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I know you «can drink until you throw up» but don't. i'll be fine once i'll get it, i'll be good
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| | Mer 23 Mai - 14:11 | |
| I know you «can drink until you throw up» but don't. Vous aimez la chanson Hangover de Taio Cruz ? Moi non plus, ou tout du moins plus maintenant. Déjà pour un type qui aime la musique classique, ne suis-je pas particulière clément d'écouter parfois ce genre de son axé clubbing ? Mes goûts musicaux n'importent pas, en vérité. C'est cette chanson qui était censée rythmer ma soirée mais hélas cette dernière s'est terminée en Get Drunk de Lana Del Rey plutôt qu'avec Flo Rida et une brochette de jolies filles.
Je faisais les cent pas devant la chambre d'hôpital de Domenico, soucieux à propos de son état de santé. J'appréciais sincèrement ce type malgré mes difficultés à justement apprécier quelqu'un. Il n'était pas ce genre de chieur qui parlait pour ne rien dire et connaissait sa juste valeur sans aucune fausse modestie. Je tapotais frénétiquement mon portable sur mes lèvres dans l'attente d'un quelconque appel. Non, je n'avais pas peur de devoir gérer la situation tout seul mais plutôt que je n'avais pas à le faire. Quelle situation ? Celle de Dom voyons, et surtout du coma éthylique dans lequel je l'avais perdu la veille. Ce mec était mon pote et même si je n'étais pas de ceux qui culpabilisaient constamment, je ne pouvais m'empêcher de m'inquiéter pour lui. La plupart des gens se seraient sentis coupable de ne pas l'avoir stoppé dans son élan alcoolisé, mais Dom n'était pas de ceux qu'on pouvait arrêter. Ou tout du moins, je le pensais.
La première personne que j'avais appelé était sa petite amie Julie. Je ne la connaissais pas mais me doutait bien que quelques nouvelles de son copain n'étaient pas superflues, surtout dans la conjoncture actuelle. Seulement Julie n'avait pas décroché à mes appels contrairement à d'autres proches de Domenico et cela ne me plaisait pas du tout. Si mon acolyte n'avait pas été hospitalisé, j'aurai tenu ma langue: les petites-amies n'ont pas à savoir quand leur copain prend une cuite (ou pas tout le temps). Kahina, une proche amie de Dom, n'avait pas répondu non plus. Je m'acharnait à les contacter, je n'avais pas d'autre option. Il s'agissait d'un coma éthylique, pas d'une petite gueule de bois doublée de quelques centilitres (ou litres pour les plus coriaces) de vomis. Je restais neutre dans ce couloir d'hôpital, impassible. Pourtant à l'intérieur je bouillonnais et jetais sans cesse des coups d'oeil vers la porte vitrée donnant sur la chambre de mon ami, endormi. C'était la belle au bois dormant paumée dans son profond sommeil... j'espérais juste que je n'avais pas à faire le prince charmant. No offense, mais bien que je m'inquiétais pour lui ardemment, je ne pense pas que mes lèvres viriles puissent sauver ses jolies petites fesses.
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| | | | Mer 23 Mai - 16:18 | |
| Houston...we've got a problem J'étais dans un état lamentable. Pas la peine de mentionner combien de bières et de drinks je m'étais enfilés: je n'en avais aucun souvenir de toute façon. Il m'arrivait très rarement de déconner. En fait, en général, dans le genre « combo bonne attitude et maturité», j'avais une assez bonne moyenne au compteur. La plupart du temps, j'étais de ceux qui étaient assis au bar à regarder les autres bouffons se bourrer et faire leur taré. J'aurais préféré rester un spectateur, un observateur neutre et ne pas faire partie cette fois de l'action, mais les circonstances avaient malheureusement joué en ma défaveur. Sur un coup de tête, j'avais demandé à Spencer de m'accompagner avec moi au Manchester, histoire de se marer un peu. En fait, je connaissais de multiples façons de s'amuser sans avoir à goûter ne serait-ce qu'un millilitre d'alcool, mais j'avais choisi le vice plutôt que ces infinies possibilités. Ce que Spencer devait ignorer, c'était que j'avais développé un problème d'alcool depuis le mois de mars. Bien peu de personnes étaient au courant. Ce n'était pas comme si j'avais laissé savoir à tout le monde que je passais de moins en moins de temps sobre. Comme à l'habitude, j'avais fait dans la discrétion. Et bien que sur le coup, c'était une bonne décision, à long terme, ce l'était un peu moins. Pourtant, la veille, j'en avais discuté avec Kahina, lui mentionnant qu'il faudrait peut-être que j'aie passé une semaine ou deux dans un centre de désintoxication, question de me remettre sur pied. Cependant, le lendemain, j'avais changé d'avis. Ou plutôt, je ne voulais pas renoncer à cet état d'étourdissement immédiatement. Je voulais y rester encore. Et voilà pourquoi j'ai contacté Spencer.
À présent, il était beaucoup trop tard (ou tôt, selon les points de vue) et j'étais cloué dans un lit d'hôpital, inconscient. Un coma éthylique, tel était mon diagnostic. Une équipe de médecins avaient passé pratiquement deux heures à me faire un lavage complet de l'estomac. Une machine maintenait ma respiration artificiellement. Ma vessie était branchée à un sac. Effectivement, j'étais dans un état critique et très précaire. Je n'imaginais pas que je me serais rendu jusqu'à ce point malade - et Spencer non plus ne devait pas s'attendre à devoir reconduire son ami à l'hôpital. En ce moment, il devait en avoir lourd sur les épaules. Ayant un caractère similaire, j'étais capable de m'imaginer la culpabilité qu'il devait avoir, mais aussi ce sentiment inconfortable de devoir appeler mes proches pour leur annoncer la nouvelle. Si j'avais été le moindrement conscient, je lui aurais fait savoir à quel point je suis désolé. Je ne pensais pas me rendre là et honnêtement, c'était la première fois que j'agissais de la sorte avec lui. J'avais failli à ma tâche de bon pote.
*** Un médecin drapé de son sarrau blanc sort des portes battantes de l'urgence avec un dossier dans les mains, l'air grave. Dr Coppelin assistait souvent des opérations de jeunes adultes en état critique d'ivresse. Toutefois, c'était l'une des premières fois qu'il avait un patient aussi intoxiqué avec, dit-on, aucun historique d'alcoolisme par le passé. Il gardait toutefois la tête froide: le fin mot de l'histoire n'était pas encore dit. Il manquait certainement des morceaux à ce puzzle. Ainsi, sortant du bloc opératoire, il tenta de repérer un autre homme, celui qui avait accompagné son patient dans l'ambulance. L'heure était aux nouvelles.
Dr Coppelin marcha jusqu'à lui, gardant son expression faciale neutre et professionnel.
- Bonjour, dit-il en serrant la main de Spencer, je suis Dr Coppelin. On m'a dit que vous êtes arrivé avec Monsieur...Torrès, rajouta-t'il après avoir regardé le dossier. Qui êtes-vous par rapport à lui? Un ami? Un membre de la famille? Un ami de coeur? |
| | | | Mer 23 Mai - 20:40 | |
| Please, don't leave me. C’est le cas de le dire, Kahina n’aura jamais la vie facile. En fait, ça la fait rire quand les gens croient qu’elle a tout pour elle. Certes, elle a un métier fantastique, elle excelle dans beaucoup de choses et est habituellement appréciée des gens. Kahina voyage énormément et n’a pas à s’inquiéter côté financier. Et pourtant. Pourtant, elle échangerait sa vie avec beaucoup de gens. En fait, Kahina perd les gens qu’elle aime. C’est une habitude. C’est rendu constant. Elle a perdu sa mère alors qu’elle était encore une petite fille, elle avait 14 ans. En début de l’an 2011, elle a perdu sa meilleure amie. Ensuite, un évènement majeur vint détruire la jeune femme. Ce qui l’amena dans un centre pendant près de 4 mois, à l’automne de la même année, pour se ressourcer et lâcher l’alcool et les médicaments. On n’aurait jamais cru cela d’elle. Mais elle avait sombré au plus creux. En surface, elle avait l’air heureuse. Alors qu’en fait, elle se détruisait à petits feux. En sortant du centre, on aurait pu croire que le vent avait tourné pour elle. Ses contrats reprenaient, elle voyageait de nouveau, elle avait rencontré de nouvelles personnes, avait un merveilleux petit ami et en fait, semblait heureuse. Et elle l’était. Puis la sempiternelle vague redescendit vers le bas. Elle quitta Alejandro suite à un immense malentendu et plus tard, au début de l’année 2012, elle apprit que son père était atteint d’un cancer. Elle revenait d’ailleurs tout juste de Los Angeles, pour le visiter à l’hôpital, lorsqu’elle devait rencontrer Domenico, hier. Domenico, son meilleur ami, lui avait parlé d’un certain « problème d’alcool » et elle lui avait refilé le numéro des centres où elle avait séjourné. Il lui avait donné rendez-vous, pour en parler, autour d’un café à San Francisco. Kahina l’a attendu durant près de trois heures, désespérée d’avoir de ses nouvelles. Aucune. Elle était donc repartit, tentant de le joindre à maintes reprises. Sa boîte vocale, toujours.
