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Lies are made to be discovered ₪ Lera & Jacek i'll be fine once i'll get it, i'll be good
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| | Jeu 10 Mai - 20:35 | |
| Tout un chacun conviendra pratiquement toujours que le cimetière est un lieu synonyme de mort, de désolation, de peine, de chagrin, de deuil. Dans l’esprit de beaucoup de personnes, ce n’était certainement pas l’endroit idéal pour passer ses journées, et rien que l’idée d’y aller les plongerait dans un état contraire à la joie, la réjouissance. Jacek avait une vision bien différente des choses, son regard de peintre s’attardant plutôt sur les couleurs, le jeu d’ombres et de lumières, les différentes techniques qu’il pourrait employer pour rendre le tableau à son goût. Il allait au-delà du terrain public et sacré où reposent de nombreux corps, ensevelis sous terre, dans des caveaux datant de plus ou moins longtemps. Il ne pensait pas à cette face-là, occultait tout bonnement qu’il foulait une terre ayant abrité des morts. Pour lui, seul comptait l’instant présent, ce qu’il pouvait en capturer et retranscrire au moyen de coups de crayons ou de pinceaux, de peinture, de pastel, de feutre, de fusains, de crayons de couleur ou encore au bic.
Cela faisait déjà plusieurs jours qu’il partait de bon matin, à pieds, traversant la ville depuis son appartement à Russian Hill, au nord de San Francisco, pour atteindre le cimetière se situant à son Sud, dans le quartier de Crocker Amazon. Il profitait allègrement de son périple – car pour lui, c’en était bien un de traverser toute la ville en marchant –, pour observer les couleurs qu’arbore la cité en divers endroits et heures. Arrivé au cimetière dont il en avait fait la première fois un tour complet histoire de savoir l’endroit qu’il allait choisir, il se postait face au paysage choisi et s’installait. S’en suivaient plusieurs heures de travail intense, où sa concentration ne lui échappait qu’en de rares instants. Il avait tout d’abord réalisé plusieurs croquis, puis était revenu, quelques jours plus tard, pour les modifier, les arranger, en ayant une meilleure perception puisque les revoyant à « froid ». Il avait ensuite opté pour de l’acrylique, avant de changer pour le pastel sec, qu’il trouvait plus facile de transport et sans doute plus adapté à la situation et au rendu qu’il voulait donner.
En cette journée de fin de mai, Jacek achevait son travail, déjà commencé depuis un moment. Il ne venait pas chaque jour, attendait parfois volontairement un moment avant de revenir. Seulement, cette journée-là lui semblait propice pour terminer son œuvre – même s’il ne l’appelait jamais ainsi –, et il n’avait pas hésité longtemps avant de rejoindre le lieu où le gardien était dorénavant habitué à le voir et avait même proposé de lui prêter une petite table ainsi qu’une chaise, choses que le jeune homme avait bien évidemment acceptées de bon cœur. Dos au soleil, des pastels de diverses couleurs répandus un peu partout sur la table, de nombreuses feuilles blanches lui servant de brouillons, il se concentrait à peaufiner les détails, ceux qui sont souvent oubliés par un œil humain non averti mais qui apportent la réelle touche à un tableau. Un crayon pastel à la main, il ajoutait quelques infimes coups de crayons sur sa feuille de canson, prenant son temps et relevant fréquemment la tête pour vérifier s’il était tout aussi réaliste que possible. Un brin perfectionniste et attentif au moindre détail ? Vous n’auriez pas tort de penser ainsi. Mais c’était aussi ce qui lui vallait de l’admiration de certaines personnes, même s’il avait bien du mal à croire tous les compliments qu’on pouvait lui faire au sujet de ses œuvres. Du Jacek tout craché.
L’après-midi était déjà bien avancée lorsque le brun décida qu’il en avait assez fait, et que cela lui plaisait. Il se dit en haussant vaguement les épaules qu’il pourrait de toute manière bien repasser si l’envie lui prenait ou s’il changait d’avis. Il aspergea son travail de laque pour fixer la matière, rangea minutieusement son matériel et nettoya la table que le gardien consentait si gentiment à lui prêter, table qu’il alla ensuite remettre à sa place originelle, ainsi que la chaise. Ce ne fut que lorsqu’il revint vers son sac comportant tous ses « outils » et diverses autres choses qui lui étaient utiles, qu’il remarqua qu’il n’était pas totalement seul. Il dut plisser les yeux, mettre sa main en visière au-dessus de ses prunelles mais réussit tout de même à distinguer plusieurs silhouettes qui venaient de passer la grille du lieu sacré. Ce n’était pas tant le fait qu’il y ait du monde qui le dérangeât, mais plutôt le raffut qu’ils faisaient. Des jeunes bourrés, drogués ou les deux. Jacek soupira un instant, mais se résolut à aller à leur rencontre. Ce ne fut que lorsqu’il fut qu’à une vingtaine de mètres qu’il remarqua une personne bien connue, sa blonde de meilleure amie, ou du moins, la considérait-il comme telle. Lera. Il se stoppa, muscles contractés. Ne pouvant détacher son regard d’elle, il l’observa en silence s’amuser visiblement comme une petite folle à monter sur la première tombe venue et parler si fort que même Jacek pouvait l’entendre. Il savait au fond qu’il ne la connaissait pas tant que ça, et qu’elle faisait bien ce qu’elle voulait, après tout. En prendre conscience et avoir le fait sous les yeux étaient une autre paire de manches. Et dire qu’il n’appréciait pas le spectacle était un euphémisme. |
| | | | Mar 15 Mai - 12:50 | |
| Lera&Jacek On a coutume de dire que les bons souvenirs durent longtemps et les mauvais plus encore. Lera agréait totalement à ce dicton. Elle venait une nouvelle fois de se réveiller en sursaut à cause de ce passé la hantant sans cesse, et ce même dans ses rêves. Trois années venaient de s’écouler. Trois longues années. 1095jours. Mais elle en était toujours au même point. Alors que certains semblaient avancer, elle demeurait sur place ou reculait. De toute façon, l’on ne peut pas dire qu’elle faisait quoique ce soit pour inverser la tendance. Fuir. Encore et toujours. Elle ne faisait que ça. Elle ne savait faire que ça.
