Les choses se passaient plutôt bien finalement. Bien sur j’avais eu droit à des complications, je ne pouvais pas espérer que la vie que j’avais eue pendant des années n’ait pas de conséquences sur moi et sur ce bébé. « Le bébé est mal accroché, vous allez devoir limiter vos déplacements au strict minimum si vous voulez que tout se passe bien. » C’était ce que j’avais fait autant que possible, mais je ne pouvais pas ne rien faire. Rester couchée tout le temps, je devenais dingue. La plupart du temps, Khris n’était pas là la journée et je devenais folle à tourner en rond ici. Même si Lera venait me voir, même si je parlais avec des gens… J’avais l’impression d’être coupée du monde. Mais je me forçais, parce que ce n’était pas pour moi que je faisais ça, c’était pour le bébé. J’avais eu du mal à l’accepter, mais maintenant je savais que Khris et moi avions pris la bonne décision, même si on ne savait pas où on mettait les pieds. Tout ça c’était nous. Je n’aurais pas été capable de ça si ça n’avait pas été lui, j’en étais consciente. J’avais passé deux mois à flipper qu’il ne veuille pas de tout ça avec moi et quand j’avais été soulagée, c’était comme si ma grossesse était devenue réelle. C’était là que j’avais commencé à aimer ce bébé et que j’avais compris que je voulais tout ça.
Il était près de minuit, j’étais couchée et crevée, mais je n’arrivais pas à dormir parce que comme d’habitude, je ne dormais pas bien quand Khris n’était pas là. Je savais qu’il allait rentrer, mais c’était inconscient, je n’arrivais pas à fermer l’œil. En plus de ça, j’avais des crampes d’estomac. J’avais pris un cachet pour soulager la douleur, qui finalement m’endormi. Lorsque Khris rentra dans la chambre, ça me réveillait, mais je n’ouvris pas les yeux pour autant, je me contentais de me coller contre lui ; comme à chaque fois qu’il rentrait tard dans la nuit. Je ne savais jamais s’il s’endormait directement ou pas, je savais juste que je me collais contre lui et qu’il me prenait dans ses bras… J’avais toujours mes crampes d’estomac, mais j’arrivais quand même à m’endormir. Pourtant, vers deux heures du matin, une douleur violente me réveilla. En passant une main sur mon front je remarquais que j’étais brulante. Ok, quelque chose n’allait pas. J’avais de plus en plus mal au ventre et je comprenais rapidement que ce n’était pas des simples crampes. C’était le bébé, il y avait un problème avec le bébé. Je commençais à paniquer dans le noir. J’attrapais le bras de Khris pour le réveiller. « Khris j’ai mal au ventre, c’est pas normal. » Je n’étais même pas à huit mois de grossesse, je savais que quelque chose clochait.
Khris flippait, depuis le moment où Frankie lui avait dit qu'elle était enceinte jusqu'à maintenant. Il était mort de peur, il ne voulait pas perdre un autre enfant, surtout pas celui de la femme de sa vie. Et puis les médecins avaient parlé de complications, le bébé était mal accroché et cela pouvait provoquer des risques.. de très gros risques. Cela faisait maintenant environ six mois qu'il avait peur chaque jour de perdre le bébé, Frankie et pire encore : les deux en même temps. Il secoua la tête pour chasser cette pensée de celle-ci, il devait arrêter de penser à ça jour et nuit, mais il n'y arriverait pas jusqu'à la naissance de leur enfant, pas avant d'être sur que tout irait bien. Il était au travail, dans la rue comme d'habitude, à attendre un client. Tout ce qu'il voulait à cet instant c'était être dans son lit avec elle. Il détestait le fait de devoir la laisser seule, elle ne pouvait plus sortir ni vraiment bouger depuis que les médecins avaient annoncé les complications, il faisait tout pour qu'elle se repose, mais elle ne pouvait rester en place lorsqu'elle était toute seule, il le savait sans être là. Il aurait voulu pouvoir travailler chez lui, mais l'idée de voir défiler des accros aux drogues dures dans son appartement, proches de sa Frankie, ne lui plaisait pas. Maintenant qu'elle n'était plus une prostituée il voulait la mettre à l'écart de ce monde dans lequel, lui, était resté. Son client se pointa enfin et il put rentrer chez lui, chez eux. Elle était surement dans le