Il fallait bien que ça finisse par arriver un jour ou l'autre, mais je n’étais pas impatient que ça arrive. Il ne m’écoutais pas, hein? Il n’entendait pas ce que je racontais, tout ce que j’avais dit hier ne semblait pas avoir eu d’impact sur lui. Je m’étais levé sans rien dire, puis m’étais éclipsé de la chambre pour descendre au rez et sortir dans le parc derrière le bâtiment principal. Il me semble que je ne me suis pas éloigné de plus de cent mètres avant de me laisser littéralement tomber sur un muret en pierre. Le silence fut le premier acte. Silence obligatoire parce que j’avais besoin de m’entendre penser. Alors comme ça… la confiance n’était pas là, Yuri pensait encore que j’avais des préférences pour mon ex, mais pourquoi est-ce que je me pliais en deux pour lui chaque matin, alors?! C’était douloureux de s’entendre dire ça par La personne. Encore plus dans un endroit pareil où vous êtes isolé avec elle et où il n’y a pas vos amis que vous pourriez appeler à l’aide. Je croisais les bras sur mes genoux, laissais ma tête retomber vers l’avant, puis arrêtais de retenir les larmes qui se mirent à tomber sur le gravier beaucoup plus que je ne l’aurais voulu. Pourquoi est-ce que ça faisait si mal d’avoir l’impression de marcher sur une plateforme glissante et instable? Mes peurs n’étaient pas infondées, et mes sentiments bien trop prononcés pour que je puisse les contenir. Je savais que mon compagnon s’excuserait tout à l’heure car il le faisait toujours, mais ce n’était pas de ça que j’avais besoin en ce moment. J’avais promis de ne pas le lâcher, alors je ne le ferais pas, même si pour cela il faudrait accepter d’être écorché à vif et en garder des cicatrices.
Mais qu’est-ce que j’avais encore fait ? Pourquoi dans des moments comme ceux-ci je trouvais toujours le moyen de dire de la merde ? Pourtant, tout avait été mis au clair la veille et j’avais finalement compris – enfin je croyais – qu’il m’aimait moi et que nous deux c’était fait pour durer. Il avait ses craintes, j’avais les miennes, nous avions tous les deux besoin de nous faire rassurer, mais cette remarque que je venais de lui faire, j’en conviens était de trop. Je m’en voulais d’être moi, de lui faire subir mon insécurité encore une fois, alors que nous nous étions éloignés de la civilisation pour nous ressourcer et passer du bon temps ensemble. Bravo Yuri.
Tout c’était passer beaucoup trop vite et en moins de temps qu’il n’en faut pour dire ‘’ peanut ‘’, je m’étais retrouvé seul au beau milieu de notre chambre, abandonné à moi-même. Que devais-je faire ? Le suivre à la trace en lui balançant une tonne de mots d’excuses par la tête ? Non, cette fois ce simple mot ne suffirait pas et j’en étais bien conscient. Je pris donc le temps de terminer ma conversation avec Denver, histoire de remettre mes idées en place et fini par quitter la pièce à mon tour. J’étais tout ce qu’il y avait de plus serein. Cette fois, c’était à moi de faire mes preuves et j’étais déterminer à faire en sorte que cette dispute soit l’une des dernières que l’on aurait.
Je dévalai les marches à coup de deux et fini par sortir de l’établissement, cherchant Robbyn du regard. Ne l’ayant pas à porter de vue, je fis quelques pas en direction du parc ou nous avions passé une bonne partie de l’après-midi et c’est alors que je le vis. Une boule se forma automatiquement au niveau de ma gorge, je n’aimais pas le voir ainsi. Impuissant, je restai planter la quelques secondes à l’observer avant de finalement marcher dans sa direction. Une fois à son niveau, je pris place à côté de lui, m’assurant que nos deux corps se touchent.
« Je t’autorise à me traiter de con … honnêtement, je ne sais pas ce qui m’a pris de te dire ça Robbyn … » Je baissai la tête et me contentai de garder le silence.
J’étais resté combien de temps seul comme ça? Tout au plus cinq minutes, je pense, ou dix, j’en sais rien, mais ça m’a paru extrêmement court entre le moment où je me suis arrêté ici et celui où j’ai senti l’épaule de Yuri toucher la mienne. Je ne sais même pas si j’étais content qu’il soit arrivé aussi vite, mais ça me rassurait un peu, dans le fond, qu’il ait réagi. Alors je l’ai écouté me parler, sans relever la tête, mes yeux gris obstinément posés sur le sol.
