Je suis originaire de Bradford, en Angleterre. Après, comment j'suis arrivée à San Francisco, c'est tout une histoire...

e n f a n c e.
Déjà à cet âge-là, j'étais cataloguée comme une fille à papa, une petite sainte-nitouche. Dès qu'on m'embêtait, j'allais le dire à la maîtresse, ce qui me valait le charmant surnom de "cafeteuse". J'étais très renfermée sur moi-même et me concentrais surtout sur l'école, j'avais très peu d'amis, les autres me rejettaient. Puis ma mère est décédée en donnant naissance à mon frère, Adam. J'avais alors 6 ans. Je n'ai pas eu le temps de remarquer son absence que, déjà, nous nous envolions vers le Québec. Nous avons emménagé avec mon grand père, un homme que je surnommerai volontiers Picsou. Mon père a souhaité comblé le vide, la manque de cette présence maternelle en engageant une jeune femme, Aurélia, qui a terminé mon éducation et fait celle de mon jeune frère. Dans ma nouvelle école, j'ai du apprendre à parler le français, une langue assez difficile mais plutôt sympa. Avec mon accent british, mes boucles brunes et mes résultats exemplaires, je suis vite devenue une "bête de foire". Chaque jour, on se précipitait vers moi pour voir si on avait les mêmes réultats aux exercies de maths. Je me suis très vite intégrée. J'ai grandi et ma timidité s'est envolée.

a d o l e s c e n c e.
Je fête aujourd'hui mes 14 ans. Je suis décrite par mon entourage comme une jolie jeune fille dynamique, généreuse et qui sait ce qu'elle veut. Je suis plus proche d'Aurélia que de mon père, jamais à la maison, toujours à l'étranger. Mais c'est pas grave, son argent comble tout. On vit dans une méga baraque, avec piscine, jacuzzi, grand jardin... Bref, la fortune de mon Papy et de mon père, ça donne ça. Adam a désormais 8 ans, c'est un agréable petit garçon. Tous les samedis, il nous accompagne, Ophélie (ma meilleure amie) et moi, à la danse. Même s'il a des doutes sur les talents d'Ophélie, il ne dit rien et l'encourage à continuer. C'est aussi à cette époque-là que je découvre les joies du premier amour. C'était avec Yohan, notre voisin. Même s'il avait trois ans de plus que moi, ça ne m'a pas empêché de tomber éperduement amoureuse de lui. Je tentais quelques approches complètement ridicules que je t'épargnerais, en vain. Il en avait rien à péter de moi. Ça a pourtant changé du tout au tout, lors d'une soirée organisée par une amie. Je m'étais mise sur mon 31 ; petite robe blanche moulante, talons hauts et soigneusement maquillée. Tandis qu'une chanson entraînante retentissait, Yohan s'est à son tour approché. Il avait bien conscience de l'effet qu'il me faisait et il en jouait. Sans comprendre comment, je me suis retrouvée à danser dans ses bras. Il a plusieurs fois tenté de m'embrasser, me peloter mais, à chaque fois, je le repoussais. Nous n'étions pas ensemble. Je lui plais juste là, ce soir, rien de plus. Je suis amoureuse mais pas idiote, je sais bien ce qu'il a dans la tête, ce qu'il attend de moi. Quand il parvient enfin à coller ses lèvres contre les miennes, c'est plus fort que moi, je le gifle. Vexé, il s'apprête à faire de même puis change d'avis au dernier moment. Il s'est éclipsé, les regards de tous posés sur lui. Même si je le croisais quelques fois, il ne m'adressais plus la parole. Moi non plus, d'ailleurs. J'ai eu, par la suite, quelques copains, par-ici, par-là, mais jamais rien de très sérieux. Jusqu'au jour où j'ai rencontré Baptiste. Chatain aux yeux bleus, sportif, drôle, sympa, un peu débile sur les bords. Le courant est passé de suite entre nous. Au bout de quelques mois, j'ai commencé à éprouver des sentiments plus fort que de l'amitié envers lui. Après, ça s'est fait tout seul. Quand Baptiste a eu 18 ans, il a souhaité partir à San Fransisco, pour terminer ses études. À mes risques et périls, je l'ai suivi, laissant à regrets Adam et mes amis.

a u j o u r d ' h u i.
Nous habitions ensemble, dans un appartement plutôt spacieux, dans Sunset District. Malheureusement, mes études en médecine nous empêchaient de nous voir autant qu'on le souhaitait. On est devenu jaloux du moindre collègue, la moindre personne rencontrée dans la rue. Ça a fini par péter. J'avais alors 21 ans lorsqu'on s'est séparé, au bout de quatre ans de relation. Je me suis retrouvée seule : étant donné que je n'avais jamais assez de temps pour voir Baptiste, c'était pas pour aller flâner dans les boutiques avec des amis. J'ai déménagé à Crocker Amazon, dans petit appartement et j'ai pris une importante décision : je suis une grande fille, maintenant, je dois payer mes études et mon loyer seule. Je mets en pratique mes cours de danse dans les rues et ça marche plutôt bien. Dès que j'ai du temps libre, je m'agite dehors. Un chaton, trouvé sur la route, me tient compagnie. Je l'ai appelé Gollum, c'est un adorable félin et mon unique ami. Ça me rend triste d'être plongée dans la solitude, j'ai vraiment besoin d'amis, de sortir.