« Veuillez boucler vos ceintures, nous arrivons à destination dans quelques minutes à peine. Merci d'avoir choisi de voyager avec nous, nous vous souhaitons un agréable séjour à San Francisco. »

Un long soupir m'échappa. Cette femme et sa foutu joie de vive, elle pouvait bien se la foutre où je pense celle-la. Ça devait faire une éternité que j'avais le cul posé dans cet avion, pourtant, le trajet m'avait semblé plutôt court. Sans doute parce que j’appréhendais ce qui allait se passer à la minute près ou j'allais poser le pied en sol Américain. Trois mois que j'étais partis sans donner de nouvelles à qui que ce soit, pas un texto, pas une lettre, rien. Je m'étais exilé au Japon, non par choix, mais par obligation, je n'avais pas la force nécessaire pour revenir avant aujourd'hui. Pas la force d'affronter Shawn, son sale caractère de merde, ses réactions à la noix...Lui tout simplement.

L'avion atterri, tout se déroula comme à l'habitude... j'ai attendu mes bagages, enfin mon seul et unique sac à dos avant de franchir les douanes avec un brin de difficulté au vu de mon nouveau physique quelque peu effrayant, puis on me guida ensuite vers un stationnement sous-terrain où se trouvait mon nouveau joujou fraîchement livré pour moi un peu plus tôt dans la journée. Sans perdre une seconde, j'enfilai mon casque ainsi que mon équipement et fila directement en direction du starbucks. Pourquoi cet endroit? Simplement parce que je présentais que c'était à cet endroit que j'allais le trouvé. Là où tout avait commencer pour nous.

Une fois arrivé, je pris le temps de me stationner et de retirer mon casque avant d'entrer dans le café bondé de gens. Inutile de vous détailler la réaction des personnes présentes en croisant mon regard et puis de toute façon, c'était le cadet de mes soucis. La personne que j'étais venu voir se trouvait de l'autre côté du comptoir. Mon cœur se mit à battre à tout rompre contre ma poitrine, au point tel que j'en eus quelques vertiges. Mais le tout s'estompa lorsque mon avant bras trouva refuge sur le comptoir. Il semblait distrait, il ne me regardait pas … le brun attendait sagement que je lui dise ma commande afin qu'il puisse passer à autre chose... ce que je fis sans me faire prier.

« Je prendrais un grand latté sans lait, avec la moitié d'un sachet de sucre diète, de l’essence de noisette, mais pas trop pour ne pas gâcher le goût du café le tout bien brassé … » Un soupir m'échappa « S'il vous plaît. » À ces mots, je me suis redressé pour me tenir droit devant lui, sans le quitter du regard une seule seconde... Pour être honnête, je m'attendais au pire...

Je l'attendais patiemment cette réaction, ce moment précis ou il allait lever la main sur moi et que la paume de sa main allait venir percuté la peau encore sensible de ma joue... Mais ce moment ne vint jamais. Il c'était contenter d'agripper le col de mon t-shirt pour me ramener vers lui l'espace de quelques secondes avant de me relâcher avec une lueur de dégoût et de peur au fond des yeux. Voilà à quoi nous étions réduis. Le spectateur et le phénomène de foire.

Pourtant, je n'avais pas bouger d'un poil, je m'étais simplement contenter de le regarder en contractant légèrement l'intégralité des muscles de mon corps. Je venais de passé en mode prédateur. Ce qu'il ignorait, c'est que je n'étais plus le petit mec aux cheveux frisés et à la gueule d'ange qu'il avait jadis aimé. Non, j'étais devenu quelqu'un qui avait la force de caractère pour lui résister.

« Ce sera tout en effet. » Marmonnais-je alors que je replaçais tranquillement le bout de tissus qu'il avait froisser. Les gens autour c'étaient arrêter pour regarder la scène. Certains avaient prit peur et avait quitté le resto, d'autre était beaucoup trop captivé par l'échange entre la faucheuse et l'humain. Quelle ironie. Pour ma part, je me demandais s'il avait vraiment prit conscience de qui j'étais. Sans aucun doute me direz-vous au vu de sa réaction... Mais il y avait quand même un petit doute dans mon esprit ce qui me poussa à agir sous le coup de l'impulsion en empoignant moi aussi le col de sa chemise lorsqu'il fût assez près de moi, le tirant littéralement par dessus le comptoir pour venir sceller mes lèvres aux siennes de force pendant plusieurs secondes. C'était la seule et unique façon de lui faire comprendre que j'étais moi...