Elle regarda l’heure sur son portable. 08h du matin. Encore une fois elle n’avait dormi que deux heures. Son organisme ne tiendrait pas longtemps un tel rythme et elle le savait. Au fond, elle ne s’en souciait que très peu. Adviendra que sera. Elle avait cessé depuis longtemps de se battre et préférait se noyer. Un peu plus chaque jour. A quoi bon combattre quelque chose qui ne pouvait l’être ? C’était une perte de temps et d’énergie. Autant sombrer pour de bon tout en prenant du bon temps. Activité dans laquelle elle excellait visiblement.
Elle se leva et alla s’installer sur un rocher au bord de la plage. Elle ne fit pas attention à ceux qui faisaient leur jogging matinal, d’ailleurs elle faisait rarement attention aux gens. Et espérait qu’il en était de même pour eux. Malgré les apparences, elle n’aimait pas spécialement être le centre d’attention. Elle n’aspirait qu’à vivre tranquillement, seule dans un coin. A l’origine, elle n’était pas une personne sociable. Elle ne l’avait jamais été avant Gareth ainsi qu’après qu’il fût parti. Mais depuis qu’elle était arrivée à San Francisco, elle s’était faite de nombreux amis. Et elle n’aimait pas spécialement ça. Elle était trop attachée à eux et cela l’effrayait. Surtout Jacek. Ce dernier ne savait d’elle que ce qu’elle avait bien voulu lui montrer, non pas par manque de confiance mais plus par peur de sa réaction. Elle était intimement convaincue qu’il porterait un regard différent sur elle et que plus rien ne serait comme avant. Peut-être même qu’il ne voudrait plus entendre parler d’elle, chose dont elle ne s’en remettrait pas. Bien qu’au fond, elle n’attendait que ça.
Elle jeta un caillou dans l’eau pour chasser ces idées de son esprit. L’idée de se jeter, elle-même dans l’eau et de se laisser couler jusqu’au fond s’immisça furtivement dans sa tête. Elle aurait enfin ce dont elle avait toujours rêvé, l’oubli. Et c’était plus facile. Tellement plus facile. Au lieu de quoi, elle retourna à son appartement, exaspérée par sa propre lâcheté. Incapable de vivre, incapable d’y mettre un terme. Pathétique. Elle entra sous la douche, en évitant soigneusement les miroirs. Elle savait très bien de quoi elle avait l’air : des poches de cernes sous les yeux, les joues émaciées et une lueur douloureuse dans le regard. Un zombie consumé par sa mémoire. Elle resta un long moment sous le jet d’eau, espérant sans doute que toutes ses pensées rejoindraient les canalisations. Il n’en fut rien. Se cogner violemment la tête contre le mur aurait sans doute été la solution. Oui, sans aucun doute. Mais une meilleure option l’attendait. En effet, un de ses potes l’invitait à passer chez lui et à voler si haut qu’elle aura du mal à redescendre. Elle accepta, bien entendu.
Lucas était un gosse de riche typique, c’est-à-dire qu’il avait tout ce qui pouvait s’acheter mais ce qui désirait réellement c’était l’attention de ses parents mais ceux-ci, bien trop occupés à sillonner le monde, ne semblaient pas prêt à la lui donner. Lucas était tombé amoureux de Lera. Ses airs rebelles et inaccessibles, l’avait complètement charmé. Néanmoins sa belle restait une énigme malgré tout ce temps qu’ils passaient ensembles, cela ne lui déplaisait pas, au contraire. Ce qui l’avait attiré chez Lera à l’origine c’était sa franchise et le fait qu’elle lui ait résisté, il aimait qu’on lui résiste. Un gosse de riche typique qui obtenait tout ce qu’il voulait en somme. Lera, elle, ne voyait en lui qu’un moyen de passer du bon temps. Rien de plus. Les sentiments, très peu pour elle et de toute façon elle n’avait jamais su y faire. Elle trouva son ami avec d’autres potes dont elle ne se souvenait jamais des prénoms, signe qu’elle n’en avait rien à faire. Elle les salua et s’installa. Les réjouissances pouvaient débuter avec au menu une bonne cam selon les dires de Lucas et de la vodka. Sombrer dans l’oubli.
L’humeur noire de Lera avait laissé place à quelque chose de plus gai. Elle aimait se sentir ainsi, invincible et intouchable, même si ce n’était que pour un court instant. Ses pensées n’étaient plus et les souvenirs de Gareth semblaient s’évanouir, eux aussi. Elle ne demandait rien de plus. Le petit groupe partit d’un rire, ignorant la raison de cet accès d’hilarité. Euphorie générale. Ils avaient tous un poids dont ils voulaient se délester et avaient trouvé en la drogue le moyen de le faire. Il y avait surement d’autres moyens de procéder mais la destruction est tellement fascinante qu’il est difficile d’y résister.
