J’étais dans ce lit, à l’hôpital, quand j’avais reçu ce dernier sms. Ils voulaient m’échanger contre Yuri. Ils avaient Yuri, ils le torturaient… Mon pauvre frère qui s’était fait kidnapper il y avait un jour de cela par ces mafieux russes. Je n’arrêtais pas de penser à lui. Chaque minute, chaque seconde. Mes yeux étaient rivés sur le mur d’en face toute la journée. Le médecin s’inquiétait pour moi et surtout pour la santé du bébé, tellement le stresse était important. Mais je ne disais rien, j’étais limite tétanisée par ce qui était en train de se produire. Je me sentais inutile là, cachée dans un hôpital, sans pouvoir retourner chez moi. Je ne pouvais même pas aller chez Kyler, à cause de ses infos secrètes. Rien. J’étais bloquée ici. Je pensais aussi à Robbyn et à ce qu’il était en train de faire. J’espérai de tout mon cœur qu’il ne fasse pas attraper non plus. Mais dans quel monde vivait-on…

Puis je reçu cet sms et j’en avais le cœur net. J’allais le faire. J’allais aller au point de rendez vous pour qu’ils m’échangent contre mon frère. Je n’avais même pas pris la peine de penser aux conséquences. Je n’avais même pas réfléchis en fait, c’était venu naturellement. J’aurais tout fait pour mon frère. Il avait besoin de soin aussi. Génial, j’étais dans un hôpital, j’avais de quoi faire. Alors c’est parti. Je me levais de mon lit et j’entrepris de m’habiller, troquer ma chemise d’hôpital contre un jean, un pull et des bottes, avant d’enfiler ma veste. Je laissais mes cheveux libres, j’attrapais mon sac et mes affaires et je sortais de la chambre, l’air de rien. Personne ne m’avait remarquée, tant mieux. Je savais où je devais aller, heureusement que j’avais fait un stage ici pour savoir où ils rangeaient tout leur matériel de soin. Tant pis, j’allais voler. Mais c’était le moindre de mes soucis à présent. Je regardais ma montre : 22h43. J’avais rendez vous à 23h30. Le temps pressait. Je me faufilais dans les couloirs de l’hôpital jusqu’à trouver la porte que je cherchais. Heureusement pour moi, elle n’était pas fermée à clé. J’entrais à l’intérieur, attrapais vite du matériel utile pour soigner mon frère et sortait rapidement. J’avançai maintenant jusqu’à la sortie. Ils découvriraient bien assez vite que j’avais quitté ma chambre, mais bon… Je serais loin le temps venu. J’entrai dans le voiture, posait mes affaires sur le siège passager, pris une profonde inspiration et démarrai le moteur.

Il était 23h18 quand j’arrivai au point de rendez vous. Je garai ma voiture un peu plus loin, puis je sortis dans la rue. Je tremblais. Oui, j’avais peur. Mais pourtant je savais que c’était ce que je voulais faire. Mon sac sur l’épaule, je marchais, la gorge nouée. Ma main se posa sur mon ventre lorsque je m’arrêtai à l’endroit où ils étaient sensés venir me chercher. Je pensais au bébé, puis à Kyler… Je ne lui avais rien dit. Sûrement parce qu’il m’aurait dit de ne pas y aller. Mais j’avais pris ma décision, et j’attendais… j’attendais. A chaque fois qu’une voiture passait, mon estomac se contractait violemment. Je regardais ma montre et je tournais ma tête sur un bruit de moteur proche : 23h30 et ils étaient à l’heure.

On me fit installer sur la banquette arrière de la voiture, le ventre plus noué que jamais. Ils me donnèrent quelque chose à boire, puis plus rien. Le néant. Ca avait été presque immédiat, et je n’avais pas réussi à identifier les mafieux. En même temps, camouflés comme ils étaient, je ne pouvais pas grand-chose. Je n’eus aucune idée si j’étais restée inconsciente ou endormie longtemps ou pas assez. Je n’avais strictement aucune idée dans laquelle ils comptaient m’emmener. Il fallait le dire, je m’étais vraiment mise dans la merde. Et tout ça pour amour pour mon frère. Je ne pensais qu’à lui en fait, pas à moi. Je n’avais eu aucune hésitation à me livrer aux mafieux, et je n’avais aucun remord.

