigné lancer un « Bonne fin de journée. » en l'air avant de franchir la porte. L'air froid me surpris une fois de plus en sortant et je ne pus m'empêcher de frissonner tout en resserrant ma veste contre moi. A la sortie du magasin, j'hésitais une seconde puis me dirigeais dans la rue principale du quartier pour continuer de me balader un peu en faisant du lèche-vitrine. J'avais failli commencer à me chercher un costume d'Halloween pour la fête organisée par Julie et Sierra, mais au final j'avais convenu d'y aller avec Lera, Léonie et peut être Eanna. D'ailleurs il fallait toujours que je choisisse mon costume, même si Lera m'avait déjà dit, quand je lui avais demandée son avis, qu'elle me verrait bien en Pocahantas. On verra. En tous les cas, j'avais hâte d'y être.

Je continuais de marcher lentement dans les rues, en espérant croiser Shawn - avec Alex peut être ? non pas du tout - , Léonie, Peter ou qui que ce soit avec qui je pourrais passer la soirée. Quand je compris que ce n'était pas mon jour de chance, je décidais de rentrer tout de suite. Je devais avoir deux ou trois trucs à terminer pour la fac et je ne voulais pas me mettre de retard. Je passais déjà énormément de temps dans les soirées ... Me rendant compte que j'avais laissé ma voiture de l'autre côté de la rue, je m'arrêtai brusquement et me retournai d'un coup. La personne qui devait marcher derrière moi me rentra alors dedans et envoya valser mon sac à main qui atterrit par terre à nos pieds. Je m'écartai de l'inconnu tout en regardant le contenu de mon sac, par terre, d'un air énervé. « Pardon .. désolée j'ai pas fait attention ! » lançai-je alors avec un sourire forcé. Je relevai la tête, et ouvris de grands yeux en découvrant l'identité de l'inconnu, qui était en fait Domenico. « Dom' ? » demandai-je bêtement. Je rougis brièvement et me baissais pour ramasser mes affaires, ce qui était plutôt histoire de me donner quelque chose à faire pour ne pas rester plantée devant lui en rougissant bêtement.

Il se pencha également pour m'aider à ramasser mes affaires, ce dont je lui fus reconnaissante tant le contenu de mon sac s'était éparpillé sur le goudron autour de nous. En une minute tout fut remis à sa place - ou plutôt tout était revenu en bordel dans mon sac - et en me relevant je relevai également vers lui des yeux interrogateurs. Il n'avait pas réagit depuis que j'avais lancé mon « Dom ? », pourtant j'étais sûre de moi à 100% que c'était bien lui. Même si la dernière fois que je l'avais vu c'était .. eh bien c'était il y a plusieurs mois maintenant, et nous étions plutôt bien arrosés tous les deux ... Cependant j'étais sûre que c'était lui, là, l qui se trouvait devant moi, Domenico, dont j'ignorais d'ailleurs le nom de famille. Il parut enfin me reconnaître, et, après une brève hésitation, me lança « T'habite à San Francisco ? ». Eh oui, quelle surprise. C'est vrai que c'était assez fou de le recroiser maintenant, ici, alors qu'on ne s'était pas croisé pendant tous les mois qui avaient précédés. Enfin de toute manière je ne savais même pas si il habitait à San Francisco, si ça se trouve il était de passage à SF la nuit où nous nous étions ... rencontrés .. et il n'était pas ici pendant les mois qui avaient suivis. Après une autre brève hésitation, il ajouta « C'est bien Kim ton nom? » d'un ton qui se voulait enjoué du genre je-suis-trop-un-beau-gosse-je-me-souviens-du-nom-de-la-fille-avec-qui-j'ai-couché-y-a-six-mois.. Là, ma surprise fut telle que j'ouvris la bouche sans même m'en rendre compte et ouvris de grands yeux. Je m'en rendis compte quelques secondes plus tard et refermai la bouche, mais en restant surprise. Ne sachant pas trop comment lui répondre - d'un ton sec du genre merci de me prendre pour une autre ! ou à la fois sympa je sais qu'on s'est vu une seule nuit il y a plusieurs moi mais t'aurais pu faire un effort - si bien qu'au final je réussis à articuler difficilement un « Euh ... non c'est pas moi. ». De toute façon, vu sa tête, il avait déjà compris qu'il avait fait une gaffe en voyant ma réaction. Puis j'hésitais entre lui dire mon prénom ou le laisser galérer pour le trouver, puis finalement j'eu pitié en me disant qu'il aurait déjà assez de mal à se tirer de la situation actuelle, pas la peine que j'en rajoute une couche - quoique c'était assez tentant. « Moi c'est Skye. » finis-je donc par ajouter d'un ton sec. Puis, parce que je ne pouvais jamais me retenir, « C'était qui Kim ? » ajoutai-je, avec un petit rire pour essayer de détendre l'atmosphère.

