Bethany avait été très surprise par l'annonce de sa soeur quelques jours avant. Deh' maman ? Mmmm. Bethany avait toujours connu sa soeur sous un angle de disputes et de gamineries. Toujours à se disputer pour un oui ou pour un non. Toujours à lui claquer la porte au nez lorsque Beth' voulait lui demander quelque chose. Jamais Bethany n'aurait pensé que sa soeur, dans son état actuel, pourrait être maman. Surtout qu'elle avait eu du mal à choisir entre Luke et Kyler. Breef, une histoire compliquée qui prenait un peu la tête de la demoiselle. Mais passé le choc de la révélation, Beth' se disait que finalement c'était peut être une bonne chose ce bébé. Elle avait l'impression de mieux s'entendre avec sa soeur, du moins, elles avaient tenu une conversation de plus de cinq phrases sans crier. Un exploit dans la famille. Bethany ne cherchait qu'à réunir sa famille, peut être que c'était le début de quelque chose.

Bethany se promenait souvent sur ce ponton depuis quelques jours, l'air de la mer l'aidait à faire le point. Elle s'y réfugiait dès qu'elle avait quelque chose auquel penser. Le regard perdu sur le ferry qui s'apprêtait à partir, Bethany s'était arrêtée et s'appuyait sur le bord. Entendant le claxon grave du bateau, la miss se dit qu'elle serait bien montée dans le bateau et partie, peu importait où le bateau allait. Elle l'avait déjà fait une fois, bon certes elle savait où elle allait, mais elle avait fuit tous ses ennuis. Trois ans auparavant, Bethany s'était envolée pour un an d'études en France. A l'époque elle sortait d'une relation compliquée, où son copain et sa meilleure amie avaient fini ensemble, et à la maison Bethany se sentait rejetée par son frère et sa soeur. Aussi, dès que l'opportunité c'était présentée, la miss était partie. Elle qui était si calme et introvertie, elle n'arrivait plus à tout garder sans rien dire. Mieux valait s'éloigner. Ce qu'elle avait fait. Ce qu'il s'était passé en France? Mmm elle n'avait presque rien raconté à personne. Mais elle avait changé, elle était un peu plus confiante en elle et ne se laissait plus faire. Ou presque. Enfin elle savait dire non parfois ce qui était une grosse amélioration.

La seule chose qui était ressortie de là bas, c'était son amitié avec un jeune homme du nom de Leopold. Beth' trouvait se prénom mignon, c'était peu orthodoxe de nos jours et elle aimait bien ce qui sortait de l'ordinaire. Ce jeune homme qui avait commencé par être son copain quelques jours avait fini par être un ami et il se trouvait que le jeune homme avait débarqué à San Francisco et depuis ils se voyaient de temps en temps. La jeune femme avait longtemps songé que s'il n'était pas aussi coureur de jupons, ils auraient peut être tenu un peu plus longtemps ensemble, mais bon, elle n'était pas vraiment dans une période a faire trop confiance aux garçons. La miss secoua la tête et regarda le ferry commencer à sortir du port.

Depuis que j’étais arrivée à San Francisco, je devais bien avouer que je me la coulais douce. Je sortais souvent, je me baladais toute la journée. Je faisais des achats, ce qui augmentait toujours plus mon découvert… Mais je m’en fichais, je profitais.
De toute façon je savais très bien que je n’avais plus un copeck, le simple fait d’avoir pris un billet d’avion pour venir jusqu’ici m’avait ruiné. Mais je m’en foutais. J’étais persuadée d’être là pour la bonne cause.
Tout allait s’arranger dans quelques jours, j’allais trouver un travail, du moins je l’espérais. Et j’allais aussi trouver un appartement, enfin je l’espérais aussi… Autant dire que les temps étaient durs en ce moment. Mais je ne me plaignais pas, j’étais parce que je le voulais, je ne pouvais en vouloir à personne d’autre que ma petite personne si j’étais fauchée comme les blés. Et puis temps que l’apparence laissait croire que tout allait bien, que j’étais chic et ce genre de choses… Tout était parfait. C’était la seule chose qui m’importait.
Enfin, hormis le fait que je voulais retrouver Léo. Nos retrouvailles n’avaient pas été ce que j’attendais, j’en avais pris plein la figure, pour le dire poliment… Il était visiblement encore un peu susceptible au sujet de son père et moi (ce qui était compréhensible, en fait…).
Mais je ne baissais pas les bras. D’abord, parce que ce n’était pas mon genre, ensuite parce que je n’avais pas fait tout ce chemin pour abandonner à la première difficulté, et enfin, parce que… je voulais le récupérer, point barre. La tache s’annonçait difficile, et il allait me falloir une intervention divine pour qu’il accepte ne serait-ce que de ne plus me considérer comme une folle à lier, complètement inconsciente…
Aujourd’hui, je décidais d’aller me balader sur le port, depuis quelques jours que j’étais arrivée, je n’avais jamais pris la peine de venir jusqu’ici. Après m’être balader pendant quelques minutes, je m’étais assise sur un rempart et je regardais le ferry partir, ou revenir (c’était selon…). Je me disais que si tout continuais comme ça, la prochaine fois je serai sur ce bateau. Mais j’espérais ne pas en arriver là…
Assise, je balançais mes jambes. J’étais bizarrement sereine, j’avais l’impression que c’était les premiers instants de paix et de calme que je vivais depuis mon arrivée à San Francisco, et ce n’était pas déplaisant…
Au bout de quelques minutes, je remarquais une jeune fille qui devait avoir à peu près mon âge, appuyée, qui regardait elle aussi le ferry partir. Pour une raison que j’ignorais, je me dirigeais vers elle. En m’approchant, il me semblait que je l’avais déjà vu quelque part.
En fait oui ! Je l’avais déjà vu par hasard, elle parlait avec Léo. Peut-être qu’elle pourrait être mon intervention divine…
Je n’étais pas certaine qu’elle me connaissait. Je me contentais alors de lui sourire, on verrait bien...