Mes paupières s’ouvrirent peu à peu. Un peu difficilement au début, comme si je me réveillais d’un sommeil bien lourd. Je voyais flou. Ma mémoire revient peu à peu : j’étais partie avec les mafieux, c’est vrai. J’étais assise et je me sentais… oppressée. Je ne pouvais pas respirer par la bouche : un scotch était plaqué contre mes lèvres. J’essayais ensuite de me mobilier : impossible. Mes pieds étaient solidement attachés contre la chaise, et mes mains entre elles. Je bougeais mes doigts, essayant de me dégager, mais c’était inutile. Ma respiration s’était entre temps accélérée. Je levais enfin les yeux pour pouvoir détecter où je me trouvais. Une salle, bien silencieuse et visiblement vide. Sauf devant moi. Quelqu’un se tenait par terre, presque écroulé sur le sol. Je l’observais un peu plus jusqu’à que mon estomac fasse un salto arrière. Yuri… Il était mal en point. Même très mal en point. Je ne savais même pas s’il avait remarqué que j’étais devant lui. J’essayais de bouger sur ma chaise, de me défaire de ces cordes, mais en vain. Ils avaient fait du bon boulot, si je pouvais dire ça comme ça. Je ne pouvais même pas appeler mon frère… Je sortais des pauvres bruits à travers le scotch, le fixant d’un air terrassé. Il fallait que je le soigne, que je me défasse de cette emprise! Où était mon sac? Et le matériel médical ? N’avaient-ils pas dit que j’étais la monnaie d’échange contre mon frère? Mes yeux commençaient à me piquer alors que je les avais toujours rivés sur Yuri. Je savais que les mafieux n’allaient pas tarder à revenir et je redoutais de ce qui allait se passer.

Jour inconnu, date inconnu. C’est tout ce qu’il me reste de ma mémoire, de l’inconnue. Combien de jours que je suis enfermé ici ? Je ne sais pas … je ne sais pas ok ! Tout ce que je sais c’est que je souffre atrocement, j’ai le mal de vivre, j’ai mal physiquement autant que psychologiquement, je n’en peux plus … mais je tiens quand même. Pour qui ? Pourquoi ? Je ne sais pas. Ces gens s’acharnent sur moi pour une connerie qui date de quelques années maintenant, mais à quoi cela sert-il ? À rien … Tous ce que veulent ces mecs c’est faire du mal … alors que je leur ai absolument rient fait ! S’ils ne m’avaient pas poursuivi y’a deux ans de cela nous n’en saurions pas la aujourd’hui. Damn je veux mourir … Non je ne veux pas mourir … je veux ma dose, qu’on me shoot pour qu’encore une fois j’oublie tout … je veux me sentir bien rien d’autre.

Il fait noir, je suis bien, je n’ai plus mal … est-ce que je suis au paradis ? Certainement pas … il fait beau là-bas et je ne serais pas enchaîner au sol si toute fois c’était le cas. Ma peau est couverte de bleus, on m’a entaillé presque la totalité du corps … il ne m’en reste plus pour bien longtemps, une question d’heure surement, une journée tout au plus. Mais je n’ai pas peur, non pas après ça … la mort est devenu convoitise, je la veux, je la désire. Est-ce qu’on pourrait pour une fois m’offrir ce que je veux réellement ? Je soupire … Tout est calme … chose plutôt rare … qu’est-ce qu’ils font ? Lentement mon corps se met à trembler, il y quelqu’un d’autre avec moi … mais qui ? Je n’ai ni le courage ni la force d’ouvrir les yeux pour voir qui est cette personne qui prendra les coups lorsqu’ils auront eu raison de moi, mais comme toujours, la curiosité avait pris le dessus. Mes yeux s’ouvrirent lentement, difficilement et lorsqu’ils furent ouvert de moitié – le maximum que je pouvais les ouvrir à présent- je la reconnue ! Ma sœur putain ! MA sœur … les enculés. J’aurais voulu hurler, mais impossible c’est comme si on venait de m’enfoncer un pieu dans le cœur la douleur était atroce, je vomis presque aussitôt.

S’en était trop cette fois … ça ne pouvait plus continuer. Mon regard dans le sien … je la suppliais de s’enfuir, même si je savais que c’était impossible. Des larmes se mirent alors à couler le long de mes joues, je ne voulais pas qu’on lui fasse du mal, moi plutôt qu’elle … n’importe quand mais … damn. Je pris sur moi et rassemblai tout ce qui me restait de force pour lever quelques doigts du sol … je voulais qu’elle les prenne… je voulais la sentir une dernière fois … si seulement je pouvais la toucher ! Après ces quelques secondes passé à espérer un quelconque contact avec ma soeur, quelqu’un d’autre entra dans la pièce … c’était la fin.

