je regardais mon appareil photo du coin de l’œil. Depuis que j’étais arrivé, il n’avait pas bougé. Sauf quand j’avais voulu faire du tri. Mais j’avais vite laissé tomber, il était bourré de photographies d’Edda. C’était toujours difficile, mais pourtant, peu à peu je faisais le deuil, ça faisait maintenant deux mois qu’elle était morte et que j’avais quitté New York. Mine de rien, ça m’avait fait beaucoup de bien. Tellement de bien que… plus je regardais cet plus j’avais envie de le tenir dans mes mains, envie de reprendre des photos, envie de retrouver cette envie. Envie de faire quelque chose de beau. Envie de me noyer dans ce que j’avais toujours fait de mieux. Oui, j’avais envie de tout ça. J’attrapais mon appareil photo et le retournais entre mes mains. Des frissons me parcouraient plus ou moins. Un petit sourire se dessina sur mon visage. J’étais prêt. J’enfilais ma veste et mon appareil dans les mains, comme un objet précieux – et finalement, il l’était – je m’apprêtais à quitter l’appartement. Je rebroussais soudain chemin, je trouvais une feuille et griffonna « parti faire des photos. je veux manger viet’ ce soir. c’est toi qui commande. » Papier que je laissais sur le lit de Lera. J’osais croire que ça lui ferait plaisir de savoir que j’étais enfin reparti faire des photos. C’était un grand pas pour moi, je me doutais qu’elle le savait. Une cigarette coincée entre les lèvres, je me dirigeais vers Union Square et vers le seul immeuble dans lequel le toit était ouvert à tous. C’était assez rare et c’était donc réputé que le toit de cet immeuble était ouvert ; tout le monde le savait par ici. Même moi, fraichement débarqué. Arrivé en haut, l’air frais me fouettais le visage. J’avais la sensation de ne pas être seul, mais je ne prêtais pas plus d’attention et ne regardais pas les recoins du toit. Trop obnubilé parce que j’allais enfin faire : revivre. Je portais mon appareil photo près de mon visage et commençais à prendre quelques photos de tout le paysage qui m’entouraient. L’adrénaline était de retour en moi, c’était tellement bon. Je fis un tour à 180° et dans mon objectif se dessina une silhouette qui me sembla trop proche du vide. Je posais mon appareil photo au sol et plissa les yeux. je n’avais pas rêvé, il y avait une fille à en juger la longue chevelure brune au bord du toit. Je m’approchais doucement, pour ne pas qu’elle m’entende et qu’elle soit effrayée. Plus je me rapprochais plus je la reconnaissais. Et soudain, je la distinguais très clairement. Putain mais cette fille c’est vraiment la reine des connes ! Je lâchais un soupire. Pourquoi est-ce qu’il fallait que je retombe à nouveau sur Ambre ? Qu’est-ce que j’avais de mal pour qu’on me punisse ainsi ? Est-ce qu’elle avait vraiment l’intention de faire ce que je croyais ? « Eh ! » je lâchais. Merde, pourquoi j’avais parlé ? J’aurais très bien pu faire demi-tour, ramasser mon appareil et rentrer chez moi. Oui, d’instinct, je savais que c’était ce que j’aurais du faire… « Dis… tu veux pas reculer ? Enfin, genre… si tu tombes et que quelqu’un apprend que j’étais là, c’est mort on va croire que je t’ai poussé. Et j’ai vraiment pas besoin d’une autre morte sur les bras. » Dans le même temps je m’approchais doucement, un bras tendu pour qu’elle attrape ma main. « Ambre, s’te plait, recule. » lançais-je, étonnement sérieux.
Ambre était dans son lit, comme tous les jours, comme tous les soirs. Jax l'obligeait à manger un minimum et à se balader dans l'appartement. Il se doutait que quelque chose s'était passé, elle ne disait rien. Elle ne voulait plus parler. Elle ne voulait qu'une seule et unique chose, elle était irréalisable. Elle voulait ne pas être allée dans cette boite de nuit, ne pas avoir prit ses pilules, ne pas être sortie, ne pas avoir tué ce mec. Impossible. C'était trop tard, elle le savait, elle avait constaté de ses propres yeux qu'elles l'avaient bien tué. Depuis ça, elle ne pensait qu'à une seule chose. Une chose qui l'obsédait, l'empêchait de dormir ou de faire quoi que ce soit. Pour la première fois dans sa petite vie, elle pensait à la mort qu'elle pensait être la meilleure échappatoire. A chaque fois qu'elle fermait les yeux elle se voyait en train de le tuer, riant aux cotés de Lera. Elle se rappelait le sang sur elles, le fait qu'elles aient dansé après avoir fini. Elle ne se reconnaissait pas dans cet acte, elle savait que c'était la faute de la drogue, mais elle devait être responsable tout de même. Jax était sortit, elle ne savait pas où et elle s'en foutait. Bientôt, elle ne les reverrais jamais, personne. Ambre attrapa un bout de papier et un crayon, dans une situation comme ça elle se devait de s'expliquer un minimum. « Je vous aime tous, j'ai pas pu c'est tout. D'après la Bible je vais aller en enfer alors, adieu j'imagine. » Rien de plus rien de moins, la lettre de suicide la plus bidon du monde. Mais effectivement, Ambre est croyante et pense donc aller en effet puisque le suicide est un pêché. Et puis, faut pas déconner, vu tout ce qu'elle a fait dans sa vie, elle s'imagine mal atterrir au paradis la bouche en cœur. Elle réfléchissait à comment elle allait procéder depuis qu'elle en avait eut l'idée, quelque heures après son crime. Elle n'avait pas d'armes, elle ne pouvait pas faire ça chez elle au cas où Jaxton rentre à l'improviste. Non, elle devait faire ça loin de tous les gens qu'elle connaissait, personne ne l'en empêcherait. Ambre n'allait pas poster un message sur