« Salut, toi aussi, tu crèves d’envie de prendre le ferry ? »

Bethany était perdue dans ses pensées lorsqu'elle se fit ramener à la réalité par une voix de jeune femme. Un peu étonnée, elle se redressa, ne laissant que ses mains touchant le bord. Bethany tourna la tête vers la direction d'où venait la voix et aperçu une jeune fille de son âge brune et qui lui souriait. Bethany ne savait pas pourquoi mais elle avait l'impression de l'avoir déjà vue quelque part. Elle plissa des yeux avant de faire un sourire crispé et de lui répondre.


- Mmm tu n'as pas idée. Enfin ils prévoient une tempête dans le sud, alors je n'aimerais pas être à leur place.


Oui, Bethany aimait bien les voyages, les bateaux, mais lors des tempêtes, elle était la première malade! Surtout sur les Ferry comme ça. Alors qu'elle était en France, des amis qu'elle avait rencontré là bas, on l'avait obligée à aller voir la Corse. On lui avait dit que c'était une île magnifique. Un peu septique au début, elle avait accepté. Elle avait alors fait le voyage en bateau de Marseille (ville qu'elle avait beaucoup apprécié aussi pour le peu de temps qu'elle avait passé). Normalement, dans la Méditerranée, le temps est au beau fixe relativement souvent. Pourtant ce jour là, allez savoir, le vent s'était levé, la pluie avait commencé à tomber, et la croisière de Bethany avait dégénéré! La miss avait passé son temps dehors à respirer de l'air frais, trempée, pour éviter de vomir. La traversée avait été un cauchemar ! Elle s'en souviendrait.

Beth' passa une main dans ses cheveux qui étaient détachés et qui volaient avec le vent. Ses pensées revinrent vers la demoiselle qui lui avait adressé la parole. Plus elle la regardait et plus Beth avait un curieux pressentiment, comme si son corps essayait de lui dire que quelque chose clochait avec cette fille. C'était fou cette sensation. Elle plissa les yeux encore avant de secouer la tête et de s'expliquer rapidement, ne voulant pas passer pour une folle.


- Je suis désolée.. J'ai.. Une impression de déjà vu.


Ca expliquait un peu la situation sans vraiment en dire beaucoup ni la vraie vérité. Elle n'aimait pas ça être dans cette situation. Elle était tellement persuadée d'avoir déjà vu. Mais où ? La miss fouilla dans ses souvenirs. La demoiselle à côté d'elle avait un accent français, du moins pas américain et Bethany en avait déduit la France. Bethany se tue quelques secondes alors qu'elle cherchait dans ses souvenirs. Elle se dit qu'en en demandant un peu plus elle aurait peut etre le déclic.


- Française ?

De loin, j’avais bien remarqué la façon dont elle regardait ce ferry. J’avouais moi-même que je le regardais avec envie.
J’aurais bien aimé monter à bord, bien que je n’aie pas la moindre idée d’où il pouvait aller. C’était assez tentant. Les choses ici ne se passaient pas vraiment comme je l’avais prévu. Enfin, pour tout dire, je n’avais rien prévu ; mais je me rendais maintenant compte que ce n’était pas ce que j’attendais…
Je souris en regardant au loin lorsqu’elle évoqua la tempête. Je n’avais pas pensé à ça. J’étais très rarement montée sur un bateau. Deux ou trois fois devait être le maximum, c’était quand j’allais en Angleterre et que ma claustrophobie m’empêchait de prendre l’Eurostar. Je devais donc prendre le ferry, ce qui ne me plaisait pas beaucoup plus, mais au moins, je pouvais aller sur le pont respirer un peu d’air.

« C’est vrai ? Alors, oui, autant rester en sécurité sur la terre ferme ! »

Je devais avouer que cette histoire de tempête m’avait refroidie quant à mon envie de partir d’ici. Et puis, je remarquais que cette fille avec qui je parlais désormais me regardait avec un drôle d’air. Est-ce qu’elle m’avait reconnue ? Ce qui sous-entendait qu’elle m’avait déjà vu, on ne serait-ce qu’entendu parler de moi.
Connaissant Léo, je n’étais pas sure qu’il aurait puis lui dire du bien de moi si tant est qu’il lui ait parlé de moi. Il était clairement contre moi depuis que j’étais arrivée. S’il m’avait évoqué autour d’une conversation, il y avait fort à parier que ce n’aurait pas été pour des éloges…
Quand elle évoqua une impression de déjà-vu, je me suis tout de suite dis qu’elle m’avait situé et qu’elle pensait que j’étais une folle à lier. Je me suis alors raidi, puis remarquant que sa réflexion n’allait pas plus loin, je me détendis.
Le vent avait la fâcheuse tendance à envoyer mes cheveux valser dans tous les sens. La plupart du temps dans mes yeux, ce qui m’énervais.
J’attrapais donc l’élastique qui était autour de mon poigner et attacha mes cheveux en un chignon grossier.
Puis je replongeais mon regard vers le lointain… Je ne savais pas quoi lui dire. C’était tout moi, je me lançais dans des trucs sans réfléchir et après je ne savais plus quoi faire… C’était une de ces impulsions qui m’avait envoyé ici, et maintenant je ne savais pas exactement comment j’allais arranger les choses avec Léo. Mais peu importait…
Je sursauta lorsqu’elle me demanda si j’étais française, elle venait de me tirer de mes réflexions sur mes agissement irréfléchis. Je tourna alors la tête vers elle. Ça devait clairement s’entendre à ma voix que j’étais française. De plus si elle connaissait Léo, elle avait du voir qu’on avait un peu le même accent. Voire même, elle était déjà venue en France.