Il hocha la tête quand je lui annonçai mon prénom comme pour me signifier qu'il le savait, mais que ça lui était juste sortit de la tête au moment voulu. Vous savez, ce petit mouvement de tête qu'on fait tous quand on essaye de faire croire que si, si, on le savait et que vous êtes juste en train de lui rappelait quelque chose qu'on savait déjà. Eh bien il l'a fait, mais je ne savais pas si je devais le croire ou pas. Une grande partie de moi se méfiait de lui désormais. En tout cas, se méfiait de sa mémoire qui avait l'air d'avoir un sérieux problème ! Je sais que je n'aurais pas dû lui en vouloir. Après tout on s'était vu une nuit il a presque un an maintenant, dans des circonstances qui faisaient que la mémoire n'était plus très fraîche rien que quelques jours après. Mais j'étais comme ça, rancunière pour un rien. Alors oui, je lui en voulais de s'être trompé de prénom c'est pourquoi je lui avais rappelé d'un ton sec.

Avant de répondre à ma question, il soupira longuement. Un soupir de lassitude, d'excuse - si ça existait, un soupir d'excuse déjà - ? Je ne savais pas, mais j'attendis sa réponse qui ne tarda pas « C'est toi. » me dit-il d'abord. Bien, je m'appelle Kim maintenant ! pensais-je d'un ton railleur. « Ton nom m'a tout simplement échappé. » m'avoua-t-il. Je lui en voulais, certes, mais d'un autre côté je me trouvais ridicule de bloquer notre .. relation si on pouvait l'appeler comme ça - vu qu'il n'y avait pas grand chose pour l'instant - juste à cause d'une histoire de prénom. Mais en même temps, cette erreur de prénom voulait dire beaucoup de chose pour moi ... et me rappelait quelques souvenirs aussi. Bref, mes pensées s'entrechoquaient et je ne savais quelle décision prendre entre devenir la « gentille » ou la « méchante » Skye. Je ne savais toujours pas quoi ni comment lui répondre quand il me poussa doucement sur le côté, m'entraînant avec lui pour déboucher le passage que nous bouchions depuis quelques minutes. Je ne m'en étais même pas aperçue ! Comme s'il avait lu dans mes pensées, il ajouta ensuite du même ton embarrassé « Je sais que les apparences jouent contre moi, mais je ne suis pas comme ça... ». Je soupirais. Pourquoi est-ce que je ne savais jamais quoi dire dans de telles situations, moi qui était pourtant si spontanée d'habitude ? « Ecoute... » commençai-je d'un ton posé. En vérité, je ne savais même pas ce que j'allais dire et hésitais plusieurs secondes « Je sais même pas si t'es comme ça ou pas, je te connais même pas après tout ... » C'est vrai, j'allais pas le juger après une nuit, même si sa remarque m'avait vexée. Ne sachant pas trop quoi lui dire ensuite, j'optai pour une pointe d'humour à la Skye. Ayant en tête à cet instant les images de l'instant où il était partit de la chambre, moi le traitant de tous les noms en lui balançant tout ce que j'avais sous la main, je lui lançai en riant « Au fait, je t'avais pas fait mal j'espère ? ». Je pense que je n'avais pas besoin de lui préciser de quoi je parlais, il devait avoir deviné. En riant, parce que j'avais envie de dissiper le malaise qui s'installait peu à peu quand on parlait de cette fameuse nuit. Pour lui montrer que pour moi c'était du passé aussi, que je ne lui en voulais plus.

