L'attente. Qu'est-ce qu'il y a de pire dans la vie que l'attente ? On ne s'en rendait pas compte, mais on attendait tout le temps finalement. On attendait le temps de prendre le bus, on attendait le temps que nos pâtes cuisent, on attendait que quelqu'un vous laisse passer, on attendait qu'une chanson passe à la radio. On le faisait inconsciemment, mais l'attente devenait vraiment longue quand on en prenait conscience. On regardait alors sa montre trois fois par minutes, on se mettait à avoir des tics étranges en attendant ladite personne ou chose. C'était un peu mon cas en ce moment en fait. Assise à une table d'une terrasse, je m'étais commandée un cappuccino en attendant Peter, déterminée à me dire qu'il arriverait en retard, comme d'habitude. Et, comme d'habitude, il m'avait donné raison. Cependant, c'était assez agréable de l'attendre à la chaleur du soleil qui tapait aujourd'hui sur San Francisco. Alors je ne lui en voulais pas. Pas encore. Parfois quand j'attendais, je m'amusais à imaginer un monde où tout serait instantané. Parce qu'au fond, ici, rien n'est instantané. Le riz instantané prend cinq minutes, le gâteau instantané une demi-heure. Tout prend au moins un quart de centième de seconde pour se réaliser.
Ce matin j'avais donné rendez-vous à mon meilleur ami, Peter, en ville car cela faisait longtemps qu'on ne s'était pas vu entre amis. En effet, il était célèbre et m'invitait souvent aux soirées de galas, de dédicasses, ce qui me donnait l'occasion de voir aussi Bliss, sa petite amie secrète qui était devenue à son tour une de mes amies proches. Ces soirées étaient sympa, vraiment, et j'avais toujours un plaisir fou à y aller pour leur tenir compagnie à tous les deux. Mais du coup, en plus avec son boulot d'acteur qui l'obligeait à bloquer ses disponibilités souvent, je n'avais pas beaucoup d'occasions de le voir en privé. On textotait très souvent, mais ce n'était pas pareil que de se voir en direct quoi ...
J'arrivais à la fin de ma tasse et commençais à désespérer de voir Peter cet après-midi, quand je le vis arriver juste du trottoir d'en face. Il traversa, coupant la circulation à la voiture qui arrivait juste sur lui. En souriant, je levai les yeux au ciel. « PETER ! » criai-je dans sa direction. Inutile, bien sûr, parce que s'il traversait la rue dans ma direction, c'est bien qu'il m'avait vu. Oui, j'avais des tas de réflexes inutiles en fait.
Je l'avais attendu dix minutes, mais je n'arrivais presque jamais à lui en vouloir ou à être fâchée contre lui. C'était presque agaçant à la fin ! J'attendis qu'il soit arrivé près de moi pour me lever et régler l'addition. J'aurais souhaité pouvoir froncer les sourcils, lui lancer un regard noir et lui dire qu'il était en retard de dix minutes, mais à la place je fonçai sur lui pour lui sauter au cou. J'étais tellement contente de le voir à chaque fois que j'en oubliais tous mes reproches ! Si reproches il y avait bien sûr. « Alors, tu veux faire quoi ? » Car non, on n'avait pas fixé de programme, on ne fixait jamais de programme en fait. Comme ça on pouvait être impulsifs, se décider au dernier moment. C'est ça qui me plaisait. J'attendis sa réponse, le sourire aux lèvres, tout en ramassant mon sac à main et en l'installant sur mon épaule.
Les rayons du soleil. Mon dieu ! Ce que je détestais cela ! A vrai dire, si, j’aimais le soleil, sauf lorsqu’il passait à travers les rideaux pour te réveiller. Je plissais les yeux, fronçant les sourcils. Je regardais un instant autour de moi. Pendant quelques secondes, j’avais oublié que j’avais passé la soirée chez Bliss. Je tournais mon regard sur elle et je ne pouvais m’empêcher de sourire. Elle semblait dormir profondément contre moi, les cheveux en pagailles. Je restais ainsi, désirant arrêter le temps. Rien n’échappait à mon regard à part le reste de son corps caché sous les draps. J’avais envie de rester ainsi toute la journée, flânant au lit avec ma petite amie. Soudain, un prénom me vint en tête : Skye. Bon sang ! J’avais presque oublié que j’avais promis à ma meilleure amie que nous allions nous voir aujourd’hui.