« Oui. Tu y es déjà allée ? »

J’allais ainsi peut-être comprendre la nature de sa relation avec Léopold, et je saurai alors à quoi m’en tenir si je voulais qu’elle agisse en ma faveur auprès de lui…

Je ne me souvenais pas exactement de la dernière fois que j’étais montée à bord d’un bateau, ce qui signifiait ce que ça faisait assez longtemps pour que je n’aie pas envie de le refaire aujourd’hui. Surtout si les prévisions de Bethany s’avéraient exactes.
Je fus contente de remarquer qu’elle était perdue dans ses pensées pendant mes quelques secondes de doutes. J’avais vraiment eu peur que Léo lui parle de moi comme d’une furie. Ce que j’aurais très mal pris. Nous avions un différend certes, mais pas besoin d’exagérer. J’étais donc d’un coté soulagé qu’il n’ait pas parlé de moi, et d’un autre coté un peu vexée tout de même.
Je passai outre de tout ça. J’affichai de nouveau mon plus beau sourire.
Bethany reposa son regard sur mon avant de me répondre. D’accord, donc elle était venue en France, et carrément à Paris. Je savais que la ville était grande et tout ce que vous voulez, mais si elle connaissait Léo, il y avait de fortes chances qu’on se soit déjà croisées aussi. Comme j’avais la mémoire d’un poisson rouge, la situer devenait difficile pour moi. Je devais donc faire attention.

« Je n’avais jamais quitté la France avant aujourd’hui. Du moins, autrement que pour quelques jours. »

Après m’avoir parlé en français, elle reprit la conversation comme nous l’avions laissée juste avant : en anglais.
Personnellement, je n’avais jamais eu de mal à parler anglais, bien sur c’était une langue difficle à apprendre et comme je ne retenais pas les règles, j’avais appris à parler anglais au ‘feeling’ comme on dit, jusque là, ça avait toujours marché, du moins les gens me comprenait. C’était tout ce que je demandais.
Bethany me demanda donc si je venais de Paris, et se présenta. Je ne savais pas vraiment si je devais confirmer que je vivais à Paris jusqu’alors. Elle qui avait déjà quelques doutes sur mon identité, ça ne m’aurait pas aidé. Comme lui donner mon prénom.
Mais je ne pouvais pas lui mentir. Je décidais donc de dire la vérité, on verra bien ce qu’il se passera. Je saurai gérer.

« Oui, j’ai toujours vécu à Paris. Enchantée, je m’appelle Charlotte. »

Voila, je la scrutais discrètement, il ne me restait plus qu’à attendre une réaction (ou pas) de sa part. En espérant que les choses ne tourneraient pas au vinaigre.

Alors que Bethany ne savait pas encore qui était réellement Charlotte, elle commençait à la trouver plutôt gentille. Bethany ne parlait pas si facilement que ça aux gens qu'elle ne connaissait pas. Enfin. Ca dépendait. Lorsque la personne semblait avoir besoin d'aide, elle n'hésitait pas à s'approcher pour demander si elle pouvait aider ou faire quelque chose. Mais lorsque tout allait bien, et bien, elle n'en faisait rien et restait dans son coin. Mais là, Charlotte lui avait adressé la parole, alors Beth' avait décidé de continuer la conversation. La miss lui dit qu'elle n'avait jamais quitté la France plus de quelques jours. Bethany passa une main dans ses cheveux pour les remettre encore en ordre du mieux qu'elle pouvait avant de lui répondre.


- On peut dire que cette fois ci tu traverse la planète ! Qu'est-ce qui t'as attirée à San Francisco ? Si je peux me permettre.


Bethany ne pouvait pas vraiment imaginer la réponse à cette question pour le moment. Elle ne se doutait pas non plus que ça pourrait mettre Charlotte mal à l'aise. Elle avait juste trouvé que c'était logique dans la continuité de leur conversation. La miss nota que Charlotte parlait plutot bien anglais, même très bien. Elle lui tenait une conversation sans hésiter. C'était pas si courant que ça en France. Les gens cherchaient souvent leurs mots pendant quelques secondes, en hésitant.