« On va au cimetière ? » Lança Lucas en buvant son verre de vodka. Ses compagnons acceptèrent, n’y trouvant là rien d’étrange tellement leur esprit était embrumé par la drogue et l’alcool. Ils montèrent dans la voiture, un des potes de Lucas au volant. En chemin, ils se roulèrent un énorme joint qu’ils fumèrent à tour de rôle jusqu’à leur arrivée. « Pourquoi tu voulais venir ici ? » demanda Lera lorsqu’ils descendirent de la voiture, le joint à la bouche. « Je me disais qu’on devait partager notre bonne humeur avec eux…sérieux ça doit être trop chiant d’être morts quoi ! » Ils partirent d’un rire. Ce n’était pas spécialement drôle, avouons-le, mais tout l’était une fois drogué. Lera monta sur une tombe et se mit à danser un genre de flamenco, du moins quelque chose y ressemblant fortement. « Vous qui êtes là-dedans, réveillez-vous ! Venez faire la fête avec nous ! » Cria-t-elle avant de pouffer de rire, suivi par ses compagnons qui applaudissaient. « Merci, merci » dit-elle en faisant une révérence à la manière des comédiens prêts à quitter la scène. Elle sauta de la tombe, manquant de se casser la figure mais elle fut rattrapée par Lucas. Lorsqu’il était sur le point d’en profiter pour l’embrasser, il fut interrompu par la voix de l’un de ses potes. « Eh l’mecs, y a quelqu’un ! » déclara-t-il en indiquant un jeune homme qui les observait visiblement. « Et alors on n’en a rien à four… » Commença Lera puis s’interrompit en reconnaissant Jacek. Malgré la cocaïne et la vodka, elle se savait dans de beaux draps.
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| | | | Sam 19 Mai - 15:46 | |
| Les gens qui vous affirment que ce ne sont pas vos choix qui déterminent le cours de votre vie sont des imbéciles. Du moins telle est la pensée de Jacek à ce sujet. Pour lui, chaque décision, même mineure, engendre des conséquences, qu’elles soient importantes ou non. Et si on avait attendu un peu avant de faire ci ou ça ? Et si on s’était dépêché ? Que se serait-il alors passé ? On a toujours le choix, qui plus est, même si l’autre option consiste à quitter le monde des vivants. Mais cela reste un choix. Jacek ne s’attarda cependant pas plus sur ces pensées : il avait d’autres chats à fouetter, comme dit l’expression. En effet, une personne requérait toute son attention à présent. Sa meilleure amie. Lera.
Il resta quelques secondes encore debout, son visage reflétant un parfait étonnement allié à une sorte de profonde déception. Il avait tout vu et entendu, et était donc bien conscient que Lera et ses « potes », comme elle devait les appeler, n’étaient pas dans leur état normal. Elle n’était pas bourrée, non, quoique Jacek ne puisse vraiment être certain qu’elle n’ait pas bu également. Mais c’était autre chose qui la poussait à agir ainsi. Elle conservait un équilibre relativement bon ; elle avait donc dû prendre de la drogue. Jacek adorait Lera. Sa patience l’avait souvent aidé à rester malgré l’humeur de la blonde qui n’était certainement pas facile à supporter. Il avait réussi à la fois à s’attacher à Lera tout en se détachant légèrement pour pouvoir rester lui-même et agir en conséquence. Il l’avait rencontrée alors qu’elle avait abusé de l’alcool et il n’était pas contre. Après tout, il s’était bien retrouvé saoul lui aussi. Mais pas en pleine journée et pas dans un lieu dit saint, sacré. Et certainement pas sous l’effet de drogues. Jacek ferma un court instant les yeux, gardant son calme tandis que son esprit analysait encore la situation et les options qu’il s’offrait à lui. Il avait le choix, comme toujours. Il pouvait faire demi-tour, fuir, partir sans se retourner, tout comme il était en mesure de passer à côté d’eux sans rien dire. Mais il avait aussi le choix d’aller vers eux et d’emmener Lera, qui, de toute manière, ne pourrait pas trop s’opposer à lui dans l’état dans lequel elle était. Il était capable de tout faire. Ce qui lui faisait mal, c’était de se dire qu’il y réfléchissait, et qu’il ne fonçait pas directement. Blessé par l’attitude de Lera, il hésitait, alors qu’il était plutôt du genre à agir aussitôt pour aider ses amis. Ce n’était pas son genre d’attendre comme ça. Ce qui prouvait que Lera avait un don pour le pousser au doute et dans ses retranchements.
Soudain, le brun cessa de réfléchir et se lança. Il tourna les talons pour aller chercher son sac, à quelques mètres de là, puis opéra un nouveau demi-tour pour se diriger vers la blonde et ses amis, s’ils pouvaient être désignés comme tels. Son pas n’était pas pressé, mais déterminé. Il n’avait pas vraiment idée de comment allaient réagir les autres, surtout qu’ils semblaient tous plus ou moins dans le même état dû à la substance illicite. Jacek ne savait pas s’il devait s’attendre à des accès de violence, mais s’en fichait un peu. Il n’avait jamais été très doué ni très porté sur le sport, mais avait tout de même acquis les bases et automatismes. Si on essayait de s’en prendre à lui ou à Lera, il n’hésiterait donc pas à répliquer. Mais il n’en eut pas besoin. Tous le fixaient, Lera la première, et il le lui rendait bien. Son faciès n’exprimait aucun sentiment en particulier. Il était conscient qu’il ne servirait à rien de s’énerver contre elle. Pas maintenant. Il pouvait cependant l’empêcher de continuer à s’enfoncer et l’emmener loin des autres. Arrivé à sa hauteur, il ne demanda l’avis à personne pour la prendre par la main, doucement. « Viens avec moi. » Elle n’opposa aucune résistance, et les autres étaient encore trop hébétés pour réagir. De plus, par chance, ce fut le moment que choisit le gardien pour débarquer à grandes enjambées et chasser les intrus. Jacek entraîna Lera dans son sillage et emprunta l’allée principale du cimetière de façon à s’éloigner de l’entrée. Il savait que le gardien ne lui dirait rien, à lui, alors il en profita.