facebook comme toutes ces gamines, elle allait juste le faire et disparaître comme elle le souhaitait. Elle se mit en route, se regardant pour la dernière fois dans un miroir – qu'elle avait évité durant tout ce temps -. Elle se trouvait horrible, d'énormes cernes foncés, les os qui sortent, le teint pale. Elle était déjà morte physiquement. Il fallait finir le boulot. Ambre enfila un veste par dessus un simple t-shirt et un jean. Dans la rue il n'y avait pas grand monde, il se faisait tard et le temps se refroidissait. Un immeuble de Union Square, ouvert au public. Il n'y aurait surement personne, tant mieux. Elle se retrouva vite en haut, elle regarda la vue. C'était beau, elle n'arrivait même pas à l'apprécier. Tout était devenu fade pour elle, plus rien ne pourrait la faire changer d'avis. L'italienne s'approcha du vide, les pieds juste au bord. Elle n'eut pas le vertige, tout était calme dehors ainsi que dans son esprit. Quelqu'un était sur le toit, elle avait entendu du bruit, du moment qu'il ne la voyait pas elle s'en fichait. « Eh ! » Putain, on l'appelait, une voix de mec. Ambre se retourna et découvrit la dernière personne qu'elle voulait voir, ce bon vieux Jim. C'est bien il allait pouvoir se foutre de sa gueule en la regardant tomber, elle ferait plaisir à quelqu'un ce soir au moins. « Dis… tu veux pas reculer ? Enfin, genre… si tu tombes et que quelqu’un apprend que j’étais là, c’est mort on va croire que je t’ai poussé. Et j’ai vraiment pas besoin d’une autre morte sur les bras. » Évidemment, il fallait qu'il lui envoie des pics. Elle le regarda, blasée, elle s'en foutait pas mal et ne comptait pas reculer. Jim s'approcha en tendant le bras. Mais qu'est-ce qu'il foutait ce con ? Il allait quand même pas essayer de la sauver non ? « Ambre, s’te plait, recule. » Wow.
- Jim, t'as pas autre chose à foutre ? Laisse-moi faire mon truc et barre-toi, fais comme si tu m'avais pas vu ok ?
Qu'il se barre vite, vite, vite. Elle allait sauter sous ses yeux s'il ne se décidait pas à partir.
« They told me not to be sad, it is just a matter of time. » ► AARON
Je regrettais déjà d’avoir ouvert la bouche. Je regrettais d’avoir décidé de venir ici. Je regrettais d’être là. C’était clair et net que maintenant, je ne pouvais plus partir. J’étais totalement impliqué dans cette pseudo-tentative de suicide. Et forcement, il avait fallu que ce soit celle d’Ambre. Je n’avais aucune envie de l’aider ELLE. Mais je savais aussi que je n’avais plus d’autre choix. Je ne pouvais plus m’éloigner. Je savais déjà que ça me pèserait dans l’avenir. Encore plus s’il s’avérait que cette idiote avait finalement sauté. Il fallait vraiment être au bout pour en arriver là. Le suicide n’était pas une chose que je tolérais. Par croyance ? Pas vraiment. Pas conscience surtout. Je ne pouvais pas imaginer que quelqu’un puisse faire ça. C’était une forme de lâcheté ? Peut-être… En vérité je n’arrivais pas vraiment à savoir ce qui me déplaisait dans cet acte. Même après la mort d’Edda, dont je m’étais toujours senti coupable, je n’en étais jamais arrivé là. Ça ne m’avait jamais traversé l’esprit ; et je savais qu’il n’avait aucune chance que j’en arrive là un jour. Pour le peu que je la connaissais (vraiment peu, finalement) Ambre m’étais apparue comme une fille forte – stupide, mais forte – et avec la tête sur les épaules. À sa façon : ridiculement en emmerdant le monde. Mais quant bien même j’avais eu l’impression qu’elle n’était pas le genre de personne à finir au bord du vide prête à faire le grand saut. Je la voyais soudainement différemment. J’avais presque de la compassion pour elle. Pas de la pitié, il y avait peu de chance qu’une fille comme elle puisse attirer ma pitié ; et j’aurais même parié qu’elle n’en aurait pas voulu. Non, juste de la compassion pour cette fille prête à tout pour en finir. Je m’étais un peu rapproché pendant que je lui parlais. « Jim, t'as pas autre chose à foutre ? Laisse-moi faire mon truc et barre-toi, fais comme si tu m'avais pas vu ok ? » Je soupirais. « Putain, mais c’est quoi votre problème à vous les mannequins ? Pourquoi faut toujours que vous ayez un pète au casque ? Vous êtes fatigantes, j’te jure. » lançais-je. Ça m’avait échappé, parce que je le pensais vraiment. Je crois qu’il devait y avoir un test fait à toutes les mannequins quand elles commençaient sur « à quel point êtes-vous totalement secouées ? » Aucune n’échappait jamais à la règle visiblement. J’étais presque intrigué de comment elle avait pu en arriver là, ce qui avait fait qu’elle était arrivé à la conclusion qu’il n’avait plus d’autre espoir. Je la regardais de haut en bas, elle était plus maigre que jamais. « Franchement… si tu veux mourir… Attends encore deux-trois jours. T’es tellement squelettique qu’à mon avis t’es bousillée de l’intérieur. Ça devrait plus être très long. » Je laissais un petit silence de quelques secondes, pour réfléchir. « Ouais, on a qu’à dire que tu fais ça, ok ? T’oublie de te jeter d’un immeuble, on reprend chacun nos vie et tu crèves un autre jour, ça te va ? Moi personnellement, ça m’arrange, j’ai déjà pleins de trucs à faire ce soir. » Je n’avais jamais su parler aux gens, c’était pas aujourd’hui que j’allais commencer. Pendant que je faisais mon monologue et qu’Ambre ne me regardait pas, j’en profitais pour continuer d’avancer vers elle. Il fallait que je m’approche le plus doucement possible mais le plus vite possible pour l’empêcher de faire n’importe quoi.