Bethany était toujours en train de se demander qui la demoiselle pouvait bien lui rappeler lorsque cette dernière lui dit son prénom. Charlotte. Toute suite, le prénom fit le lien qu'elle n'avait pas encore saisi. Il n'y avait qu'une possibilité parce que maintenant Bethany s'en souvenait. Charlotte était l'ex petite amie, fiancée même, de Léo, un ami qu'elle avait rencontré à Paris. Elle se souvient encore de ce qu'il s'était passé, du moins ce que Léo lui avait raconté. Alors que tout avait l'air d'aller bien, elle lui avait brisé le coeur. On peut dire que Bethany n'avait eut qu'une envie lorsque Léo lui avait raconté, c'était d'aller écraser la tête de Charlotte. Mais elle n'avait rien fait parce que... Et bien parce qu'elle ne voulait pas s'en mêler vraiment. Elle s'était contenter d'aider au mieux Léo même si elle ne pouvait pas faire grand chose. Ca en faisait du temps maintenant qu'elle avait vu la photo de la demoiselle. Bethany avait un peu perdu contact avec Léo au début à son retour en France, puis, lorsqu'il avait débarqué à San Francisco, ils avaient pu parler et rattraper le temps perdu. C'était là qu'il lui avait raconté pour la première fois son histoire avec Charlotte.

Bethany avait toute suite compati. Il lui était arrivé une histoire un peu similaire. Bon d'accord, en un peu moins poussé parce qu'elle était encore jeune et pas question de se fiancer à l'époque. Mais elle avait été trompée par son copain avec sa meilleure amie. D'accord, ça n'était pas avec sa mère, heureusement. Bien que Bethany puisse un peu compatir, elle ne pouvait pas entièrement savoir quelle trahison s'avait dû être pour le jeune homme. Ce qui était assez amusant dans l'histoire, si on peut dire amusant, c'est qu'elle avait fait comme Léo, mais dans l'autre sens en fait. Elle avait fuit en Europe pour oublier. Et lui avait fuit l'Europe pour les Etats-Unis. Tous les deux n'avaient trouvé que cette solution pour essayer d'oublier.

Bethany n'en revenait pas de voir la demoiselle en face d'elle. Elle ouvrit la bouche en reculant le temps de reprendre ses esprits. Comment était-ce possible ? Non elle devait rêver. Pourquoi tout le monde la faisait marcher en ce moment!... C'est alors que Beth' se rendit compte que non, on ne la faisait pas marcher. Sa soeur était bien enceinte, ce n'était pas une blague. Bethany avait eu du mal à la croire mais elle avait du se rendre à l'évidence. Et là aussi elle devait se rendre à l'évidence. C'était bien Charlotte devant elle. Aussi gentille que la miss avait pu paraitre aux premiers abords sans que Beth' ne sache qui elle était, il n'était pas question qu'elle devienne amie avec elle ou qu'elle lui fasse croire qu'elle l'appréciait. Ca n'était pas en claquant des doigts qu'on pouvait se faire pardonner ce genre de choses. Bethany recula de plusieurs pas encore avant de réussir à parler.


- Charlotte ?... L'ancienne copine de Léopold right ?


Bethany appelait plus souvent Léopold Léopold que Léo. Elle aimait bien comment le prénom du jeune homme sonnait. C'était amusant comme prénom elle trouvait. Anyway. Bethany n'attendit pas la réponse de la demoiselle, c'était plus une question rhétorique qui avait pour but de signaler à Charlotte qu'elle savait très bien qui elle était même si Charlotte ne savait pas forcément qui Bethany était. Elle fit des gestes avec ses bras en ajoutant.


- Je sais ce que tu as fait. On a rien a se dire de plus.

J’essayais de voir si Bethany bluffait. Ou si vraiment, elle ne savait pas qui j’étais. Lorsqu’elle me demanda ce que j’étais venue faire ici, je détournais le regard. Je me mis a scruter les bateaux au loin, et ceux qui étaient au port.
J’étais moins sure que tout cette histoire soit une bonne idée. Il n’était pas certain qu’elle accepter de m’aider. Surtout que je ne savais quelle relation Bethany entretenait avec Léo. Je ne savais même pas s’ils étaient amis, ou si quand je les avais vus, c’était juste une trêve entre eux.
Après tout, Léo et moi avions réussi à nous voir, et bien que la tension fût palpable entre nous, extérieurement, nous n’avions pas eu vraiment l’air d’ennemis. Pourtant…
Je n’aimais vraiment pas l’idée de me dire que Léopold et moi étions ennemis. Je cherchais quelque chose de mieux pour qualifier ce que nous étions. Mais je me rendais à l’évidence que nous étions loin d’être amis (et surement aussi loin de le redevenir un jour…) mais nous étions tout aussi loin d’être de simples exs.
Je reportais mon attention sur Bethany. Plutôt que de lui répondre, et m’emmêler les pinceaux dans des histoires abracadabrantes comme je savais les créer ; je fis un signe de la main et un sourire, histoire de dire « sans importance ».
Une fois que je lui ai dit mon nom, je la regardais dans les yeux, je savais que j’avais un air de défi, alors que tout ce que j’essayais de percevoir, c’était si oui ou non, Léo lui avait parlé de moi ; si oui ou non, en mal ; si oui ou non, j’avais une chance qu’elle soit un tant soit peu de mon coté…
Mais Bethany fit un pas en arrière. Ça y est la bombe était lâcher. Et comme j’aurais du m’en douter, Léo avait raconté nos mésaventures, et comme j’aurais pu m’en douter, il n’avait pas été tendre avec moi. En la voyant comme ça face à moi me demander si j’étais bien l’ex-fiancée de Léo, je compris de un, qu’ils devaient être amis, de deux, qu’elle devait avoir envie de m’étriper. Ce qui était légitime, en somme. Si quelqu’un avait fait le quart de ce que j’avais fait, à un de mes amis, j’aurais été la première à avoir des envies de meurtres. Mais de toute évidence, j’avais espérer que les choses seraient différentes, puisque j’étais dans le rôle de la coupable.
J’avais toujours tendance à croire que les choses allaient dans mon sens, que je sois fautive ou non. Là, j’étais loin d’avoir le contrôle. Je devais réfléchir vite, pour gérer cette situation, voir si je pouvais renverser le cours des choses. Mais Bethany n’avait pas l’air de quelqu’un qui se laissait avoir comme ça, et j’avais des preuves accablantes contre moi.