Puis, au beau milieu de la nuit, Spencer, quelqu’un d’inconnu pour elle, tenta de la joindre. Elle se réveilla une heure plus tard et vit son appel manqué sur son portable. Un message vocal. Au sujet de Dom’. Rien de plus n’était dit, mais Kahina avait énormément d’appréhension. Elle le rappela, boîte vocale. Elle se mit à se créer plusieurs scénarios. Accident de voiture? Décès? Non, non. Dom’ ne pouvait pas être mort. Il n’avait pas le droit. Domenico était à peu près tout ce qui restait pour Kahina. Il était son meilleur ami, son premier amour. Ses espoirs étaient posés sur lui. Bien qu’elle ne l’avouerait jamais, Kahina avait toujours aimé Dom’ et elle l’aimerait toujours. Elle se le cachait à elle-même. C’était mieux comme ça. De toute façon, Dom’ était bien avec Julie, ou avec Denver, peu importe. Et Kahina, elle trouvait sa voie peu à peu. Alejandro n’était peut-être pas le bon, mais un jour elle le trouverait. Bref, tout cela pour en venir au fait que Kahina tenait énormément à Domenico et que la simple idée qu’il lui soit arrivé quelque chose l’effrayait au plus haut point. Elle était incapable de penser qu’il pourrait ne plus être de ce monde. Qu’elle devrait avoir à vivre sans lui. Elle avait tellement perdu de gens dans sa vie qu’elle ne serait pas capable d’affronter une autre perte. À cette simple idée, des larmes coulèrent sur les joues de la jeune femme, encore à moitié endormie.
Elle tenta de se rendormir, téléphone à la main. Incapable. Impossible. Finalement, en matinée, encore très tôt, Spencer rappela Kahina. Elle répondit rapidement, visiblement inquiète. C’est là qu’elle apprit que Dom’ avait trop bu, qu’il était à l’hôpital, dans un état critique. Un coma éthylique. Elle sentit son monde s’effondrer. Elle se sentait incapable de bouger. Elle avait envie qu’on la réveille de ce cauchemar. Elle ne voulait pas y croire. C’était impossible. Pas lui, pas Dom’. Il n’avait pas le droit. Il ne peut pas. Aux yeux de Kahina, un coma était signe de mort. Sa mère était dans un coma avant de décéder. La blondinette ne sentait plus les membres de son corps. Elle avait l’impression de sombrer. Il fallait qu’elle se rende à l’hôpital. Qu’elle le voit. Qu’elle lui parle. Qu’elle entende les médecins. Elle raccrocha le téléphone, après un simple « j’arrive », enfila une veste par-dessus son pyjama. Pas le temps de s’habiller. Elle entra dans sa voiture. Elle savait que c’était risqué, mais elle ne voulait pas attendre un taxi.
Après quelques excès de vitesse, elle était finalement rendue à l’hôpital. Elle gara sa voiture, couru jusqu’à l’entrée et demanda la direction à prendre pour la chambre 258. « Je suis désolé, mademoiselle, mais seuls les gens proches de monsieur Torrès ont accès à sa chambre. » Visiblement choquée par la réponse du secrétaire et aussi très fatiguée, Kahina lui lança un regard noir. « J’ai compris, je vais me débrouiller seule. » « Vous n’avez pas le droit. Vous pourriez être arrêtée. » « Je m’en contrefiche. Je connais mes droits, probablement mieux que vous. Non, je rectifie, je les connais mieux que vous. Je défends des gens à chaque jour. Alors je m’en vais voir mon meilleur ami qui est vraisemblablement dans un très mauvais état et si vous voulez vous y interposer, on s’en reparlera à ma sortie. » Kahina se rendit vers l’ascenseur, assez certaine de son coup face au fait que la chambre 258 devait être au deuxième étage. Trois virages dans les couloirs blancs et maussades de l’hôpital et elle y était. Spencer, sûrement lui, était devant la chambre à faire les cent pas. Elle le salua. « Je suis Kahina. As-tu des nouvelles des médecins face à son état? » Elle regarda par la vitre de la chambre. Domenico y était allongé. Elle posa sa main sur le rebord de la fenêtre, sentant ses jambes fléchir. Non. Impossible… |
| | | | Mer 23 Mai - 21:09 | |
| Je ne restai pas longtemps dans ma solitude (bien qu'à dire vrai, cela ne me déplaisait pas d'être livré à moi même plutôt qu'aux autres) car un docteur vint rapidement à ma rencontre, un certain Dr. Coppelin. « Qui êtes-vous par rapport à lui ? Un ami ? Un membre de la famille ? Un ami de coeur ? » « Je suis son cousin » Je restais impassible malgré mon mensonge. Je n'avais pas vraiment une tête de latino (en vérité je ne l'avais absolument pas) mais je m'en fichais. Ne vivions-nous pas dans un monde cosmopolite ? Dans ce cas, ma calomnie tenait la route et le médecin n'aurait pas à me baratiner si j'avouais n'être qu'un ami du patien. Je tenais à Domenico, c'était un type bien, je n'en avais aucun doute. C'est pourquoi j'étais le cousin Spencer aujourd'hui. Pour lui. « Il va mieux n'est-ce pas ? Rien de grave, juste un excès isolé et ponctuel ? » Langage formel et traits du visage froids. Je n'étais pas de ceux qui chialaient et tambourinaient des pieds le sol sous le coup de la tristesse ou de la rage. Si les autres me pensaient inexpressifs, c'est qu'ils n'avaient pas été faire un tour là, dans ma tête (et entre nous: tant mieux). Soudain, mon portable sonna. Nouveau message vocal. « Excusez-moi docteur, la mère de Domenico s'inquiète vous comprenez... » Instinctivement j'attrapai mon téléphone et composa le numéro de ma boîte vocal afin d'y écouter le message. Kahina, l'ex-copine et meilleure amie de Dom. Alléluia. Le médecin me fit un rapide sourire avant de s'éloigner vers deux infirmières, au bout du couloir. Je composais le numéro de la jeune hawaïenne si vite que mes doigts faillirent se dérober au point de broyer les touches. « Allo, Kahina ? ». Kahina arriva alors que j'avais entrepris de faire les cent pas à nouveau. Salutations brèves et de circonstances. « Je suis Kahina. As-tu des nouvelles des médecins face à son état? » « J'écoutais ton message quand le docteur est venu me voir. Du coup il a pris congé mais il devrait pas tarder à réapparaître. Ils lui ont fait un lavage d'estomac et l'ont entubé. Respiration artificielle. Son état à l'air stable pour le moment. » Bref, net et concis. Mais au fond, je me sentais terriblement mal pour Dom mais aussi Kahina. Mon ignorance était en partie fautive: si j'avais su, j'aurais pu. Mais hélas je ne savais pas et n'ai pas pu agir à temps. Le latino et moi avions passé la soirée au Manchester et si personnellement je détestais (et n'arrivais pas) à me soûler, Dom avait excellé en la matière. Je ne l'avais pas empêché car j'étais de ceux qui estimaient que poser des limites à un homme tel que mon ami était castrateur. J'avais tort, j'aurais dû intervenir... seulement le conditionnel passé n'allait ni réparer le foie du latino ni créditer ma prudence. Il s'agissait d'une vie et moi qui avait passé une grande partie de ma vie à protéger celle des autres, je me sentais désarmé lorsque l'arme blessant mes proches n'était faite que de gouttes.
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| | | | Mer 23 Mai - 21:43 | |
| Please, don't leave me. Kahina regardait Domenico, par le billet de la fenêtre, et Spencer. Domenico. Spencer. Domenico. Spencer. Elle était chamboulée. Elle ne savait que faire. Il y a de ces moments dans la vie où la vive impression de perdre une grande partie de soi est présente. Peut-être trop. Domenico, qui était dans un coma. Son père, qui n’avait que peu de chances de survivre. La vie lui enlevait toujours ceux à qui elle tenait. Elle se sentait piégée. Incapable d’agir. Elle ne pouvait rien changer à la situation de Domenico. Ni à celle de son père. Elle ne pouvait rien n’y faire. Et se sentir inutile la rendait encore plus vulnérable. Kahina écouta Spencer. « J'écoutais ton message quand le docteur est venu me voir du coup il a pris congé mais ne devrait pas tarder à réapparaître. Ils lui ont fait un lavage d'estomac et l'ont entubé. Respiration artificielle. Son état à l'air stable pour le moment. » Elle entendait les mots se succéder et ne voulait rien comprendre. Son monde s’écroulait. C’était impossible. Puis, elle se trouva ridicule. Elle était là, en pyjama, à s’inquiéter alors que Spencer venait de lui dire que l’état de Domenico était stable. Mais un état stable, ça signifiait quoi au juste? Kahina était avocate, pas médecin. Par contre, elle savait que ce n’était pas obligatoirement positif. Son état n’empirait pas. Mais il ne s’améliorait pas non plus. Kahina regarda les médecins ainsi que les infirmières. Puis de nouveau Domenico. Il fallait qu’elle aille parler au jeune homme. Elle savait qu’il pouvait l’entendre. Pas répondre, mais l’entendre. « Je peux entrer, tu crois? » Spencer lui fit un signe positif de la tête.
