Quand je regarde en arrière, je me dis que j’ai merdé pas mal de fois avant de trouver ma voie. En fait, je suis né à Londres, en Angleterre ; mes parents galéraient bien pour nous payer tout ce qu’on voulait mais on n’était pas malheureux du tout, au contraire. J’ai grandi dans une petite maison de banlieue avec mes deux frères et ma sœur, la petite dernière. Contrairement à ce qu’on aurait pu croire, d’entre nous, c’était elle la pire, toujours entrain de se mettre dans des histoires pas possible, juste parce qu’elle savait qu’on serait derrière elle. Bon, il fallait reconnaitre qu’emmerder mes parents, faire des conneries et me batte à tout bout de champ… j’aimais bien. Mais l’année de mes quinze ans, tout a basculé. J’ai été tiré au sort pour être celui qui conduirait après une soirée – évidement, je n’avais pas mon permis et évidement, j’avais bu. J’ai renversé une fille, elle avait mon âge si je me souviens bien et, si elle n’est pas morte, elle est devenue paraplégique. Paraplégique. Bordel, ça m’a foutu un sacré coup.

Du jour au lendemain, j’ai arrêté mes conneries, me consacrant entièrement à mes études, histoire de suivre le parcours de ma mère – elle était prof pour des enfants en difficulté. Je suis entré à oxford l’année de mes 18 ans et j’en suis ressorti diplômé, major de ma promotion. Je pouvais désormais enseigner la chimie en université ou bien les sciences physiques dans un lycée. J’avais également obtenu un DU en psychologie de l’enfant et de l’adolescent ; allez savoir pourquoi, j’ai pensé que ça me serait utile.

Lorsque mes parents ont divorcé, ma mère a décidé de tout quitter pour aller vivre aux Etats-Unis, acceptant enfin un poste qu’on lui proposait depuis des années. Je suis parti avec elle. Je sais que certain ont trouvé mon choix égoïste, ma petite amie de l’époque – entre autre – que j’ai quitté puisqu’on sait très bien ce que donne l’amour à longue distance ou alors mes frères, qui l’ont encore en travers de la gorge. D’ailleurs, j’ai moi-même regretté mon choix durant de long mois, je me demandais sans cesse quand est-ce que j’arrêterai d’avoir le mal du pays ou pourquoi est-ce que j’avais été si con de quitter l’Angleterre. Mais je sais aujourd’hui que je suis à ma place.

Finalement, je suis devenu l’assistant de ma mère, dans son cours de biochimie. Bon, m’associer avec elle n’est pas la meilleure des idées que j’ai pu avoir car tout le monde sait que travailler avec un membre de sa famille est source de conflit mais jusqu’ici, on ne s’en sort pas trop mal. C’est là que j’ai pris conscience que mon DU allait m’être d’une aide précieuse puisque j’ai pu dresser le profil psychologique des élèves de la classe pour pourvoir leur venir en aide en cas de problème – quel qu’il soit. Sauf qu’au fil des années, le nombre d’élève n’a cessé d’augmenter et c’est à contre cœur que j’ai accepté de diviser les élèves en deux groupes, laissant ma mère s’occuper de l’autre moitié.

Aujourd’hui, j’ai 28 ans, je suis plus une sorte de prof référent qu’autre chose – certain élèves me qualifient même de psychologue scolaire – mais je suis heureux comme ça. J’ai pu vraiment aider quelques élèves qui étaient sérieusement en difficulté et jusque là, personne ne m’avait vraiment résisté. Mais il y a toujours une exception qui confirme la règle, un cas tellement à part qu’on ne peut s’empêcher de s’acharner. Lilas Martin-Andrews est cette exception. Elle refuse de s’ouvrir alors que c’est la personne qui en aurait le plus besoin. D’ailleurs plus elle me repousse, plus je m’accroche. Plus je m’accroche, plus je pense à elle. Plus je pense à elle, plus je me dis que quelque chose est entrain de m’échapper totalement…