Sous l’impulsion, il avait simplement pensé à emmener sa meilleure amie loin des autres, mais il n’avait pas réfléchi à un endroit en particulier. Etant venu à pieds, il doutait de pouvoir traîner la blonde jusque chez lui en traversant la mégapole. Prendre un taxi serait bien plus raisonnable. Mais pour le moment, il préférait attendre que les autres guignols se soient éloignés. Il restait réaliste, et se doutait que si Lera, dans un brusque accès de folie, se décidait à vouloir aller avec eux, il ne pourrait pas lutter contre tous. La meilleure solution était donc de ne pas quitter le cimetière le temps qu’ils aient pris la poudre d’escampette.
Parvenu sans trop de mal jusqu’à une extrémité du lieu où la végétation était encore abondante du fait de l’absence de tombes placées jusqu’ici, il soupira avant de lâcher la main de Lera. Il n’avait pas la moindre idée de ce qu’il devait faire à présent. Attendre ? La blonde ne le supporterait pas bien longtemps. Mais il ne voyait pas comment l’occuper. Lui parler n’arrangerait rien : elle ne serait pas en mesure de lui répondre véritablement, bien que Jacek ait comme l’impression que son organisme n’avait pas encore pris en compte tous les effets de la drogue, mêlée à l’alcool. Face à elle, il l’observa en silence, baissant légèrement la tête pour ce faire puisque la demoiselle était moins grande que lui. Elle ne réagissait pas. Pas encore. Le temps de répit serait sans doute court, mais il en profitait. Il adorait Lera, et voulait vraiment tout faire pour l’aider. Il lui ferait savoir son avis sur ce qui s’était passé. Peut-être qu’elle le fuirait. Mais ce n’était pas dans le genre de Jacek d’abandonner si facilement. Elle n’apprécierait sans doute pas qu’il lui dise comment elle devait agir pour mener une vie « normale » et saine. Ils allaient très certainement passé un mauvais moment. Il ne comptait de toute manière pas la ménager. Elle n’avait plus dix ans. Mais il l’aiderait. Il s’acharnerait. C’était ce qu’il choisissait à présent. Quelles seraient les conséquences ? Bonne colle. Mais il était convaincu que Lera en valait la peine. Alors il le ferait. Mais pour le moment, il allait devoir la supporter comme elle était. Et ce n’allait sans doute pas être une paire de manches. |
| | | | Jeu 24 Mai - 9:54 | |
| Enfin…elle se savait dans des beaux draps, ce n’était pas exactement cela puisqu’il fallait du temps pour que son cerveau capte cette information et vous savez comment est celui d’un drogué. Il est très difficile de lui faire comprendre quoique ce soit, du moins à la minute. Il lui faut du temps. Enormément de temps. Disons cinq bonnes heures. D’accord, j’exagère quelque peu mais comparer actuel de Lera à celui d’un mollusque n’était en aucun cas exagérer. Il n’était mais alors pas du tout opérationnel, et je plaignais quelque peu son meilleur ami. Toujours est-il que nous nous n’y étions pas encore.
Jacek observait sa meilleure amie, indécis sur ce qu’il devait faire alors que sa dite meilleure amie ne le comprenait pas. En fait, elle ne comprenait pas grand-chose en ce moment précis, tout ce qu’elle avait en tête c’était l’amusement, la légèreté. Après tout c’était pour cette raison qu’elle consommait ces substances illicites. Elle désirait plus que tout oublier. Tout. Son prénom. Gareth, surtout. A l’époque, à leur première rencontre, elle ignorait qu’elle serait profondément marquée par cet homme qui était pour elle à la fois l’amant et le père idéal. Peut-être que si elle l’avait su les choses auraient tournées autrement. Ou peut-être pas. Elle ne regrettait pas grand-chose des trois années passées en sa compagnie. Peut-être que si. Cela dépendait des jours. Cela dépendait si elle avait ou non la force de supporter la vérité qui était que la seule chose qu’elle ne supportait pas dans son histoire avec Gareth c’était que ce dernier l’ait abandonné. Aussi facilement. Comme si elle n’avait jamais compter. Elle se serait faite à cette existence chaotique dans laquelle il l’avait entrainée si c’était pour le garder à ses côtés. Ah, douce Lera que tu es pathétique. De toute façon toute jeune fille aussi amoureuse qu’elle l’était est pathétique. C’était ainsi. Maintenant tu le détestes. Du moins, tu fais mine de le faire. C’est plus facile n’est-ce pas ? C’est étrange, on a plus de facilité à supporter la haine, la colère que le désespoir. Pourtant ces deux sentiments sont aussi forts l’un que l’autre.
« Viens avec moi » furent les seuls mots de Jacek lorsqu’il vint prendre Lera par la main et l’entraina avec lui sous le regard hébété des compagnons de ces dernières. Dire que les quatre drogués ne comprenaient rien à ce qui se passait serait un euphémisme. Ils étaient dans leur monde planant et là, tout leur semblait aller à la vitesse de la lumière. Il n’y avait qu’à voir Lera qui se laissait trainer telle une poupée de chiffon, n’arrivant même pas à se demander ce qui lui arrivait. D’ailleurs elle ne comprit les mots de Jacek que lorsqu’ils arrivèrent à leur destination. Elle était bien trop obnubilée par le paysage autour d’elle. Un paysage plus vivant que chez la moyenne. De plus ce petit voyage l’avait plus faire rire qu’autre chose, non pas qu’elle trouvait cela drôle, enfin si, mais c’était plus que cela. Elle se sentait tellement légère qu’elle ne put retenir son hilarité. C’était triste de songer qu’il n’y avait que la drogue qui la rendait heureuse, du moins si l’on pouvait qualifier cela ainsi. Elle vivait tellement dans un monde d’illusions qu’elle avait fini par s’y perdre. Elle ne savait plus différencier le réel de ce qui ne l’était pas. Quoique non, ce n’était pas exactement pas ça. Pas du tout même. Lera n’avait en aucun cas perdu le sens des réalités mais il était si aisé de se barricader dans le factice que le retour aux sources était nettement plus complexe que prévu. Voire insurmontable dans son cas. Elle ne se sentait pas prête à affronter tout cela. La question est, le sera-t-elle un jour ou comptait-elle vivre ainsi jusqu’à sa mort, certainement prématurée ?
