Depuis quelques temps, je n'avais plus qu'une chose dans la vie : mon boulot. Ma musique. Et c'est là que je peux dire "music saved my life". Parce que sérieusement, j'aurais eu un travail ordinaire, dans un bureau, comme n'importe qui, je n'aurais jamais survécu. L'année qui venait de s'écouler fut aussi magnifique que détestable. Dans l'absolu, plein de belles choses me sont arrivées. Mais la chute fut brutale. Trop brutale. À tel point qu'aujourd'hui, je n'ai presque plus rien dans ma vie. Plus aucun ami. Si, il me restait ma famille. Mais ils vivent loin, et je n'aime pas les inquiéter, alors je ne dis rien. Pourtant, j'aurais bien besoin d'une épaule sur laquelle pleurer de temps à autre. Au lieu de ça, j'ai une guitare, un synthé…Et voilà. Mieux que rien, non ?
Je venais de passer une nouvelle journée de genre douze heures en studio, à écouter les chansons que j'avais choisies de garder pour mon nouveau contrat, encore et encore, pour les masteriser, perfectionner le son. Parce que oui, on m'avait proposé un nouveau projet, réaliser la bande originale d'un film très attendu, une adaptation cinématographique d'un bestseller. Bon, je vais vous avouer que je n'ai presque pas touché un seul livre durant l'année qui venait de s'écouler. En même temps, je n'avais pas eu une minute pour moi-même, entre mes soucis, ceux des autres que je me sentais obligée de régler, mon travail, mes déplacements…Oui, j'ai un peu honte de le reconnaître. Du coup je ne savais pas grand chose dudit best-seller au moment où j'avais accepté le contrat, ce qui fut par conséquent une prise de risque de ma part. Ce qui m'avait poussé à accepter?
Le soir où Tom, mon manager était venu me faire part de cette proposition qu'il venait de recevoir de la part des producteurs du film, je m'étais dit qu'il fallait peut-être que j'apprenne à prendre plus de risques. Tenter de nouvelles expériences, sortir de ma zone de confort. La vie était bien trop courte pour essayer de tout contrôler en se cantonnant à ses petites habitudes. Si ça continuait comme c'était parti, je ne risquais pas de faire autre chose qu'un peu de musique en Californie. Et ce serait tout. Mes aspirations étaient bien plus importantes quand j'étais un peu plus jeune, où avaient-elles disparu? Peut-être avec toutes les personnes que j'avais perdues en chemin. Une part de moi était partie avec Ole, pour commencer. Ma plus grande inspiration et motivation attique je pense…Puis Kyler, Imogen et Andreas pour finir…Il ne doit plus rester grand chose de moi. Mais cette dernière part qui me restait devait devenir forte, et me ramener à ce que j'étais auparavant. Donc oui, c'est ce que je devais m'efforcer de faire. Je n'ai que 22 ans, et la force d'encore accomplir plein de grandes choses.
"Je vais accepter ce contrat.", avais-je conclu.
Cela faisait à présent longtemps que je travaillais dessus, je ne pouvais pas délivrer un produit fade. Il y avait des jours où je me retrouvais presque à tout ré-enregistrer, au grand dam de mon équipe de production, ainsi que celle du film. Tant pis, ils feraient avec. Ils avaient choisi de travailler avec une môme malchanceuse, solitaire, mais gentille et optimiste, très professionnelle et bosseuse, alors ils me faisaient confiance. Et pour des raisons que j'ignore, ils tenaient absolument à ce que ce soit Ryan Wilson qui figure sur la BO et personne d'autre, ce que je trouvais étrange. Parfois, je me disais qu'ils finiraient par me virer parce que d'une part j'étais chiante, d'autre part, au bout de plusieurs semaines de travail je ne voulais toujours rien faire écouter à personne, et pourtant, tout le monde avait pris son mal en patience et attendait le résultat. Tant mieux…Ils avaient bien compris que je n'allais pas me soumettre à la pression des vendeurs, alors voilà. Mon seul objectif était de délivrer un travail clean, et pour ça, il me fallait du temps.