« C’est pas le fait que tu le dises, c’est le fait que tu le penses. »
Et il était bien là le problème. Je m’en fichais qu’on m’insulte juste pour m’insulter dans le rue, par exemple, parce que je savais que c’était des mots balancés en l’air et qu’après des excuses cela pouvait être pardonné, mais lorsque quelqu’un croit en ce qu’il dit, ça change tout, et les mots ne suffisent plus à arranger la situation, c’est dans la tête qu’il fallait que ça bouge. « Est-ce que me voir comme ça, c’est une réponse assez claire pour toi qui te demandes ce que je ressens? »
Je me suis pincé les lèvres avant de me redresser finalement et de lever le visage au ciel pour fermer les paupières. J’étais profondément attristé par cette situation, mais j’avais aussi foi en Yuri, je lui faisais confiance, et j’étais prêt à écouter n’importe quoi venant de sa part. N’importe quoi. Et d’y croire. J’avais beau dire vouloir garder mes distances pour ne pas perdre le contrôle, c’était déjà clairement trop tard pour ça, je l’aimais trop, et je serais même d’accord de me laisser ébranler de partout tant qu’on me laissait rester à ses côtés, tant qu’il me laissait le faire. C’était « sick » comme relation pour moi, mais je l‘assumais.
Le temps c’était quelque peu rafraichi, mais rien de comparable au froid que je ressentais à l’intérieur de moi. Cette fois, je l’avais vraiment blessé, j’avais fait du mal à cette personne qui comptait le plus à mes yeux et que j’aimais plus que tout. Je l’écoutais parler et chacun des mots qu’il prononçait me percutait le cœur un peu plus fort à chaque fois. C’était douloureux, autant pour lui que pour moi et je m’en voulais ! J’aurais aimé être en mesure de répondre à chacune de ses questions, mais j’en étais tout simplement incapable. Oui je savais reconnaître mes tords, mais avouer que cette fois j’avais dépassé les bornes, m’était difficile. Je restai donc muet, me contentant de soupirer de temps à autre pour exprimer mon malaise.
Je le savais au fond de moi qu’il m’aimait. Et je dois avouer que de le voir aussi ébranler après lui avoir fait part du fait est que je croyais toujours qu’il préférait son ex à moi, m’avait ouvert les yeux. Tout compte fait, mes peurs n’avaient peut-être pas lieu d’être et je devais passer à autre chose plutôt que de stagner à la même place et me faire du mal à moi-même en évitant de vouloir voir la réalité en face. Pourquoi m’avait-on créé ainsi ? Quelle étrange machine que l'être humain un assemblage de réglages, de cadrants et de signaux dont nous ne pouvons déchiffrer qu'une petite partie. Et encore sans doute, de façon très imprécise. C’était à mon tour de faire comprendre à Robb comment moi je fonctionnais. Il voulait quelque chose de profond, j’allais lui offrir la pureté de mon cœur, rien de moins.
Craintif, j’avais peur de ce qu’il allait trouvé à redire suite à ma déclaration, et si ce n’était pas ce qu’il voulait entendre ? Ah et puis à quoi bon compliquer les choses plus qu’elles ne l’était déjà ? J’inspirai profondément et fini par prendre parole, en fixant toujours ce même point au sol.