« De toute évidence, je ne peux pas le nier… »

J’avais un peu l’impression de ne plus avoir le beau rôle. Enfin, d’un certain point de vue : Bethany savait qui j’étais, elle savait ce que j’avais fait ; elle savait pour ainsi dire, tout ce qu’il y avait à savoir. Alors que moi de mon coté, tout ce que je pouvais vaguement supposer, c’était qu’elle était amie avec Léo, rien de plus. Et ça me contrariait.
« On a rien à se dire de plus. » Certes, elle n’avait peut-être pas forcement tort (ça dépendait comment on voyait les choses, bien sur) mais je n’aimais pas vraiment cette réaction. J’avais l’impression qu’elle prenait toute cette histoire comme la sienne, alors qu’elle n’avait rien à voir là-dedans. Comme si ce n’était pas Léo que j’avais trompé, mais elle. Sérieusement ? Il fallait arrêter. On était pas dans un film. Même si ça m’énervait, parce que je n’aimais pas spécialement la tournure que prenait les choses, je savais que je devais rester calme, pour essayer d’arranger les choses.

« On a rien à se dire ? Pourquoi ? Cette histoire ne te concerne pas, sans vouloir te vexer. »

J’avais dit ça d’une voix détendue, je ne voulais pas que Bethany pense que je l’agressais. Parce que ce n’était pas le cas. Et aussi parce que j’avais encore un mince espoir d’arranger les choses.

Bethany était assez étonnée par l'aplomb de Charlotte. Elle avait commencé par ne pas nier son lien avec Léopold. Heureusement remarquez sinon Bethany l'aurait encore plus évitée. Elle n'aimait pas les gens qui mentaient en sachant qu'elle le savait. Ca lui était arrivé de nombreuses fois d'avoir un ami qui ne lui avait pas dit quelque chose et un autre ami lui avait dit et le premier ami savait parfaitement qu'elle savait mais il continuait de ne pas lui dire et il lui racontait des bêtises à la place. Mmm compliqué certes. Mais les gens avaient un esprit tordu et complexe. Pourquoi faire simple quand on pouvait faire plus compliqué hein ? Bethany s'était souvent posée la question mais elle n'avait toujours pas la réponse. C'était donc une bonne chose d'un côté que Charlotte lui ai dit la vérité de front. Même si Bethany ne l'avouerait pas toute suite. Oh non. Elle était bien trop en colère contre Charlotte pour le moment.

D'ailleurs Charly' l'avait remarqué puisqu'elle remit Bethany à sa place en lui disant qu'elle n'avait rien à voir dans cette histoire. Bethany s'arrêta de reculer et regarda Charlotte un instant la bouche entre ouverte comme pour parler. Elle était un peu choquée à vrai dire mais elle venait de se rendre compte que Charlotte n'avait pas tout à fait tord dans le fond. Et puis elles ne se connaissaient pas alors elle devait se demander qui était Bethany pour réagir ainsi. La jeune femme tourna légèrement la tête pour regarder le bateau d'un air absent. Peut être qu'elle n'avait rien à voir dans l'histoire parce qu'elle n'était ni la copine de Léopold, ni une proche de Charlotte. Mais Léopold était son ami et tout ce qui touchait ses amis la touchait aussi. Elle était de nature un peu trop empathe et elle s'impliquait beaucoup dans toutes ses relations. Lorsque quelqu'un faisait du mal à un ami à elle, elle en voulait aussi aux autres personnes. Elle leur en voulait de leur avoir fait du mal et Beth' avait du mal à pardonner ça. Beaucoup de gens ne comprenaient pas que ses amis passaient avant tout pour elle, mais elle s'en fichait. Elle avait des valeurs qui s'étaient un peu perdues et elle ne les niaient pas. Dans la cours des gens qui avaient fait du mal à ses amis, Charlotte n'était pas très loin du haut de la file. Même si elles ne se connaissaient pas vraiment. Elle avait heurté Léopold d'une façon impardonnable. Tout comme son copain à une certaine époque l'avait trompée avec sa meilleure amie. C'était impardonnable.

Reportant son attention sur la miss devant elle, Beth' ferma sa bouche et fit un pas vers Charlotte, passant une main dans ses cheveux pour dégager son visage. Le ton avec lequel Charlotte avait parlé n'était pas agresseur. Beth' n'avait pas l'impression qu'elle était méchante d'ailleurs. Avant de savoir que c'était la fameuse Charlotte, elle ne lui avait rien trouvé à lui reprocher. Elle aurait pu devenir une amie même peut être. Mais non, non elle ne pouvait pas. Pas question... Bethany leva les mains d'un geste d'impuissance avant de répondre d'un semi-ton désolé.