Ils restèrent un long moment à se fixer. Du moins, Jacek observait Lera, celle-ci était bien trop loin dans univers pour se concentrer sur quelque chose. Heureusement pour le brun, une partie d’elle ne tarderait pas à revenir, il lui suffisait d’être un peu patient. Ah, il lui fallait une sacré dose de patience pour supporter la blonde et je vous avouerais que je le plaindrais presque. Il faut vraiment qu’il tienne à elle pour accepter tout cela, enfin ce ne sont pas mes affaires. Soudain, son estomac, ne supportant plus d’être noyé sous de la vodka, décida de s’en débarrasser et malgré son état, Lera eut la présence d’esprit d’aller régurgiter derrière un arbre. Pour un croyant elle aurait souillé cet endroit sacré par bien des façons, il ne manquait plus qu’elle s’envoie en l’air avec quelqu’un et le tour était joué. Elle se sentait mal, après tout rendre un ventre vide n’était pas très agréable. Il ne fallait pas abuser des bonnes choses, c’était connu. Elle alla par la suite se rincer la bouche au robinet non loin d’elle. Le moins que l’on pût dire c’était que son meilleur ami l’aurait vu dans les situations qu’elle considérait comme les plus embarrassantes. Manquerait-il qu’il la voit pleurer et ils auraient faits le tour. Ce n’était décidément pas sa journée. Vraiment pas. Elle hésitait sur la manœuvre à suivre. Tout son être lui criait de partir, elle n’avait qu’à courir jusqu’à ce qu’elle n’en puisse plus et pourquoi pas prendre un taxi qui la ramènerait jusqu’à chez elle. Mais sa tête lui sommait de rester et d’avoir une discussion sérieuse, autant qu’il en était possible avec Jacek. Il était temps. Elle ne pourrait pas toujours se défiler. Elle resta quelques instants à fixer les tombes, réfléchissant, signe qu’elle revenait peu à peu à son état normal et elle n’aimait pas ça. Elle n’avait plus aucune excuse désormais pour fuir le face à face avec le brun à qui, elle le savait, elle devait quelques explications.
Elle soupira puis alla s’asseoir devant Jacek d’une démarche branlante. Elle avait beau retrouver progressivement un état d’esprit convenable, elle n’en avait pas pour autant l’esprit clair. « Je suppose que tu veux parler. » dit-elle simplement, en grimaçant quelque peu, un concert de rock avait lieu dans sa tête. Les revers des excès et ce n’est que le début Honey. « Je t’écoute. » Elle porta son regard sur le brun et tenta de se concentrer sur son visage pour éviter de partir dans des délires dont elle seule en avait le secret. Puis elle partit d’un rire incontrôlable. Quand je vous disais quelle n’en était pas encore complètement sortie. Son sérieux ne serait que par phase et je me demandais bien comment Jacek allait gérer tout cela. Je lui souhaitais bon courage d’avance. |
| | | | Jeu 24 Mai - 19:16 | |
| L’amitié est-elle comparable à de l’amour ? Bien des personnes vous répondront que non, et sans doute que s’il était amené à ce qu’on lui pose la question, Jacek, après un léger temps de réflexion, abonderait également dans ce sens. Ce n’est pas comparable. Les sentiments sont plus forts, en termes d’amour, selon beaucoup de gens. Mais on peut reconnaître aux deux « états » des points communs. La multiplicité, tout d’abord, soit le fait qu’il existe différentes formes d’amour comme d’amitié. Et puis, aussi le fait de ne pas être seul, de se penser et se préoccuper de quelqu’un. To care. Jacek, en observant Lera, qui semblait être plutôt calme pour le moment, se demandait comment on pouvait bien tomber amoureux de quelqu’un comme elle et de le supporter tous les jours. Il adorait et aimait Lera, mais pas de cette manière-là. Et même s’il s’accrochait, il trouvait loin d’être facile de toujours être présent pour elle, et mesurait sa chance d’avoir obtenu de la génétique un caractère si patient. Si lui, en tant que meilleur ami, avait déjà parfois du mal, il n’osait même pas imaginer ce qu’il pouvait en être de la personne qui aurait des sentiments encore plus forts à l’égard de la blonde. Parce que même s’il tenait énormément à elle, il fallait lui reconnaître certains défauts, qu’elle mettait plus ou moins en avant. Mais là n’était pas la question.
Il n’y avait pas prêté vraiment garde, mais ce ne fut qu’après coup qu’il se rendit compte qu’elle était parfaitement calme. Elle avait même l’air… là. Pas partie dans un délire quelconque, pas en train de rire comme elle l’avait fait durant le court trajet qu’ils avaient réalisé dans les allées du cimetière. Elle semblait pleinement consciente de ce qu’elle faisait dorénavant, que lui n’affichait pas une tête des plus réjouies, loin de là, et elle préférait donc sans doute s’abstenir de s’enfoncer encore davantage. Mais Jacek ne savait pas combien de temps cela durerait. Et les faits qui suivirent de près cette réflexion prouvèrent qu’il n’était certainement pas dans le faux.