« J’ai tellement de chose à te dire, que je ne sais pas par où commencer… Quand tu m’as demandé de venir te rejoindre au shop ce fameux jour ou tout à commencer pour nous, laisse-moi te dire que j’étais l’homme le plus heureux du monde. Tu es une personne exceptionnelle, tout le monde le dit, le pense et je me sens privilégié de pouvoir partager ta vie intimement. Que tu m’aie choisi moi … je ne saurais t’expliquer ce que ça me fait réellement et je continu de croire que le destin fait bien les choses. Entre nous, il devait se produire quelque chose, c’était écrit et c’est maintenant qu’on le vit. Au début, j’étais craintif, je disais te faire confiance alors qu’au fond de moi je craignais certaines choses. C’est normal d’avoir peur et je suis certain que je ne suis pas le seul à éprouver certaines craintes, mais plus les jours passes, plus notre relations évolue, plus je me rends compte qu’au final je te fais pleinement confiance. Tu n’en a peut-être pas l’impression après ce que je t’ai dit un peu plus tôt, mais sache que j’ai réellement confiance en toi. En réalité, le problème ne vient pas de toi, mais de moi. Je suis conscient des faits, de ton amour, des efforts que tu fournis, que tu changes. Je suis au courant de tout cela, et ça fait plaisir à voir. Mais ce que j’essaie de te dire c’est que… malgré tout j’me fais des peurs à moi-même. Au tout début, tu m’avais dit préféré Andrew à moi et je dois t’avouer que c’est en parti pour ça que j’en reste toujours au même point. Je stagne et je me fais des idées. C’est maladif et ça se fait automatiquement sans même que veuille que ça se produise. Je déteste ressentir ses choses-là, je t’avoue que ça me fait terriblement mal parce que j’ai réellement peur de te perdre, mais en voyant tout le mal que je te cause, que je nous cause en refusant de voir autre chose que LUI, je prends conscience de bien des choses. Je réalise qu’en réalité il y a pas mal plus de chance que je gâche tout entre nous en agissant de la sorte et je me trouve stupide. Je te demande sincèrement pardon pour tout ça, je n’ai jamais eu l’intention de te blesser Robbyn, et je ne veux pas que t’aie peur de quoi que ce soit. Je ne suis pas là pour te rabaisser, bien au contraire, je veux vivre quelque chose d’unique avec toi, je veux que tu t’épanouisses pleinement, que t’aie pas à craindre du lendemain, que tu te laisses aller complètement. Je sais que ce n’est pas facile, que tu n’as pas été élevé de la sorte, mais je suis la … à coté de toi. Je te tiens la main et je ne veux que ton bonheur rien de plus. Je suis prêt à t’apprendre une nouvelle façon d’aimer si tu m’en laisse la possibilité. Parce que la vie est bien trop courte pour qu’on s’arrête à nos peurs et qu’on s’empêche d’avancer simplement parce qu’on a l’habitude de certaine chose. J’ai beaucoup à t’apporter je crois, comme tu as beaucoup à m’apporter aussi. Il faut s’apprivoiser, se faire confiance, et tout viendra naturellement je crois ! Je ne veux pas te forcer, tu prends le temps que tu veux, mais ne me bloque pas l’entrée, laisse-moi faire ce que je sais faire de mieux, c’est-à-dire t’aimer et ne te prive pas d’en faire autant en retour. Je t’aime tellement Robbyn, j’ai de la chance de t’avoir dans ma vie, j’en suis conscient. Je vais prendre soin de toi et je serai TOUJOURS la dans les bons comme les mauvais jours. Non ce n’est pas une demande en mariage, mais la réalité. Pour ma part, je m’engage a chassé toutes ces pensées néfaste qui me brise pour que je puisse réellement avancer et te prouver à quel point j’ai confiance en toi. L’amour est comme un château de cartes, c’est difficile à construire, mais je suis sûr qu’en y mettant du cœur ensemble … on construira quelque chose de sensationnel ! »
Je m’arrêtai quelques instant et fini par lever les yeux au ciel en attrapant l’une de tes mains.
Moi qui pensait être du genre à détester le déballement de sentiments, je me surprenais à y prendre de plus en plus goût avec le temps qui passait, et lorsque Yuri prit la parole, la boule dans ma gorge se resserra immédiatement, tout comme celle dans mon ventre. Beaucoup de choses à me dire? Très bien, j’étais là pour écouter. Les mots s’enchaînaient, les phrases se suivaient les une après les autres avec ce naturel qu’il avait toujours eu pour exprimer ce qu’il avait sur le cœur, et moi je l’écoutais en silence, posté dans la même position que lui avec la tête vers le bas. J’attendais que ses paroles referment les blessures ouvertes petit à petit, et bon sang… combien de personnes avaient eu droit à un discours pareil de la part d’une autre dans cette ville? Il n’y existait même pas d’expression pour décrire ce que tout ça me faisait à l’intérieur. Ce n’est pourtant qu’au bout de trois minutes de parole non-stop qu’il finit par se taire. De mon côté, j’étais rendu muet même si j’avais beaucoup de choses qui me passaient par la tête à présent. Oh, ce que j’aimerais pouvoir être aussi expressif que ça quand je lui parlais… mais dans ma tête, j’étais loin de ça, même si la conversation qu’on avait eue hier aurait dû me persuader du contraire. Je changeais, oui, petit à petit je changeais, je m’adaptais à la personne en ma présence, et ce n’était que pour le mieux. Si nous étions voués à nous influencer l’un l’autre au fur et à mesure que le temps passait, je n’osais pas imaginer à quoi ressemblerait la situation d’ici une année ou deux. Cinq. Plus. Normalement, je vous dirais là que ça ne devrait jamais durer si longtemps, que c’était juste temporaire, mais je sais que ce serait un mensonge, car je croyais à fond à ma relation avec ce mec, et je fondais tous mes espoirs dessus. Ca ne faisait même pas un mois, je sais… c’était rien du tout à côté d’une vie entière, mais pourquoi est-ce que ce ne serait pas suffisant pour savoir où on en était avec son partenaire? Nous avons déjà eu des conversations bien plus sérieuses que nécessaire à ce jour concernant l’avenir, lui et moi, et on pensait vraiment tout ce qu’on disait. À mon âge, je me sens suffisamment expérimenté pour savoir ce que je veux, et Yuri atteint sensiblement la même maturité que moi-même s’il est plus jeune.