Cette personne masquée me défit de mes chaines et me souleva du sol m’arrachant alors plusieurs cris de douleurs. Où est-ce qu’il m’emmenait ? Je ne savais pas. Celui –ci me porta finalement à quelques centimètre du visage de Tamara… je pouvais presqu’entendre son cœur battre d’où je me trouvais. Je déglutis à nouveau. Je savais qu’il allait lui poser une question … mais je ne voulais pas qu’elle y réponde, il ne fallait pas. Lorsqu’il prit finalement la parole je m’efforçais tant bien que mal de faire ‘’ non ‘’des yeux pour qu’elle le remarque. Peut-importe le prix à payer elle ne devait rien dire parce qu’à partir du moment où elle allait ouvrir la bouche, c’était la vie de mon mari et de ma fille qui était en danger.

« ….. Soit tu parles, soit c’est lui qui prend. »

L’homme lui laissa quelques secondes pour répondre et heureusement – façon de parler – elle ne le fit pas. Il lui reposa la question et puis toujours rien … ça allait frapper fort je sens et comme de fait quelques minutes à peine après sa dernière interrogation sans réponse, je senti un objet me percuter le derrière de la tête et puis plus rien … c’était le néant total. Mon rythme cardiaque commençait à diminuer, je n’avais plus conscience de ce qui m’entourait. Mon corps avait retrouvé sa place au sol comme une vulgaire chaussette, baignant dans son sang. Game over.

Mes yeux rivés sur la silhouette de mon frère, j’essayais en vain de chercher un moyen de communication pour qu’il me voit. Les pauvres sons qui sortaient du scotch résonnaient à peine dans la salle et même si je bougeais de toutes mes forces, ma chaise, elle, ne bougeait pas d’un poil. Puis enfin je le vis. Un petit mouvement de tête, et Yuri semblait entrouvrir ses yeux. Je cherchais immédiatement son regard. Il était paniqué, tout comme moi. Il ne devait vraiment pas s’attendre à me voir ici. Des larmes commencèrent à couler sur ses joues et c’était presque incontrôlable, je fis la même chose. De chaudes larmes rinçaient carrément mon visage. Je voyais les doigts à Yuri qui essayaient péniblement de m’atteindre… Instinctivement je fis la même chose, mais impossible de le toucher. J’avais tellement envie de me défaire de mes chaînes, de courir vers lui, de le prendre dans mes bras et de lui dire que tout était terminé, qu’il n’y avait plus de danger… Impossible.

La porte s’ouvrit à la volée. Mais pour autant je ne quittais pas des yeux mon frère, je ne voulais pas cesser de le regarder. Je vis du coin de l’œil, les mafieux passer à côté de moi puis se diriger vers mon frère. Mes muscles se contractèrent d’une force incroyable. Mon ventre était comme prêt à exploser. J’avais peur de ce qu’ils pouvaient lui faire. J’étais venue ici pour qu’ils me prennent à sa place merde! Affolée, mes yeux balançant des regards un peur partout sur tous leurs gestes, je vis qu’ils le détachaient, pour l’approcher… le plus près de moi. Un des mafieux s’approcha de moi et m’enleva sans aucune douceur le scotch collé sur ma bouche. Mes poumons prirent une bouffée d’air jusqu’à ce que je relève mes yeux sur mon frère. Un des mecs me posa une question. Mais je lisais dans les yeux de mon frère que je ne devais pas y répondre. Je me mordis la langue pour ne pas le faire… Je ne voulais pas qu’ils lui fassent encore du mal, mais je savais en même temps que je ne devais rien dire. C’était carrément horrible comme situation. C’était comme si je leur donnais l’autorisation pour lui faire du mal, alors que je pouvais nettement faire quelque chose contre ça. Je ne bougeais pas, je ne disais rien, même au bout des trois questions répétées. Il n’y avait que mes larmes qui coulaient et mon regard dans celui de Yuri.

Puis le mafieux tint sa parole. J’entendis un bruit sourd et je vis juste sous mes yeux, mon frère s’écrouler à mes pieds. Je ne pus m’empêcher de lâcher un cri de désespoir alors que mes larmes coulaient de plus en plus. Il était inconscient, juste sous mes pieds, dans une marre de sang. Mon frère… J’avais la rage, la haine contre ces personnes. Je lâchais un autre cri dans lequel j’appelais mon frère par son nom. Pour qu’il se réveille, qu’il me fasse un signe de vie… Mais c’était le cri de trop. Alors que mes yeux étaient carrément noyés de larme, je ne vis pas le coup arriver mais mon ventre le sentit, comme un coup de poignard. Je me sentis basculer par l’avant, tellement le coup était fort. J’avais fermé mes yeux et mon souffle avait carrément été coupé. Je sentis ensuite une main ferme m’attraper par le menton et me forcer à relever la tête pour le regarder. Je sentais encore le coup venir… mais je pensais encore à mon frère, juste à côté. C’était pour lui que j’étais venue, et je n’allais pas le laisser tomber. Jamais.