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Kahina était assise à côté du lit de Domenico. Elle entendait les « bips » fréquents de la machine reliée au jeune homme, signe qu’il était toujours en vie. Décidemment, Kahina détestait les hôpitaux. Les chambres blanches, les vies ébranlées à l’intérieur. Elle ne connaissait que trop bien cet atmosphère. La jeune femme prit la main du jeune homme. « Dom’, c’est Kahina. » Évidemment. « Tu as merdé, cette fois. » Elle ne savait que dire, elle ne voulait pas se choquer face à sa conduite de la veille. Il était dans un sale état déjà. « Pourquoi? Pourquoi faut-il que tu te crois invincible, Dom? Tu ne l’es pas. Je ne le suis pas. Tu sais, je te comprends en un sens. Mais tu n’as pas le droit de me faire ça. Tu m’as toujours dit que tu serais toujours là pour moi. Alors ne m’abandonne pas. » Des larmes se mirent à couler sur ses joues. « Tu sais, Dom’, la vie nous amène toujours des embûches. Bien sûr que tu le sais. Nous deux, nous le savons que trop bien. Mais elle nous amène aussi des gens extraordinaires pour nous aider à travers cela. Tu es l’une de mes personnes extraordinaires Dom’. En fait, tu es pratiquement le seul. Emma est morte, tu le sais. Je porte malchance à mes meilleurs amis, je crois bien. Mais tu ne peux pas me laisser. » Elle regarda autour d’elle, constatant encore plus la froide réalité. « Tu te rappelles, à Hawaii? On se croyait les rois du monde. Nous avions notre forteresse sur la plage. On s’y cachait quand tout allait mal autour de nous. Eh bien ce souvenir, c’est le meilleur que j’ai de toute ma vie. La quiétude, notre endroit favori où nous passions des heures à parler et à écouter les vagues de l’océan. Tu me crois, si je te dis que ça manque et que je donnerais tout pour retourner à ce moment-là? » Kahina regarda le jeune homme, un léger sourire apparût sur le visage de la blondinette. Elle se releva. « Je reviens tout à l’heure. Je reste tout près. » Elle se dirigea de nouveau vers la sortie.
***
Spencer était toujours là. « Reste, Spencer. D’accord? Je ne veux pas rester seule dans un hôpital. » En fait, si elle devait rester seule, elle s’effondrerait. C’est le fait d’avoir des gens autour d’elle qui lui permet de garder son allure de personne forte, alors qu’elle n’a envie que de se laisser tomber, de s’abandonner. Tout ceci, aux yeux de Kahina, n’est qu’un cauchemar effroyable.
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| | | | Mer 23 Mai - 22:02 | |
| Houston...we've got a problem Retour au 23 mai 2012, 2h55 a.m Avec mes verres fumés, je me mettais à tituber sur le le plancher de danse, sous le regard amusé de Spencer. Après s'être payé quelques bières tout en discutant de football, du travail et des prochaines élections présidentielles, j'avais décidé de pimenter un peu la soirée. À vrai dire, j'étais incapable de me tolérer sobre. J'appréciais la compagnie de Spencer, vraiment, mais aujourd'hui, mes pensés n'arrêtaient pas de me hanter continuellement. Quand ce n'était pas ma culpabilité face à mon éloignement volontaire de Julie, les problèmes auxquels Kahina faisait face avec son père ou mes inquiétudes refoulées pour Denver, c'était mon problème d'alcool justement. Bref, je discutais comme ça, mais j'avais la tête ailleurs et je haïssais ça. Les bières ne me suffisaient pas pour noyer mes réflexions. J'avais alors inciter Spencer à me payer des shooters et des drinks à la pelle, comme il me l'avait promis. Au début, il suivait mon rythme et c'est avec enthousiasme que nous trinquions à notre amitié, aux femmes et à toutes autres causes qui venaient à l'esprit. Puis, plus le temps avançait, plus il modérait ses consommations. Moi, j'arrivais de mieux en mieux à m'oublier et à trouver une certaine paix d'esprit. D'ailleurs, voyant que je commençais à aller mieux, je ne voulais pas que ça arrête. Je n'avais pas envie que cette sensation disparaisse. Alors, il m'en fallait plus. Toujours plus. Spencer, lui non plus pas tout à fait sobre, avait tout de même un peu de jugeotte. Il riait de moins en moins. Et moi, je devenais quelqu'un d'autre. Je dansais comme un déchaîné sur la piste de danse. Avec une, deux ou plusieurs filles, selon le moment de la journée. J'étais vulgaire, plus arrogant qu'à mon habitude. Les gens commencèrent de moins en moins à apprécier ma compagnie sur la piste de danse et me lâchèrent successivement. Vers 3 heures du matin, presque à la fermeture du club, j'étais encore là à zigzaguer sur la piste alors que Spencer m'attendait au bar. Je sentis soudain sa main dans mon dos. Il me prit un certain temps avant de réagir. Je me retournais.
- T'es sur que ça va Dom? avait-il demandé avec le même ton grave et solonnel. Très Spencer quoi.
Je ne répondis pas immédiatement. Un mince filet de lucidité perça la pénombre de cette dure soirée. J'eus un avant-goût de ce que j'avais fait subir à Kahina. Je vis Grace et George me regarder comme si j'étais maintenant devenu un enfant à problème. J'imaginais Julie qui m'aurait regardé, attristée de n'avoir rien vu, rien su. Bref, je vis ce qu'attendaient mes proches à la suite de mes déboires. Et je me sentis mal. Mal de leur subir tout ça alors que je m'étais donné la mission de ne jamais les abandonner, d'être celui qui ne déconnerait jamais, qui serait toujours là. J'eus tellement honte de moi que je ne voulus même pas chercher une porte de sortie. C'était trop tard.
- Ouais, avais-je baragouiné en tapotant son épaule. Pourquoi ça n'irait pas? Si tu veux bien m'excuser, je vais aller aux toilettes. - Je t'attends à l'extérieur alors, s'était-il contenté de répondre.
M'éloignant pour aller me soulager, j'eus l'étrange idée d'agripper une bouteille dans le bar et l'amener avec moi, pour me donner le coup de grâce. Sans trop de difficulté, je réussis à éviter le regard du barman, pris mon poison et allai me diriger aux toilettes. Le reste de mes souvenirs furent flous. J'avais tout bu d'un coup, sans arrêter. Je m'étais ensuite préparé à abaisser ma braguette, mais je sentis soudain des points noirs dans mon champ de vision. Je n'arrivais plus à trouver l'équilibre. Sans que je m'en rendis compte, je m'affaissais sur le dur carrelage des toilettes pour hommes. Mon corps gisait inerte. Autour de moi, la bouteille cassée était répandue en mille morceaux. Retour au 22 mai, 4h45 am Dr Coppelin examinait son patient la mine songeuse. Qu'avait-il pu se passer pour que Monsieur Torrès ait subitement décidé de prendre un coup? Toute cette histoire l'intriguait vraiment. Si la médecine était sa vocation, la psychologique demeurait sa passion. Il n'arrivait pas encore à cerner le personnage de ce latino de 22 ans. Il comptait en apprendre davantage avec son cousin, assis dans la salle d'attente. Dr Coppelin songea un instant que cet homme blond à l'imposante carrure aurait pu être son cousin. Après tout, les familles recomposées étaient fort nombreuses aux États-Unis. Tout comme celles qui avaient adopté. Or, il finit par considérer qu'on lui avait menti. Plutôt que d'empêcher le jeune homme d'avoir accès à son patient, il décida de jouer la carte de la crédulité. Il obtiendrait de vraies réponses de cette manière. Ainsi, déterminant qu'il était maintenant temps d'aller faire un bilan à ce dernier.
Une fois arrivé, Dr Coppelin constata que l'homme n'était plus seul. Une jeune femme blonde, elle aussi, lui tenait compagnie. Toujours avec l'air aussi professionnel, il alla rejoindre le duo et s'arrêta à une distance raisonnable pour créer une intimité, mais être tout de même en retrait.
- Désolé de vous déranger, mais je crois qu'il est en mon devoir de vous informez de l'état de votre cousin, indiqua-t'il en appuyant particulièrement sur le dernier mot.
Il leur fit signe de s'asseoir sachant ce qu'il avait à leur annoncer. Une fois que cela fut fait, il poursuivit.
- Monsieur Torrès était dans un état... assez critique, je dois l'admettre. Il l'est toujours dans la mesure où il n'a pas retrouvé conscience. Nous estimons que cela pourra prendre entre 2 à 40 jours, mais rien n'est certain. Nous avons fait un lavage complet de son estomac. Son foie est sur surveillance. Si cela s'aggrave, nous allons devoir opérer.
Dr Coppelin marqua une pause, le temps de laisser digérer la nouvelle aux deux proches de son patient.