Je tentais de m'extirper du lit sans réveiller Bliss, ce qui sembla être un réel sport. Je me pétrifiais lorsqu'elle bougeait, me mordant la lèvre. Je n'étais pas le mec le plus discret. Cependant, je parvins à sortir des draps et enfiler un boxer en silence. En sortant, je ne croisais pas le colocataire de ma petite amie, je décidais de faire du café - bien que Bliss déteste ça. Je prenais une tasse lorsque j'entendis une voix féminine me demander ce que je faisais. Je me tournais et expliquait à Bliss que j'avais promis à Skye de la rejoindre et qu'elle allait m'en vouloir si j'arrivais en retard « Reste avec moi... » me suppliait-elle en se collant contre moi. Je l'embrassais, elle semblait vouloir me retenir autrement, si je ne m'en libérais pas, j'étais bon pour oublier complètement ma meilleure amie. « Non, désolé, elle va me tuer si je suis en retard » je lui déposais un baiser sur le front et me dégageais de son étreinte pour aller m'habiller.
Je partais lui dire au revoir, elle semblait bouder. Je soupirais en m'excusant à nouveau et partait. La seconde chose la plus dure à faire était de partir discrètement de chez Bliss sans me faire repérer par un paparazzi. Je voyais déjà la une des journaux s'ils avaient une telle photo. En regardant ma montre, je remarquais que j'étais déjà en retard. Je poussais un juron en préférant aller à pied plutôt que de me perdre dans les bouchons. Ce qui me fit arriver encore plus en retard. Cependant, je vis Skye au loin, elle semblait perdue dans ses pensées. Je traversais la route, lui faisant signe lorsqu'elle m'appela pour lui montrer que je l'avais vue.
En arrivant vers elle, je m’attendais à recevoir son éternel sermon sur le retard, à la place, elle se jeta à mon coup. J’échappais un sourire de soulagement, n’appréciant pas me disputer avec ma meilleure amie. Je la serrais contre moi. A cause de mon travail et de ses études, nous ne nous voyons pas aussi souvent que nous le voudrions, certes, nous parlions par textos, mais ce n’était pas la même chose, je ne pouvais pas la serrer dans mes bras « Salut la plus belle, comment tu vas ? Désolé d’être en retard, j’ai été retenu » je lui fis un clin d’œil, elle avait sûrement compris. Ainsi, je lui embrassait le sommet du crâne en me dégageant d’elle. « Hmm… Je t’aurais bien proposé de te payer un verre, mais tu sembles t’être déjà servie » je ris.
Passant un bras autour de son épaule, j’ajoutais « Eh bien, on va bien trouver un truc au feeling ». Nous commencions à marcher lorsque je vis un magasin de bonbon, soudain, tout mes souvenirs d’enfance refaisaient surface « ça te tente de retomber en enfance le temps de dix minutes pour qu’on aille s’acheter des bonbons ? ».
Il me serra contre lui un instant, et je fus soulagée de retrouver la présence chaleureuse de Peter. Je n'avais finalement passé que quelques jours sans le voir, mais le voir me faisait toujours autant du bien ! Sa compagnie m'apaisait, même si on faisait toujours des conneries ensemble. Avec lui je me sentais plus libre, plus ... moi-même quoi ! Il me lâcha, m'observa un instant en souriant, avant de me déposer un baiser rapide sur le front. Puis je le lâchai sans toujours trop m'écarter, et il s'excusa pour son retard, que j'écartai d'un geste de la main en souriant. Je me retins tout de même de lever les yeux au ciel, mais bon c'était Peter. « Hmm… Je t’aurais bien proposé de te payer un verre, mais tu sembles t’être déjà servie ! » ajouta-t-il en me désignant la table que je venais de quitter pour le rejoindre. Je lui fis une grimace d'excuse. Il passa alors son bras autour de mes épaules, et nous commencions à marcher tranquillement quand il ajouta qu'on allait trouver un truc au feeling. Je hochai la tête pour marquer mon assentiment. Puis il parla de nouveau « ça te tente de retomber en enfance le temps de dix minutes pour qu’on aille s’acheter des bonbons ? » Un grand sourire me monta aux lèvres. « Du moment que tu ne me fais pas prendre 10 kg, je te suis ! » lui répondis-je d'un ton enjoué.