lit, comme la plupart du temps, mais ne dormait surement pas. Dès qu'il fut rentré il se dirigea vers la chambre, elle était effectivement couchée dans le noir, mais il savait qu'elle l'attendait. Khris se coucha, la prenant dans ses bras comme d'habitude et elle s'endormit bien avant lui. Tout semblait aller bien, le bébé et elle se reposaient pendant que lui essayait de trouver le sommeil, comme d'habitude. Une journée ordinaire, une nuit ordinaire. Jusqu'à ce que la voix de Frankie ne le réveille vers deux heure du matin « Khris j’ai mal au ventre, c’est pas normal. », ses yeux s'ouvrirent automatiquement et il les tourna vers le visage de Frankie. Son cerveau ne voulu pas comprendre tout de suite, mais après quelques allés-retours entre l'expression effrayée de sa petite amie et son ventre rond, il se leva rapidement. Il n'essaya pas de comprendre ce qui se passait pour qu'elle ai mal, si elle le sentait, c'est qu'il y avait un problème. Ils devaient aller à l'hôpital, tout de suite. Il s'habilla avec les premiers vêtements qu'il trouva et en lança sur le lit à l'attention de Frankie, oui ils étaient pressés mais ils n'allaient quand même pas venir en sous-vêtements à l'hosto.. Enfin bref, la panique s'était installée dans la tête de Khris et il essayait de se rappeler ce qu'il était censé faire dans une situation comme celle-ci, à part l'emmener à l'hôpital.. non, il n'avait pas d'autre idée. Il revint vers elle, la couvant d'un regard plus qu'inquiet.
Les douleurs étaient telles que j’avais du mal à retenir des grimaces. Je n’avais jamais eu aussi mal de ma vie. Et je pense que c’était surtout du au fait que j’étais terrifiée. Je ne comprenais pas ce qui arrivait. Je savais juste que c’était le bébé et qu’elle n’allait pas bien. Je ne pouvais pas perdre ce bébé, je ne pouvais pas… je en voulais pas. Je m’étais tellement faite à l’idée que Khris et moi allions former une vraie famille. Imparfaite, mais la notre. Je ne pouvais pas tout foutre en l’air. Pas maintenant. Mes yeux commençaient à briller. Khris se redressa vers moi avant de se lever et de s’habiller. Je n’avais toujours pas bougé, je ne pouvais pas, j’avais trop mal. J’enfilais les vêtements qu’il m’avait passé. Ok, Khris paniquait. Je le voyais clairement. Je devais passer au plan B, et le rassurer.si Khris paniquait alors je n’allais pas réussir à me contrôler. Ce n’était pas une solution envisageable. Il se rapprocha de moi. Je levais les yeux vers lui. « Tu peux marcher jusqu'à la voiture ? » Je me relevais en dissimulant une grimace et je me rapprochais de lui. Je posais mes mains sur ses joues et le regardait dans les yeux. « Ca va. Tout va bien. On y va. » Je l’embrassais pour ajouter un peu de crédibilité. Je n’étais absolument pas convaincue par ce que je venais de dire. Je l’avais dit pour le rassurer et avec le vague espoir que ça me rassure aussi. Sans succès. Je montais côté passager dans la voiture et regardais par la fenêtre pour que Khris ne me voie pas. Je respirais lentement. Les deux mains posées sur mon ventre. J’avais l’impression qu’on m’arrachait une part de moi et finalement c’était peut-être ce qui était en train de se passer. S’il vous plait, faites que tout se passe bien. Je ne pouvais pas perdre mon… notre bébé. Je ne voulais pas perdre ma fille. Juste ce mot réussi à m’arracher un sourire. Ma fille. Arrivés à l’hôpital, on nous laissait dans une chambre « en attendant qu’un médecin arrive » Bien sur, je n’avais que ça à foutre d’attendre. Je souffrais le martyr, j’étais peut-être en train de perdre mon bébé et on m’abandonnait dans une chambre pour attendre. Je laissais tomber ma tête dans le lit et posais mes mains sur mon visage. Il ne fallait pas que je craque. J’avais trop mal au ventre couchée, si bien que je me relevais et m’asseyais au bord du lit, Khris en face de moi. Je le regardais en souriant. Rien que le regarder arrivait à me faire un peu oublier à quel point j’avais mal, à quel point j’avais peur. Un médecin fini par arriver et m’obligea à me coucher pour me faire une échographie. « Votre bébé s’est décroché. Il faut que vous accouchiez maintenant. » Je me redressais sur mes coudes et tournais la tête vers Khris, effondrée. Puis je reportais mon attention sur le médecin. « Non. Non, je peux pas accoucher maintenant, je suis même pas à 8 mois de grossesse, je peux pas… » Celui-ci se foutait visiblement complètement de ce que je disais. Je ne savais plus quoi faire. Oublié le plan B pour rassurer Khris, je paniquais totalement. J’attrapais sa main. « Khris… »