La main du Russe ne tarda pas à glisser vers la mienne, et ce geste me rappela les quelques fois où j’avais tenté d’approcher Andrew de cette manière, sans succès car il se braquait presque aussitôt. Alors de mon côté j’avais pris l’habitude de rester un peu distant vis-à-vis de lui pour garder cette frontière physique entre nous, puis-ce que c’est ce qu’il voulait. Mais ça ne m’avait jamais dérangé… parce que c’était la seule relation avec un homme que j’avais eue et que je considérais ça « normal ». Mais là, Yuri me montrait une toute autre vision de cette chose que je n’arrivais pas à saisir et qu’il maîtrisait, à mes yeux, à la perfection. Je ne savais pas aimer comme lui le faisait, mais en l’observant et en m’habituant à son comportement, je finissais par l’adopter peu à peu moi aussi. Et ça me faisait du bien de me libérer des barrières que je me posais à moi-même, elles tombaient une à une au fur et à mesure que ma confiance en John grandissait. Parce que oui, il s’appelait John en réalité, pour ceux qui ne le savaient pas, et il était merveilleux.
Je saisis donc sa main en serrant les doigts, puis relevais finalement la tête pour tourner le regard vers lui et le fixer durant plusieurs secondes sans me donner la peine d’inspirer.
« Prends ce que tu veux, je te le donne, entre librement, la porte est ouverte… je te laisserai devenir moi quand tu auras besoin de plus me comprendre, et j’essayerai d’être toi lorsque quelque chose ne sera pas clair... Je veux être ton premier refuge, et aussi le dernier… À nous deux, on peut tout faire, pas vrai? »
Je tirais sa main vers le haut et resserrais ma prise dessus.
« Il n’y a que nous deux, d’accord? Juste nous deux. Le passé appartient au passé, on doit pas l’oublier, mais ne pas le laisser parasiter le présent et le futur non plus, alors peu importe ce qu’on a fait jusqu’à maintenant ou qui on a rencontré. Maintenant c’est uniquement toi et moi, la peur n'a pas sa place entre nous. »
Je pense avoir passé une dizaine de secondes à le fixer droit dans les pupilles après ça, avant de répondre que je l’aimais aussi.
Contrairement à ce que les gens pensent, je n’avais jamais été le genre de mec à s’exprimer facilement. C’était sans doute dû à mon passé, allez savoir pourquoi, mais du plus loin que je me rappel, j’avais toujours eu cette peur de communiquer mon ressenti. Sans doute parce que j’avais peur de l’opinion qu’aurais les gens à mon égard ou je ne sais quoi encore, mais à mon arrivé ici, on m’avait appris cette autre façon de faire. La parole était devenue un atout pour moi et c’est dans des moments comme ceux-ci que je remerciais le ciel de m’avoir donné la capacité de pouvoir me laisser aller de la sorte, surtout en présence des gens que j’aime.
Je lui avais dit tout ce que j’avais sur le coeur à sa demande. Je me sentais libéré, mais surtout vulnérable. Il connaissait mes faiblesses, je connaissais en partie les siennes et c’était parfait comme ça ! Je savais que Robbyn ne se servirait pas de mes faiblesses contre moi, mais qu’il allait plutôt s’en servir pour me rendre plus fort. Ce mec avait un cœur d’or, il ne voulait que mon bien et c’était la même chose pour moi. Nous avions la même vision du couple, beaucoup de projets communs, et ce qu’il y avait de beau dans tout cela, c’est que nous nous complétions à merveille. Ses forces compensaient pour mes faiblesses et vice versa. Nous deux c’était fait pour durer, aucun doute la dessus.