Il me connaissait quand même très bien. Je ne connaissais pas beaucoup de mon qui auraient osé me demander d'aller acheter des bonbons tranquillement sur le ton de la conversation - sauf peut être Apple. La plupart auraient trouvé ça gamin, ou pire certaines n'auraient jamais pensé faire un truc pareil, car mon Dieu les bonbons = sucre = calories = grossir ! Mon dieu. Je détestais les gens qui surveillais sans arrête ce qu'ils mangeaient. Oh certes moi je le faisais un peu, je surveillais que je mangeais équilibré quoi, pour ne pas me faire pizzas tous les soirs. Mais de là à aller regarder combien y avait-il de calories par gâteau avant d'ouvrir la boîte ! Non mais ! Et je vous jure que ça existait les gens comme ça, j'avais connue une fille à la fin du collège qui ne fonctionnait qu'ainsi, en faisant attention à chaque grain de riz qu'elle avalait. Mais avec moi et Petre, ce n'était pas du tout comme ça. On vivait l'instant présent sans faire gaffe aux conséquences, ou sans penser que c'était ridicule ou autre. On le faisait, c'est tout.
C'est ainsi qu'on se dirigea à quelques mètres de là, vers la petite boutique de sucreries qui bordait la rue. Toujours suivie de Peter, je poussai la petite porte qui tinta en s'ouvrant, et rentrait dans l'univers sucré. J'avançai pour laisser avancer mon ami, et respirais à fond l'odeur du sucre qui me faisait retomber en enfance.
Il ne fallait pas se le cacher, je n’étais pas le maître de la ponctualité. A vrai dire, je ne me souviens pas d’un jour où j’avais réussis à arriver à l’heure à un rendez-vous. Mais ce n’était pas ma faute, il y avait toujours quelque chose qui venait se mettre en travers de ma route – comme une tasse de café par exemple. C’était comme si le monde mettait tout en place afin que je ne sois pas ponctuelle. C’était majoritairement une horde de fan ou des paparazzis qui m’en empêchait. Sauf qu’à présent, je partais un quart d’heure plus tôt que l’heure à laquelle je devrais partir en temps normal afin de ne pas être trop en retard. En vain.
Ce matin, c’est Bliss qui m’a mis en retard pour mon rendez-vous avec Skye, ma meilleure amie. En effet, de un, j’ai mis du temps à comprendre que je la voyais aujourd’hui. Et de deux, Bliss semblait vouloir me garder pour elle toute la journée. Cela était tellement tentant, de plus que nos moments à deux se faisaient très rare, mais je voyais encore moins ma meilleure amie. Il m’arrivait de pouvoir caller Skye dans mon emploi du temps de ministre, mais cela restait très rare. Alors, lorsque je la voyais, j’en profitais un maximum. De plus, cela faisait toujours du bien de s’entendre avec quelqu’un qui n’était pas du milieu, au moins, ça aidait à garder les pieds sur terre. Je souhaitais les garder, ne pas prendre la grosse tête par tout cela et j’espérais que ma meilleure amie me mette en garde le jour où je viendrais à choper le melon.
De plus, ma rencontre avec cette dernière restait unique. En effet, je ne me serais jamais attendu à ce que cette étudiante en journalisme qui m'avait interviewé pour son blog lors d'un tapis rouge deviendrait ma meilleure amie, mon pied-à-terre dans ce monde de fou. Cependant, ce n'est pas dans cette interview qu'elle est devenue importante. C'était cette fois où j'essayais de rejoindre Bliss, sauf que j'avais été poursuivi par une horde de paparazzi. Skye qui passait par là m'a aidé à leur échapper. Elle était ma sauveuse depuis.
Je traversais la route, me dirigeant dans la direction de Skye, assise à la terrasse d’un café. En arrivant près d’elle, j’attendais cet éternel sermon sur la ponctualité. Cependant, il ne vint pas, j’eu droit à un câlin à la place. Je ne m’en plaignais pas. C’était bon de la revoir. Ainsi, je décidais d’improviser sur ce que nous allions faire de notre journée. Je devais avouer que je n’étais pas très inspiré. Je passais mon bras autour de son épaule et commençait à marcher. J’étais à la recherche d’une occupation lorsque mes yeux se posèrent sur une boutique de bonbon. L’envie d’en prendre s’emparait de moi. Je ris à sa réponse « Mais non, les bonbons ça fais mincir, tu ne savais pas ? » je lui fis un clin d’œil. Non ce n’était pas vrai.
