HISTOIRE !
Ma vie n’a rien de banale, loin de là. J’ai rien du type qui est né à San Francisco, a vécu une vie sans rebondissements et qui s’est créé un train de vie quotidien bien normal. J’aime pas la normalité, on peut dire que je suis figure d’originalité. Et ce que j’ai traversé tout au long de mon existence le prouve bien. Je n’ai connu mes parents biologiques que 6 ans. Soit rien du tout. Aucun souvenir, aucune photo, aucun film d’enfance, aucun objet, rien. Tout est parti en fumée avec eux. Il parait que c’était criminel, mais on a jamais su le fin mot de l’histoire. Dans tous les cas, la maison de mes parents a brûlé quand j’avais 6 ans. On était tous les trois à l’intérieur, mes parents sont morts. Je suis le seul rescapé. Un miracle, selon les pompiers, vu la hauteur des flammes et l’emplacement de ma chambre d’enfant. Moi, je pense surtout que c’était pas mon heure, que j’avais pas fait ce que j’avais à faire sur cette Terre. « T’es un veinard », on me disait. Du coup, j’ai été placé dans un orphelinat. C’était à Sacramento tout ça. L’accueil était sympa, mais y avait pas mal de turbulents là-bas. J’avais qu’un seul pote dans cet endroit, je me souviens. On passait nos journées ensemble, jusqu’à ce qu’il se fasse embarquer par une famille. Parait qu’ils l’ont gardé qu’un an, et qu’ils l’ont renvoyé à l’orphelinat après, je sais pas pourquoi. J’étais déjà parti moi. Direction San Francisco avec la famille Gorislavski. Bizarre comme nom de famille, mais ça me plaisait. C’était bizarre, et original. Une famille mi russe, mi anglaise, un bon mélange. Je me rappelle qu’au début, je comprenais rien quand ils me parlaient. Cela faisait qu’un an qu’ils étaient arrivés en Amérique, ils venaient d’Angleterre. J’ai fini par m’y habituer, heureusement. J’ai même pris l’accent, en fait. Quand on vit avec des gens qui parlent d’une façon, on finit par faire comme eux, surtout quand on est enfant. Grâce à eux, j’ai eu droit à un meilleur ami. Un cousin. Damon. C’est un p’tit jeunot encore, il a trois ans de moins que moi. Mais le courant est toujours super bien passé, même si on se voyait pas souvent. J’ai eu le droit à une super cousine aussi, bien casse-cou. Un vrai amour, bien que ça soit une chieuse. Et j’ai eu le droit à une maison. Enfin. C’était à Bayview, pas le plus beau quartier de San Francisco. Ni le plus accueillant. C’était peut-être le plus dur, même. Le genre d’endroit où il n’est pas bon de sortir seul la nuit, sans être armé. Je m’y suis fait à cette ambiance. C’est comme tout, quand t’es dans la merde, t’essaie de t’en sortir. Alors au lieu de subir, en grandissant, j’suis rentré dans les magouilles. 12 ans et je trainais déjà avec un gang. Je me sentais un peu plus important, et un peu plus en sécurité. Ils m’ont trainé vers le fond ceux-là, mais c’était une nouvelle famille. J’en ai fait des conneries dans l’anonymat. J’ai déjà volé les caisses d’un petit supermarché de rue. Blessé gravement des gens. C’était la loi de la jungle. La loi du plus fort. Survivre ou mourir. Personne ne savait que je faisais partie de ce gang. On savait que j’étais pas non plus très fréquentable, on m’avait déjà vu plusieurs fois avec un flingue à la main. Mes parents n’en savaient rien. J’ai quand même finit le lycée avec ces conneries. Difficilement, mais j’ai réussi. Puis, j’ai eu un diplôme de coiffure et de paysagiste. Bien plus manuel qu’intellectuel, c’est ce qu’on disait. Je gagnais du fric en réparant les meubles, les voitures, en faisant les jardins. Et mon temps libre, j’étais avec le gang, ou dans les skate-parks. Joyce l’a su, que je magouillais. En fait, elle a eu des problèmes avec l’autre gang, et moi et mes potes, on l’a secourut. Ça l’a pas plus, surtout que Gillian et moi, ça a toujours été ambiguë. Elle me l’a bien fait comprendre quand Gigi et moi, on s’est embrassé à une soirée. Elle a voulu que je dise toute la vérité à sa sœur. Et je l’ai fait. Y avait Damon aussi, et il a tout entendu. Ça lui a pas plu non plus. Je crois que personne n’a apprécié, en fait. Le chemin du retour, c’était les grosses tensions dans la voiture entre nous quatre. Méga dispute, Damon roulait super vite. Et y a eu les flics. J’avais de la drogue sur moi. Un paquet ! Ils m’ont embarqué. Détention et trafic de drogues. Ça va, ils ont pas su pour le reste. Enfermé pendant deux ans quand même. C’est long. Mais je sors enfin. Je suis enfin libre, et une nouvelle vie s’ouvre à moi. Hallelujah.