Si elle se retrouvait au bord du vide ce soir ce n'était pas seulement à cause d'une seule nuit. C'était tout une vie de merde accumulée peu à peu. A rester forte, à paraître forte surtout, elle avait fini par craquer. Luca, lui courir après pendant dix-huit ans sans jamais réussir à l'avoir. Elle avait passé presque toute sa vie à l'attendre et maintenant plus rien, il était partit et surement pour de bon. Elle tentait de l'oublier depuis, elle savait qu'elle ne finirait jamais avec lui. Après tout ce temps elle avait enfin comprit que ce n'était plus la peine de se battre pour lui et de supporter de le voir avec d'autres filles. Jared aussi, cette histoire l'avait bien enfoncée. Quelle conne elle avait été, lui faire croire qu'elle était enceinte avait été la seule idée qu'elle avait eut et elle était plus que mauvaise. Pourquoi quelqu'un resterait avec elle si ce n'est par obligation ? En l'occurrence Ambre savait qu'un bébé était une obligation et qu'il n'était pas un connard, qu'il ne l'aurait pas laissée seule avec un enfant, son enfant. Avec lui elle avait eut un semblant de bonheur, elle s'était attachée à lui, elle aurait presque été prête à changer pour lui. Malheureusement leur relation était basé sur un mensonge et jamais elle n'aurait put marcher pour cette raison. Lui aussi était partit, elle s'était retrouvée seule. C'est là qu'avait commencé l'anorexie. Travailler dur et donc arrêter de manger. Faire la fête la nuit, se défoncer de trop pour tout oublier. Ça avait marché, certes son état de santé se dégradait de plus mais elle n'était pas au fond du gouffre non plus, elle savait qu'elle pouvait s'en sortir si elle le voulait. Ambre avait continuer à rester forte malgré tout. Ce qu'elles avaient fait, Lera et elle, avait été la chose de trop. Il était impossible pour elle d'oublier ce qu'elle avait fait et de se le pardonner. Mourir était donc la meilleure solution, plus de remords, plus de jugements, rien, le néant total. Il n'y aurait plus Jim à coté d'elle pour essayer de l'empêcher de se suicider. « Putain, mais c’est quoi votre problème à vous les mannequins ? Pourquoi faut toujours que vous ayez un pète au casque ? Vous êtes fatigantes, j’te jure. » C'est ça, enfonce-moi un peu plus je suis pas à ça près, pensa-t-elle. Ambre ne répondit rien, il n'en valait pas la peine. « Franchement… si tu veux mourir… Attends encore deux-trois jours. T’es tellement squelettique qu’à mon avis t’es bousillée de l’intérieur. Ça devrait plus être très long. » De mieux en mieux ! Au moins il était franc et n'essayait pas de lui remonter le moral comme n'importe qui l'aurait fait. « Ouais, on a qu’à dire que tu fais ça, ok ? T’oublie de te jeter d’un immeuble, on reprend chacun nos vie et tu crèves un autre jour, ça te va ? Moi personnellement, ça m’arrange, j’ai déjà pleins de trucs à faire ce soir. » Elle s'était mise à pleurer sans s'en rendre compte, tant pis, c'était pas la fin du monde que quelqu'un la voit comme ça, elle était déjà dans un sale état. L'italienne se tourna vers lui, il s'était approché le con. Elle leva un pied au dessus du vide.
- Recule. Vite.
Elle était fatiguée de tout ça, de ce monde où on ne peut même pas crever en paix.
- S'il te plait, j'te le demande gentiment, pars. T'en as rien à foutre que je meurs ou pas alors casse-toi. J'pensais que tu serais content. Je suis qu'une mannequin débile après tout, pas unique ni rien. T'oublieras vite que je suis plus là alors pars.
Toujours le pied au dessus du vide, son équilibre l'étonnait elle-même.
- Jim..
Ambre se serait presque mise à genoux pour qu'il parte si cela n'impliquait pas la possibilité qu'il l'écarte du vide.
« They told me not to be sad, it is just a matter of time. » ► AARON
Quoi qu’il puisse se passer dans la tête d’Ambre à ce moment, je n’avais plus qu’une option : l’empêcher de sauter. D’accord je ne l’aimais pas et c’était réciproque, mais je n’étais pas insensible au point de la laisser se foutre en l’air – au sens propre. Et je savais depuis la seconde où je l’avais reconnu que je n’avais plus le choix et que je devais tout faire pour la dissuader. Sauf que ce genre de truc ce n’était pas mon fort. Pas du tout. Je n’étais pas fait pour aider les gens. Enfin si, mais juste ceux que je connaissais et que j’appréciais. Ambre n’entrait dans pratiquement aucune de ces deux catégories. Il m’était difficile d’être avec elle comme avec quelqu’un que j’aimais bien, puisque la dernière fois qu’on s’était croisé, je l’avais pratiquement étranglé. Pourtant aujourd’hui, j’avais l’impression d’une autre personne devant moi. Une autre Ambre. Bien sur c’était plus qu’une impression. Mais c’était une Ambre que je n’aurais jamais pensé connaitre. Je me disais que finalement, elle était comme tout le monde, elle faisait semblant d’aller bien. Et comme moi ; elle divaguait, souriait et visiblement souffrait. C’était un peu compliquer d’assumer que peut-être elle et moi avions quelques points communs. Je m’étais rapproché d’elle doucement, pour ne pas la brusquer et lui permettre de commettre l’irréparable. Ambre remarqua que je m’étais avancé. « Recule. Vite. » lança-t-elle, en levant un pied dans le vide. Sur le coup, mon cœur rata un battement. Putain mais c’est pas vrai, cette idiote va vraiment le faire ! « S'il te plait, j'te le demande gentiment, pars. T'en as rien à foutre que je meurs ou pas alors casse-toi. J'pensais que tu serais content. Je suis qu'une mannequin débile après tout, pas unique ni rien. T'oublieras vite que je suis plus là alors pars. » souffla Ambre. Dans sa voix sonnait comme un désespoir. Ok, je ne l’aimais pas mais je ne