- Monsieur Torrès est au stade 3 du coma éthylique ce qui implique qu'il est plongé dans un coma profond. On a retrouvé énormément d'alcool dans son sang. C'est à en faire dresser les cheveux de la tête. Je voulais savoir si vous saviez ce qui s'est passé. |
| | | | Jeu 24 Mai - 3:16 | |
| Please, don't leave me. Kahina était de retour dans la salle d’attente, auprès de Spencer. Elle ne savait d’ailleurs pas qui il était. Probablement un ami de Domenico. Ou peut-être une connaissance de bar. Qui sait? Elle ne l’avait jamais rencontré. Elle était assise à ses côtés lorsqu’un médecin se dirigea à leur rencontre pour leur donner de plus amples informations au sujet du jeune homme. « Désolé de vous déranger, mais je crois qu'il est en mon devoir de vous informer de l'état de votre cousin » Kahina regarda étrangement Spencer, puis reporta son regard sur le médecin. Spencer n’était pas le cousin de Domenico. Elle en était certaine à 100%. Mais elle n’y porta guère attention, se disant simplement qu’il a dû tenter de se couvrir pour pouvoir rester auprès du jeune homme. Bon choix d’inventer qu’il était de la famille. Bien vu même, bien que pour les airs latinos, on y repassera! « Monsieur Torrès était dans un état... assez critique, je dois l'admettre. Il l'est toujours dans la mesure où il n'a pas retrouvé conscience. Nous estimons que cela pourra prendre entre 2 à 40 jours, mais rien n'est certain. Nous avons fait un lavage complet de son estomac. Son foie est sur surveillance. Si cela s'aggrave, nous allons devoir opérer. » La blondinette regarda le médecin, se répétant dans sa tête le 2 à 40 jours. Quarante jours. Quarante. Un mois et demi. Quarante jours. Près de six semaines. Bordel. Elle prit une grande respiration avant de poser une question au médecin. « Quand vous dites 40 jours, c’est dans le pire des cas, non? Il va se réveiller… Il ne restera pas dans un coma éternel… N’est-ce pas, monsieur? » Pourtant, la jeune femme n’appréhendait que trop bien la réponse du médecin. Elle savait que cela pourrait tourner pire. Elle savait. Elle savait mais elle refusait de le croire. Elle refusait de croire qu’elle revenait tout juste d’un hôpital à Los Angeles pour son père et qu’elle était maintenant dans un hôpital, à San Francisco, pour son meilleur ami. La vie la lâcherait-elle, un de ces jours? Ou devait-elle attendre de perdre tout ceux à qui elle tient? « Monsieur Torrès est au stade 3 du coma éthylique ce qui implique qu'il est plongé dans un coma profond. On a retrouvé énormément d'alcool dans son sang. C'est à en faire dresser les cheveux de la tête. Je voulais savoir si vous saviez ce qui s'est passé. » Putain. Voilà le mot qu’il lui venait à l’esprit maintenant. Bordel de merde. Pourquoi, pourquoi avait-il agit comme un grand imbécile alors qu’elle lui avait parlé le jour d’avant? Pourquoi avait-il cherché de l’aide pour finalement abandonner et se saouler à en perdre la conscience. Pourquoi fallait-il qu’il joue aux plus forts? Pourquoi, bordel, pourquoi? Elle reprit son calme l’instant de répondre au médecin. « Domenico avait… Certains problèmes récemment. Je ne sais pas trop quels étaient ceux-ci. Je sais seulement qu’il m’avait parlé vouloir aller dans un centre pour quelques temps, question de régler ses problèmes d’alcool. Je n’étais pas au courant de rien avant hier. Il m’en a glissé un mot hier. J’étais à Los Angeles, je ne pouvais rien faire. Je… Je ne pensais pas qu’il ferait une connerie du genre… » Kahina se leva de sa chaise et s’éloigna, sentant les larmes lui monter aux yeux. Elle retourna près de la chambre de Domenico, y entra de nouveau et s’asseya auprès de lui. « Dom’, j’ai merdé. Je suis désolé. C’est ma faute ce qui t’arrive. J’aurais dû revenir à San Francisco quand tu m’as parlé de tes problèmes. Je n’aurais pas dû te laisser attendre une journée de plus. C’est ma faute Dom’. Si tu meurs, ce sera ma faute aussi. Tu mérites d’avoir une meilleure amie plus présente. J’aurais dû revenir Dom’, j’aurais dû être là. Je n’aurais pas dû croire que tout allait bien. Je sais ce que c’est, des problèmes d’alcool. J’aurais dû prévoir. Bordel… Pourquoi ai-je été aussi conne? » La blondinette reprit ses esprits et quitta la chambre avant de se laisser glisser contre le mur, à côté de la porte, et de se mettre à pleurer à chaudes larmes. Pourquoi? Pourquoi n’était-elle pas revenue à temps…
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| | | | Jeu 24 Mai - 15:56 | |
| « Reste, Spencer. D’accord? Je ne veux pas rester seule dans un hôpital. » Ma gorge se noua. J'acquiesçait silencieusement, perdu entre l'inquiétude et la pudeur de mes émotions. Kahina revenait de la chambre de Domenico et je devinais sans peine quels genres de choses elle avait du lui dire. Mon père avait sans doute dit plus ou moins les mêmes à ma mère lorsqu'il s'était retrouvé seul avec le corps inconscient de celle qu'il aimait. Mais mon ami n'était pas ma mère aussi bien au niveau physiologique que vital. Son coeur battait et se battait. Je n'étais pas un grand sentimental dans l'âme mais le douloureux sommeil de mon ami m'affectait. L'islandais froid et solitaire que j'étais avait un réussi à sympathiser et apprécier sincèrement quelqu'un et ce quelqu'un souffrait. C'était en majeure partie pourquoi je n'avais jamais aimé me lier aux autres: les perdre était en un sens perdre aussi une partie de soi.
« Désolé de vous déranger, mais je crois qu'il est en mon devoir de vous informer de l'état de votre cousin » Mon visage resta impassible bien que mes entrailles se serrèrent dès le retour du médecin. Ses dires n'arrangèrent rien. Domenico n'allait pas bien, l'alcool l'avait perdu. Et même si mon ignorance était fautive, elle n'était pas la seule. Je n'avais pas agis à temps et à présent l'une des seules personnes à qui je m'identifiais aisément sombrait. « Monsieur Torrès est au stade 3 du coma éthylique ce qui implique qu'il est plongé dans un coma profond. On a retrouvé énormément d'alcool dans son sang. C'est à en faire dresser les cheveux de la tête. Je voulais savoir si vous saviez ce qui s'est passé. » Ce qu'il s'était passé ? Domenico avait bu et je l'avais laissé faire. Je n'étais ni son garde ni corps ni sa nounou mais son ami, ce qui m'incriminait d'autant plus. Mon visage resta grave et glacial alors que Kahina prenait la parole, émue. Que faire ? La prendre dans mes bras et lui dire que tout allait bien aller ? Je n'étais pas ce genre de personne, mais rester inactif et impuissant me rongeait. J'étais en partie responsable alors que j'avais dévoué ma vie à éviter ce genre de choses. Dom n'allait pas bien et je n'avais rien vu venir. J'avais combattu dans les pays les plus miséreux dans le but de donner aux autres cet espoir que je n'avais jamais eu et aujourd'hui je me retrouvais devant l'évidence absolue: Dom non plus, ne semblait pas l'avoir trouvé. « Kahina a tout dit docteur, hormis le fait que j'aurais pu et du l'arrêter et que je ne l'ai pas fait. » La hawaïenne nous avait quittés depuis quelques instants, en pleurs. Le docteur me regarda quelque peu dépité face à mon ignorance vis à vis des problèmes de Domenico mais surtout à propos de mon comportement. Je n'avais pas à lui expliquer le pourquoi du comment, son jugement à mon égard ne m'importait pas. C'était le jugement que je portais sur moi même qui m'effrayait.
J'avais écouté Kahina parler au latino, cette fois-ci. Elle pleurait et se flagellait d'une culpabilité qui n'était pas sienne. Nous ne pouvions prévoir ce que Dom allait faire ni l'exactitude du pourquoi de ses actes, ami proche ou non. Nous avions tous une part de secret et de solitude en nous et notre ami endormi en avait usé. « Si tu avais été conne, tu ne serais pas là l'heure actuelle Kahina. Je sais bien que tu es plus proche de lui que personne d'autre, mais cela ne signifie pas que tu es responsable de ses actes et... si il y a quelqu'un à qui tu peux en vouloir, c'est bien celui qui ne l'a pas arrêté le moment venu, moi. Mais aurions-nous pu vraiment l'empêcher de commettre de qu'il a fait ? Si je l'avais empêché de boire ces verres, ne l'aurait-il pas fait tout de même ? J'sais pas, j'suis pas devin, mais tu sais comment est Dom. Je ne peux même pas te promettre qu'il ira mieux instantanément ou quoi que ce soit. Cependant, je suis certain d'une chose: c'est que où qu'il soit, il a besoin de toi, là, maintenant. Alors qu'il mérite une autre meilleure amie ou non là n'est pas la question car ce n'est pas d'une autre dont il a besoin mais de toi. » Je n'aimais pas parler ainsi, c'était comme montrer à quel point une cause m'affectait. Mais je n'étais qu'un homme qui estimait assez justement que Kahina n'avait pas à se torturer ainsi, bien que cela était inévitable. Ce qui avait été fait était fait et rien au monde ne pouvait changer cela. Pas même la science, ni le mensonge... ni même les mots.