Moi qui étais une fille à soirée - personne ne pourra vous dire le contraire ! -, j'étais habituée aux histoires d'un soir. Il y avait d'ailleurs eu une époque où j'en étais la spécialiste, pour ne rien vous cacher. J'enfilais les aventures les unes après les autres au fur et à mesure que les soirées se présentaient à moi. C'était une époque où j'étais un peu perdue peut être, cette période que nous avons tous, à vivre dans le moment présent sans se soucier des conséquences et sans même penser qu'il puisse en avoir. Je m'étais ensuite calmée, reprenant en quelque sorte ma vie en main (même si on ne pouvait pas dire que je l'avais totalement lâchée) en essayant de me reconstruire au maximum. Certes il m'arrivait encore de déconner et finir dans le lit de certains mecs pendant quelques soirées bien arrosées, mais j'essayais d'être moins « libertine » maintenant. Evidemment, c'était pendant cette période où j'essayais de me reconstruire que Domenico était arrivé. Je m'étais promis de ne rien faire de con pendant cette soirée, mais bon il était là et je devais avoir un peu craqué sur lui pendant la soirée. Alors évidemment, c'était arrivé. Et oui, j'avais peut être été conne de penser qu'il y aurait quelque chose après tout ça, mais oui j'avais été conne ce soir là de toute façon. « On s'est rencontré au mauvais moment. J'avais des... problèmes à cet époque et ça m'a fait dérapé. » Je pris quelques secondes sans réagir, sans rien laisser transparaître afin de tourner ces mots dans ma tête pour en comprendre le vrai sens. Etait-ce Tu étais une erreur de parcours ou vraiment des excuses pour sa conduite ce soir là ? Enfin, notre conduite après tout. Moi, quelle était mon excuse ? Je n'en avais pas réellement, à part être bourrée évidemment. Une nouvelle fois comme s'il lisait dans mes pensées, je l'entendis me dire « Sache que tu n'as rien à voir avec la tournure des évènements cette soirée-là. Tout est de ma faute. Ce n'est pas toi, c'est moi. » Etonnée d'un tel aveu en quelque sorte, j'essayais de le rassurer « Oh t'inquiète c'est pas entièrement ta faute, c'était la mienne aussi ... » lui assurai-je avec une moue d'excuse - d'excuse, en quelque sorte. Il ajouta qu'il était vraiment sincère. Même si je ne le connaissais pas, je fus étonnée - dans le bon sens - de son sens de l'honnêteté qu'il me montrait là. Je décidai de le croire. « T'en fais pas, je te crois. Mais vraiment, te crois pas seul responsable. » Je détestais que quelqu'un prenne tout sur lui comme ça. Quoi qu'il se soit passé dans sa tête ce soir-là, il y avait sûrement une raison pour laquelle il avait agit de la sorte, de même que moi. C'était de notre faute à tous les deux, ça me gênait qu'il prenne tout pour lui.

Hésitante, je me mordillais la lèvre tout en remettant la bandoulière de mon sac sur mon épaule. Cela faisait plusieurs minutes qu'on parlait maintenant, et je me trouvais toujours face à lui près du mur. Je ne savais pas où cette discussion allait nous mener .. je ne savais même pas ce que l'avoir revu aujourd'hui allait nous mener. Ne sachant pas quoi lui proposer, je me lançai tout de même « Est-ce ... je peux t'offrir un café pour me faire pardonner ? » lui demandai-je en riant à moitié.