souhaitais pas non plus qu’elle meurt. Surtout pas devant moi, en fait. J’avais eu ma dose de fille morte. « Jim.. » Je n’arrivais pas à comprendre si elle me suppliait de partir ou si au contraire elle me suppliait de la sauver. Mais je penchais plutôt pour la première solution. « Ecoute, je sais pas ce qui t’arrive et entre nous, tu sais que je m’en fous. » soufflais-je, en continuant d’avancer doucement. C’est là que je remarquais qu’Ambre pleurait. Merde, pourquoi c’était toujours moi qui me tapais les filles dérangées ? J’essayais de réfléchir vite à ce qu’il fallait que je dise pour l’empêcher de sauter. J’essayais de chercher ce que toute personne normale aurait fait à mal place, mais c’était difficile et j’en avais pas la moindre idée. « Tu crois pas que t’as d’autres choses à faire ? J’imagine que t’as encore pleins de gens à faire chier avant ça. Et franchement, j’ai pu constater que tu faisais ça bien, alors ce serait bête de gâcher ce talent, tu crois pas ? » Encore un pas. J’étais maintenant assez près d’elle pour pouvoir la toucher si je voulais. Mais, vu sa maigreur, c’était pas impossible qu’en la touchant soit je la casse en mille morceaux, soit je la pousse pas inadvertance dans le vide… Peu de solutions s’offraient à moi. Je fis encore un pas, pour être derrière elle et je serrais mon bras autour de sa taille avant de la tirer avec moi en arrière de toutes mes forces pour qu’elle ne puisse pas se débattre et faire un geste maladroit qui l’aurait propulsé dans le vide. Une fois tous deux éloignés du bord, je lâchais un soupire de soulagement. Je retournais Ambre et la regardais droit des les yeux. Elle était livide mais plutôt jolie en fin de compte. « Même toi, tu mérites pas ça… » soufflais-je, sincère. J'aurais presque pu la serrer dans mes bras.
Si elle avait attaqué Jim à la base, lors de leurs « retrouvailles » sur la plage, ce n'était pas parce qu'il lui faisait pitié comme elle le lui avait expliqué. Elle connaissait son histoire, son point faible – Edda donc – et qu'il était facile à exploiter. Pas que surement. Elle peut vous dire que c'était parce qu'elle était de mauvaise humeur ou bien qu'elle s'ennuyait, ou juste qu'elle adorait faire chier son petit monde. Mais en fait, une petite partie d'Ambre avait perçu quelque chose chez lui, quelque chose qu'elle n'aimait pas du tout. C'était une partie d'elle, comme un miroir. Lorsqu'elle le voyait, elle se voyait aussi, se lamentant sur la départ de Luca comme il le faisait sur la mort d'Edda. Ce n'était bien sur pas comparable et ça énervait d'autant plus Ambre, l'entrainant toujours plus à penser qu'elle était vraiment faible pour finir dans une situation pareille à cause d'un mec qui n'était même pas mort contrairement à l'ex de Jim. Enfin ex.. on voyait bien que pour lui c'était toujours sa copine, comme si elle était encore là. Ambre voulait bel et bien mourir, elle était sure de son choix et elle ne comprenait donc pas pourquoi il essayait de l'empêcher de sauter. C'était sa décision, sa vie, pas celles de Jim. Bon, si elle avait croisé quelqu'un au bord du vide – et du suicide – elle aurait surement essayé de le dissuader. Jim ne l'aimait pas, elle ne l'aimait pas, ils ne se connaissaient même pas. Il l'avait presque étranglé et elle avait décidé de lui pourrir la vie lorsqu'elle l'avait vu. N'importe qui aurait put venir un touriste voulant voir la vue, des ados voulant jouer à frotti-frotta loin de leurs parents. Jamais elle n'aurait imaginer le voir ici, à ce moment là en tout cas, elle n'avait pas pensé une seule seconde qu'il soit là. Lera, Isys, Jaxton, elle y avait pensé. Et si ils arrivaient au moment où je vais sauter ? Heureusement ce n'était pas arrivé, malheureusement c'était lui. Elle aurait préféré voir un inconnu tenter de la sauver plutôt que cet imbécile. « Écoute, je sais pas ce qui t’arrive et entre nous, tu sais que je m’en fous. » Elle reposa son pied, à bout de force. Il continuait à avancer et elle ne voulait pas lui donner l'impression que c'était de sa faute, bitch mais pas méchante à ce point. « Tu crois pas que t’as d’autres choses à faire ? J’imagine que t’as encore pleins de gens à faire chier avant ça. Et franchement, j’ai pu constater que tu faisais ça bien, alors ce serait bête de gâcher ce talent, tu crois pas ? » Le fameux coup du « ta vie de vient que de commencer », oui, mais pour ce qu'elle en avait vu, ça lui suffisait largement. Néanmoins ce qu'il avait dit avait faillit la faire sourire, faire chier les gens était son activité favorite. Jim était tout près, elle voulait sauter, qu'il arrête d'essayer de la faire changer d'avis. Elle ne renoncerait pas de toute façon. Alors qu'elle s'était convaincue que c'était le moment où jamais de sauter, elle se sentit tirer en arrière. Il avait été plus rapide qu'elle. Ambre ne se donna pas la peine de se débattre, il était plus fort qu'elle. Il la tourna vers elle, l'italienne devait lever la tête pour le regarder dans les yeux, trop grand comparé à elle qui n'était déjà pas si petite que ça. « Même toi, tu mérites pas ça… » Elle le prit mal, pas parce que cela ne lui faisait pas plaisir, au contraire. Ambre recommença à pleurer sans tellement savoir pourquoi, elle voulait pousser Jim et retourner au bord pour sauter. Elle se débattit un peu, essayant de faire demi tour, sa force inexistante de l'aidant pas du tout. Elle abandonna rapidement, tout ça la fatiguait encore plus. Inexplicablement elle avait envie qu'il la serre dans ses bras, elle en avait besoin, elle recula pour ne plus être près de lui. Elle fixait le sol, trop honteuse pour le regarder dans les yeux.