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| | | | Jeu 24 Mai - 21:27 | |
| Houston...we've got a problem Pour tout vous dire, je n'avais jamais été d'aussi proche de la mort depuis la coulée de boue à Quito. C'était la première fois que je me retrouvais à osciller entre la vie et la mort. Même si physiquement, mon corps ne répondait plus, mon esprit restait très actif et alerte. À vrai dire, la meilleure sensation pour expliquer le coma serait probablement celle de la plongée sous-marine. C'est un autre univers, tout fonctionne au ralenti, au rythme des courants marins. On nage en profondeur, mais sans être sur la surface. Mon corps était un peu cet océan gigantesque dans lequel je me perdais et je n'arrivais pas à remonter vers le haut. Toutefois, bien que j'avais cette immense sensation, mes capacités auditives demeuraient encore fonctionnels. Bien que je ne pouvais rien dire, je pouvais entendre pertinemment les personnes qui me parlaient. Il y avait d'abord eu Spencer, affolé de me retrouver affalé sur le carrelage du bar, qui s'était empressé d'aller appeler les secours et le propriétaire du bar par la même occasion. C'en est ensuite suivi d'un amalgame de voix différentes et pressées. Sûrement des infirmières, avais-je pensé. Vint ensuite une voix plus grave. Professionnel, posé et en contrôle. Probablement le médecin s'occupant de l'équipe, de l'opération. Puis, beaucoup plus tard, je pus entendre au loin les échos de mon ami irlandais, suivi de celui de ma meilleure amie hawaïenne. J'étais trop loin pour entendre ce qu'ils se disaient, mais je savais que c'était à propos de moi. Évidemment.
Vint ensuite deux visites spontanées de Kahina dans ma chambre. Elle me parlait. Comme plusieurs, elle devait être au fait que les gens plongés dans le coma pouvaient nous entendre. Avec sa mère qui était passée par-là, elle devait avoir une impression de déjà vu. Elle commença d'abord à me demander pourquoi j'avais agis ainsi. Elle ne me faisait pas de reproches. Elle cherchait sûrement à savoir réellement pourquoi j'avais commis un tel geste. Elle me parla ensuite de tous ceux qui l'avaient laissé. Qu'il ne lui resterait presque plus personne excepté moi. J'aurais été conscient et je lui aurais fait savoir tout mon repentir. C'était contre mes principes d'agir comme un con de première, de perdre le contrôle comme je l'avais fait. C'était ma faute. Bien qu'à sa deuxième visite, elle m'avait avoué qu'elle se sentait responsable de ma chute. D'un certain point de vue, on avait tous eu notre part de responsabilité dans l'échec de cette soirée - même si je demeurais le plus fautif de tous. Quoiqu'il en soit, le mal était fait et les regrets ne nous mèneraient nulle part. Fort malheureusement. *** Dr Coppelin recevait de nombreux patients chaque jour. Toujours, il faisait du mieux qu'il pouvait pour les sauver et leur donner la vie qu'il avait avant que l'incident se produise. Plusieurs fois, il devait aller s'asseoir avec les proches de son protégé et discuter. Pour lui, c'était la partie la plus difficile de son travail. Voir autant de souffrance dans le visage des gens, voir à quel point la mort détruisait des vies ne le laissait pas du tout indifférent. Du mieux qu'il pouvait, il restait calme et posé bien que dans certains cas, cela lui était très difficile. Il était humain après tout. Il était très bien capable d'imaginer comment il se sentirait s'il arrivait de telles choses à ses proches. Ce matin encore, il savait qu'il n'allait pas l'avoir facile bien que les nouvelles n'étaient pas si dramatiques. Évidemment, il y eut des questions. Il y en avait toujours.
- Vu le stade dans lequel il était, quarante jours semble effectivement le délai maximum, répondit le docteur aux deux jeunes adultes. Toutefois, Monsieur Torrès fait maintenant partie des statistiques. Cela veut dire qu'il peut suivre la tendance ou s'en éloigner. Le coma comporte encore quelques passages obscurs à la médecine. On n'est pas à même de dire quand il sera exactement revenu à lui.
Il prit une pause. La jeune blonde fit savoir au docteur que Domenico avait développé un problème, mais que c'était de fraîche date. Elle n'avait visiblement pas plus d'informations à lui fournir, car elle ne devait pas en connaître davantage. L'autre fut bref et se contenta de rajouter qu'il ne l'avait pas arrêter de boire. Dr Coppelin en profita pour noter ses détails dans son dossier. À ce moment, la jeune femme prit congé de la présence des deux hommes et alla rejoindre le patient dans la chambre à côté. Le docteur se permit alors de rajouter un commentaire à l'endroit du «cousin» de Domenico.
- Le stade 4 est la mort immédiate. On peut dire qu'il a été chanceux d'avoir été trouvé à temps. Si j'étais vous, j'essaierai de ne pas trop m'en faire au sujet de votre culpabilité dans l'affaire. Il n'y a jamais un seul coupable dans des histoires comme celles-là.
Dr Coppelin se tut immédiatement en revoyant la jeune femme ressortir de la chambre en larmes. Le grand blonde, avec maladresse, tenta de la calmer du mieux qu'il pouvait. Le docteur sentit son coeur se nouer. La détresse. L'incompréhension. La peur. Tant d'émotions négatives. Il sentit soudain son alarme accrochée sur sa ceinture s'activer. On l'appelait ailleurs. Ne voulant pas briser le semblant d'intimité qui s'était installé entre les deux proches de la victime, il se contenta de faire ses salutations de manière brèves, mais sincères.
- Vous savez, je suis un père de famille, mais aussi un frère, un cousin et un mari pour d'autres. Je sais ce que vous vivez. Si vous voulez un conseil, restez auprès de lui. Parlez-lui. Il y a de fortes chances que ça l'aide et peut-être le ramène à lui. Mais surtout, ne restez pas seul. C'est facile de sombrer dans de telles situations.
Il marqua une pause.
- Le devoir m'appelle. Je vous laisse sur ce conseil bien avisé
Et le Dr Coppelin s'éloigna, priant pour qu'il n'ait jamais à être à la place de ces deux jeunes gens. |
| | | | Jeu 31 Mai - 14:45 | |
| L’attente. Encore et toujours. Dieu que c’était une torture pour une personne qui n’avait jamais été d’un naturel patient. Je jetai encore un coup d’œil à mon portable, sachant pertinemment que les chiffres n’auraient pas bougé d’un iota. Ils semblaient même s’être figés dans une douloureuse immobilité. Le temps, quel bourreau sans pitié. Lorsque tu avais besoin qu’il avançât, il semblait prendre plaisir à faire du sur place. Je soupirai pour la énième fois depuis que j’étais levée. Quoique je n’avais pas fermé l’œil de toute la nuit. J’en étais totalement incapable. Comment l’aurais-je pu d’ailleurs ? Dom était à l’hôpital, dans le coma à ce que j’avais entendu dire et…c’était tout ce que je savais. J’ignorais si son état était critique ou non, s’il allait un jour sortir de son inconscience et surtout quand. Si d’ailleurs il arrivait à se réveiller, quelles en seront les séquelles ? Tant de questions qui m’assaillaient de toute part m’empêchant ainsi de trouver le repos.
Je me levai et allai faire une balade au bord de la plage. Depuis que j’avais appris la nouvelle par Julie hier soir, j’étais dans un état de nerf constant. D’ailleurs je me souvenais que lorsqu’elle me l’avait annoncée, ma réaction première fut le déni. Je ne pouvais le croire. Je ne voulais le croire. C’était trop soudain. Après Eliott, Dom. J’étais sans doute maudite, il n’y avait pas d’autres possibilités. Les personnes à qui je m’étais attachée, malgré moi, semblaient avoir élu l’hôpital comme seconde maison. Je me demandais bien qui serait le prochain sur la liste histoire que je prépare mentalement. Ne supportant plus d’être cloitrée entre les quatre murs de mon appartement qui semblaient accentuer ma claustrophobie, j’étais sortie au bon milieu de la nuit, sans but précis. J’avais besoin de m’éloigner. D’arrêter de penser. De me vider l’esprit. J’avais erré sans but dans les rues de San Francisco jusqu’à ce que le jour se lève, espérant naïvement que cela me permettrait de me concentrer sur autre chose. Sans succès cependant. Oublier. Oublier. Oublier. Voilà ce que je désirais, momentanément du moins. Et l’on refusait également de me l’accorder. J’avais bien une idée sur la manière de l’obtenir, get high guys, mais je ne pouvais fuir indéfiniment. Et j’avais besoin d’avoir les idées claires pour engueuler mon idiot de frère de cœur. Je ne comprenais pas ce qui l’avait pris, il était nettement plus responsable que cela. Il était de ceux qui modéraient leur consommation et surveillaient ceux qui terminaient à l’envers, non l’inverse. Je secouai la tête. J’étais tout aussi coupable que lui. Je n’avais pas mesurée l’ampleur de la situation quand il était venu me parler de ses problèmes de cœur ainsi que de ses problèmes d’alcool. J’aurais dû y voir un signe avant-coureur. Lui, si discret à l’accoutumé, venait me faire part de ses soucis, j’aurais dû y prêter plus attention. Je ne l’avais pas fait. Je m’étais dit qu’il était fort et qu’il saurait gérer, ignorant à quel point son addiction pourrait être profonde, ses maux importants. Ses allures d’homme robuste nous avait tous bernés, moi la première. Peut-être qu’au fond, ne voulions-nous pas le voir. C’était bien plus rassurant de se dire que tout était bien dans le meilleur des mondes.
