C'est un de ces soirs où tu as l'impression de tourner en rond, comme une lionne dans une cage trop petite pour elle. Tes pensées sont comme des épines et tu n'as même pas le courage de les enlever. Tu les laisses juste se planter une à une en espérant qu'à force, tu seras tellement habituée à la douleur que tu ne la sentiras plus. Mais bien sûr, tu rêves encore. Pour changer. C'est là que tu as l'idée de t'en aller, de franchir cette foutue porte qui te sépare du monde extérieur depuis trop longtemps. Si tu es pas foutue de rester seule trop longtemps, tu te dis que tu n'as qu'à te mélanger à la foule et boire jusqu'à ne plus savoir exactement quelle est l'année, la date et l'heure. Ensuite, tu te dis qu'accompagnée, c'est mieux. Tu attrapes ton portable et tu envoies un message à Magda, une fille que tu adores et avec laquelle tu passes toujours d'excellents moments. Tu es persuadée que tout ça te fera du bien, même si ce n'est que pour quelques heures. Tu te redresses pour aller te préparer. T'attrapes une robe et tu penses à ton frère qui te dirait qu'elle est bien trop courte et ça te fait sourire. Maquillage simple, léger coup de brosse dans tes cheveux aux couleurs criardes et talons aux pieds. Tu enfiles ta veste en cuir et tu attrapes un taxi de justesse pour t'emmener à l'endroit de ta perdition du jour. Tu espérais qu'elle allait venir, pour que vous vous amusiez ensemble mais surtout pour prendre de ses nouvelles et t'assurer qu'elle va bien. Tu t'es pas rendue compte que le taxi s'était arrêté, c'est seulement quand la voix sèche et profonde du chauffeur est arrivée à tes oreilles que tu as sorti l'argent pour le payer. Une fois sortie de la voiture, tu t'es mise contre la façade et t'as fouillé dans tes poches à la recherche de tes clopes. T'en as allumé une et tu as attendu la filles aux tatouages.

tu fumes une cigarette, allongée dans ta baignoire, l'eau chaude qui t'enveloppe. les yeux fermés, t'es bien, t'es calme. l'appartement est totalement silencieux, en l'absence de cliff. c'est bizarre. en fait, tu te demandes depuis quand tu n'avais pas entendu le silence. longtemps, parce que même dans ta tête, c'est jamais le silence. ton portable vibre sur le rebord de la baignoire. « MAD » s'affiche sur l'écran, tu déverrouilles et lis le message en entier. sortir ? tu regardes l'heure, il est encore tôt, tu aurais encore le temps de te prélasser un peu dans ton bain. tu réponds positivement. tu écrases ta cigarette dans le cendrier et plonge ta tête dans l'eau. ça tombe bien tiens, sortir. t'as tout le temps envie de sortir depuis quelques temps. tout le temps envie de faire la fête. de trouver un mec pour la soirée. de profiter de tout, tout le temps.
tu finis par émerger de ton bain, quelques minutes plus tard. tu sors toute nue dans l'appartement, tu en profites pendant que t'as pas de coloc. tu enfiles une robe rose pâle, celle que tu adores, qui te fait ressembler à une vraie fille, à tes pieds tu chausses une paire de converse, faut pas abuser de la féminité. par dessus tu laisses tomber ta veste en cuir. et puis tu traverses san francisco pour retrouver mad au ruby skye. tu t'es toujours demandé pourquoi tout le monde allait tout le temps au ruby. mais bon, tu le fais aussi, alors... devant, tu repères des cheveux colorés. tu souris, c'est elle. vous faites une sacrée paire toutes les deux. elle multicolore, toi feuille canson vivante recouverte de la tête aux pieds. tu te faufiles jusqu'à elle. ce soir, c'est votre soir. « salut ! j'suis pas trop en retard ? si, merde désolée, je me suis endormie dans mon bain. » tu bavasses, en cherchant à ton tour tes cigarettes.