- Tu peux y aller maintenant que t'as fait ta bonne action, tu dormiras en paix cette nuit.
S'il partait, elle sautait, il fallait être con pour ne pas le comprendre. Elle espérait vraiment qu'il l'était.
« They told me not to be sad, it is just a matter of time. » ► AARON
Je découvrais une toute autre Ambre. C’était étrange de me dire que je pouvais peut-être apprécier cette nouvelle fille là. Elle n’était pas hautaine, pas superficielle… elle n’était pas l’autre. Elle n’était pas Ambre de la plage. Cette fille que j’avais détestée avait disparu ce soir et même si cette brune en face de moi était au bout d’elle-même, elle me plaisait plus. Parce qu’elle ne jouait pas, elle ne jouait plus. Plus d’artifices, plus de faux-semblants. Juste une vraie personne. Je venais de me rendre compte que depuis que j’avais trouvé Ambre au bord du vide, je n’avais pas pensé à Edda. J’aurais pu sourire en d’autres circonstances. J’avais donc reculé de toutes mes forces, Ambre dans mes bras. Le temps d’une seconde j’avais eu peur que dans un faux mouvement, on bascule tous les deux du mauvais coté du toit. Lorsque mes deux pieds furent bien encrés dans le sol, je pu à nouveau respirer normalement. C’était fini, pas vrai. Ambre en face de moi, les deux pieds par terre, loin du vide. C’était comme une victoire. J’avais fait une bonne action finalement. Ambre se remit à pleurer. Ok. Elle baissa les yeux, fixant le sol. Qu’est-ce que je devais faire maintenant, partir ? Est-ce que tout était fini et qu’on allait pouvoir reprendre nos vies chacun de notre coté, sans jamais se recroiser ? C’aurait été une option qui m’aurait particulièrement plu, je devais bien l’avouer. La voix de la brune me tira de mes pensées. « Tu peux y aller maintenant que t'as fait ta bonne action, tu dormiras en paix cette nuit. » J’eus un petit sourire, pendant qu’elle était en pleurs. J’aurais vraiment eu envie de partir. Mais il était hors de question que je parte en la laissant sur le toit, je n’étais pas stupide. Sans trop savoir qui avait commandé cette action dans ma tête : je passais mon bras autour de ses épaules et la serra contre moi. Euh bon… ok… « Tu crois vraiment que je vais partir et te laisser sur le toit ? Non mais tu rêves. J’ai pas fait tout ça pour que tu te jettes du toit dans deux minutes. » lançais-je, pendant que je m’écartais d’elle. Je regardais les lumières de la nuit que l’immeuble surplombait. C’était beau, j’aurais vraiment pu faire de belles photos ce soir… Je passais à nouveau mon bras autour des épaules d’Ambre et l’entrainait avec moi vers les escaliers, pour quitter cet immeuble de malheurs. Arrivés en bas, sur le trottoir, nous n’avions toujours pas prononcé un mot. J’attrapais doucement son bras, pour ne pas le casser et l’entrainais avec moi, vers un marchand de sandwich ambulant. Je payais deux hot-dogs et lui en tendit un. « Mange. » ordonnais-je à l’ex-suicidaire. Pourquoi je faisais tout ça ? Pourquoi j’étais aussi gentil avec elle ? J’en avais pas la moindre idée. Mais je ne réfléchissais pas vraiment.
Ambre restait franche avec elle-même, Jim l'avait sauvé pour cette fois. Il n'y aurait pas toujours quelqu'un pour la surveiller, nuit et jour, Jax n'y arrivait déjà pas alors qu'il vivaient ensemble. Ils l'avaient tous laissé sombrer dans l'anorexie, quelle était la différence avec un suicide ? Il n'y en avait pas, ils ne verraient rien et ne feraient rien cette fois-ci non plus. Ce con souriait alors qu'elle était en train de pleurer juste devant lui, décidément elle ne le comprenait pas du tout. Il venait de l'empêcher de sauter et maintenant il se foutait une fois de plus de sa gueule ? C'était vraiment pas logique, il n'était vraiment pas logique. Ambre pensait qu'il allait partir tout de suite, elle ne comprit encore une fois pas ce qu'il se passa ensuite. Jim la prit dans ses bras, incapable de résister elle se laissa faire. C'était bizarre, le même gars qui avait tenté de l'étrangler l'autre jour la serrait maintenant contre lui. Il disait qu'elle était folle, elle aurait voulu lui retourner le compliment. Qu'est-ce qu'elle avait fait pour qu'il en vienne à l'extrême opposé de leur dernière rencontre ? Elle ne le savait pas, elle n'avait pas assez d'énergie pour y réfléchir. Ses bras étaient confortables, bon, c'était vraiment un compliment car à cause de sa silhouette squelettique plus rien ne lui paraissait comme tel. Où qu'elle soit couchée ou assise elle sentait toujours ses propres os qui lui faisaient mal. Il s'écarta assez vite, oui merci, faut pas abuser quand même. Ça avait fait plaisir à Ambre que malgré tout il la prenne dans ses bras, elle ne l'aurait avoué pour rien au monde et préféra faire comme si de rien n'était. « Tu crois vraiment que je vais partir et te laisser sur le toit ? Non mais tu rêves. J’ai pas fait tout ça pour que tu te jettes du toit dans deux minutes. » D'accord, il était pas con donc. Jim aurait très bien put faire semblant de croire qu'elle allait rentrer chez elle mais non, il fallait qu'il se sente responsable d'elle maintenant ! Génial. Le bras du jeune homme passa pour la deuxième fois autour des épaules d'Ambre, il l'entraina vers les escaliers. Ils ne parlèrent pas, elle ne savait absolument pas quoi dire. Elle aurait put lui sortir un « merci. » classique mais il n'aurait pas été sincère, puisqu'elle aurait préféré qu'il la laisse faire. En bas, il lui attrapa le bras, doucement. Elle se rendit compte qu'il faisait vraiment attention à ne pas lui faire mal, mai qu'est-ce qui lui était arrivé ? La voir dan cet état l'avant tant choqué que ça ? C'était comme s'il avait oublié l'épisode de la plage et qu'il avait complètement changé. Rendez-moi le méchant Jim, il était limite plus marrant, pensa Ambre. Il l'attira vers un stand de bouffe, elle commença à faire « non » de la tête rien qu'en le voyant. Il avait en fait décidé de la torturer, c'était ça. Il commanda deux hot dogs, non, elle ne le mangerait pas. Il lui tendit celui qui lui était destiné. Ambre fit non de la tête. « Mange. » Encore non. Elle ne voulait même pas le prendre dans main, ça la dégoutait. De la nourriture, surtout aussi grasse et surtout à quelque centimètres d'elle. Le « mange » avait sonné comme un ordre et elle savait qu'elle l'obligerait à le faire. Elle prit le sandwich du bout des doigts, comme si de le toucher allait la faire grossir. Ses mains tremblaient maintenant. Jim la fixait toujours. Putain de merde, elle allait quand même pas le faire ? Ambre approcha la nourriture millimètre par millimètre en répriment des haut le cœur. Ses yeux s'embuèrent alors qu'elle allait croquer dedans.