Je retournai à l’appartement prendre une douche, me préparer puis allai chercher Julie qui m’attendait en bas de son immeuble. Le trajet en voiture jusqu’à l’hôpital se fit dans un silence religieux, de toute manière il n’y avait rien à dire. Nous partagions déjà les mêmes inquiétudes concernant notre ami, il était donc inutile de les formuler à voix haute. D’ailleurs les énoncer ne ferait que leur donner un aspect réel que je n’avais pas encore eu le temps d’intégrer. Je ne faisais que repousser l’échéance, je le savais bien. Lâche un jour, lâche toujours. Nous nous garâmes et prîmes quelques instants avant de descendre. Alors que nous pénétrâmes dans la bâtisse, je pris une profonde inspiration, nous y étions. Nous nous présentâmes à l’accueil où la standardiste en nous indiquant la chambre de Dom nous gratifia d’un regard condescendant auquel je répondis avec froideur. Nous n’avons nul besoin de la pitié d’une personne qui ne souciait que superficiellement de notre cas. Pourquoi se sentaient-ils tous obligés de nous couvrir de cette compassion exécrable ? Je soupirai tandis que nous montions dans l’ascenseur. Je pris la main tremblante de Julie dans la mienne, espérant la calmer un peu tout en lui murmurant des « ca va aller » auquel je ne croyais pas moi-même mais je me devais d’être rassurante pour elle. Il ne servait à rien que nous craquions toutes les deux. Je la laissais entrer dans la chambre en première et patientai à l’extérieur alors qu’elle s’entretenait avec son petit-ami. Cela me laissait ainsi le temps de me préparer psychologiquement à ce que je verrais à l’intérieur.
Julie sortit une bonne demi-heure plus tard, les yeux brillants de larmes. Je la pris quelques instants dans mes bras, essayant de mon mieux de la réconforter. Elle s’en extirpa, prétextant avoir besoin d’air frais. C’était mon tour. J’entrai dans la pièce et mon regard se porta instinctivement sur le corps endormi de Dom. J’allai m’asseoir près de lui, prenant soin de refermer la porte derrière moi. Son visage était si paisible qu’il eût été un crime qu’il se réveillât. Un profond silence régnait, seulement perturbé par les « bip » du moniteur cardiaque. Dieu que tout cela faisait remonter les souvenirs à la surface. Il fût un temps j’étais à sa place. « Salut la belle au bois dormant, c’est Lera. » Je marquai une pause, ne sachant que dire. « L’hôpital ne te réussit franchement pas, tu es plus pâle que moi, c’est affreux ! » fut tout ce qui me vint à l’esprit. J’inspirai profondément. « Bon inutile de te dire que tu as merdé, te connaissant même inconscient tu as déjà dû te le répéter un bon millier de fois. Tout ce qui m’intéresse c’est de savoir pourquoi. Qu’est-ce qui t’as pris ? Tu désirais tant que ça te foutre en l’air ? Tu m’avais dit ne pas te tolérer sobre mais j’ignorais que c’était au point de te provoquer un coma ! » Je jetai un coup d’œil à la pièce puis revins à lui. « Je suis tout aussi coupable que toi de ne pas su voir le danger mais les remords ne changeront rien, au contraire il vaut mieux utiliser cette énergie pour réparer ce qui peut l’être et t’aider au mieux. Donc réveille-toi vite. » Je marquai une nouvelle pause guettant une réaction chez mon ami. Aucune. Désespérant. « Je ne crois pas te l’avoir dit mais moi aussi je me suis jadis retrouvée à ta place, quoiqu’au fond me connaissant ce n’est pas si surprenant que ça non ? » Je ris. « Toujours est-il cet état m’effrayait et me plaisait à la fois. Je me sentais tellement légère et inatteignable que je ne souhaitais qu’une chose, rester dans ce cocon fraîchement construit. Ce qui m’effrayait c’était de voir avec quelle facilité j’étais prête à renoncer à ma vie. Je n’ai jamais été très amie avec la réalité, tu sais bien et je venais de perdre la chose la plus importante pour moi. C’est un coup dur. » Je me perdis dans mes souvenirs. L’idée que j’aurais certainement dû y rester ne me quittait malgré les années qui s’étaient écoulées. « Je me demande bien pourquoi je te raconte tout ça… » Sans doute pour meubler le silence effroyable qui nous enveloppait, messager du malheur. « Bref, tout ça pour te dire que t’as intérêt à te réveiller bientôt sinon je m’en occuperais et je t’assure que ce ne sera pas beau à voir. » Je crus apercevoir un mince sourire sur ses lèvres, c’était certainement mon esprit qui me jouait des tours, sachant fort bien que le brun serait partit d’un petit rire à l’entente de ces mots, ne me prenant pas du tout au sérieux. « Quand tu seras réveillé, nous aurons à discuter. » Mon ton était plus sec que je ne l’aurais voulu.
Quelques instants plus tard, un homme en blanc entra suivi de près par Julie, les yeux enflés par les larmes. « Je suppose que vous êtes le médecin de Dom, je suis Lera, une amie. » Je me levai et lui serrai la main « Alors, docteur, où en est-il ? » demandai-je en vrillant mes prunelles dans les siennes.
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| | | | Jeu 31 Mai - 20:09 | |
| Houston...we've got a problem C'est triste de constater qu'il faut parfois merdé pour réaliser à quel point les gens de notre entourage nous apprécie et quel impact nous avons sur eux. Très jeune, j'avais moins même appris que le moindre évènement avait une incidence sur pas mal de personnes, impliquées ou non dans ledit évènement. Avant de faire subir ceci à mes proches, j'avais moi-même passé par le processus de la victime indirecte, impuissante au malheur. Encore aujourd'hui, caché dans ma mémoire profonde, j'ai le souvenir de ce sentiment fort, cruel et étreignant. Constater notre impuissance, mais aussi notre échec, même s'acheter une part de responsabilité dans l'affaire, voilà à quoi on était confronté. On finit par s'en vouloir, s'accuser de tous les maux alors qu'en vérité, on ne sait jamais si on avait agi autrement, les choses auraient pris une tournure différente. Quand mes parents et mes soeurs sont mortes, je m'étais enfermé dans un silence complet. J'espérais me punir pour ne pas être resté avec eux et succomber à la fatalité en famille. Je ne suis même pas certain de m'être encore totalement pardonné d'avoir fui cette soirée-là. N'empêche, le point étant que, bien que rien ni personne n'avait pu prévenir cette monstrueuse tragédie, tous les survivants étaient accablés de remords - de quelques natures qu'ils soient. Ainsi, j'imaginais très bien en ce moment ce que mes amis, Julie et mes parents pouvaient ressentir à ce moment même. Moi qui m'était promis d'être le plus fort, ceux qui veilleraient sur les autres, qui ne ferait aucun faux pas, j'avais failli à ma tâche. Pour ça, je m'en voulais amèrement. Je n'aimais pas me faire mentir. Mes promesses, j'aimais les tenir. C'est pourquoi tout était d'autant plus frustrant.
Voilà une semaine que j'étais dans le comas. Une semaine prisonnier de mon corps. Malgré le fait que je ne réalisais pas vraiment le nombre de jours qui s'était écoulé depuis l'incident, je commençais à sentir le temps s'allonger. En fait, je n'avais jamais passé autant de temps inactif, sans bouger. Être branché, complètement légume sur un lit d'hôpital, ça ne me ressemblait pas du tout. C'était sûrement ce qui était le plus frappant pour mes proches qui me voyaient la première fois. Après mon arrivée de Kahina et Spencer, j'eus de multiples visites par la suite. Grace et George, mes parents adoptifs, prirent le premier avion en direction de San Francisco pour venir me voir. Bien que je ne pouvais réagir, je les avais entendu. Grace, si fragile et inquiète, n'avait pu retenir ses sanglots. George avait des trémolos dans sa voix. J'étais devenu leur fils au fil des ans. Ils me voyaient comme l'un des leurs. Si j'aurais été conscient, je les aurais pris dans mes bras et je me serais excusé. Excusé de ne pas avoir été un fils modèle. Depuis que je recommençais à avoir des relations avec des femmes, je ne semblais plus le même. J'avais été instable émotionnellement. Après mon incident au bar de Los Angeles, où j'avais tout juste éviter un casier judiciaire, me voilà de nouveau dans le pétrin. Il fallait que je fasse du ménage côté relation, car ça me jouait de sérieux tours. D'ailleurs, c'était principalement pour ça que j'avais eu ce coma. Ce casse-tête relationnel me donnait des maux de tête. Il fallait que je règle ça. Si je m'en sors, bien évidemment. Il y avait ensuite eu des visites répétées de Julie. La pauvre, elle était la première surprise de me voir dans un tel état. Si elle savait... J'étais encore repentant vis-à-vis elle, car depuis le début de notre relation, je n'avais pas arrêté de cacher certains trucs, alors que j'étais le premier à prôner l'honnêteté - bien que j'avais menti par omission. Chaque fois qu'elle venait, elle pleurait. Même si je ne pouvais réagir, cela me bouleversait, d'une manière que je ne saurais expliquer. Même chose pour Kahina.