Une de mes dernières journées de travail sur cette bande originale, je commençais à me dire qu'il fallait peut-être que je pense à rentrer chez moi -il était 22 heures- quand Tom, mon manager, entra dans la salle avec un petit sourire en coin. Il m'expliqua brièvement que j'allais rencontrer l'auteur du livre (et héroïne du film par la même occasion) le lendemain pour lui exposer mon travail. Je ne savais pas trop comment accueillir cette nouvelle. D'une part je ne m'y attendais pas, d'autre part, des semaines de travail acharnées allaient être jugées par…Une femme. Une seule. D'accord, il s'agissait de SON film, inspirée SON livre, mais voilà, je ne savais pas trop comment ça allait se passer, ça me stressait, et je le reconnais, j'avais ce gros cliché de l'écrivain-star un peu snob, parce que cultivée et ayant un job "intelligent", en plus d'être multimillionnaire avec tous les bouquins soudainement vendus. J'avais peur de ne pas l'aimer. De ne pas non plus accepter sa critique. Et puis on allait affronter mes équipes à celles du film à l'Opéra House de San Francisco (voilà, une nouvelle preuve du fait que j'allais probablement avoir à travailler avec une hipster snobinarde), pourquoi un cadre aussi dingue juste pour présenter quelques chansons à une dizaine de personnes? Enfin bref, il fallait que j'arrête de me plaindre aussi. Je n'étais pas comme ça avant.
Si je me trouvais dans cette position, c'était avant tout parce que je l'avais choisi. Donc il fallait que je l'assume jusqu'au bout.
Je ne me souviens plus vraiment. Je ne sais plus vraiment le jour, la date où l'heure, mais je sais que c'était il y a un peu près 8 mois. Il y a 8 mois, c'est à dire un peu moins d'un an après la sortie de mon livre qu'on m'a téléphoné. Ce fameux livre portant mon nom, enfin non mon nom c'est Judicaëlle, mais Bliss est mon deuxième prénom et me correspond dans cette histoire. Tout le monde m'appelle Bliss, sauf parfois Helen, qui me connait depuis un long moment avant que je devienne la célèbre auteur 'un roman autobiographique best seller. A croire que raconter l'histoire de la mort de sa petite soeur cela intéresse le monde. Mon agent m'a conseillé de ne pas refuser une telle opportunité. De ne surtout pas bouder ce monde qui s'offre à moi ou ma vie ne serait pas un conte de fée, mais tout l'inverse.
Alors voilà c'est lancé. On me demande souvent mon avis, je crois qu'ils veulent un films très proche de mon livre que j'aurais pensé inadaptable. On a fait des castings pour les personnes présentes dans l'histoire et croyez le ou non, mais ce fut mon rôle que nous avons eu le plus de mal à trouver, avant que je ne rencontre la fille parfaite. Julie Evans. Elle a dû me prendre pour une folle lorsque je lui ai dis qu'on cherché en urgence le rôle principal d'un best seller.. mais alla a accepté et elle tourne en ce moment. Sa vie va surement changer.. vraiment.. Mais je l'ai vu joué et elle est très talentueuse.
Le taxi roule. Il pleut, et j'aime assez la pluie à San Francisco. L'odeur de la pluie mélangé à celle du sel de la mer donne quelque chose d'unique. Je regarde par la fenêtre, j'ai encore un rendez vous professionnel, je les enchaine. Je tourne aussi, parce que j'ai écrit un livre, qui dans ce livre précise que je jouais du théâtre à l'époque. Et des producteurs - genre d'un block blosters - ont appelé mon agent en leur disant qu'ils me voulaient. Me voila personnage principal d'un scénario d'apocalypse. C'est assez drôle puisque je joue avec mon fiancé. Au début j'ignorais qu'il avait passé l'audition, mais bon pourquoi pas. On rigole bien.
La voiture s'arrête. Je reprend mes esprits et je sors un billet de vingts dollars. Je sors sous la pluie et je rentre assez rapidement pour me mettre à l'abri. Je rentre dans le théâtre, aujourd'hui je dois choisir avec les producteurs musiques. On va surement entendre plusieurs groupe, je ne sais pas trop ce qui m'attend, je ne sais pas non plus quel genre ils veulent. Je leur dirais ce que j'aime.. je suppose que si on veut mon avis c'est qu'il va compter un maximum. Ils ont fait des pré-sélections et maintenant il me reste moins de dix artistes à écouter pour choisir.
On parle un peu avant de commencer les auditions, on me munie d'une crayon et d'un papier et je m'installe entre les producteurs. Bien je suis toute ouïe pour écouter. On commence mes un groupe que je ne connais pas et je n'aime pas spécialement le style. Deux autres suivent sans me taper dans l'oeil. Puis vient une jeune femme, Ryan Wilson avec un style peu commun que j'apprécie.
- Bonjour, Euh Ryan c'est ça ? Et bien c'est à vous !
Je lui envoie une sourire, je crois que les artistes sont stressés tout de même.
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