Penser que j’allais un jour revenir à San Francisco dans de telles circonstances, ne m’aurait jamais effleuré l’esprit. Pas même une seule seconde, j’étais assise en face d’une caisse vide, j’avais pour seul compagnie mon ordinateur, je me sentais vide, confuse, perdue, coupable, désemparée. Il y’avait aussi ces voix dans ma tête qui venaient me parler de temps en temps, pour me faire sentir encore plus mal que je ne le suis déjà. J’étais dans la pâtisserie, Pearce Bakery, cet endroit était la preuve de la réussite professionnelle de ma mère, une maman, j’imagine que c’est important, je n’arrivais même plus à me souvenir de son visage, cela fait maintenant presque une semaine qu’elle a disparu, oui disparu, je refuse de croire qu’elle est morte, elle n’a pas le droit de le faire. Je contemplais le sol sans grande attention, je n’arrivais à rien ressentir, mon monde s’était déjà écroulé il y’a bien longtemps, je ne sais même pas ce que je fais encore sur cette planète, plus rien n’a d’importance maintenant.

Je regardai ensuite mon ordinateur qui se trouvait juste en face de moi, je venais de recevoir une réponse de Spencer, me disant qu’il allait venir. J’avais besoin de le voir, il était l’une des rares amis que j’avais et qui semblaient apprécier énormément ma mère, il affectionnait spécialement sa cuisine. Elle l’aimait beaucoup.

Je n’avais plus le courage à rien, je voulais juste rester assise là, sur cette chaise, comme elle avait l’habitude de le faire, son sourire chaleureux, son dynamisme, je ne vais donc plus y avoir droit ? L’écouter me réprimander, s’inquiéter pour moi, il n’y aura donc plus rien de tout ça ? Non, je refuse d’y croire. Je ne savais pas vraiment où était mon père, et je m’en fichais, en fait, je me fichais de tout. Il m’a bien fait comprendre à quel point je leur faisais honte, avec mes comportements irrationnels. Je le comprends, je me fais honte à moi-même d’ailleurs.

J’entendis soudainement quelqu’un toquer à la porte, en ouvrant j’aperçus Spencer, qui se tenait là devant moi. Je ne m’attendais pas à ce qu’il arrive aussi rapidement, le revoir me faisait repenser à tellement de bons moments passés dans cette pâtisserie, avec lui et ma … mère. Je ne savais pas vraiment quoi lui dire, ni comment réagir, le fait de le revoir me bouleversait pour une certaine raison. Alors je me tenais là, mon regard était vide, j’étais confuse et perdue, comme toujours.

« Tu as été rapide. »

c'était mes seules paroles, la seule chose que je trouvais à dire après ce long moment d'absence.

Revoir Spencer, me rendait quelque peu nostalgique. Je m’étais soudainement souvenu des moments passés à la pâtisserie, avec ma mère, contente à chaque fois de le revoir pour lui faire goûter ses nouvelles créations culinaires. Plus rien ne sera pareil maintenant, elle a disparu, je ne me suis jamais vraiment rendue compte de l’importance qu’elle avait à mes yeux, jusqu’au jour où j’ai appris sa mort. Je ne suis pas arrivée à réaliser à quel point elle comptait pour moi, à quel point je l’aimais, jusqu’à ce que j’apprenne pour sa disparition. Une intense mélancolie me submerge, elle s’est installé dans mon âme, et ne la quittera sûrement jamais. Il y’a aussi ce sentiment de culpabilité, je n’ai jamais vraiment été une bonne fille pour elle, jamais. Tout ce que j’ai réussi à faire, c’est la décevoir, encore et encore. J’étais loin d’elle quand elle a rendu l’âme, et je crois que c’est mieux ainsi, je n’aurais fais que lui rappeler de mauvais souvenirs, elle est morte bercée par des mensonges, pensant que sa fille était entrain de travailler à Londres tout en étant parfaitement sobre et clean. Seulement la vérité est toute autre, je ne suis qu’une ratée, qui s’est faite virée, je passe la plupart de mon temps à la pâtisserie maintenant. Je ne sais même pas si je suis motivée pour me trouver du travail, je me ferai sûrement virer une seconde fois.

Je ne savais pas vraiment quoi dire à Spencer, lui demander si son voyage c’était bien déroulé ? Je n’aurais pas l’air d’être très cohérente en faisant cela. Alors j’ai préféré laissé place au silence, on communiquait en quelque sorte par le regard. Je sentis ensuite ses grands bras m’entraîner vers lui, je me laissais faire, j’en avais besoin, tellement besoin. De sentir du réconfort auprès de quelqu’un qui puisse me comprendre, comprendre ce que je ressens, j’avais besoin de soutien. Les paroles m’importaient peu, je voulais sentir la présence de quelqu’un, finalement dire que je n’avais besoin de personne et le penser, n’était que me mentir à moi-même. Dès que ma tête s’était posée sur sa poitrine, je ne pouvais plus contrôler ces larmes qui ont commencé à couler tout le long de ma joue, des larmes chaudes, ou peut-être était-ce ma joue qui était trop froide ? Je les sentais presque me brûler la peau. J’étais triste, si triste et confuse. Mais quelque part, cette étreinte m’avait fait un bien fou, la première fois depuis le jour où j’ai eu ce coup de téléphone m’annonçant sa mort, que je pleure autant. « Je suis sans doute pas de la meilleure compagnie, mais je suis là quand même. Et je resterai si besoin est ou n'est pas. » Ses paroles m’avaient a légèrement sourire, je me sentais reconnaissante d’avoir un tel ami. Je sais qu’il est passé par là lui aussi, mais je n’avais aucune idée de l’impacte que ça aurait de perdre un être aussi cher. « non Spencer, tu es l’une des meilleures compagnie que j’ai eu. » Je m’efforçais ensuite de sécher ces larmes qui ne voulaient plus s’arrêter. « Je te comprends maintenant, et c’est.. c’est horrible. »