Elle s’éloigna subitement, alors que le jeune homme s’interrogeait de nouveau sur ce qu’il se devait de faire, à présent. Il ne put pas détacher ses yeux d’elle et ne fut donc pas en mesure de réprimer une grimace de dégoût en l’entendant régurgiter tout son estomac. Ou du peu de ce qu’il voyait, de tout le liquide – certainement alcoolisé – qu’elle avait ingurgité auparavant et qui ressortait à présent. Pour se détacher de la scène peu ragoutante, le brun s’efforça de calculer depuis quand sa blonde de meilleure amie n’avait pas mangé, puisque son estomac semblait vide de toute nourriture ingérée. Un bon moment déjà. Il nota l’information mentalement, songeant qu’il lui faudrait certainement la forcer à ce faire, en plus du reste. Il ne savait pas d’ailleurs encore comment il allait agir, par la suite. Il n’avait pas bien conscience de l’importance de la dépendance de Lera à la drogue, et n’était pas certain de vouloir le savoir. Il ne pourrait pas vraiment la forcer à faire quoi que ce soit, mais était convaincu de tout de même être en mesure de lui faire comprendre certaines choses. Mais il se décida rapidement à se concentrer à nouveau sur l’instant présent, puisque Lera nécessitait toute son attention. Surtout dans l’état dans lequel elle était.
Se rinçant la bouche grâce à l’eau courante du robinet, heureusement situé non loin d’eux, elle se figea, ses yeux perdus dans le vague. Hésitant un instant, elle revint finalement vers le Polonais, dans un piteux état. Elle n’était pas en forme, et c’était même peu de le dire. Mais il allait devoir faire avec. S’installant en position assise, face à Jacek, elle leva les yeux vers lui. Il ne bougea pas d’un iota, son esprit encore trop embrumé des diverses informations qu’il avait à traiter et de la marche qu’il se devait, en tant que meilleur ami, de suivre en de telles circonstances. Sauf qu’il n’avait aucune idée de ce qu’il devait faire. Pas la moindre. Mais Lera mit fin à ses interrogations mentales en s’adressant à lui : « Je suppose que tu veux parler. » Dans une autre situation, il aurait pu en rire, peut-être. Mais malgré le faciès grimaçant de la demoiselle, Jacek mesurait le sérieux de ses propos. Il n’était absolument pas au courant de ce qu’il arrivait lorsque l’on se droguait. Pour lui, c’était même incroyablement surprenant que Lera ait une telle présence d’esprit. « Je t’écoute. » Ses yeux plantés dans ceux du brun, il réfléchit un instant à ce qu’il allaiy lui dire. Il était partagé entre être honnête maintenant ou attendre qu’elle ne soit plus en train de planer. Ce fut son rire, plutôt strident, qui l’aida à se mettre au clair. Quoi que le jeune homme puisse lui dire, cela rentrerait très certainement par une oreille pour ressortir par l’autre. Le fou rire incontrôlable de la blonde en était la preuve. Elle se tint d’ailleurs bientôt les côtés, embarquée dans un délire dont elle était la seule à savoir le secret et la raison. Elle n’était certainement pas en état de discuter, et Jacek ne tenait pas vraiment à lui dire ce qu’il pensait de tout ça deux fois aussi sérieusement. Il le pouvait, bien entendu. Mais cela ne servirait à rien, pour le moment.
Il finit par s’asseoir à un mètre de Lera, résolu à attendre que son fou rire cesse. Mais il dura de longues minutes encore, et Jacek commençait même à s’inquiéter pour la respiration de la blonde quand elle s’arrêta aussi soudainement qu’elle avait commencé. Mais ce ne fut que de courte durée, et elle eut même assez d’esprit pour en faire un jeu. S’arrêter brusquement en plein fou rire en provoquait un nouveau. Combiné à ce qu’il devait se passer dans sa boîte crânienne, Jacek se fit la réflexion qu’il n’était pas sorti de l’auberge, à ce rythme-là. Mais, même si son calme dominait, une partie de lui était encore légèrement énervée contre Miss Vilte, sur ce qu’elle faisait de sa vie même si techniquement, cela ne regardait qu’elle. Alors il la laissa délirer pendant une bonne dizaine de minutes, observant parfois le paysage, patient. Il pensa tristement qu’elle était sans doute très jolie lorsqu’elle riait véritablement et quand elle n’était pas sous l’emprise de drogues. Mais ce n’était pas le cas.