L'air de rien, ça te fait un bien fou d'être sortie de cet appartement. Parfois, t'as l'impression qu'il te rendrait presque folle mais au final, c'est le fil continu de tes pensées qui te fait perdre la tête. Cigarette entre les lèvres, tu inspires et expires la nicotine en même temps que l'air frais du soir. Tu te sens presque sereine, là, contre ce mur, à regarder les gens qui déambulent dans la rue, qui rentrent et sortent du ruby. Sortir, ça a toujours été ton remède. La musique et les autres ne te laissent pas réellement le temps de penser. Pas dans ce genre d'endroit. On pouvait voir ça comme un moyen de fuite. Tu préférais voir ça comme un moyen d'évacuer positivement. Tu as eu le temps de terminer ta cigarette, de faire l'équilibriste sur le trottoir et de passer un coup de fil. Magda était en retard mais elle t'avait répondu qu'elle viendrait alors tu ne t'inquiétais pas plus que ça. Finalement, elle est arrivée sans que tu n'y attendes.  salut ! j'suis pas trop en retard ? si, merde désolée, je me suis endormie dans mon bain. Tu rigoles quand elle t'explique et tu lui proposes une de tes cigarettes avant qu'elle sorte les siennes. C'est rien, t'en fais pas ! Comment tu vas ? C'est pas comme si tu l'attendais depuis trois heures non plus, l'important c'est qu'elle était là et que vous aviez la soirée devant vous. Une fois sa cigarette allumée, tu l'entraînes dans la boîte, toujours un sourire collé aux lèvres. Prête à faire la fête ?

tu coinces la cigarette que t'as offert mad dans ta bouche et l'allume. t'es carrément surexcitée en fait. ça te fait vraiment du bien de sortir. pas pour une soirée du boulot, pas avec camil ou dante. ça te fait du bien de changer, mon dieu, tu t'en rends compte maintenant que t'es devant le ruby skye avec mad. que l'ambiance qui transpire du lieu commence doucement à t'envahir, non pas que les boites de nuit soit ton endroit préféré, mais le ruby c'est pas pareil. t'es toujours venue ici, depuis que t'es arrivée, encore plus à l'époque où c'était jax le gérant. maintenant, le ruby c'est une habitude. pour toutes les soirées importante et puis pour tout tes potes aussi. « c'est rien, t'en fais pas ! comment tu vas ? » « super bien ! et toi ? » tu finis ta cigarette et puis tu regardes à quelques mètres de vous, les gens qui entrent à l'intérieur de la boite. tu mets les mains dans tes poches de veste. « prête à faire la fête ? » tu hoches la tête vivement comme une gamine à qui on propose d'aller vivre à disney land. t'es super prête même. tu passes ton bras autour des épaules de mad et tu l'entraines avec toi vers l'entrée du ruby. « allez viens, ça va être énorme. » tu dis. vous entrez à l'intérieur et l'habituelle ambiance de boite vous tombe dessus comme n'importe où. instinctivement tu te rends au bar, en te disant que mad va suivre. tu commandes deux shooters.

Ce n'est pas comme si tu étais une habituée du Ruby, ni des boîtes san-franciscaines en général. T'es pas assez fixe pour ça. Tu changes trop vite d'endroit, de ville, de pays et le pire, c'est que tu ne t'en rends même pas compte. Seulement pour une fois, t'avais envie de t'ancrer un peu en Californie. D'y installer un semblant de vie. De bien faire les choses et de prendre le temps de respirer un peu loin de Paris, que tu commençais à haïr pour des raisons que tu faisais exprès d'éviter. Les gens ont toujours tendance à penser que t'es une fille éphémère, qui laisse qu'une traînée de paillettes derrière elle et t'as bien du mal à tisser de vrais lien avec les gens que tu croises. La rencontre se fait assez vite mais pour t'attacher, c'est toute une histoire et ça prend un certain temps à devenir solide. En arrivant à San Francisco, tu t'étais promis que tu ferais des efforts pour t'intégrer. Pour trouver ta place parmi d'autres visages. T'y tenais vraiment à cet endroit car il te permettait de respirer un nouvel air, d'évoluer à ta manière, à des kilomètres de tes parents. T'avais toujours vécu avec eux avant de rencontrer Luke, ils n'étaient jamais loin mais toi, tu voulais la véritable indépendance. Tu voulais construire ta vie et te débrouiller seule, sans tes frères. Sans personne derrière toi pour te mâcher le travail. Cette ville, c'était un peu ce qui a marqué ton envol et tu ne pouvais que l'apprécier pour ça. super bien ! Et toi ? D'office, tu te sens mieux depuis que t'as pris la décision de sortir et que Magda t'a rejoint. Pareil que toi ! Tu peux pas t'empêcher d'être impatiente d'être dans la boîte, de sentir la musique vibrer dans ton ventre et de danser, de sauter dans tous les sens et lorsque Magda te répond, tu comprends que vous êtes sur la même longueur d'ondes. Comme souvent, en fait. allez viens, ça va être énorme. T'affiches un grand sourire en entrant avec elle, qui s'avance vers le bar pour passer commande. Tu bois ton shooter cul-sec comme à l'habitude et l'alcool qui te brûle un peu la gorge te fait faire une grimace, accompagnée d'un rire puis tu te retournes pour poser ton regard sur la masse compacte de gens en ébullition devant vous. Bon, c'est pas tout ça mais il faut qu'on se trouve de belles fesses et de jolies gueules pour nous accompagner alors je t'annonce que la chasse est ouverte.. Tu dis ça d'un ton amusé. Vous êtes pas venues pour jouer les gentilles filles après tout, non ? Et il fallait bien profiter de ce qui se trouvait sur votre chemin.