- Je... Ecoute. Léopold est mon ami. Et peut être que tu as raison et que ça ne me concerne pas. Mais je sais ce qu'il a vécu. Et si tu es ici pour le lui rappeler... On a vraiment rien à se dire.


Bethany croisa les bras et fixa Charlotte. A vrai dire, maintenant qu'elle y pensait.. Pourquoi Charlotte était-elle ici ? Que venait-elle faire à San Francisco ? C'était sur qu'elle venait pour Léopold. Et si elle comptait lui faire du mal, Bethany n'allait pas laisser faire. Peut être qu'elle n'était pas la meilleure amie de Léo', mais elle se sentait concernée par son ami, et elle ne voulait pas qu'il souffre à nouveau. Est-ce qu'il savait qu'elle était ici ? Est-ce qu'ils s'étaient déjà revus ? Bethany se dit qu'elle devait aller le voir toute suite après pour le prévenir au cas ou. Elle attendit la réponse de Charlotte patiemment. Elle devait s'avouer un peu curieuse d'un coup.

Je me retrouvais confrontée à une situation que j’avais voulu éviter. Mais l’évidence était là, sous mes yeux…
J’avais blessé Léo et, que je veuille bien l’admettre ou non, je m’étais blessé aussi. Toute cette histoire n’avait rien apporté de bon. Bien sur, j’aurais du m’en douter dès l’instant où j’avais posé les yeux sur le père de Léo ; mais j’étais du genre à dire « pas de problème, tout va s’arranger ! ». Bon, de toute évidence, rien ne s’était arrangé.
J’avais mis quelques temps à accepter l’idée que le père de Léo ne m’apporterait rien de bon, et en plus de ça, que Léopold lui-même avait tendance à me manquer.
Je comprenais la réaction de Bethany « mes amis, ma vie » j’étais exactement pareil, je ne supportais pas l’idée qu’on puisse faire du mal à mes amis et j’étais la première à vouloir les venger. Mais la situation était bien différente.
Je regardais sa réaction après que j’eu admis être LA Charlotte. Ça ne m’aurait servi à rien de nier. Qu’est-ce que ça m’aurait apporté de me faire passer pour une autre que moi ? Lorsque Bethany l’aurait appris je l’imaginais bien être de genre à se sentir trahie et tout ça. En plus de ça, si j’avais dis être une autre, elle n’aurait pas pu m’aider. Je n’avais donc aucune bonne raison de lui mentir.
Autant qu’elle s’énerve tout de suite après moi, et qu’on passe à autre chose. Je me fichais qu’on se dispute, je savais que ce serait arriver. Ce qui m’intéressait c’était après. Je savais que ça donnait l’impression de me servir complètement d’elle. Mais elle n’était pas sensé le savoir, d’accord ? En plus de ça, j’appréciais sincèrement le caractère de Bethany et sa loyauté envers ses amis. Ça nous faisait un point commun, mais je n’étais pas certaine que c’était le moment de développer ce point. Elle ne devait pas avoir envie, à ce moment, d’avoir un point commun avec moi.
Je la regardais reculer tout en me fixant, je n’arrivais pas vraiment à savoir si c’était du dégout qu’elle éprouvait…
Elle s’arrêta et reporta son regard sur moi. Puis elle me servir un mini-discours sur Léo et ce que je lui avais fait vivre.
Evidemment, elle ne savait pas les raisons qui m’avaient poussées à venir jusqu’en Californie. Et même si j’avais envisagé régler les problèmes laissés en suspens en France avec Léo, j’étais forcée de me rendre compte que les choses n’étaient pas aussi simples et évidentes que je l’avais espéré.
Mais je ne désespérais pas, et j’imaginais une dernière chance avec Bethany, pour qu’elle aille parler à Léopold pour moi, en lui disant… et bien, que j’étais une fille bien, que j’avais changé… Bref.
Evidemment, je ne pouvais pas balancer ça à Bethany de but en blanc, elle avait déjà assez de raisons de me détester actuellement.
Comment je pouvais lui expliquer les choses ? Comment lui faire comprendre que j’avais de bonnes intentions ?

« Je suis pas là pour lui faire du mal… Je suis là, pour m’excuser. J’ai changé. Je pense qu’il mérite de le savoir, non ? C’est légitime, pas vrai ? »

Je n’avais plus qu’à attendre de voir si ça passait. Si Bethany me croyait, je l’espérais, en tout cas…

Bethany n'avait jamais vraiment réussi a détester quelqu'un plus de quelques jours, même son ex et sa meilleure amie à vrai dire. Elle n'avait jamais vraiment eu de rivaux tels que l'on peut voir dans les séries télévisées. Celles qui s'en jettent plein la tête jusqu'à que l'une d'elle ne craque. Elle avait un trop grand coeur pour en vouloir aux gens très longtemps. Elle relativisait beaucoup trop les choses et finissait toujours par se dire que la dispute était vraiment débile et qu'elle était grande et qu'une telle chose ne devrait pas la vexer autant. Lorsqu'elle s'était faite trahir par son ex, ok, elle leur en avait voulu à lui et à elle pendant un certain temps. Mais elle avait fini par les oublier, se plongeant dans une autre occupation. Mais à ce moment même, Bethany était vraiment énervée contre Charlotte. A croire qu'elle venait à San Francisco que pour rappeler des mauvais souvenir à Leopold. Mais raah. Après tout Beth ne connaissait pas Charlotte personnellement. Si ça se trouvait, en dehors d'avoir fait le coup qu'elle avait fait à son ami, elle était super gentille. Peut être qu'elle avait changé aussi, Bethany n'en savait rien. Elle ne pouvait pas vraiment juger.