« Nous parlerons plus tard. » Finit-il par déclarer, entre deux fous rires de ladite demoiselle qui redevenait progressivement dans un état plus ou moins normal. Elle se calma instantanément, et ses yeux un peu perdus, accrochèrent aux prunelles chocolat de Jacek. Il ne savait pas s’il avait en face de lui sa meilleure amie ou la droguée, même si les deux ne formaient qu’une seule personne. Il n’était pas en mesure de le dire, ni d’agir correctement. Il ne détacha pas son regard d’elle, estimant qu’il était encore trop tôt pour envisager de prendre un taxi et de la ramener. Puis, malgré qu’il se pouvait très fortement qu’elle ne lui réponde pas sérieusement, ni même du tout, il lui demanda finalement : « Pourquoi tu fais ça, Lera ? » Son ton n’avait pas une once de reproche, empreint de neutralité, ainsi que d’une certaine curiosité. Après tout, si elle daignait lui répondre, même si ce n’était pas vraiment elle, il était possible qu’il apprenne quelque chose. Quelque chose qu’elle ne se serait pas résolue à dire si elle était « clean ». Il n’avait pas de grandes chances à cela, mais comme de toute manière il préférait encore attendre un peu, autant essayer d’obtenir d’elle quelques réponses, plus ou moins laborieuses et véridiques. |
| | | | Jeu 14 Juin - 15:12 | |
| Elle rit. Encore. Durant de longues minutes. Elle donnait l’impression de ne plus pouvoir s’arrêter. Ou de ne pas vouloir. Puis elle se tut. Un silence s’installa. Un silence de mort. Ces silences qu’elle n’avait jamais supportés. Cela lui rappelait bien trop sa maison à Nashville alors que son beau-père venait se tirer avec sa secrétaire siliconée. Alors que sa mère se cloitrait dans sa chambre. Sourde. Muette. Morte de l’intérieur. Alors Lera rit de nouveau. Il n’y avait rien de drôle. Mais cela lui était nécessaire. Elle ne voulait pas plonger dans ces souvenirs dont elle tentait vainement de se débarrasser. Fantômes perfides qui s’accrochaient désespérément à elle. Elle s’arrêta. Elle fit cela à plusieurs reprises. On eut dit un interrupteur sur lequel on appuyait. On. Off. Allumer. Eteindre. Vivre. Mourir. Choix qu’elle n’avait jamais pu faire. Coincée entre les deux. Incapable de prendre une décision définitive. Elle attendait. Encore et toujours. Quelque chose qui ne viendrait sûrement pas. Quelque chose dont elle ignorait la nature. Lâche. Bien trop lâche pour aller contre le courant. C’est tellement plus simple. « Nous parlerons plus tard. » La voix de son meilleur ami l’a sortit de la contemplation de ses mains. Elle était si lointaine, comme signifiant le gouffre qui séparait ces deux êtres. Ils étaient et appartenaient chacun à des mondes différents. Personnellement, je n’arrivais toujours pas à comprendre comment ils avaient pu être amis et encore moins meilleurs amis. C’était insensé mais pourtant vrai. Ils n’avaient, à mon sens, rien à faire ensembles. Souvent, Lera se faisait d’ailleurs cette réflexion. Non pas qu’elle détestait sa relation avec Jacek, bien au contraire, néanmoins elle restait intimement persuadée que jamais leur routes n’auraient dû se croiser. Il aurait pu continuer sa vie sans trainer avec lui un poids mort. En fait, il aurait dû la laisser crever dans cette ruelle mal fréquentée. Elle n’aspirait à rien de mieux mais il avait fallu que son âme de bon samaritain le pousse à lui venir en aide. Souvent aussi, elle le détestait pour sa gentillesse. Elle n’en avait pas l’habitude et supportait très mal les sentiments que cela animait en elle. Pour la blonde, c’était à cause de lui que son bouclier avait commencé à se fissurer peu à peu, qu’elle s’était de nouveau attacher à des gens et pour ça, elle lui en voulait terriblement. Elle aimait la personne qu’elle était avant, froide, distante et sans cœur. Le mélange parfait pour mener une existence paisible. Une poupée de cire. Voilà ce qu’elle désirait être.
Lorsque les mots du brun eurent enfin une signification dans son cerveau drogué, elle cessa de rire sur le coup et se perdit dans le regard de Jacek. Enfin, perdue elle l’était déjà. Abandonnée sur le bord d’une nationale en pleine nuit sans lumière pour se repérer. Elle sombra dans ces abysses chaleureux avec délice. « Pourquoi tu fais ça, Lera ? » Elle eut un léger sursaut et pencha la tête sur le côté avant de sourire. Un sourire aussi froid et fragile qu’elle l’était. Cette question, elle la comprit immédiatement. Les mots ne trouvaient aucune traduction dans son esprit mais pourtant elle sut. Etait-ce l’intonation de la voix de Jacek ? Ou ce regard inquiet qui lui lançait ? Ou bien les deux ? Sans doute. « Je n’ai plus rien à perdre. » Son ton calme, posé, ne trahissait en rien ce qu’elle ressentait. D’ailleurs ressentait-elle quelque chose en ce moment précis ? J’en doutais réellement. Ce qu’elle avait consommé semblait avoir anesthésié la partie réservée aux émotions de son cerveau. Ah, dieu qu’elle aimait cette sensation que plus rien ne comptait pour elle. Poupée de cire. Poupée désarticulée. Broken. Plus rien n’avait réellement d’importance pour elle, du moins c’était ce en quoi elle essayait de croire. Le temps s’était stoppé il y a quatre ans. Son cœur aussi par la même occasion. Semi-morte. A quoi bon se soucier des choses et des gens ? Tel un zombie elle déambulait d’une démarche bancale parmi ses pairs, sans réellement les voir et être vue, à la recherche d’un quelconque moyen de se briser un peu plus. Se complaire dan sa destruction. Masochiste par excellence. Dieu que c’était fascinant.