Après ce bref échange, ma poigne se resserra d'elle-même contre le bout de tissus et rapidement je le tirais en dehors du café, encore troublé par ce baisé volé. « T'as la chienne avoue? » Dis-je en venant le coincer entre le mur de brique et moi. « Depuis quand Shawn tremble devant l'apparence d'une personne? Qu'est-ce qui t'effraie à ce point? L'encre qui recouvre la presque totalité de mon corps? C'est ça qui te fait peur, de la PUTAIN de couleur? Es-tu à ce point devenu superficiel?» Mon regard s'assombrit instantanément alors que la colère faisait apparaître quelques veines de chaque côté de mes tempes « Remarque t'a toujours été comme ça!» Un rire sarcastique et je le relâchais comme s'il n'était rien de moins qu'une vieille chaussette. Pourquoi est-ce que j'étais revenu ici moi? Pour lui? Pour ça? Pour ce mec superficiel et complètement dépassé? Une de mes main vint glisser le long de mon visage avant de retomber sur le côté de mon corps à présent devenu faible. « J'ai plus rien à faire ici, j'sais même pas pourquoi j'suis revenu pour toi... Tu... je … » Un rire nerveux s'échappa du fond de ma gorge cette fois, alors que mon corps vacillait jusqu'à ma moto où je pris appuis quelques instants histoire de reprendre mes esprits, regard perdu dans le vide. « Fou le camp » Soufflai-je finalement après quelques secondes de réflexion alors que j'empoignais mon casque pour le remettre sur ma tête.

Mon corps entier tremblait sous le poids de l'énervement, des sentiments refoulés, de la douleur causé par les '' récents '' événements. L'abandon de l'homme que j'aimais, la perte de ma famille... le fait de me retrouver seul au monde du jour au lendemain, abandonné à moi-même avec pour seul ressource ma volonté de vivre et de me battre... Ça en faisait beaucoup trop pour moi... Pourtant ces trois mois d'isolement total avaient servit à cela... à me remettre sur pieds, à évacuer, me forger une carapace. Pourquoi est-ce que je me sentais aussi coupable? Si j'étais partis sans rien dire c'était pour éviter qu'il s'inquiète pour moi, éviter de l'impliquer dans mes problèmes puisqu'il en avait suffisamment comme ça. La réalité me rattrapait à présent. J'étais assis là, non loin de lui à me prendre ses coups de poignards dans le cœur. C'est pas du tout comme ça que j'imaginais nos retrouvailles, non … vraiment pas. Mais le pire dans tout cela, c'est qu'il avait raison … et c'est ce qui m'énervait le plus dans l'histoire... Toutefois, mon orgueil refusait de l'admettre, de céder à ses provocation par des excuses...

« ME TRAITE PAS DE LÂCHE SALOPARD, PAS APRÈS ÇA … T'AS PAS LE DROIT! » Ma voix trembla à ce moment précis. Le mot '' lâche '' avait fait remonter en moi une gamme d'émotions que j'essayais de refouler depuis un bon moment déjà et les larmes se mirent à couler d'elle-même sans que je puisse faire quoi que ce soit pour les retenir. Chassez le naturel et il revient au galop comme on dit. Instinctivement, ma tête se baissa. Comme un enfant qu'on venait de disputer... bonne vieille habitude que je n'avais pas perdu ça... « Pas dans une heure! » Repris-je après avoir essuyer mon visage avec mon avant bras avant de jeter un coup d'oeil à ma montre. « C'est maintenant que ça ce passe. Je viens de me taper je ne sais pas combien d'heure de vol pour venir te voir en face à face, c'est pas pour repartir maintenant avec ton paquet d'insulte à la gueule, j'suis pas un lâche, je me tiens là devant toi! J'aurais pu tout simplement t'annoncer mon retour par texto, ou encore rien te dire, mais j'suis là, après tout ce temps, j'suis de nouveau là.. » Mes poings se refermèrent peu à peu alors que je revoyais des scènes en continue dans ma tête. Cette fameuse nuit ou je l'ai abandonné en lui laissant qu'un simple baiser sur le front en guise d’au revoir. Pour être honnête, je ne pensais pas partir aussi longtemps, je croyais que j'allais être de retour après une semaine, mais c'était pas du tout ça, mais ce genre de chose, il l'ignorait, comme tout le reste d'ailleurs. « On s'en va, maintenant! Rien a foutre ton ton job de merde, tu prends ce casque et on se casse! » Sans attendre une quelconque réponse de sa part, je lui ai balancer un casque à la gueule avant d'enfiler le mien. « J'te laisse pas le choix Shawn... » À ces mots, je pris place sur ma moto et fit démarrer le moteur, en attendant sagement qu'il vienne prendre place derrière moi, le regard rivé droit devant moi. Soit il embarquait et on allait chez lui maintenant, sois je partais seul pour je ne sais quel endroit et tirait un trait sur lui a tout jamais. C'était à mon tour de dicter les règles.