Pour une énième fois, Julie vint me rendre visite, toujours aussi dévastée. Avec son nouveau projet de film, elle devrait avoir les idées ailleurs, le moral à son meilleur. Pourtant, ma connerie l'obligeait à détourner son attention. C'était une autre des choses que je n'avais pas pensé en allant jusqu'au bout de ma bêtise: comment j'aurais d'impact sur la vie des autres. Elle me parlait de peut-être lâché le projet. J'espérais qu'elle ne le fasse pas, car je savais l'immense opportunité et privilège qu'elle avait. Je ne voulais pas qu'elle manque sa chance. Après un moment, elle m'indiqua qu'elle avait besoin de prendre l'air un peu et me laissait entre bonnes mains. Je compris vite ce qu'elle voulut dire: Lera vint s'asseoir à côté de moi. C'était la première fois qu'elle venait me voir. J'ignorais si elle avait été mise au courant avant ou si elle venait de l'apprendre. Néanmoins, je la sentis tout de suite, mal à l'aise. Lera n'a jamais été la fille qui jouait dans le mélodrame et les grandes émotions à la Shakespeare. Plutôt l'inverse je dirais. Comme bien d'autres, elle commença à s'ouvrir à moi et se confier. Elle était passée par là. Vaguement, bien que je ne pouvais réagir, cela me rappelait quelque chose. Je l'avais toujours perçu comme un oiseau avec une aile cassée qui cherche désespérément à voler, fuir la cage dans lequel il était retenu. Peu importe les bonne personnes qui l'entouraient, elle ne semblait pas vouloir revenir à la réalité, au vrai sens des choses, comme si quelque chose l'effrayait là-dedans. Comme à son habitude, elle me menaça et me fit la morale. J'aurais souri si je l'aurais pu. J'avais la conviction qu'à mon réveil, elle serait beaucoup trop heureuse pour me reprocher quoique ce soit. *** Dr Coppelin passait voir ses patients, vérifier qu'ils allaient bien. Depuis la semaine dernière, il avait reçu 20 nouveaux patients. Il n'avait pratiquement pas une minute pour lui. Toutefois, il essayait le mieux possible de donner des soins de qualité à ses malades - comme il aimait les appeler. Saluant Monsieur Norton, vieillard de 76 ans se remettant d'une chirurgie à l'estomac, il regarda ensuite sa liste en y voyant apparaître le nom de Domenico Torrès, son comateux de voilà exactement une semaine. Alors qu'il se dirigea vers sa chambre, il croisa sa petite amie, les yeux rougis et le nez qui coule. Il lui mit la main sur son épaule et l'invita à le joindre à l'intérieur. Lorsque Dr Coppelin fut interruption dans la chambre, il trouva une autre jeune femme dans la chambre de son patient. Il s'arrêta au cadre de porte. Elle se présenta et je lui serrai la main. Dr Coppelin en profita pour répondre aux questions de la jeune femme tout en faisant ses vérifications sur le moniteur cardiaque et son patient.
- Aucun changement depuis son arrivée, nota-t'il au son de «bip» régulier. Nous surveillons toujours son foie. Il y a peut-être un danger, mais rien n'est encore certain. J'aurais les résultats de sa prise de sang d'ici quelques jours.
Il se retourna vers les deux jeunes femmes.
- En attendant, nous considérons que Monsieur Torrès demeure dans un état stable. Nous avons découvert que ses excès d'alcool ne sont pas tout à fait récent. Cela doit faire déjà quelques mois qu'il boit à répétition. |
| | | | Jeu 31 Mai - 21:29 | |
| Please, don't leave me. Plusieurs années auparavant, huit ans pour être précise, Kahina avait perdu sa mère. Andrea Kealoha avait succombée à des blessures suite à un accident de la route : un chauffard saoul avait frappé sa voiture. Par contre, avant, elle fut dans un coma durant deux semaines. Kahina lui parlait constamment. Elle n’avait presque pas quitté l’hôpital et ses murs vident de bonheur. Elle avait pleuré un certain temps, puis ça avait cessé. Elle avait accepté les évènements. En fait, non. Je vous mens. Elle ne les avait jamais acceptés. Elle avait seulement comprise qu’elle ne pouvait rien n’y changer. Son sentiment d’impuissance face à sa mère était immense. Elle regrettait d’avoir laissé sa mère sortir, de ne pas avoir trouvé une idée pour la faire rester. Mais alors, elle ne savait pas avant ce qui allait se passer. Ce drame. Andrea avait succombé au bout de deux semaines. Les médecins avaient mentionnés que si son père ne souhaitait pas la débrancher, elle pourrait peut-être rester en vie. En tant que « légume ». Kahina n’avait pas tout à fait compris le terme « légume » à cette époque. Elle en avait donc voulue à son père. Mais finalement, elle comprenait. Elle comprenait que sa mère n’aurait été que vivante physiquement, mais qu’elle n’aurait jamais pu revenir mentalement. Qu’elle aurait toujours été en état de type coma. Bref, aujourd’hui, elle était de nouveau aux côtés de quelqu’un étant dans le coma. Son meilleur ami. Son premier amour. Domenico. Elle ne se voyait pas sans lui. Impossible. Elle avait pris cette nouvelle de façon irréaliste. Elle ne voulait pas réaliser qu’il était dans un état critique. Lorsque Spencer l’avait appelé durant la nuit, elle ne comprenait pas. En fait, elle ne voulait pas comprendre.
Après sa deuxième visite dans la chambre de Domenico, épuisée et attristée, elle se laissa glisser contre le mur. Elle se revoyait faire la même chose, à quatorze ans, lorsqu’elle avait quitté la chambre de sa mère. Se croyant seule, Kahina se mit à verser des larmes, dépassée par les évènements. Ce qu’elle ne savait pas, c’est que Spencer l’avait entendu. « Si tu avais été conne, tu ne serais pas là l'heure actuelle Kahina. Je sais bien que tu es plus proche de lui que personne d'autre, mais cela ne signifie pas que tu es responsable de ses actes et... si il y a quelqu'un à qui tu peux en vouloir, c'est bien celui qui ne l'a pas arrêté le moment venu, moi. Mais aurions-nous pu vraiment l'empêcher de commettre de qu'il a fait ? Si je l'avais empêché de boire ces verres, ne l'aurait-il pas fait tout de même ? J'sais pas, j'suis pas devin, mais tu sais comment est Dom. Je ne peux même pas te promettre qu'il ira mieux instantanément ou quoi que ce soit. Cependant, je suis certain d'une chose: c'est que où qu'il soit, il a besoin de toi, là, maintenant. Alors qu'il mérite une autre meilleure amie ou non là n'est pas la question car ce n'est pas d'une autre dont il a besoin mais de toi. » Kahina le regarda, fixement. « Même si tu avais voulu l’arrêter, Dom’ t’aurait rembarré. Il n’aime pas qu’on lui dise quoi faire. C’est con. » Domenico faisait toujours à sa tête. Il se foutait de ce que l’on pouvait bien lui dire. Malheureusement, ceci était l’un de ses plus grands défauts. Kahina détestait d’ailleurs ce côté de Dom’. « Mais moi, j’aurais pu l’en empêcher avant, si j’avais été ici et non pas à Los Angeles. » Elle aurait pu, vraiment? Elle omettait de dire qu’elle était avec son père, à l’hôpital aussi, puisqu’il combattait le cancer. Elle se voilait le visage en se disant qu’elle aurait pu, alors qu’en fait non. Parce que son père était aussi important que Domenico.
*** Une semaine s’était écoulée. Kahina passait ses journées à l’hôpital. Elle avait eue des nouvelles de son père, son état était stable lui aussi. Elle souhaitait revenir le voir à Los Angeles, mais il lui avait dit de rester auprès de Domenico. Et Kahina écoutait toujours son père. Alors cela faisait sept jours maintenant qu’elle restait à l’hôpital. Elle ne dormait que très peu, des cernes s’étaient d’ailleurs formées sur son visage. La fatigue, le stress, l’attente. Elle avait croisée Julie à quelques reprises, puis Lera aussi. Elles étaient tout aussi inquiètes. Lera venait d’ailleurs tout juste d’apprendre que Domenico buvait fréquemment depuis déjà quelques mois. Kahina le savait. Il lui en avait fait part la veille de son coma. Elle regrettait de n’avoir rien dit. Il lui avait demandé de garder cela pour elle. Mais bordel, elle aurait dû le dire à des gens de San Francisco qui auraient pu aider Domenico le temps qu’elle était à Los Angeles.