Je l’entrainais dans la boutique, plus enjoué que jamais. Au fond, j’étais encore un gosse. Je pouvais parfois me comporter comme un vrai gamin – surtout lorsque j’étais lâché dans un magasin de bonbon ou de jouet. Ce qui était bien avec Skye, c’est qu’elle était comme moi et elle n’avait pas peur du ridicule. C’est pour cela qu’arrivé dans les rayons j’hurlais « REGARDE ! DES SHTROUMPHS ! On en prend hein ! » Je lui fis mon air de chien battu. Je m’emparais d’un sachet pour un mettre quelque un. Je continuais de courir dans les rayons, à la recherche d’autres bonbon, riant pour n’importe quoi – un vrai gosse quoi.
Je ne pus retenir de lui mettre mon coude dans les côtes après sa remarque « Mais non, les bonbons ça fais mincir, tu ne savais pas ? » . Oui, vraiment, le coup était partit tout seul. Mais bon, ce n'était pas fort et Peter avait l'habitude que je l'embête ainsi, surtout après qu'il se fiche de moi, surtout après son petit clin d'oeil, et ses yeux rieurs qui croisaient les miens le long du trajet.
En arrivant dans la boutique de sucreries, je fus accueillie par une vague d'odeur sucrée provenant des bonbons disposés un peu partout. En vérité, il n'y avait que ça ici. Des présentois de sucettes qui semblaient aussi attirantes les unes que les autres. Il y en avait de toutes les couleurs, des rouges, des jaunes, des bleues, des violettes, des roses, des vertes ... Elles vous tapaient l'oeil dès que vous entriez dans le magasin, et dès lors il était impossible de ne pas en acheter ! Il y avait également des rayons entiers de bonbons, dans lesquels Peter se précipita dès que ses deux pieds eurent franchis le seuil. Ce fut à ce moment-là aussi que la vendeuse - une petite femme, la quarantaine, les cheveux châtains et les yeux marrons - se dirigeai doucement vers nous. Enfin vers moi devrais-je dire, puisque Peter choisit ce moment pour donc se jeter dans les rayonnages. J'entendis un vague « Bonjour ... » qui se perdit au fur et à mesure que son regard interloqué suivait mon ami dans ses péripéties bonboniennes. Au moment où Peter cria « REGARDE ! DES SHTROUMPHS ! », je décidai qu'il était temps de le rejoindre et adressai un sourire d'excuse à la vendeuse avant de me précipiter à la suite de mon meilleur ami. A peine fus-je arrivée derrière Peter - auquel je me rattrapai pour ne pas glisser à la suite de mon élan -, qu'il ajouta « On en prend hein ! ». L'air de chien battu finit de m'achever, et j'éclatai d'un rire frais alors qu'il repartait de plus belle, son paquet de Shtroumphs sous le bras et s'arrêtant tous les dix centimètres pour regarder les autres paquets. Toujours en riant, je m'élançai à sa suite, et attrapai un paquet de 500g de M&M's et un autre de fraises Tagadas, qui étaient tous les deux mon péché mignon. « Regarde ce que j'ai trouvéééé ! » ajoutai-je en le rejoignant alors qu'il s'était arrêté devant les sucettes. Je vis qu'il les regardait avec envie, et ne pus m'empêcher d'en faire autant. L'odeur tout comme la présentation étaient alléchantes, et j'attrapai une grande rouge en forme de cerise.
Jetant un coup d'oeil à travers les rayonnages, je m'aperçus que la vendeuse s'était rassise à son comptoir et nous regardait l'air de rien. Cela fit repartir mon rire de plus belle. « Je crois qu'elle nous prend pour des fous .. » glissai-je à Peter en me penchant vers lui. Puis je réalisai la quantité de sucre que nous avions entre les mains et soupirai. « Si avec ça je grossis pas ! Allez viens, avant que je change d'avis. ». Je le pris par le bras - enfin un bout d'un de ses bras qui tenaient les paquets - et l'entraînai vers la caisse afin de régler notre dose de sucreries.
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