- Je te déteste.
Elle ne parlait pas à la bouffe mais à Jim. Elle avala un minuscule morceaux qu'elle recracherait surement lorsqu'elle serait enfin chez elle, deux doigts dans la gorge.
« They told me not to be sad, it is just a matter of time. » ► AARON
Ce moment que je vivais avec Ambre me paraissait totalement surréaliste. Qui aurait cru qu’un jour j’en arriverai là avec elle ? Personne, et certainement pas moi. Mais sans trop savoir pourquoi l’avoir sauvé ; parce que je l’avais sauvé, je le savais et j’étais persuadé qu’elle aussi ; m’avais donné l’impression qu’elle avait besoin de quelqu’un. Pas forcement de moi, bien sur, mais de quelqu’un n’importe qui qui pouvait lui faire oublier ce qu’il venait de se passer, encore que ce soit possible. J’avais donc entrainé Ambre avec moi. Je ne savais pas quoi faire d’elle mais je ne pouvais pas la laisser comme ça, Dieu seule savait ce qui pouvait encore lui passer par la tête. Je l’avais sauvé une fois, peut-être que personne ne serait là la prochaine fois. J’avais donc repéré un marchand de sandwichs à quelques pas de l’immeuble que nous venions de quitter, j’avais donc décidé de lui prendre à manger. Depuis quand t’as pas mangé, hein ? Un bon bout de temps, je n’en doutais pas une seconde. J’avais presque envie de la suivre toute une semaine pour la forcer à manger. Oui on en s’aimait pas, mais c’était moi, j’avais toujours l’impression de devoir sauver les gens. J’avais fait la même chose avec Edda, même si j’avais échoué. Même si je ne l’aimais pas, Ambre était un nouveau défi. J’avais commandé deux hot-dogs et j’en avais donné un à Ambre. Elle le regarda, pleine de dégout pendant que je prenais moi-même une grosse bouché de mon sandwich. Je souriais, amusé de la voir aussi dégoutée par un petit sandwich. Je voyais soudain que la vue du hot-dog la paniquait. « Je te déteste. » lança-t-elle. J’avais bien compris qu’elle s’adressait à moi. Et elle prit une petite bouchée. Je la fixais imperturbable jusqu’à ce qu’elle ait fini sa bouche. « Je sais. Mais malheureusement pour toi, je vais rester jusqu'à ce que t’ai tout mangé. Et si tu protestes, je te colle pendant une semaine et je te fais faire trois repas par jour. Qu’est-ce que tu préfères ? » je lâchais, en souriant. J’essayais de détendre l’atmosphère pour qu’on oublie tous les deux ce qu’on venait de vivre. Ça avait été aussi éprouvant pour elle que pour moi. « Arrête de pleurer… » soufflais-je. Je regardais autour de moi, et trouvais au loin un banc près d’un parc. « Viens. » Je commençais à me diriger vers celui-ci, sans regarder Ambre. Pas intuition, je savais qu’elle me suivrait.
Quelques semaines ou jours plus tôt Ambre n'aurait put imaginer dans une situation. Déjà, le fait de faire une tentative de suicide, puis de se faire sauver mais pas par n'importe qui, par Jim. Ce gars qu'elle avait détesté du plus profond de son être, elle aurait put juste le mépriser comme tous les autres s'il n'avait pas essayé de l'étrangler. Ça avait été le geste de trop, pour sur. Elle ne pouvait plus le haïr, il l'avait sauvé – même si elle ne voulait pas de ce dit sauvetage, ça s'était passé. Non pas qu'elle pense avoir une dette envers lui, elle ne lui devait, ce n'était pas un service qu'il venait de lui rendre. Il aurait sans doute mieux fait de la laisser crever là. Elle ne pouvait plus le détester parce qu'il l'avait sauvée alors que c'était elle, et ça changeait tout. Ambre devait être la personne qu'il détestait le plus sur cette planète et il l'avait éloignée du vide comme si elle était quelqu'un à qui il tenait. En plus il l'avait prise dans ses bras, ce qui est censé être une marque d'affection chez les personnes normales – on ne peut pas dire que l'italienne et elle jugeait qu'il ne l'était pas non plus. Cela expliquait surement beaucoup de choses, notamment cette soirée. Si Jim avait été normal il l'aurait soit dissuadé de sauter soit il serait partit comme si de rien n'était, il ne l'aurait pas enfoncée encore plus pour finalement la tirer vers lui. S'il était normal il ne l'aurait sans doute pas sauvée, ni prise dans ses bras, ni obligée à manger s'il la détestait autant qu'il adorait le dire. Tout ça n'était pas logique, elle cherchait et pourtant ne trouvait pas de réponses. Jim devait aimer les filles à problèmes, c'était son truc. Edda, petite colombe aux ailes brisées en plein vol par la drogue et puis Ambre. Anorexique, suicidaire, ayant tué quelqu'un, détestable. Cette fois il avait tiré le gros lot, s'il se mettait en tête de sauver cette détraquée là, il en aurait pour un bon bout de temps. Le seul obstacle pour lui était sans doute qu'elle ne voulait pas aller mieux, elle voulait mourir ou rester dans sa merde, c'était plus agréable. Jim la fixait toujours, la regardant mâcher avec peine sa minuscule bouchée qu'elle avala encore plus difficilement. « Je sais. Mais malheureusement pour toi, je vais rester jusqu'à ce que t’ai tout mangé. Et si tu protestes, je te colle pendant une semaine et je te fais faire trois repas par jour. Qu’est-ce que tu préfères ? » Ambre lui lança un regard, il n'oserait quand pas la coller pendant tout une semaine ? Elle n'était sure de rien avec lui.