vous rentrez dans la boite. la musique est à votre rythme. ouais, votre rythme, vous faites l'ambiance, bien sur. la direction du bar est presque directe. comme un reflexe ou comme une voie divine. bien sur c'est toujours la direction du bar qui est la première à suivre. toutes les directions mène au bar. bref. mad boit son shooter cul-sec, comme une pro. tu prends ton petit verre de deux cl et tu fais de même. l'alcool décape ta gorge. ça te fait tellement de bien. l'alcool te fait du bien et te réchauffe. tu souris. d'un petit signe de main, tu montre au serveur qu'il est temps de reservir la même chose. mad se retourne pendant que tu ne lâches pas le serveur des yeux, histoire qu'il ne vous oublie pas. tu sais que dans ces soirées là, les serveurs s'attardent difficilement sur les gens et oublient les commandes. la voix de mad te tire des tes pensées. « bon, c'est pas tout ça mais il faut qu'on se trouve de belles fesses et de jolies gueules pour nous accompagner alors je t'annonce que la chasse est ouverte.. » tu lâches un rire. évidemment. tu voudrais trouver un garçon avec qui rentrer ce soir. un inconnu. un mec que tu ne reverras jamais. oh, ce serait tellement bien... tu n'en parlerais à personne. tu n'aurais pas besoin de te justifier auprès de personne. les deux nouveaux shooters arrivent. ça te donnera du courage, t'es pas très douée pour la drague... tu glisses le verre de mad devant elle. et puis tu bois le tien, d'un coup. cul-sec. et tu te retournes vers la foule toi aussi. tu commences à épier. « il faut qu'on se fasse payer des verres ! c'est pas à nous de sortir de l'argent. » tu souris.  

Il ne suffit pas de grand chose pour te faire décoller, pour que tu profites de la vie simplement. T'as toujours su apprécier chaque moment à sa juste valeur et tu t'estimes même chanceuse de pouvoir le faire librement, sans oppression quelconque. Il y a quelques jours, tu étais devenue l'ombre de toi-même. L'angoisse était la seule chose que tu pouvais définir réellement et tout le reste te paraissait hors d'atteinte et ça, ce n'était pas toi. Ça n'avait jamais été toi d'ailleurs. Alors ce soir, tu reprends là où tout s'était arrêté et tu te reprends en mains aussi, indirectement. Les lamentations, ça n'a jamais été ton truc. Tu veux respirer, vivre, faire n'importe quoi. Profiter, sans plus de cérémonies. Tes yeux cherchent un visage auquel s'accrocher, qui te marquerait plus ou moins. Pour quelques heures, tu voulais que ce soit tout de même quelqu'un qui en vaut la peine. Il faut qu'on se fasse payer des verres ! C'est pas à nous de sortir l'argent. Ta tête se tourne à nouveau vers elle et tu hausses les sourcils par la petite surprise que tu ressens et puis tu ris, un peu comme une enfant c'est vrai. Tu reconnaissais bien Magda dans ses paroles et puis tu es d'accord avec elle alors tu finis par acquiescer en signe de soutien aux mots qu'elle vient de te dire. Tu gigotes un peu parce que l'envie de danser fourmille un peu en toi. Le serveur vous ressert à nouveau et puis tu réponds à ton amie. C'est vrai, c'est vrai ! Autant en profiter entièrement. Puis tu pensais que pour cela, il fallait attendre et tu comprends mieux pourquoi ça n'est pas venu à ton esprit directement : La patience, ça n'a jamais été ton truc. Les San Franciscains étaient pas si mal et ceux que tu avais remarqué en font partie. Tu remarques un mec, à quelques mètres de vous, qui n'hésite pas à reluquer Magda de la tête aux pieds. Ça t'amuse alors tu ris un peu à nouveau, en la bousculant légèrement avec ton épaule pour lui faire savoir. Je te parie une pizza que ce mec-là te paiera ton premier verre !