Le message avait été capté. Le jeune homme me fit signe d'attendre un peu, sans doute le temps qu'il récupère ses affaires, avant qu'il ne revienne se poser derrière moi. Nous filâmes donc chez lui à pleine vitesse, le vent dans les voiles. Faire de la moto apaisait mes maux, l'adrénaline que cet engin me procurait, avait un effet apaisant sur mon système de mec nerveux. Une autre chose que j'avais découverte ces trois derniers mois. Bref. J'avais du mal à me concentrer sur la route à la simple pensée que Shawn se trouvait derrière moi en ce moment. J'étais partis comme un voleur certes, mais cela était loin de vouloir dire que je ne le l'aimais plus, au contraire... Mes sentiments pour lui étaient encore bien présent dans mon cœur et je le sentais très bien, mais est-ce qu'il en était de même pour lui? Et si c'était le cas, comment réagirait-il en apprenant la vérité sur mon compte, sur la drogue et tout le tralala. Je ne devais pas penser à cela, non pas maintenant, je devais me concentrer sur la route pour ne pas faire d'accident.

Lorsque nous arrivèrent enfin, Shawn me fit signe de stationner ma moto dans son stationnement, ce que je fis avant de descendre. Cet endroit n'avait pas du tout changer, c'est comme si je n'étais jamais parti en vrai. Quelques uns de nos souvenirs de vie de couple me revinrent en tête avant qu'il ne me réveille en me tendant son casque que je serrai sous le siège. « Hein? … Ah, non. Juste ça! » J'avais mit un peu de temps avant de capter de quoi il me parlait, mais bon. Je le suivi donc, en silence. Ne sachant pas quoi dire pour l'instant.

Nous montâmes alors dans l'ascenseur, et rapidement les portes se refermèrent derrière nous. Un étage et puis un autre, quand l'élévateur s'arrêta au beau milieu du chemin entre le troisième et le quatrième étage. Complètement perdu dans mes pensées, je n'avais pas tilter que c'était Shawn qui avait arrêter le truc, du coup, lorsqu'il s'approcha de moi, je fis un pas vers l'arrière avant de percuter le mur. Tout se mélangeait dans ma tête, pourquoi est-ce qu'il faisait ça? Lorsque qu'il déposa finalement son front contre le mien, je me suis permis de respirer un peu. Il ne semblait plus en colère, qu'est-ce qui l'avait fait changer aussi rapidement? Aucune réponse ne me vint à l'esprit avant qu'il dépose ses lèvres contre les miennes pour un tendre et langoureux baiser que je lui rendis malgré la surprise en glissant une de mes mains contre sa joue pour la caresser du bout de mon pouce. « S-Shawn » Soufflai-je désespérément contre ses lèvres entre deux baisers tout en faisant passer mes bras autour de son cou, avant de venir y nicher mon visage. Je ne devais pas pleurer, pas encore! Je pris donc quelques bonnes inspirations tout en caressant sa nuque avec tendresse. « Je crois qu'on devrait monter, y'a sûrement des gens qui attendent pour l'ascenseur... » J'étendis donc le bras, sans me séparer de lui pour appuyer sur le bouton et lentement l'engin se remit en marche jusqu'à l'étage souhaitée. Lorsque les portes s'ouvrirent, mon regard croisa celui d'une vieille dame qui semblait être choquée autant par la situation que par mon physique et rapidement je m'écartai de Shawn pour enjamber le pas jusqu'à l'appartement, tête baissée, mains dans les poches. Je n'étais pas encore tout à fait à l'aise avec le fait d'être vu avec un autre homme... Je devrais sans doute travailler la dessus... Enfin si nous nous remettons ensemble bien évidemment!

Le jeune homme ouvrit finalement la porte et sans me gêner, j'entrai comme ci c'était chez moi, déposant mon sac à l'endroit exacte ou j'avais l'habitude de le déposer lorsque je venais étudier chez Shawn, même chose pour mes chaussures et mon manteau de cuire. Je n'avais pas vraiment envie de parler de ce qui c'était produit dans l'ascenseur, mais le désir de l'embrasser de nouveau me rongeait à l'intérieur. Je m'approchai alors de lui et le poussa tranquillement jusqu'à la chambre à coucher, notre chambre et sourit finalement pour la première fois depuis mon arrivé. Rien n'avait changer … Rien du tout. C'est donc avec le cœur remplis de bonheur que je suis hisser sur la pointe des pieds pour venir l'embrasser tendrement en lui murmurant un nombre incalculable de fois de me pardonner ce que je lui avais fait subir.