- Tu pourrais pas me suivre pendant une semaine, t'en aurais vite marre de moi et tu le sais.
Elle avait esquissé un minuscule sourire, presque imperceptible, à la pensée de faire chier Jim pendant une semaine entière. Il avait réussi à la faire sourire, bel exploit, surtout que ce n'était pas arrivé depuis un petit moment. « Arrête de pleurer… » Vraiment, il l'étonnait de plus en plus. Elle allait essayer. « Viens. » Où ça ? Il avança sans l'attendre et elle le suivit par pur réflexe, où est-ce qu'elle pouvait aller d'autre de toute façon ? Il s'assirent sur le banc, l'un à coté de l'autre. C'était vraiment bizarre, vu de l'extérieur on devait surement penser qu'ils étaient amis. En fait, c'était juste un gars bizarre qui tentait de veiller, pour on ne sait quelle raison, sur une fille bizarre.
- Je suis vraiment obligée de le manger ?
Elle s'attendait à un « oui » alors elle prit une autre bouchée légèrement plus grosse pour lui montrer toute sa fausse bonne volonté.
« They told me not to be sad, it is just a matter of time. » ► AARON
Pourquoi je m’étais mis en tête de rester là, avec elle ? J’en avais pas la moindre idée. Mais après ce qui venait de se passer ce soir, il me semblait que c’était la meilleure chose à faire. Comment aurions-nous pu retourner chacun de notre coté comme si rien ne s’était passé ? Ca me paraissait impossible. J’avais découvert une Ambre fragile et humaine. J’imaginais bien que c’était une partie d’elle qu’elle ne voulait pas montrer. Mais après tout, c’était juste moi et nous ne serions probablement jamais amené à nous revoir. Qu’est-ce que ça pouvait faire si je la voyais comme ça ? A qui j’aurais pu en parler ? Personne. Je me rendais compte qu’à ce moment précis, il n’y avait plus qu’elle et moi. Etrange que de ce dire que j’arrivais à apprécier cette fille que j’avais presque étranglé quelques semaines plus tôt. Mais Ce n’était pas cette fille là qui était avec moi ce soir, c’était indéniable. « Tu pourrais pas me suivre pendant une semaine, t'en aurais vite marre de moi et tu le sais. » Elle avait sourit. Pour la première fois, je voyais son sourire. Je souris à mon tour. C’était certain. Jamais je ne la supporterais toute une semaine, je n’en doutais pas une seconde. Et j’avais d’autre chose à faire que de m’occuper d’une anorexique qui ne voulait pas se soigner. J’étais donc parti m’asseoir, Ambre sur mes talons. Une fois assis sur le banc, je repris une bouchée de mon sandwich. Tout était étonnamment calme entre nous. Pas d’éclat de voix, pas de cris, pas d’injures, pas de piques… C’était une situation surréaliste que d’être assis calmement à coté d’Ambre. Pourquoi j’avais soudainement eu envie de m’occuper d’elle ? Je ne le saurais probablement jamais. Mais c’était clair qu’elle avait besoin de quelqu’un en ce moment. et peut-être que c’était moi le mieux placé : parce qu’on était pas amis, parce que je ne cherchais pas à la caresser dans le sens du poil. Elle avait peut-être besoin de ça ; et sans trop savoir pourquoi, j’étais prêt à lui donner… « Je suis vraiment obligée de le manger ? » demanda Ambre, avant de reprendre une bouchée en grimaçant. Je la regardais faire. Je savais qu’elle se forcait. « T’es obligée, oui. C’est pas en arrêtant de manger que tu te sentiras mieux. Vous êtes pas obligées de faire tout ça, vous êtes jolies quoi qu’il arrive. Arrêtez de vous faire du mal. » J’avais généralisé mes propos sur toutes les mannequins, même s’ils auraient pu ne s’adresser uniquement à Ambre…
Ambre n'avait jamais douté du fait que Jim soit quelqu'un de bien, même s'il l'avait étranglé au final elle comprenait. Toute personne bien poussée à bout ferait quelque chose du genre, elle n'y était pas allé doucement avec lui. C'était aussi surement parce qu'il avait l'air gentil qu'elle l'avait attaqué, les gens soit-disant « parfaits » rendaient la jeune femme malade. Puisqu'elle même ne l'était pas du tout. Elle ne voulait pas leur ressembler, elle les trouvait ennuyeux et fades. On a tous envie d'être parfait un jour ou l'autre, en tout cas, autant que possible. Ambre essayait de ne plus penser à ce qu'ils venaient de vivre, ça la déprimait encore plus. Jamais dans toute sa vie elle n'aurait imaginé arriver à un acte aussi extrême, elle l'aurait fait s'il n'avait pas été là et elle lui en voulait – et lui en voudrait surement toujours – pour ça. Comment avait-il put penser que la sauver était une bonne chose ? Elle n'était qu'un nid à problème pour quiconque osait s'approcher d'elle, toute personne étant entrée dans sa vie en avait eu par sa faute. Quoi qu'elle puisse dire ou penser, ça lui avait fait plaisir que qu'il soit là pour elle. Surtout lui en fait. Que Jim, qui la détestait, tente de la sauver.. ça l'avait touchée, vraiment. Une personne ne connaissant pas Ambre ou étant amie avec