Je l’écoutais parler et une boule d’émotion se forma de nouveau au niveau de ma gorge. Il me faisait tellement de bien. Il trouvait toujours le mot juste pour me rassurer et chacune des paroles qu’il prononçait, agissait comme un baume sur mon cœur et suffisait à chasser le doute qui me restait. Lui et moi, PERSONNE d’autre. Ça avait le mérite d’être clair.
Lorsqu’il eut terminé, je me contentai simplement de le fixer droit dans les yeux, faute de trouver les mots justes à lui retourner. Mon regard en disait long et au travers lui, il pouvait lire ce qui se trouvait au fond de mon être. Je n’avais rien à lui caché et il avait dit vrai, la peur n’avait pas sa place entre nous, comme tout ce qu’il pouvait y avoir de négatif d’ailleurs. Nous venions d’atteindre le niveau suivant et je savais qu’à partir de maintenant, on pouvait aller de l’avant.
« Merci … encore. Si tu savais à quel point ça m’a fait du bien d’entendre ça et sache je partage ton opinion. En prenant un peu de recul, je réalise à quel point j’ai été stupide de m’arrêter à ça… c’était très enfantin de ma part. »
Un léger sourire se dessina au coin de mes lèvres alors que ma main qui se trouvait au creux de la sienne, la relâchait pour venir caresser sa joue.
« J’espère que j’ai pu réparer mon erreur … et si jamais tu as besoin de me l’entendre dire à nouveau, ne te gêne surtout pas pour me le demander, je me ferai une joie de te redire ses mots. Cette fois j’ai compris la leçon tu peux en être certain et je n’ai qu’une envie, c’est qu’on passe un week-end génial tous les deux. Sans soucis, sans prise de tête, rien que toi et moi … à l’avenir, je ferai tout pour éviter les disputes, crois-moi. »
À ces mots, ma main qui se trouvait toujours sur sa joue, glissa jusqu’à sa nuque que j’entrepris de caresser lentement.
« Il y a d’autre chose que tu voulais clarifier ? »
« Non, tout est clair maintenant… je te répéterai les choses aussi. Plus tard, souvent, pour que tu saches qu’on a trouvé le bon équilibre et que ça va plus jamais changer entre nous. »
Quelque chose venait de se débloquer, ou alors était-ce juste la porte entre nos deux chambres respectives qui s’était ouverte pour nous permettre de nous déplacer librement l’un chez l’autre? Quand on disait d’une relation qu’elle grandissait, est-ce qu’on pouvait l’illustrer de cette manière? Selon moi oui, c’était vraiment l’impression que j’avais à la fin de cette conversation. On ouvre des portes, et on en referme d’autres en jetant la clé parce qu’il n’y a plus rien à prendre à l’intérieur de ces pièces là, ou parce qu’on ne veut plus rien y prendre. Faire des choix, c’était inclure, mais surtout exclure, et je commençais à réaménager mon espace vital en ne gardant que certains objets en souvenir, et certaines portes ouvertes. Mon travail, L’amitié, La famille, Lui. Bien sûr que je gardais chaque personne dans un coin de ma tête, quelque part, mais il s’agissait de hiérarchiser l’importance de chacun dans ma vie, aujourd’hui. Qu’est-ce que j’aurais fais si « Sonic » n’avait pas existé? Pas juste l’homme, mais tout le concept derrière cet homme, aussi. Il avait fait figure de Force durant ces quinze dernières années, j’avais beaucoup apprit de lui, et sans sa présence, je ne serais pas là aujourd’hui, face à ce gars qui se fait appeler Yuri et qui symbolise à lui seul tous les adjectifs que je pourrais coller au mot « soulmate ». Il ne s’agissait même pas de perfection, car personne n’est parfait, mais c’était l’humain avec qui je m’entendais le mieux et avec qui tout semblait « couler de source ». Je l’ai trouvé, alors? La personne qu’on cherche tous à un moment donné de sa vie. Je l’ai trouvée?