On ne comprend le terme de « grossesse à risque » que lorsqu'on est devant le fait accompli. Khris savait que des complications allaient arriver, on l'avait prévenu. Mais il avait essayé de se convaincre qu'il n'arriverait rien à Frankie, qu'il n'arriverait rien à leur fille. La perdre, perdre un deuxième enfant, le tuerait. Ils avaient tout prévu, ils s'étaient fait à l'idée qu'ils allaient former une famille. Peut-être pas normale, mais la plus heureuse possible. Et tout ça pour leur reprendre un mois avant l'accouchement ? C'était de la torture. Les mains de la blondes sur ses joues l'aidèrent à se calmer un peu, « Ca va. Tout va bien. On y va. », elle l'embrassa. Il était censé la rassurer, pas l'inverse, mais il avait été prit de court et la panique l'avait submergé sans prévenir. Il voyait bien les grimaces qu'elle faisait, il ne pouvait pas imaginer la douleur qu'elle endurait, mais il l'imaginait. Et rien que ça, c'était horrible. Elle n'allait pas bien, elles n'allaient pas bien, tout n'allait pas bien. Inutile d'essayer de le rassurer, il était déjà trop tard pour qu'il retrouve son calme. Mais il arriva à dissimuler un peu mieux ses pensées lorsqu'ils entrèrent dans la voiture. Les sourcils froncés, le regard fixé sur la route pour éviter de trop penser au reste. Khris jetait de temps en temps des regards furtifs en direction de Frankie, les deux mains sur son ventre rond, là où leur fille était peut-être en train de.. Il ne voulait pas y penser, il ne voulait pas mettre ce mot dans cette phrase, il n'y arrivait pas. Une fois à l'hôpital on les plaça dans une chambre, et ils durent attendre, ce furent surement les minutes les plus longues de toute sa vie. Il voyait bien qu'elle se forçait à sourire, lui n'y arrivait pas. Même s'il savait que maintenant qu'ils étaient à l'hôpital, il y avait une chance pour que tout s'arrange, il n'était tout de même pas serein. Il s'approcha d'elle et l'embrassa, essayant de lui faire oublier sa douleur, même si c'était surement impossible. Il préférait ça plutôt que de rester assit à ne rien faire, à attendre qu'un médecin vienne enfin leur dire ce qu'il se passait. Et il arriva enfin. Celui-ci fit une échographie, Khris vit encore une fois sa fille. Elle était toujours là, il soupira de soulagement, comme si elle avait put disparaître complètement durant l'attente. « Votre bébé s’est décroché. Il faut que vous accouchiez maintenant. », il n'était pas un génie, mais il savait que si un bébé naissait trop tôt, il y avait de fortes chances pour qu'il y ait des problèmes. Khris et Frankie se regardèrent au même moment, la même expression sur le visage. « Non. Non, je peux pas accoucher maintenant, je suis même pas à 8 mois de grossesse, je peux pas… », il lui prit automatiquement la main, ce qu'elle avait fait aussi. « Khris… », sa façon de le dire.. il était encore plus anéanti.
- On a pas vraiment le choix Frankie..
Le médecin le coupa avec un « Il faut l'emmener au bloc immédiatement. », ce que plusieurs infirmière firent pendant que Khris les suivait, refusant de lâcher la main de Frankie. Avant même qu'il n'ait réalisé le sens de la phrase, au bloc ? Une césarienne ? Il savait ce que cela voulait dire, et il se le prit en pleine figure lorsque les infirmières lui dirent de rester dans le couloir et d'attendre. Loin d'elle, sans qu'il ne puisse savoir si elle allait bien ou pas, si leur fille était en vie. C'était donc le moment, ce fameux moment où il allait devenir père, où ils allaient former une famille. N'était-ce pas censé être un moment joyeux bien que douloureux pour la mère ? De la peur, c'est tout ce qu'il arrivait à ressentir. Seul, dans le couloir, sans pouvoir s'asseoir un instant. Il tourna en rond pendant ce qui lui parut des heures entières.