elle l'aurait sauvé, elle n'était pas sure que Jared l'aurait fait. Il la détestait surement plus que son sauveur de ce soir. Elle n'aurait pas imaginé qu'il puisse avoir envie de la sortir de là et pourtant. Ce qui l'étonnait le plus, maintenant, c'est qu'il restait avec elle. Chacun aurait pu repartir de son coté, elle serait remonté et aurait sauté. Il la surveillait, pour l'instant. Passé un moment aussi calme avec Jim relevait de la science-fiction, eux-même n'y auraient jamais cru. Elle ne comprenait pas pourquoi il faisait tout ça, elle n'était rien pour lui, moins que rien. Une ennemie, une bitch, une idiote, une anorexique. Surement pas une amie dont on a envie de s'occuper pour son bien. Comme si ça ne suffisait pas de l'avoir empêché de faire ce qu'elle avait à faire ce soir, il l'obligeait à manger. Il était dur avec elle, commencer par lui faire manger un hot-dog – nourriture grasse étant encore plus difficile à avaler et garder pour elle. Qu'il la surveille pour qu'elle ne se suicide pas ce soir était une chose, mais l'obliger à manger en était une autre et cela impliquait plus de chose. Il n'en avait vraiment pas rien à foutre d'elle, il le prouvait à cet instant. « T’es obligée, oui. C’est pas en arrêtant de manger que tu te sentiras mieux. Vous êtes pas obligées de faire tout ça, vous êtes jolies quoi qu’il arrive. Arrêtez de vous faire du mal. » Ambre pensa un instant qu'il généralisait ses propos pour ne pas paraitre trop proche d'elle en lui disant directement qu'elle était jolie. Puis elle pensa à Edda, son parfait opposé physique – et surement mental. Jim ne la trouverait jamais belle, surement pas dans sa situation actuelle. Elle ne ressemblait plus à rien et le savait parfaitement. Elle décida d'abréger ses souffrances en mangeant de hot-dog en quelques bouchées, à la limite de tout rendre lorsqu'elle avalait la nourriture. Elle respira profondément, elle n'avait pas eut le ventre aussi plein depuis des semaines et elle se sentait coupable d'avoir autant mangé. Comme à chaque fois qu'elle ingurgitait quelque chose, son seul désir était de le voir ressortir aussitôt.
- J'espère que tu fais pas ça par pitié, j'ai pas besoin de que tu m'aide Jim. Je suis pas Edda.
« They told me not to be sad, it is just a matter of time. » ► AARON
Assis sur ce banc avec Ambre, cette soirée respirait enfin le calme. C’était agréable. Peu à peu, on oubliait chacun comme on le pouvait la panique qui avait été engendrée en haut de cet immeuble. J’y avais laissé mon appareil photo, merde… Je retournerai le chercher, un jour… Ou j’en rachèterai un, je sais pas. Je n’arrivais pas à savoir pourquoi j’avais soudain envie de m’occuper d’Ambre, peut-être parce que c’était la première fois que je voyais ses faiblesses, ça la rendait tellement plus humaine que j’avais eu l’impression qu’elle avait besoin d’être protégée, pendant quelques secondes. « J'espère que tu fais pas ça par pitié, j'ai pas besoin de que tu m'aide Jim. Je suis pas Edda. » lança Ambre en me sortant de mes pensées. Je levais les yeux vers elle sans rien dire. non, elle n’était pas Edda, c’était certain. Personne ne pouvait être elle, plus personne ne pourrait jamais l’être, jamais aussi bien qu’elle-même. Elle me manquait constamment, mais j’apprenais chaque jour à vivre sans elle, j’avais même ce soir réussi à reprendre mon appareil photo, ce qui relevait du miracle, finalement. Je tournais la page, comme je le pouvais ; même si Ambre venait de la remettre sous mes yeux… « Si tu crois que j’ai rien d’autre à faire de d’avoir pitié de toi… si j’en étais là, ce serait moi qui aurait du sauter du haut de l’immeuble, tu vois. » répondis-je, après quelques secondes. J’avais fini mon hot-dog. Il se passa un long moment avant qu’Ambre finisse le sien. J’attendais en silence, le regard dans le vague, perdu dans mes pensées, pendant qu’Ambre mangeait à son rythme. Une fois qu’elle l’eu fini elle me jeta l’emballage dessus. Je souriais. Je me levais, toujours silencieux et attrapait sa main pour qu’on rejoigne ma voiture. En s’asseyant à coté de moi, elle me donna son adresse. Je roulais silencieusement jusqu’à destination. Aucun mot n’était plus à échanger entre nous. Tout était fini, qu’aurions-nous pu nous dire de plus ?... Rien. Après quelques minutes, j’arrivais devant son immeuble. Je m’arrêtais et restais le regard fixé devant moi. Ambre commença à sortir de la voiture, je la retenais. « Si tu suicides encore une fois, je te jure que je te ressuscite et que je te tue de mes propres mains, j’ai pas fait tout ça pour rien. » lui affirmais-je. Puis je me radoucis. « Fais attention à toi. » Une fois Ambre descendue, je n’attendis pas une seconde de plus et démarrais en trombe pour rentrer chez moi et me jeter sous la douche puis dans mon lit. Que cette journée finisse !