Je sentis la main de mon interlocuteur se déplacer derrière ma nuque, et mes bras passèrent immédiatement dans son dos alors que je me rasseyais face à lui pour le serrer aussi fort que possible, ma tête glissant sur le côté pour se poser dans le creux de son cou. Je fermais les yeux, il faisait froid, mais j’avais chaud dans ma poitrine, et ça me suffisait. Vous me direz « Quoi? Pourquoi il l’embrasse pas au lieu de lui faire un câlin? N‘importe quoi peut faire un câlin à quelqu‘un d‘autre, c‘est nul. » Mais c’est quoi un baiser? Contact de quelques secondes avec les lèvres d’une autre personne, voir avec la langue. Je ne compte pas le nombre de personnes que j’ai embrassées jusqu’à maintenant, et j’imagine que Yu non plus… mais tes clients, tu les prends pas dans tes bras pour leur faire des caresses. Pourquoi? Parce qu’il s’agissait d’un contact physique qui faisait passer au moins cinq fois plus de sentiments, une manière tellement plus explicite de dire qu’on est là, qu’on aime, qu’on ne partira pas, qu’on tient l’autre et qu’on ne le lâchera pas.
J’ai finis par ouvrir les yeux, une main remontée derrière la tête de mon compagnon pour lui caresser les cheveux doucement. Je n’avais pas envie que ce moment s’arrête tout de suite, mais la température était vraiment de plus en plus désagréable, et il n‘était pas question que je me chope d‘autres jours de convalescence parce que j‘étais tombé malade. Bon, alors je me suis quand même décidé à me redresser en déposant un baiser sur les lèvres de Yuri au passage, puis j’ai penché la nuque de droite à gauche pour la débloquer.
« Je crève de froid, on rentre? »
Je repensais à l’un des messages sur facebook à ce moment là, et ça me fit sourire de manière douteuse.
« J’suis sûr que t’aimerais bien te réchauffer aussi. »
Puis je me suis levé et mit en route en gardant une main tendue vers l’arrière jusqu’à sentir qu’on me la prenait.
Tout était clair dans ma tête et ce depuis fort longtemps. Je savais avant même que l’on soit ensemble lui et moi, que c’était l’homme de ma vie. Je sais ça peut paraitre stupide dit comme ça, mais ce sont des choses qui se sentent, qui se vivent et tant qu’on n’a pas ressenti ces choses-là, on ne peut pas les comprendre. Robb représentait tout pour moi. Au début je le percevais comme un ami et cette perception à rapidement évoluer en autre chose. La vie nous réserve parfois de belles surprises et Robbyn est de loin la plus belle que le ciel m’ait offerte à ce jour.
Lorsqu’il me prit dans ses bras, je me contentai d’en faire autant, en prenant soin de le garder près de mon cœur le plus longtemps possible. C’était nos petits moments à nous, des instants précieux qui resteraient à jamais gravé dans ma mémoire. Rien de bien compliqué ou d’extravagant, de l’amour rien de moins et ce simple geste suffisait à me faire réaliser tout l’amour qu’il me portait à défaut de l’entendre me le dire. Je ne vous cache pas que j’aurais aimé que ce moment s’éternise encore un peu, mais la froideur de l’air ainsi que la condition physique de Robbyn, ne nous le permettait pas. Je le laissai donc se relever tranquillement, puis fini par en faire autant quelques secondes après, en m’empressant de venir joindre ma main à la sienne.
« En effet, je ne serai pas contre un brin de chaleur …»
Ce furent les dernières paroles échangées avant que nous n’atteignions notre suite. Les mots étaient devenus inutile d’autant plus que ni lui, ni moi ne semblait avoir la force d’en rajouter. Ce genre de conversation demandait beaucoup émotionnellement parlant, du moins pour moi et j’avais à présent besoin de me ressourcer. Lorsque nous fûmes à l’intérieur de la pièce, je relâchai la main de Robbyn et m’empressai d’aller mettre quelques bûches dans le foyer qui avouons-le donnais une petite touche de romantisme à la pièce et revins vers lui tout sourire avec une idée bien précise en tête; le réchauffer à ma façon.
Il était là, telle une proie innocente face à son prédateur. Je n’avais certes pas l’intention de lui sauter dessus, mais mes envies étaient claires et je crois qu’il les partageait aussi. Nos corps gelés avaient besoins de se retrouver l’un l’autre, besoin de partager ce moment d’intimité offerte pour clore cette première soirée de couple en beauté. C’est pourquoi, lorsque je fus à son niveau, je me contentai simplement d’agripper sa nuque, sans rien dire pour l’entrainer lentement jusqu’à la salle d’eau, mon regard perdu dans le sien. Une fois sur place, je me débarrassai de mon t-shirt que je laissai tomber au sol, avant de partir en direction du mécanisme de la baignoire que je mis en marche en m’assurant de la température de l’eau , puis revins finalement vers lui, satisfait pour prendre ses lèvres dans un baiser qui se voulait plus que passionnel.