« Dis, si un chat retombe toujours sur ses pattes et une tartine beurrée retombe toujours du côté du beurre, que se passe-t-il si on attache une tartine beurrée sur le dos d’un chat et qu’on les jette par la fenêtre ? » demanda brusquement Lera avec un sérieux ahurissant. On eût qu’il eût s’agit d’une question existentielle et d’une importance capitale. Elle fronça et prit un air des plus sérieux, tentant de répondre à sa question par-elle-même. Ca y est, elle était repartie dans ses délires. Sa clarté d’esprit arrivait par intermittence, tout comme son désir de se reconstruire et de reprendre sa vie où cette dernière s’était arrêtée. |
| | | | Jeu 14 Juin - 20:25 | |
| Lera sursauta à l’entente de mes propos, manifestement surprise que son meilleur ami lui adresse à nouveau la parole et de façon moins douce qu’auparavant, plus neutre. Un sourire anima les lèvres tremblantes de la blonde, fragile, mais tout aussi froid que de la glace. Jacek ne savait pas ce que cela signifiait, si la blonde prenait pleinement conscience de la situation, du sens de la phrase qui venait de lui être adressée. Il n’en avait pas la moindre idée, et se demanda un instant si cela avait de l’importance. Tout dépendrait de sa réaction, il supposait. N’ayant jamais expérimenté les effets de la drogue dans son organisme, le Polonais était bien incapable de savoir ce qui se passait en cet instant dans le cerveau de Lera, ni même de savoir si la drogue l’emportait dans une réalité toute autre ou parfois reliée au présent. Quand reviendrait-elle la Lera qu’il connaissait ? Cela dépendait certainement de la dose qu’elle avait prise, et du type de drogue ; ce genre d’informations qu’il ne possédait. Du moins, n’ayant aucune certitude, il dût se faire à cette version. La situation lui échappait complètement, à son plus grand désespoir. Il ne savait pas comment il se devait d’agir. Comme un ami, un meilleur ami, qui plus est. Mais qu’est-ce que cela supposait ? Lera était majeure et menait bien sa vie comme elle l’entendait. Ce qui n’empêchait pas le jeune homme de vouloir la remettre sur les rails, même si cela allait certainement prendre du temps.
« Je n’ai plus rien à perdre. » La voix de la jeune femme le sortit de ses pensées qui l’emmenaient plutôt loin. Il mit un certain temps avant de complètement prendre conscience de la portée de ces paroles, de les assimiler. Plus rien à perdre. Sa voix, contrairement à son précédent semblant de sourire, ne vacillait pas, comme énonçant une vérité, ou ce qui semblait à Lera une vérité. Parce que pour Jacek, elle avait sans aucun doute quelque chose ou quelqu’un à perdre. La réponse de la demoiselle resta comme suspendue dans l’air, se répétant plusieurs fois dans le cerveau du brun. Il avait posé cette question tout haut dans le but de savoir s’il était possible qu’il obtienne des informations malgré ou grâce à l’état de Lera. Il n’était dorénavant plus aussi certain de vouloir savoir. Ce que l’on ignore ne peut pas nous faire de mal, après tout. Et même si Jacek n’y croyait pas une seconde, la situation y prêtait plutôt bien, même si sa curiosité l’emporterait certainement encore.
Brusquement, la blonde reprit la parole, mais sur un registre complètement différent : « Dis, si un chat retombe toujours sur ses pattes et une tartine beurrée retombe toujours du côté du beurre, que se passe-t-il si on attache une tartine beurrée sur le dos d’un chat et qu’on les jette par la fenêtre ? » Jacek ne chercha même pas à cacher la surprise que trahissait son faciès, étonné que Lera arrive à sauter du coq à l’âne mais à se faire une réflexion plutôt recherchée, pour quelqu’un supposé planer. Il ne doutait pas que les capacités intellectuelles de Lera ne soient certainement pas nulles, mais tout de même. Une fois le choc – bien que moindre –, passé, il réfléchit durant quelques secondes sur la réponse qu’il allait lui apporter. Il lui devint alors évident que, comme à son habitude, il lui répondrait patiemment et tout aussi honnêtement que si Lera avait énoncé son interrogation dans un état normal. Parce que le naturel revient toujours au galop, et que dans pareille situation, Jacek savait pertinemment qu’il ne servait à rien de le chasser. De plus, il avait déjà eu à affaire à pire de la part de la blonde en termes de conversations plutôt délirantes. Ce ne serait qu’une fois de plus. « Je pense que la tartine, étant attachée au chat, ne touchera pas le sol, et que puisque le chat est plus massif, c’est lui qui l’emporte. Le chat risque donc de retomber sur ses pattes, et la tartine de rester accrochée. Toutefois, tout dépend de l’état du chat, de la façon dont est attachée la tartine et de l’étage depuis lequel tu les jettes. » Il ne poussa pas sa réflexion plus loin, espérant que cela satisferait Lera. Laquelle lui donna confirmation de ses pensées en hochant la tête d’un air grave, comme s’il s’agissait d’une question de vie ou de mort. Jacek ne doutait pas que le sujet ne tarderait pas à changer d’ici peu, selon que le cerveau de la demoiselle décide de ce qui allait suivre en termes de discussion. Peut-être était-ce son tour de poser une question. Il n’en savait trop rien. Mais puisque les interrogations défilaient sans trop de peine dans son esprit, il se tenta tout de même à en risquer une, absolument pas certain pour autant d’obtenir une réponse. « Que penses-tu que l’on dirait si l’on te perdait, toi ? » Sa formulation n’était peut-être pas correcte, mais s’il se corrigeait, il risquait plus de perdre Lera qu’autre chose, qui ne serait pas le moins du monde attentive à ce qu’il pouvait dire. Sa curiosité se manifesta de nouveau, tandis qu’il attendait patiemment de voir si la blonde resterait encore un moment assise en face de lui, à discuter ou non, ou si elle allait subitement se lever. Curieux également de ce qu’elle allait lui répondre si elle s’y décidait, de ce qu’il pourrait en conclure, des réponses qu’il pouvait avoir ou non. Sa question, à cet instant, n’avait pas tellement d’importance, après tout, puisqu’il ne pouvait pas mesurer la véracité des réponses, et qu’il allait tout de même devoir avoir une conversation sérieuse avec Lera une fois qu’elle serait pleinement revenue sur Terre. Mais pour le moment, cela satisfaisait sa curiosité tout en occupant Lera. Quel mal y-avait-il donc à cela ? |
| | | | | | | | Lies are made to be discovered ₪ Lera & Jacek | |
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