Je m’en voulais tellement de cette situation. J’avais déjà l’impression d’avoir perdu mon bébé. Je m’en voulais d’imposer ça à Khris ; et peut-être même de me l’imposer à moi-même. Mais c’était de la faute, j’avais tellement longtemps eu une vie peu propice à l’arrivée d’un enfant… Je n’avais jamais pensé aux conséquences de ma vie, sur mon futur. Mais je n’avais jamais non plus pensé être enceinte un jour et garder le bébé. Aujourd’hui, je me sentais prête pour ça. Je savais qu’on pouvait y arriver. Je m’étais convaincue de ça pendant des mois et je savais qu’à nous deux, on pouvait avoir cet enfant, s’en sortir. Je savais que je pouvais radicalement changer ma vie. Jamais je n’aurais pensé l’année dernière que j’en serais là aujourd’hui, et je ne voulais pas tout gâcher maintenant. Khris me tenait la main, je me doutais qu’il était aussi tendu que moi. Je savais qu’il comprenait ce que je ressentais, ma peur de perdre notre bébé. « On a pas vraiment le choix Frankie.. » Je fermais les yeux une seconde en pinçant les lèvres. On n’avait pas le choix, non… J’entendis le médecin parler sans comprendre ce qu’il disait et je voyais qu’on m’emmenait. Je serrais toujours la main de Khris, je ne voulais pas le lâcher, je ne voulais pas qu’il me laisse… Mais on l’arracha à moi, sans me demander mon avis. Au bloc, une infirmière, ou qui qu’elle puisse être, commença à m’expliquer la procédure et ce qui allait se passer. Je ne l’écoutais pas. J’avais trop mal. Je posais une main froide sur mon front brulant et fermais les yeux pour respirer. Quelques secondes après que le masque se soit posé sur mon visage, je m’endormis.
Cinq heures trente du matin. Après une heure d'opération, les pleurs d’un bébé se faisaient entendre dans le bloc opératoire. Une fille. Etant prématurée, les défenses immunitaires du bébé étaient très faibles et sa peau très fine. Une infirmière plaça le nouveau né dans une couveuse, après l’avoir nettoyé et habillé. Pendant ce temps, le médecin ressorti du bloc opératoire. En direction du couloir ou attendait Khris. De son coté, Frankie encore endormie, était reconduite dans la chambre suivie de sa fille. Arrivé devant Khris, le médecin se permis un sourire. « Tout c’est bien passé. Votre fille est une battante. Félicitations. » Il laissa planer un petit silence et montra du doigt la chambre. « Votre femme devrait se réveiller bientôt, elles sont les deux dans la chambre, vous pouvez y aller. »
Lorsque Khris était avec Frankie tout allait mieux, il le savait déjà, mais même dans cette situation sa présence avait réussit à le calmer. Depuis qu'ils les avaient séparés sa peur avait décuplé de seconde en seconde. Il ne savait pas dans quel était elle était, ce qu'ils lui faisaient – enfin, pas exactement – et si leur fille allait bien. Lui qui était habitué à savoir tout ce qu'elle faisait et où elle le faisait, bien que ces derniers mois elle ne soit pas beaucoup sortie de l'appartement à cause du bébé, ne plus savoir d'un coup le terrifiait. Il avait tourné en rond dans le couloir en attendant qu'un médecin vienne lui dire comment tout se passait, pas un signe de vie, pas une seule personne dans le couloir à part lui. Il avait imaginé les pires scénarios sans pouvoir s'en empêcher, il ne pouvait pas penser à autre chose, il n'y avait rien pour le distraire et il se retrouvait face à ses pires craintes. Perdre le bébé, sans jamais l'avoir vu, perdre Frankie avec.. Si ça arrivait vraiment, il n'aurait plus qu'à mourir. Il n'aurait plus aucune raison de vivre, sans elle, sans elles, il n'y aurait plus rien pour le retenir. Et s'il ne passait pas à l'acte, il était sur de mourir de tristesse dans les mois suivants. Il avait fini par s'asseoir, mais ses jambes s'agitaient et ses mains tremblaient, il tentait de respirer calmement mais rien n'y faisait. Rien ne pouvait le calmer à part quelqu'un venant lui dire que sa petite amie et sa fille étaient en bonne santé, ou en tout cas en vie. Le médecin arriva enfin, Khris bondit sur ses pieds, s'approchant de l'homme ne pouvant plus attendre une seule seconde de