Elle regarda un instant Charlotte sans rien dire. Puis elle parla, bien décidée à protéger son ami quand même malgré tout. Parce que c'était bien de lui dont il était question, pas d'elle. « Ecoute je.. Je ne peux pas t'aider. C'est avec lui que tu dois voir mais il y a beaucoup de raisons pour lesquelles je t'encouragerais de ne pas aller le voir néanmoins. A commencer par le fait que je ne suis pas sure qu'il te croie sur parole si je peux me permettre. Je pense que sa confiance en toi a été un peu altérée et - je sais de quoi je parle - ce genre de trahison ne passe pas si facilement. » Parfois, quand Bethany était vraiment passionnée par un sujet, elle se lançait dans des longs discours. Et c'est un peu ce qu'elle venait de faire à l'instant. Elle avait parlé d'un ton qui semblait encore blessée. Elle venait de lui avouer que ça lui était arrivé une fois aussi alors qu'elle n'en avait jamais vraiment parlé à personne de son entourage (si ce n'était aux concernés). La blessure était restée. Ok elle les avait oublié, mais à chaque fois qu'elle les croisait, elle les évitait au maximum parce que quand ils se voyaient, son amie essayait de reprendre la conversation et Bethany se sentait obligée de sourire pour faire semblant. Ca faisait mal. Et elle ne voulait pas que Léo souffre comme ça aussi. Peut être, même surement, ce n'était pas à elle de décider. Mais elle se sentait d'un élan protectrice.

Ce que Bethany ne savait pas, c'était que Charlotte avait peut être déjà essayé de convaincre Léopold. Elle ne pouvait pas savoir si elle avait commencé directement par s'adresser au concerné où si elle avait préféré tenter une voie auxiliaire d'abord. Alors que Bethany avait à nouveau tourné les talons pour s'en aller, pensant avoir été très claire sur sa position dans l'histoire, elle se stoppa. Elle venait de se rendre compte qu'au final, peut être qu'elle comprenait un peu le point de vue de Charlotte. Affronter les gens de face après ce genre d'incident n'était pas forcément la meilleure solution car la personne blessée n'avait pas forcément (même pas du tout) un point de vue objectif sur l'autre. Et malgré le fait qu'elle avait peut être changé, Leopold risquait de ne jamais le voir. Alors que si Charlotte essayait de convaincre une amie ou un ami de Leopold de lui parler, peut être qu'il essaierait de lui accorder une trève. Bethany tourna la tête pour regarder Charlotte qui était restée seule derrière. Si elle acceptait de l'aider... Ca ne serait qu'à certaines conditions. Bethany prit une longue inspiration avant de faire demi tour et de se planter devant Charlotte avec un air décidée. « Qu'attends-tu de moi exactement ? »

Je savais qu’au fond, Bethany était une gentille fille. Ça n’avait rien de péjoratif quand je le disais, je pensais sincèrement qu’elle était gentille. Je savais bien que j’aurais du mal à faire en sorte qu’elle joue en ma faveur auprès de Léo, parce que je me doutais qu’elle ne voudrait pas être « entre deux ». Mais j’avais au moins un peu plus de chance pour qu’elle m’aime bien, du moins qu’elle ne me déteste pas.
Bon évidemment ça n’arriverait pas là, dans la seconde. Mais peut-être quand se quittant, elle me trouverait sympa. De toute façon, je suis sympa ! Non mais ! Bon bref. Je devais amener les choses facilement, peut-être un peu cachées et subtilement, mais je savais que je ne devais pas lui demander du tac-o-tac d’aller voir Léopold et de lui dire « salut, j’ai vu ton ex, elle est cool, pardonne là. »
Maintenant qu’elle savait qui j’étais et que le sujet de Léo était lancé, je la sentais quelques peu dubitative à mon sujet, et je la comprenais, je l’aurai été pour moins que ça. Je devais essayer de gagner sa confiance. Le fait qu’elle soit si protectrice (en quelque sorte) envers Léo et l’idée que je puisse lui faire du mal, ne me facilitait pas vraiment la tâche.
J’essayais de voir ce qui dans le cas inverse (moi à la place de Bethany) aurait pu faire en sorte de me faire changer d’avis. Mais je me ravisais, elle et moi n’avions vraisemblablement pas les mêmes principes (du moins en pratique). Ce qui marchait pour moi ne devait pas marcher pour elle. Tout en réfléchissant je l’écoutais parler.