La blondinette entra pour une millième fois dans la chambre du jeune équatorien. Sa routine habituelle maintenant. Elle s’asseya de nouveau aux côtés de Domenico. Elle ne pleura pas. Elle avait visiblement écoulé tout son stock de larmes pour des années à venir. « Dom’, s’il te plaît, reviens. Ça suffit maintenant tes vacances. Tu nous as suffisamment fait flipper. Et crois-moi, à ton réveil je t’amène dans un centre. De toute façon, que tu le veuilles ou non, ton médecin le proposera sûrement. D’ailleurs, chic type ce médecin. » Elle allait l’amener de force s’il fallait. Elle ne voulait plus jamais être dans une telle situation. Plus jamais passer proche de perdre son meilleur ami. Elle avait eu son lot de malheur là-dedans. « Tu sais, j’aurais fait une crise cardiaque si j’avais été plus âgée. Ça te donne une idée d’à quel point tu ne dois pas me faire vivre de telles émotions? C’est un amalgame complet là Dom’. Bordel, de vraies montagnes russes gratuitement. Sympa. » Ouais, des montagnes russes. Dans les manèges de ce type, tu as toujours certains moments plus joyeux et d’autres où tu avais envie de crier, même de pleurer. Bon, évidemment les montagnes russes présentes étaient plutôt effrayantes, amenant des émotions plus ou moins négatives. « Tu sais Dom’, je sais que tu m’entends. Je sais aussi que ma mère m’entendait. J’essaie d’être forte. Mais je ne peux pas être forte toute ma vie, Dom’. Tu dois revenir, ça m’épuise. Je ne sais plus où donner de la tête entre les remords, la tristesse et la peur de te perdre. Car oui, oui j’ai affreusement peur de te perdre. Tu as toujours été dans ma vie, ou presque. Ça fait au moins dix-sept ans que l’on se côtoie. Tu penses que je ferais quoi, sans toi? On a eu des hauts et des bas, certes, mais je ne me vois pas sans toi. Impossible. Alors ne me fais pas ça. Si tu n’as pas envie de revenir, fais-le au moins pour moi et pour tous les gens qui t’aiment. Grace et Georges souhaitent tellement te revoir. Ils ont tellement peurs de te perdre. Tu es leur bébé, Dom’. Certes, pas biologiques, mais ils te considèrent comme tel. Te perdre les détruirait. Je déteste les voir comme ça. J’essaie de leur remonter le moral, mais je suis si faible aussi. Je me sens impuissante. J’ai besoin de toi, Dom’. » La jeune femme regarda les vas et viens incessants des gens dans le couloir. Elle décida d’aller s’asseoir dans la salle d’attente, de nouveau, dans le but de se changer les idées en lisant les magazines redondants d’hôpitaux. Britney Spears en désintox? Brad Pitt et Angelina Jolie se marient? Who cares? Mais au moins, ça change les idées. « Bon, aller. Je t’ai suffisamment importuné pour l’instant. Je vais aller me lire un Star System. Je déteste ces revues mais j’avoue que lire les problèmes des stars peut parfois soulager le poids de la tristesse. Je te donnerai des nouvelles d’Angelina! » Elle lâcha cette dernière phrase à la blague. Domenico détestait les revues à potins, tout comme elle. Mais c’était le stock qu’il y avait à l’hôpital. Demain, Kahina devrait apporter des bouquins de chez elle. Fort plus intéressants. La blondinette quitta donc la pièce et alla s’asseoir sur un fauteuil, près d’une fenêtre, dans la salle d’attente blanche et bleue de l’hôpital. Elle prit le premier magazine sur la pile située sur la table à côté d’elle et commença à feuilleter.
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| | | | Dim 3 Juin - 20:45 | |
| Un peu plus d'une semaine plus tard, je posais de nouveau mon regard froid sur Domenico. Il dormait profondément, lui. Rêvait-il ? Je l'espérais sincèrement. Voilà des années que je ne rêvais plus, mes heures de sommeil se comptaient général sur les doigts d'une seule main. Ces derniers jours, cela avait été encore pire. Allongé dans mon lit, j'avais littéralement tué le temps à fixer mon plafond, pensif. Je ne culpabilisais pas vis à vis de Domenico: comme Kahina l'avait si justement dit, le latino avait son caractère et n'aurait pas écouté mes avertissements au sujet de sa consommation excessive d'alcool.
Je ne savais pas vraiment quelle heure il était, mais cela faisait bien une demie-heure que je restais figé devant la chambre d'hôpital de Domenico. Non, ce n'était pas la culpabilité qui me lacérait si vivement le ventre mais l'inquiétude. J'avais vécu la guerre, j'avais d'ailleurs les mains trempés jusqu'aux coudes; mais rares furent les blessures atteignant réellement mon coeur. Le latino aujourd'hui endormi était un ami et je n'avais su trouver les mots. Je devais le faire, juste quelques phrases, quelques syllabes... Les autres avaient réussi, non ? Pourquoi pas moi ? Étais-je réellement aussi glacial ? Je savais parfaitement que non, mais tout restait là, logé au fond de moi et rien n'était sorti.
« J'ai jamais aimé faire ça alors où que tu sois Dom, ne te fous pas de ma gueule même si il y a probablement matière. » J'avais fait quelques pas en avant et étais entré dans la chambre près de mon ami inconscient. Tout cela me rappelait ma mère, le lit d'hôpital, la morgue. Chassant ces idées sombres, je me focalisais sur le torse de Domenico. Il respirait, lui. « Est-ce bien utile de dire quelque chose ? Ma présence parle d'elle même non ? Alors reviens Dom. Une horde de nana en chaleur réclame ton corps et j'arrive pas à finir les boîtes de douze donuts tout seul. » Et je ne dis rien de plus car il n'y avait rien à ajouter. Domenico n'était pas un garçon débile et devait probablement comprendre ce que je cherchais à lui transmettre si il m'entendait. Les déclarations et les pleurs n'avaient jamais été ma façon d'opérer. Seule la pureté de mes émotions, l'était.
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| | | | Lun 11 Juin - 23:42 | |
| Houston...we've got a problem J'avais toujours attiré les confidences. Il me semblait qu'on avait naturellement confiance en moi pour parler des choses difficiles. Pourtant, je n'étais pas une personne ayant une curiosité débordante. Je ne cherchais pas à savoir les tourments des gens qui m'entouraient. Toutefois, c'était souvent vers moi qu'on se tournait. J'aurais été un excellent psychologue: je savais écouter sans interrompre, je restais discret sur les propos qu'on me partageait et je donnais des conseils judicieux. Paradoxalement, bien que j'aie toujours eu une oreille attentive, je n'avais jamais été la personne qui était porté à aller se confier elle-même. Ma méfiance faisait en sorte que je ne voulais pas que mes problèmes soient connus de tous et chacun. En plus, partager mes problèmes c'était mettre un mot sur une réalité existante et je n'étais pas toujours prêt à faire ce pas. Il est souvent plus facile de le garder par soi, tenter de le régler. Il y avait un certain signe de faiblesse dans la confession je trouvais. Mais bon, mes idées préconçues n'étaient pas toujours véridiques. Depuis mon hospitalisation, j'avais d'abord vu défiler Kahina, Spencer, puis mes parents, Julie, Lera et même Denver. Tous m'avaient fait de confidences - certaines attendues, d'autres surprenantes. Je ne pouvais peut-être pas leur répondre - ce qui devait faciliter la tâche de certains d'entre eux - et je ne pouvais peut-être pas voir leur expression. Cependant, j'étais persuadé que je m'étais trompé au sujet des confidences. Il faut beaucoup de courage pour déballer ce qui nous dérange, nous tourmente et nous blesse. Ce n'est pas une question de lâcheté, mais au contraire, de bravoure. Les voir s'ouvrir à moi, c'était une marque énorme de respect. Je voyais à quel point je comptais pour eux, en tous les cas, assez pour recevoir un discours. Si cela je pouvais revenir à moi...
Dans le coma, on ne voit pas le temps qui passe. Cela fait-il deux jours ou deux ans que je suis endormi? Comment aurais-je le moyen de le savoir? Cet état de plongée en apnée commençait sérieusement à me fatiguer. J'avais le goût de vivre, de remonter à la surface. Je voulais pouvoir réparer la bêtise que j'avais commise. Je voulais une deuxième chance, si ce n'était pas trop égoïste de la demander. Il me restait encore tellement à vivre, tellement à accomplir....cela ne pouvait pas être la fin. On avait encore besoin de moi là-haut. Il devait y avoir un moyen de s'en sortir. J'étais un battant après tout. Je n'avais pas dit mon dernier mot. *** 2 heures du matin. L'infirmière fait une inspection de nuit sur les patients du deuxième étage. Un peu endormie, elle passe en revue la série de tests qu'elle doit effectuer sur le patient assoupi dans le lit, un latino nommé Torrès. Elle jette un coup d'oeil aux dernières prises de sang tout fraîchement sorties du dossier du jeune homme et regarde le moniteur cardiaque. Il y a un problème. Elle appelle immédiatement un médecin. Quelque chose ne va pas.
Dr Coppelin qui était de garde ce soir-là reçoit un avertissement sonore l'informant qu'il est demandé à la chambre 258, celle de l'un de ses patients. L'infirmière lui explique d'où émerge ses inquiétudes. À quelque part au fond de lui-même, Dr Coppelin sait de quoi il s'agit. Il indique à l'infirmière d'amener son patient en salle d'opération. Le foie de Domenico fait des siennes. Il faut s'en occuper avant que cela ne dégénère.
Tout en marchant vers la salle d'opération, il adressa quelques mots à son comateux.
- Ça va aller. Bats-toi.
Il ne sut si ses mots s'adressaient vraiment à Domenico ou à lui-même. Néanmoins, il savait qu'il n'avait pas le droit à l'échec. C'était exclus. |
| | | | | | | | I know you «can drink until you throw up» but don't. | |
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