plus. Il avait un sourire aux lèvres, elles allaient donc bien. « Tout c’est bien passé. Votre fille est une battante. Félicitations. », cette phrase lui confirma. Khris put enfin respirer à fond, comme s'il avait été en apnée depuis que Frankie était entrée dans le bloc opératoire. Un court silence lui laissa le temps de se remettre un peu de ses émotions, le médecin montra une chambre du doigt avant d'ajouter « Votre femme devrait se réveiller bientôt, elles sont les deux dans la chambre, vous pouvez y aller. ». Il ne se posa pas plus de questions, n'adressa pas un seul mot au médecin et se dirigea à grands pas vers la chambre. Il entra en poussant la porte doucement, Frankie était encore endormie dans le lit et leur fille était dans une couveuse.. Il s'assit sur le bord du lit et rapprocha la rapprocha de celui-ci, pour que la blonde n'ai pas à se lever lorsqu'elle se réveillerait et souhaiterait voir leur fille. Khris n'osait pas regarder pour l'instant, il avait peur une fois de plus, voir sa fille pour la première fois rendait ces derniers mois réels. Il prit la main de Frankie dans la sienne pour se donner du courage et osa enfin poser les yeux sur son bébé. S'il n'avait eu aucune fierté masculine il aurait pleuré, mais les pères ne pleurent pas.
Je n’arrivais pas à ouvrir les yeux. J’avais l’impression qu’ils avaient été collés et je n’arriverai plus jamais à les ouvrir… Soudain, je sentis une main se glisser dans la mienne, même les yeux fermés, je comprenais que c’était Khris. Mon cœur rata un battement : qu’est-ce qu’il s’était passé ? C’était calme, trop calme. Est-ce que… Je n’osais même plus essayer d’ouvrir les yeux, de peur de découvrir une vérité que je ne voulais pas voir. J’avais mal au ventre, comme si m’avait fait un trou béant et laissé pour morte comme ça. C’était peut-être ça… Je pris une grande inspiration et j’ouvris doucement les yeux. Quelle heure il était ? Le soleil avait l’air de se lever, les murs blancs de l’hôpital m’agressaient les yeux. Je passais ma main libre, celle que Khris ne tenait pas, sur mes yeux pour les habituer à la lumière. Le temps d’une seconde, j’avais oublié la situation dans laquelle je me trouvais. Je levais les yeux vers lui, assis à coté de moi, il regardait dans la direction opposée. Je pressais sa main pour qu’il comprenne que j’étais réveillée et qu’il tourne la tête vers moi. J’étais incapable de parler, ma gorge était trop sèche. Il tourna sa tête vers moi et me sourit. Je me redressais et c’est là que je vis la couveuse et… le bébé. Un sourire se dessina sur mon visage et je portais ma main à ma bouche. J’avais réussi. On avait réussi. J’avais un bébé, maintenant. J’avais une fille. J’étais maman. C’était pas le truc le plus surréaliste que j’avais pu dire de toute ma vie ? Difficilement, je m’assis dans le lit. « Comment elle va ? » m’inquiétais-je. « Comment tu vas ? » J’avais conscience que les dernières heures avaient été difficiles pour tout le monde et pas seulement pour moi. Je me doutais que Khris avait paniqué. Un médecin entra dans la chambre. Je serrais la main de Khris dans la mienne, attendant le verdict sur l’état de ma fille. « Votre fille va bien. Elle reste très fragile ; elle n’a pas fini sa « croissance ». On va devoir la garder en couveuse, le temps qu’elle se refasse une sante. Un bon mois… » Je retenais mon souffle. Un mois. Je posais mon regard sur elle. Je n’en revenais pas que tout se finisse aussi bien, finalement. « Hm… et il faudra que vous nous donniez son prénom… » ajouta le médecin. Je regardais Khris. Tout ça était bien réel, on avait finalement une vraie famille. Pas comme les autres, mais notre famille. J’avais l’impression que mon cœur allait exploser tellement j’étais heureuse. Même si je savais que j’allais devoir rentrer chez moi, sans ma fille et vivre sans elle pendant un mois… Je savais que le plus dur était derrière nous. Nous avions déjà choisi le prénom, quelques mois plus tôt. Je me tournais vers le médecin, avant de reporter mon regard sur ma fille, en souriant. « Katie Lux Jones-Ainsworth. » Bébé Katie.