« Je suis déjà aller le voir, ça c’est plutôt bien passé. » Oui, bon à peu près, roh ! Pas besoin de détail. J’enchainais. « Mais je sais qu’il ne me refera pas confiance comme ça, juste en un claquement de doigt. Mais il le faut, enfin je veux dire, c’est ce que je voudrais. Qu’il sache que je ne suis plus la même et qu’il peut avoir confiance en moi. »

Grosso-modo, c’était la vérité, mieux valait-il ne pas m’attarder dans les détails qui allaient embrouiller Bethany. Je n’étais pas là pour devenir sa meilleure copine et ce genre de chose. J’étais là pour qu’elle ait assez confiance en moi pour qu’elle m’aide. Elle avait visiblement été trahie elle aussi, ce qui n’était pas pour m’aider, il fallait bien le dire…

« Je suis désolée, quoi qu’il ait pu t’arriver, vraiment, je t’assure. Tu ne crois pas que si cette personne qui t’a fait du mal, essayer à tout prix de se racheter, tu n’arriverais pas à la pardonner ? Même, juste un peu ? »

J’essayais d’être compatissante, mais il fallait être honnête ce n’était pas mon fort. Je n’étais pas du genre à étaler mes problèmes (bon, sauf là) et j’avais d’autant plus de mal à me lamenter sur le sort des autres. Ce n’était pas à proprement parlé de la méchanceté, c’était juste que je n’éprouvais pas beaucoup d’empathie (surtout pour les gens que je connaissais depuis quelques minutes).
Soudain, Bethany s’éloigna de moi. Elle partait. Merde. Ce n’était pas pour ce coup là. Je baissais la tête et essayais de réfléchir à mille à l’heure. Mais rien ne venait pour la rattraper. Quand je relevais les yeux, Bethany avait fait demi-tour et revenait vers moi. Je n’osais même pas imaginer ce qui se passait dans ça tête. Ça devait être pire que moi. Elle me posa la question fatidique. Celui qui aurait pensé que cette fois c’était gagné se trompait : c’était maintenant qu’il fallait prendre des gants et y aller en douceur. La douceur n’était pas mon truc.

« Je sais pas. Je ne veux pas te forcer à faire quoi que ce soit. Mais je suis en face de toi, et je ne suis pas méchante, pas vrai ? Enfin, je veux dire… tu vois… Peut-être que si toi tu le dis à Léo, il te croira, tu es une fille bien. Il te croira, non ? Et puis, c'est dur pour moi, il a du mal à croire ce que je lui dit : il a déjà un avis sur ce qu'il pense de moi. Alors que si ça vient de quelqu'un d'autre... »

Bon, bon, bon. Je n’étais pas sure d’avoir dit les choses comme il fallait, mais j’avais fait du mieux possible pour avoir l’air sincère et gentille…

Je me rendais compte que si j’avais eu le contrôle de la situation jusqu’à ce que Bethany sache qui j’étais vraiment ; les choses étaient différentes maintenant, c’était à moi d’attendre, à elle de poser ses conditions. Ça m’énervait un peu, je n’aimais pas particulièrement cette position d’infériorité. Bien sur je savais que je n’avais pas d’autre choix que d’accepter, et de l’écouter. Elle était à peu près mon seul espoir, donc bon… Je prenais sur moi
Je me doutais que lorsqu’elle m’expliquait qu’il était impossible de pardonner mais possible de le faire croire elle parlait de son histoire. Ça ne me mettait pas vraiment mal à l’aise, mais je ne voulais pas m’attarder là-dessus. Déjà parce que ça me concernait pas et que je ne voyais pas vraiment en quoi ça m’aiderait de connaitre les détails de la vie de Bethany ; ensuite parce que je ne voulais juste pas m’en mêler, sa vie ne me regardait pas, tout simplement.
Ce n’était pas ce que je voulais, que Léo prétende qu’il me pardonnait ? Non pas vraiment, c’est clair. Mais si ça commençait comme ça, grâce à l’aide de Bethany, j’arriverais sans doute toute seule après à faire en sorte que les choses s’arrangent vraiment avec Léo. Enfin… j’imagine.
Je me contentais d’acquiescer en regardant Bethany, puis je reportais quelques secondes mon attention sur le port, les bateaux…
Lorsqu’elle était revenue, j’espérais que mon petit discours avait fonctionné sur Bethany. Parce que je savais que c’était les dernières cartes que je pouvais jouer pour qu’elle me croie et qu’elle accepte de m’aider. Et je ne voyais pas qui à part Beth’ allait pouvoir venir à mon secours auprès de Léopold. Ça m’énervait de le dire, mais elle était plus ou moins mon dernier espoir…
Je me doutais vaguement de ce qu’elle craignait : que Léo lui en veuille, qu’il se retourne contre elle. Je ne savais pas exactement ce qu’ils étaient l’un pour l’autre, mais c’était évident que ce problème était la raison (principale, peut-être) de la résistance de Bethany à m’aider.
Après sa tirade, je me retenais d’esquisser un sourire. Pas un sourire mauvais, un sourire de soulagement, puisqu’elle acceptait de m’aider. Je ne savais pas vraiment où tout cela allait nous mener, elle comme moi, mais peu importait. Elle allait m’aider, c’était tout ce que je voulais. Elle allait aller parler à Léopold, et je n’avais plus qu’à espérer qu’il la croirait… Lorsque Bethany me dit que Léo avait besoin de me pardonner pour passer à autre chose, j’acquiesçais. Pas besoin d’en rajouter en disant que je ne voulais pas vraiment qu’il passe à autre chose… Après son avertissement (je me doutais qu’elle allait poser des conditions, et un avertissement comme celui-ci), je la regardais dans les yeux.

« D’accord. Et… je n’ai jamais eu l’intention de lui faire du mal, en venant ici. »

Je replaçais mes cheveux, regardais au loin, puis je reposais mes yeux sur Bethany. Ça y était. Elle allait m’aider. Que ce soit en bon en mal, les choses allaient vraisemblablement changer entre Léopold et moi.
Je fis un timide sourire à Bethany

« Merci… »