Elles étaient si belles, endormies, l'une comme l'autre. Khris ne voulait pas faire comme tous ces parents qui essayent de trouver des ressemblances physiques avec leurs enfants, mais elle semblait avoir le même nez que lui. La pauvre, elle avait choisit la partie la moins belle du visage de son père. Il soupira, en espérant qu'elle ressemblerait à Frankie plus tard. Celle-ci ouvrit les yeux, serrant sa main pour le tirer de ses pensées. Il lui sourit, tellement heureux de la voir enfin éveillée, elle pourrait enfin voir leur fille. Il était resté durant tout son sommeil les yeux rivés sur sa fille. Sa fille putain. Il se prenait ces huit mois en pleine face, maintenant qu'elle était à quelques centimètres de lui, qu'il pouvait presque la toucher, tout devenait réel. Avant il ne pouvait pas vraiment la voir, lorsqu'elle était dans le ventre de sa mère, et des fois il avait eut l'impression qu'elle n'existait pas et qu'il rêvait. Mais elle était bien là, en train de dormir tranquillement dans sa couveuse, comme si elle ne se rendait pas compte du fait qu'elle avait faillit ne pas venir au monde. L'innocence même. « Comment elle va ? » Khris n'en savait rien, pour l'instant tout avait l'air d'aller, mais le stress de ces dernières heures n'était pas encore retombé et il ne pourrait se calmer seulement lorsqu'un médecin lui aurait dit que sa fille était en parfaite santé. Il supposait que si elle était dans une couveuse, c'était parce qu'elle n'allait pas « bien ». Mais si elle était devant eux, près d'eux, elle n'était pas si mal en point que ça. Il l'espérait en tout cas. « Comment tu vas ? », il la rassura d'un léger hochement de tête. Il allait bien, ou plutôt mieux. Maintenant qu'il était avait sa « femme » et sa fille, il était heureux et serein. Le médecin entra, Khris retint sa respiration pendant qu'il parlait, toujours légèrement tendu. Frankie serra à nouveau sa main, lui montrant qu'elle était là et qu'elle appréhendait elle aussi. « Votre fille va bien. Elle reste très fragile ; elle n’a pas fini sa « croissance ». On va devoir la garder en couveuse, le temps qu’elle se refasse une sante. Un bon mois… » Un mois ? Une éternité aux yeux de Khris, à peine était-elle née qu'on la lui enlevait. Mais en y réfléchissant bien, il préférait qu'elle reste un mois en sécurité à l'hôpital pour en sortir en bonne santé plutôt que de la voir souffrir. Même s'ils ne pourraient pas tout le temps être tous les trois, il savait qu'il pourrait venir souvent. Pour une fois que son boulot avait des avantages pour sa fille.. « Hm… et il faudra que vous nous donniez son prénom… » Ils se regardèrent, ils n'avaient dit le prénom à personne et l'avaient choisi quelques mois auparavant. Ils avaient réussi, ils étaient une vraie famille maintenant. Un père, une mère et une fille. Peut-être pas la plus normale des familles, mais une famille quand même. Ils devraient rester un mois sans elle, puis il faudrait apprendre à s'occuper d'elle. Khris n'y connaissait rien, il devrait tout apprendre. Il ne s'était jamais occupé d'un enfant aussi petit étant donné que son frère et sa sœur n'étaient pas beaucoup plus jeunes que lui. Des fois il se demandait s'il y arriverait, mais lorsque Frankie prononça le nom complet de leur fille, il sut qu'il en était capable. Rien qu'à voir son visage endormi, cela lui donnait l'espoir de s'en sortir avec elle. « Katie Lux Jones-Ainsworth. », Baby Jones-Ainsworth. Un mélange de lui et Frankie, la preuve de leur amour surement.. Le médecin écrivit sur une feuille le nom de Katie et lui mit un petit bracelet pour qu'ils puissent la reconnaître parmi les autres bébés durant le mois suivant. Puis il laissa la famille Jones-Ainsworth tranquille, leur disant qu'il reviendrait plus tard pour voir si tout allait bien. Khris s'approcha de sa petite-amie pour l'embrasser, pouvant enfin la serrer contre lui sans être séparé par un alien.
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